Kings from the Queens : Roy Hibbert, le pur produit de Georgetown face au choc des époques
Le 26 juil. 2021 à 12:29 par Alexandre Taupin
Dans le cadre de la sortie de la deuxième série spin-off de l’univers power « Power book III : raising Kanan » le 18 juillet 2021, sur la plateforme de notre partenaire Starzplay, TrashTalk s’est également lancé dans une petite série. Une série d’articles sur des basketteurs qui ont réussi une belle carrière en NBA après avoir, comme Kanan Stark le héros ou comme 50 Cent le producteur de la série, grandi dans le Queens à New York. Leurs fortunes sont diverses mais leurs histoires sont passionnantes. Quatrième épisode aujourd’hui : Roy Hibbert.
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Qu’est ce qui définit d’où l’on vient ? Son lieu de naissance ? Né dans le quartier de Flushing dans le Queens, Roy Hibbert ne gardera pourtant que peu de souvenirs de cette partie de sa vie. Pas le temps d’aller au Citi Field voir les Mets jouer au baseball ou à Flushing Meadows pour assister aux duels des meilleurs joueurs de tennis de la planète, le jeune Roy quitte Big Apple à seulement deux ans. C’est donc loin du Queens, des playgrounds new-yorkais ou de l’ambiance festive de New York qu’il se construira. Débarqué à Adelphi dans le Maryland, il n’aura pas à chercher trop longtemps pour trouver son nouveau chez lui. En effet, à quelques kilomètres au sud se trouve Washington et une célèbre université qui va très vite taper dans l’œil de celui qui n’est encore qu’un gamin. L’histoire d’amour entre Roy Hibbert et Georgetown vient de commencer. Dès l’école primaire, il suit chaque match qui passe à la télé et lorsqu’il doit aller au lit avant le coup de sifflet final, il y a toujours quelques subterfuges à trouver pour voir les dernières minutes. Certains mettent des oreillers sous la couette avant de faire le mur et retrouver des copains, lui va juste se mettre sous son pieu avec une télé miniature histoire de mater le money time. Malin, mais quand tu fais déjà plus d’un mètre quatre-vingt-dix à 12 ans (et que tes pieds dépassent largement du lit), tu as plus de chance de te faire griller par tes parents.
Patrick Ewing, Alonzo Mourning, Dikembe Mutombo, Allen Iverson : pour un jeune fan des Hoyas, ce n’est pas très compliqué de trouver des stars à aduler. Quand tu es destiné à finir pivot, tu as tendance à suivre le modèle des trois premiers, surtout que Georgetown est considéré comme la Mecque des Big Men en NCAA. Comme les stars du passé, Hibbert va lui-même pouvoir bénéficier des conseils du légendaire mais regretté John Thompson avant de faire le grand saut chez les pros. Quatre ans, c’est une durée particulièrement longue pour les prospects aujourd’hui mais il faut dire que Big Stiff, comme le surnomme son coach, part de loin. Physiquement, il a beaucoup de mal à enchaîner les efforts et son jeu en attaque est limité. Cela fait beaucoup de choses à améliorer pour celui qui doit perpétuer la tradition des intérieurs dominants sortis de Georgetown.
Dominer… le mot est peut-être un peu fort quand on parle de Roy Hibbert en NBA. Pourtant, celui qui fut le colosse des Pacers pendant près de sept ans a connu des bons moments sur les parquets. Deux sélections All-Star, une place dans le second cinq défensif ainsi qu’une deuxième place au classement du DPOY en 2014. Forcément, quand on part sur les palmarès des autres élèves de Thompson, il y a un gap mais pas de quoi jeter la pierre non plus au natif du Queens. On parle quand même d’un des meilleurs pivots de la Ligue sur la première moitié de la dernière décennie et surtout la pièce centrale de la défense d’Indiana lors des belles années de rivalité avec le Heat et ses Tres Amigos. Un vrai mur qui se plaçait sur la route de chaque attaquant osant pénétrer la raquette. Parce que quand tu vois un beau bébé de 2m18 et 123 kg sur ton chemin, tu réfléchis vite à l’idée d’aller jouer le contact avec lui, surtout que ce dernier maitrise parfaitement la règle NBA de la verticalité( un défenseur ne peut pas se voir siffler une faute s’il saute parfaitement droit avec les bras à la verticale). Dans le système défensif mis au point par Frank Vogel et avec un rythme lent, le joueur a tout pour se plaire. Les résultats collectifs sont bons (Indiana meilleure défense de la NBA entre 2012 et 2014, deux Finales de Conférence à l’Est), le pivot est considéré comme un des meilleurs protecteurs de cercle du pays (ce n’est pas Carmelo Anthony qui dira le contraire), on a alors envie de croire que le soleil brillera jusqu’au bout n’est-ce pas ? Rien n’est moins sûr.
En effet, un nouveau courant se développe pendant les belles années de Hibbert chez les Pacers et cette vague va littéralement submerger le robuste intérieur. Si aujourd’hui, le small ball est utilisé par toutes les équipes, ne serait-ce que par séquences, au début des années 2010, c’est une vérité qui se vérifie moins. Les stats avancées, la volonté de jouer plus vite et de shooter toujours plus de loin seront les trois poisons qui vont transformer le rêve du pivot en cauchemar. Big man old-school collé à sa raquette, Roy Hibbert n’a aucunement la capacité de jouer au large et encore moins de défendre sur des extérieurs : il n’a aucun shoot et surtout, il est très lent. Ce constat, les autres staffs vont rapidement s’en rendre compte et ironie de l’histoire : celui qui était le fer de lance de la défense va devenir celui qui se fera cibler par les attaques adverses. Incapable de défendre sur les intérieurs fuyants, trop limité en attaque pour compenser, la fin de parcours de Big Stiff s’annonce particulièrement difficile. Dégagé des Pacers, il va enchaîner les équipes avec toujours le même constat : utile quand il s’agit de défendre à l’intérieur mais de plus en plus incompatible avec le jeu moderne. C’est donc par la petite porte et sans grand bruit qu’il choisira de se retirer des parquets en 2018, à seulement…31 ans.
Roy Hibbert c’est l’histoire d’un joueur qui, comme d’autres, a peut-être joué à la mauvaise époque. Combatif, dur sur l’homme, souvent bien placé, il aura fait honneur aux qualités défensives des anciens de Georgetown mais son passage dans la Ligue aura été tronqué par ce choc des époques et l’avènement du small ball. Une terrible fin pour un joueur passé en quatre années de candidat DPOY à simple faire-valoir mais aussi la preuve que la théorie de l’évolution de la NBA n’avait plus de place pour ce vieux dinosaure adepte du jeu old-school de ses glorieux ainés des Hoyas, celui qu’il regardait avec des étoiles dans les yeux sur sa petite télé.