Phoenix Suns, le bilan 2021-22 : entre domination absolue et grosse désillusion, la chaleur du désert de l’Arizona s’est vite refroidie

Le 23 mai 2022 à 18:25 par Auguste Amar

Boule du désert
Source image : France 2 | Zapping sauvage

Cette saison des Suns a révélé deux visages bien distincts. Entre domination absolue et effondrement total, on peut dire que Phoenix a fait une grande chute digne des plus belles montagnes russes de Disneyland. Le plus intriguant là-dedans c’est que les responsables de ces deux visages sont les mêmes. Comme quoi, les meilleurs joueurs peuvent aussi faire dans leur pantalon.

CE QUE TRASHTALK AVAIT ANNONCÉ

En octobre, nous n’avions aucune inquiétude quant à la qualité du roster de Phoenix. Celui-ci mélangeait jeunesse et expérience, qualités athlétiques et techniques ainsi que continuité et petits ajustements. Les Suns devaient prouver que leur saison 2020-21 n’était pas un coup de bol dû aux blessures adverses en Playoffs, mais bien le début de quelque chose de grand, de très grand. La seule crainte par rapport au groupe étaient les cas Mikal Bridges et Deandre Ayton, en attente de leurs prolongations de contrat. Niveau classement, les Cactus n’avaient pas d’autre option que de finir sur le podium. Notre verdict ? Plus de 55 wins et une troisième place à l’Ouest. En d’autres termes, la régulière comme échauffement et rendez-vous en Playoffs dans la cour des grands.

CE QU’IL S’EST VRAIMENT PASSÉ

Les prédictions ci-dessus se sont avérées fausses… parce qu’en fait les Suns ont encore plus dominé la Ligue que ce qui était annoncé. Tout d’abord, l’été a servi à prolonger les contrats de Chris Paul, Cameron Payne, Frank Kaminsky, et à recruter des bons role players bien utiles comme JaVale McGee, Landry Shamet et Elfrid Payton. Point important : pas de gros chèque pour Deandre Ayton et sur ce coup, le management de Phoenix a peut-être flairé un bon coup malgré l’agacement du géant des Caraïbes. Une première complication à gérer pour la franchise… mais d’autres sont à venir. En plus de la blessure de Dario Saric à l’année, ESPN dévoile quelques affaires louches autour du propriétaire de la franchise, Robert Sarver. Et on ne parle pas de deux petites bricoles, mais de racisme, de sexisme et de harcèlement sexuel. Le genre de problèmes qui n’aident pas à préparer une saison de la meilleure des manières. Cependant, le groupe arrive à passer outre, chacun ses affaires et on est là pour causer de sportif. Ça se sent d’ailleurs très vite : les Suns écrasent littéralement la concurrence et enchaînent 18 victoires de suite de fin octobre jusqu’à début décembre, un record de franchise. Le premier de la saison et – spoiler – pas le dernier. Parmi les victimes de cette série, on ne retrouve pas que des équipes de seconde zone, mais de véritables contenders comme les Warriors, les Sixers ou les Nets. Les Cactus trustent donc le sommet de la Conférence Ouest, débarquant dans n’importe quelle ville et détruisant des pauvres équipes qui n’ont rien demandé. On se demande même si ce ne sont pas les Rome Suns qui jouent parce que la mentalité est la même qu’autrefois : veni, vidi, vici. Cette domination collective semblable au modèle Spurs de la belle époque est récompensée avec Chris Paul et Devin Booker, sélectionnés au All-Star Game en tant que remplaçants.

Avant de passer aux hostilités printanières, entrons un peu plus dans les détails de cette ascension. Cette machine à gagner que sont devenus les Suns l’est justement grâce à plusieurs éléments. D’abord, le métronome, le Point God, Chris Paul. Cipi Fruit passe son temps à battre des records qu’ils soient individuels ou collectifs. Il termine sa saison en tant que meilleur passeur de la Ligue avec 10,8 assists par match, un véritable distributeur de caviar. À côté de lui, un Devin Booker qui n’a pas eu besoin de tant chauffer mais juste à exécuter. Toutefois, D-Book s’est permis quelques petites folies comme au MLK Day contre les Spurs ou en fin de saison face aux Lakers et aux Nuggets quand le titre de MVP était encore jouable. Puis, Mikal Bridges a de nouveau passé un cap en défense. Véritable roc dans sa moitié de terrain, il n’a cessé de rendre les meilleurs joueurs de la planète inoffensifs face à lui. Mais au delà de quelques individualités, les Suns rayonnent par leur collectif. Tout le monde connaît son rôle par cœur et l’accepte. Booker et Paul prennent toute la lumière, mais ça ne dérange pas des joueurs comme Jae Crowder, Bismack Biyombo, ou Cameron Johnson de faire le sale travail de l’ombre. Derrière ce collectif huilé comme un bon engrenage se trouve Monty Williams. Le gourou a su créer un jeu basé sur un groupe et un état d’esprit que l’on retrouve sur le terrain – des deux côtés – et qui fait gagner des matchs. Tellement de matchs que les Suns battent le record de franchise avec 64 victoires sur la saison, soit deux de plus que les équipes de Charles Barkley de 1993 et de Steve Nash en 2005. Coach Monty est même élu tacticien de l’année, la vie est belle dans l’Arizona et les Playoffs sont abordés avec beaucoup de sérénité…

…Peut-être trop d’ailleurs. Au premier tour, les Suns affrontent les surprenants Pelicans, victorieux des Spurs et des Clippers lors du play-in. Une équipe physique menée par Brandon Ingram et C.J. McCollum, en l’absence de Zion Williamson et dirigée par le motivant Willie Green. Phoenix perd Devin Booker sur blessure et l’avantage du terrain dès le Game 2 en se faisant bousculer sérieusement contre New Orleans pas venu pour faire de la figuration. Heureusement, simple accident, puisque Phoenix s’impose dans le match 3. Au final, victoire en six et ce qui devait être une série de chauffe se transforme en véritable message d’alerte. Chaque campagne de Playoffs est différente et est difficile. En demi-finale, les Cactus font face aux Mavericks de Luka Doncic qui passe enfin un tour en postseason. Le démarrage est parfait. À la maison, Phoenix se rassure en mettant le coup d’accélérateur quand il le faut contre Dallas trop limité collectivement. Les Suns mènent 2-0 et se rendent à l’American Airlines Center dans le but d’en prendre au moins un… mais que nenni. Les Mavs portés par leur public font le job. Luka Doncic est thermostat 12, Jalen Brunson retrouve des couleurs et les autres role players se transforment tous en Stephen Curry à 3-points. Dallas égalise à 2-2 et trouve son MoJo. À noter que Chris Paul vient de fêter ses 37 ans et que depuis, il en fait 53 et n’a plus une bille de son basket. De retour dans l’Arizona, les Suns font régner leur loi et arrachent un succès plein de collectif. Dallas en fera de même au Game 6 dans le Texas et on attend encore un véritable match serré puisque les six premiers sont des blowouts. Arrive donc le fameux Game 7 qui a tout chamboulé côté Suns. Parce que oui, l’impensable s’est réalisé. Luka Doncic et sa troupe ont ridiculisé la soi-disante meilleure équipe de la Ligue chez elle en Game 7 de Playoffs avec à l’arrivée un +33, ressenti +50. Au banc des accusés, un CP3 fantomatique et un Deandre Ayton beaucoup trop soft et qui pense plus à sa campagne solo sur Warzone qu’à son job. Vous l’aurez compris, on peut parler d’un état d’esprit lamentable, ces Soleils ont subi l’éclipse au sens Licornesque du terme

Les Suns terminent leur saison de manière précoce, en demi-finale de Conférence alors que l’objectif était le titre. Un échec qui donne raison à tous les détracteurs de la saison dernière dont Anthony Davis qui a dû bien se fendre la poire depuis son transat à Cancun. Chris Paul est plus que pointé du doigt pour son énième choke en Playoffs. Deandre Ayton est moqué et on réalise que son management a peut-être bien fait de ne pas lui filer le max en octobre. Tout un équilibre qui semblait pourtant parfait s’écroule… et attention aux conséquences.

LA SAISON DES SUNS EN QUELQUES ARTICLES

L’IMAGE DE LA SAISON

Phoenix Suns 16 mai 2022

Après la joie d’une régulière historique, la désillusion et la honte. Deux sentiments qui se lisent parmi tant d’autres sur les visages de ces deux supporters. On est sur le champ lexical de la défaite, et c’est bien logique. Comment, pourquoi ? Ces Suns avaient tout pour gagner, absolument tout. Et ils ont échoué. Il n’y a pas de mal à se faire éliminer lorsqu’on combat vaillamment, avec les tripes. Devant un public acquis à sa cause, le groupe de Monty Williams qui avait tant brillé depuis octobre prend la douche froide, gelée même. On ne parle pas d’une fracture irréparable, mais ce terrible revers laissera pléiade de traces et pas uniquement chez les joueurs.

IL A CARTONNÉ : MIKAL BRIDGES

Dans le bilan des Hornets, on parlait déjà d’un Bridges dans cette section. Toutefois, pas de lien de sang entre les deux et deux styles très différents. Chez Mikal, on oublie les gros dunks pour se concentrer sur une défense imperméable et inébranlable. Déjà très fort dans ce secteur l’an passé, l’ailier des Suns a passé un nouveau cap. Cette fois, on sent qu’il est le véritable patron de la défense avec plusieurs cordes à son arc. Une mobilité très dynamique, latérale comme verticale. Ses longs bras bloquent les angles de tirs et de passes les plus évidents et placent les shooteurs adverses dans l’inconfort. Et puis, Bridges est un défenseur qui sait aussi bien défendre sur l’homme en un contre un comme en zone accompagné de sa troupe composé de Crowder et Ayton à l’intérieur. Niveau stats, on sent une légère amélioration avec un point de moyenne en plus mais pas de quoi sauter au plafond non plus. L’impact de Bridges se mesure autrement de toute manière. En Playoffs, il a montré plusieurs visages. Face aux Pels, il a tenu son rang dans un dur combat physique, avec toutes les qualités montrées pendant la saison régulière. Il s’est même offert une soirée de leader offensif pour clôturer la série, téma l’appareil multi-fonction. Toutefois, contre Dallas, il n’a pas passé le test Luka Doncic avec brio (en même temps qui peut s’en vanter ?). Sa saison au global reste très bonne. Une nouvelle fois nominé dans la course au DPOY, le trophée lui échappe encore… mais il est certain qu’il ne devrait pas tarder à venir dans son armoire à trophées s’il continue comme ça.

ON L’ATTENDAIT ET ON L’ATTEND TOUJOURS : LE TITRE

Cela peut paraître sévère, mais c’était l’objectif d’une équipe comme Phoenix. La fenêtre de tir pour devenir champion NBA était là sous leurs yeux. Le roster était parfait comme expliqué plus haut et construit dans la continuité d’un beau projet. La régulière de malade réalisée par les hommes de Monty Williams nous laissait plein d’espoir pour les Suns qui à part les blessures potentielles ne voyaient aucun adversaire à leur hauteur. Cependant, aucun observateur n’avait anticipé le fait que mentalement, les Suns n’allaient pas être prêts à camper ce rôle de favori. Mis en difficulté par les Pelicans puis défaits par les Mavericks en perdant quatre des cinq derniers matchs d’une manière bien teintée de honte. Pour la deuxième saison consécutive, le titre de champion passe à côté de l’Arizona et ira soit en Californie, soit en Floride, soit dans le Massachusetts ou par miracle dans le Texas. Une opportunité pour Phoenix qui ne se représentera peut-être pas de sitôt.

…ET LA SUITE ?

La suite est simple. Il va falloir se remettre en question, prendre le temps de digérer cette humiliation et faire le point sur l’effectif. L’été à venir s’annonce chargé avec en premier lieu le point Ayton à gérer. Le n°1 de Draft 2018 sera Free Agent restreint et la question d’une prolongation se pose réellement. Son côté soft sous le cercle et un poil nonchalant peut énerver une équipe prétendante qui a besoin de vaillance dans la raquette. Les franchises qui voudront s’attirer les services du pivot seront nombreuses. Une équipe comme Charlotte en aurait grandement besoin par exemple. Cependant, est-ce que Phoenix veut réellement le voir partir ? Pas si sûr, malgré “des problèmes internes” qui auraient lieu entre lui et Monty Williams. Le cas Chris Paul est également à discuter. Bien que le meneur ait prolongé son contrat, comment aborder la saison prochaine avec cet énième choke en Playoffs ? La confiance sera-t-elle toujours là ? Est-ce que mentalement, il sera encore capable de porter l’équipe ? Est-ce que Devin Booker ne le voit pas comme un frein à sa carrière et sa réussite ? Tant de questions sans réponse. En tout cas, la suite doit aller dans une seule direction : se reconstruire psychologiquement et revenir plus fort pour aller gagner ce fichu titre avant qu’il ne soit trop tard.

La saison 2021-22 des Suns restera comme l’une des plus belles de l’histoire de la franchise, mais également comme la plus frustrante. Cet échec en demi-finale de Conférence nuit à l’image et à l’élan de ce groupe pourtant si bien préparé. Il sera intéressant de voir comment cette équipe rebondira en 2022-23. 

Source : ESPN