Le fabuleux destin du millésime 96 – Ben Wallace : pas besoin d’être drafté pour peser
Le 08 janv. 2017 à 17:10 par David Carroz
On parle beaucoup de la Draft de 1984 ou de sa petite sœur de 2003 en termes élogieux, comme les meilleures que la NBA ait pu connaître. Pourtant, intercalée entre ces deux générations dorées, une autre cuvée a son mot à dire. Avec 18 titres de champion, 2 MVP des Finales, 4 MVP de saison régulière et 10 All-Stars, la classe 1996 mérite toute notre attention. Ce millésime – qui vient de voir son dernier représentant tirer sa révérence avec un feu d’artifice à 60 points – fête donc cette saison les 20 ans de son arrivée dans la Ligue. Et, force est de constater que ces gars ont non seulement brillé sur les parquets mais aussi grandement contribué à changer le visage de la NBA. Pour le meilleur ou le pire, n’est-ce pas monsieur Stern ?
Numéro un peu spécial ce mois-ci puisque lorsqu’on relit les noms des joueurs draftés en 1996, à aucun moment on ne lira celui de Ben Wallace. Pourtant, l’intérieur a débarqué en NBA cette saison-là lui aussi et il a marqué la Ligue de son empreinte avec un palmarès à en rendre jaloux plus d’un dans sa promotion.
Rookie Origins – un bon défenseur en fac de seconde zone
Si en juin 1996 certains se pointent avec un pedigree qui fait rêver les franchises, Ben Wallace ne possède pas cette renommée. Il faut dire que “Big Ben” a déjà quasiment 22 piges alors que ses camarades n’ont toujours pas le droit de la bière au Pays de l’Oncle Sam. Et quand certains sortent tout juste des jupes de leur mère, lui a déjà bourlingué, loin des spotlights de la première division de NCAA et a dû laisser du temps à sa génitrice qui devait s’occuper de onze gosses, dont neuf plus vieux que lui. Non, Ben Wallace est plutôt du genre dur au mal, et le seul mec lié à la NBA qu’il a réussi à impressionner jusqu’à présent est Charles Oakley. Il faut remonter d’ailleurs à 1991 pour voir le “Chêne” s’intéresser au jeune Wallace. À cette époque, Ben Wallace est déterminé et donne le maximum dans le sport, l’expérience des petits boulots à l’usine n’ayant pas aiguisé son appétit pour le taf à la chaine. Le vieux grognard décide de prendre le gamin de 17 ans sous son aile, allant jusqu’à pousser plus tard pour que son ancienne fac, Virginia Union, lui donne une chance trois ans plus tard. Le conseil de “Oak” : continue de jouer avec la même passion et de bonnes choses arriveront. Entre temps, Ben Wallace fera ses gammes dans une école secondaire à Cleveland. Là, ses qualités défensives lui permettent de se démarquer de la concurrence et après deux ans, il atterrit donc chez les Panthers, comme Charles Oakley presque une décennie plus tôt. Ce n’est pas le cursus le plus réputé certes, ce n’est que la seconde division NCAA. Mais c’est déjà un niveau supérieur où il s’affirme puisque lors de sa dernière saison à Virginia Union, et ainsi être élu dans la First Team All-American (Div. II). Sur ce petit campus, il continue sur sa lancée et ce qui fait sa force : motivation, détermination et travail acharné dans un cadre qui lui convient parfaitement. Au cours de ses deux années à Virginia Union, il tourne à 13,4 points, 10 rebonds et 3,6 contres par rencontre. Du solide. Du Ben Wallace dans le texte. Mais bien loin des radars de la NBA car en plus de son déficit d’exposition de part le niveau basket de sa fac, sa taille – 2 mètres et 6 centimètres officiellement, même si le joueur annonce plutôt 5 centimètres de moins en réalité – limite encore plus l’intérêt des franchises.
Rookie year – repêché de justesse
À tel point que le 27 juin 1996 au matin, Ben Wallace doit réfléchir à un endroit où jouer au basket, loin de la NBA. Direction l’Italie pour un essai au sein de la Viola de Reggio de Calabria. Un séjour de courte durée puisque trouve finalement le chemin du vestiaire de la franchise de Washington – les Bullets pour encore un an – dès le 2 octobre avant de faire ses débuts moins d’un mois plus tard pour l’ouverture du mois de novembre à Orlando.0 point, 10 rebonds et 3 interceptions plus tard (en 19 minutes en sortant du banc), le ton est donné quant au style de jeu du rookie. Mais le frontcourt est chargé du côté de D.C avec Gheorghe Muresan, Chris Webber et Juwon Howard qui squattent le cinq, pendant que Lorenzo Williams et Harvey Grant prennent le relai pour la second unit. Difficile alors de faire son trou face à une telle concurrence, et les quelques titularisations en pré-saison sont bien loin de sa réalité de rookie. Mais malgré le faible temps de jeu et les apparitions irrégulières sur les parquets, Ben Wallace reçoit des compliments qui rappellent étrangement ceux glissés par Charles Oakley cinq ans plus tôt : “si tu continues à jouer comme cela et à faire ce que tu fais, tu auras une belle carrière dans cette ligue.” L’intérieur prend bonne note et son mal en patience, profitant de chaque opportunité pour apporter son énergie et montrer sa détermination. Mais après cinq prestations intéressantes en sortie de banc avec au moins dix minutes à jouer, il disparait de la rotation et lorsque Jim Lynam ou Bernie Bickerstaff décident de faire appel à lui, ce n’est que pour lui laisser les miettes du garbage time. Au final, il se contentera de 34 rencontres sur la saison régulière, sans aucune titularisation, pour un bilan de 1,1 point et 1,7 rebond en 5,8 minutes. Pas de quoi faire rêver la foule, mais quand on voit que sur ses cinq premiers matchs il poste 2 points et 5,6 rebonds en 16,2 minutes, on se dit qu’une meilleure utilisation aurait pu lui permettre de progresser encore plus. Peu importe, il continue de taffer et d’avancer loin des regards des gens.
Petit rookie deviendra grand – Ben Wallace, synonyme de défense
Les deux saisons suivantes, il reste à Washington mais sous le maillot des Wizards, nouveau nom de la franchise où il poursuit dans le même registre : dur au mal, travail de l’ombre et défense. Un style qui lui permet de glaner ses jalons de titulaire ou du moins d’être présent dans le cinq plus régulièrement. Mais pour s’affirmer comme un membre indispensable de la first unit d’une équipe, il devra attendre de débarquer à Orlando à l’été 1999 où les Wiz l’envoient avec quelques cacahuètes et un mars en échange d’Isaac Austin. Un passage de courte durée au Magic dont les ambitions sont plus grandes et qui vont se servir de Ben Wallace un an plus tard pour faire venir Grant Hill en Floride. Un deal qui parait nettement en faveur d’Orlando sur le papier, mais qui quelques années plus tard fera passer la franchise pour des Mickey. Car si Hill enchaine les blessures et n’aura jamais l’impact attendu, Ben Wallace se montre rapidement indispensable dans le Michigan. Pierre angulaire de la défense des Pistons dès son arrivée, il va tout simplement devenir le meilleur défenseur de la Ligue – trophée sur lequel il mettra la main quatre fois, en 2002, 2003, 2005 et 2006) – tout en obtenant le statut de All-Star – là aussi à quatre reprises. Le tout bien entendu couronné par deux voyages jusqu’aux Finales NBA, avec le titre de 2004. Avec Ben Wallace, il ne s’agissait pas des chiffres, pas des lignes de stats. Non, ce n’est pas comme cela que son importance pouvait être évaluée. Ce qu’il faisait soir après soir, c’était le sale boulot pour permettre à son équipe de gagner. Un apport inestimable. Col bleu par excellence dans une ville ouvrière, il est alors l’icône du Palace et son afro la coiffure la plus à la mode dans tout l’état. Véritable pilier de l’identité des Pistons qui s’appuient sur le collectif, la défense et la détermination, on a même envie d’oublier son implication dans “The Brawl” pour ne retenir que le meilleur de Ben Wallace à Detroit. Et oublier la suite d’ailleurs, lorsque durant l’été 2006, il signe aux Bulls en tant qu’agent libre. Il n’y fera pas long feu car les Taureaux l’enverront moins de deux ans plus tard à Cleveland, où les Cavs à leur tour mettront moins de 18 mois à l’envoyer en Arizona en échange de Shaquille O’Neal. Un Shaq à qui Ben Wallace a livré des duels d’anthologie en Playoffs, que ce soit lors des Finales de 2004 ou lorsque “Diesel” sévissait du côté de Miami. “Big Ben” ne portera par contre jamais le maillot des Suns qui le couperont, permettant ainsi au pivot de retrouver sa franchise des Pistons pour boucler sa carrière.
Du côté du Michigan, on n’est pas prêt d’oublier “Big Ben” et son afro qui ont terrorisé les intérieurs adverses soir après soir dans la première moitié des années 2000, sa période la plus faste. Six saisons durant lesquelles il ira chercher un titre NBA avec les Bad Boys nouvelle génération mais également des trophées de Defensive Player of the Year et même des sélections au All-Star Game. Largement suffisant pour dire qu’aujourd’hui, malgré ses lacunes offensives (aucune saison à plus de 9,7 points par rencontre, 41,4% de réussite au lancer franc en carrière), Ben Wallace est le meilleur joueur non drafté de l’histoire.
Stats en carrière :
5,7 points à 47,4% au tir, 1,3 passe décisive, 9,6 rebonds, 2 contres et 1,3 interception en 29,5 minutes de moyenne sur 1088 rencontres de saison régulière dont 912 en tant que titulaire.
Un bout de palmarès :
- Champion NBA 2004
- All-Star à 4 reprises (2003, 2004, 2005, 2006)
- NBA Defensive Player of the Year (2002, 2003, 2005, 2006)
- NBA All Defensive First Team à 5 reprises (2002, 2003, 2004, 2005, 2006)
- NBA All Defensive Second Team (2007)
- All NBA Second Team à 3 reprises (2003, 2004, 2006)
- All NBA Third Team à 2 reprises (2002, 2005)
- Meilleur rebondeur de la Ligue à 2 reprises (2002, 2003)
- Meilleur contreur de la Ligue (2002)
- Numéro 3 retiré par les Pistons
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