Le Spectrum : théâtre des stars de Philadelphie, jusqu’à Rocky Balboa

A chaque salle NBA son âme, ses anecdotes et ses bannières accrochées au plafond. Toutes les arènes sont uniques et leurs couloirs cachent bien souvent des secrets qui révèlent leur histoire et leur personnalité. Direction la Pennsylvanie et plus particulièrement Philadelphie, pour une visite guidée du Spectrum qui accueillait les Sixers entre 1967 et 1996.

La fiche

  • Dernier nom : Wachovia Spectrum
  • Anciens noms : Spectrum, CoreStates Spectrum, First Union Spectrum
  • Adresse : 3601 South Broad Street
  • Ville : Philadelphie, Pennsylvanie
  • Date d’ouverture : 30 septembre 1967
  • Date de fermeture : 31 octobre 2009
  • Démolition : 23 novembre 2010
  • Capacité : 18 168 personnes
  • Propriétaire : Comcast Spectacor, L.P.
  • Surnom : America’s Showplace
  • Successeur : Wells Fargo Center depuis 1996

Histoire

Construite initialement pour accueillir les Flyers, franchise fondée lors de l’expansion de la Ligue Nationale de Hockey, les Sixers suivent le mouvement et débarquent dans cette toute nouvelle enceinte conçue par les architectes Skidmore, Owings and Merrill. Ce sont eux qui ont construit le Burj Khalifa à Dubai, une réalisation parmi plus de 280, ce qui fait d’elle l’agence ayant construit le plus de gratte-ciels dans le monde. Pour un prix côtoyant les 7 millions de dollars, l’édifice sert donc de maison aux Flyers et aux Sixers de 1967 à 1996, aux Wings de 1987 à 1996 (Lacrosse), aux Phantoms de 1996 à 2009 (hockey sur glace) ainsi qu’au KiXX (soccer indoor) et au Soul (football indoor) respectivement de 1996 à 2009 et 2004 à 2008. Pour l’anecdote cinématographique, c’est au Spectrum que le premier combat entre Rocky Balboa et Appollo Creed a lieu, la salle servant de lieu de tournage pour le film Rocky.

Pour le premier match sur leur nouveau parquet, le 18 octobre 1967, les Sixers recevaient les Lakers d’Elgin Baylor. Auteur de 11 points, 30 rebonds et 9 passes décisives, c’est bien Wilt Chamberlain qui arrachera la victoire pour la ville de l’amour fraternel alors que Baylor aura scoré 24 points tout en prenant 13 rebonds. Première victoire à domicile, la salle est baptisée. Avec ce bâtiment tout neuf les fans avaient à disposition 18 168 sièges en configuration basket et devaient payer aux environs des 6 dollars pour assister à une rencontre lors de la première décennie. Avant-gardistes en ce qui concerne le parquet, les Sixers proposaient le logo de l’équipe au centre du terrain, qui définit alors la couleur du terrain. La raquette est bleue, le logo apparaît aux quatre coins du terrain et celui en plein milieu est entouré de… Beaucoup trop de couleurs en fait, du bleu, du vert, de l’orange, du rouge et du noir, voilà les couleurs qui composent l’emblème des Sixers. Initiative particulière mais qui ne manquera pas d’inspirer les autres franchises dans les années à venir.

Enceinte multiculturelle, entre les rencontres sportives avaient lieu des concerts, ce qui portait le nombre d’événements annuels à près de 160, un nombre conséquent pour la ville de Phila. A propos de basket, le parquet aura vu le All-Star Game de 1970 ainsi que celui de 1976, le Final Four de la NCAA entre 1976 et 1981, le tournoi NCAA de l’Est en 1992 ainsi que les Finales NBA à quatre reprises, en 1977, 1980, 1982 et 1983. En ce qui concerne les records, Wilt Chamberlain et Willie Burton détiennent le record de points avec 53 unités inscrites contre les Lakers le 18 mars 1968 et contre le Heat le 13 décembre 1994. Sans grande surprise, nous retrouvons Wilt aux rebonds avec 35 prises contre les Bullets le 12 janvier 1968 alors que ce dernier est encore recordman à la passe avec 21 caviars délivrés contre Detroit le 2 février 1968. Cependant, il doit partager ce record avec Maurice Cheeks qui, lui aussi, en aura distillé 21 contre les Nets le 30 octobre 1982. Là où Wilt passe, forcément, les records lui appartiennent.

Meilleur souvenir au Spectrum

Dans l’histoire des Sixers, des joueurs légendaires sont passés par là, entre Julius Erving, Wilt et Charles Barkley, ces mecs ont marqué l’histoire de la franchise dans les performances mais on ne peut pas en dire autant des résultats. Avec une carrière remplie d’actions spectaculaires et de moments inoubliables, une image ressort dans le jeu de Julius Erving. Nous sommes en Finales NBA contre les Lakers lors du Game 4, les Sixers sont menés 2 à 1 et Dr. J va sortir un move légendaire qui en inspirera plus d’un dans le futur. Alors qu’il ne reste que quelques minutes dans la dernière période et que l’avantage se renvoie comme une balle de ping-pong, Erving dépasse sur le côté droit avant de s’engouffrer ligne de fond alors que Mark Landsberger défend sur lui. Le bonhomme ne fait pas le poids et Kareem Abdul-Jabbar surgit, bien déterminé à contrer ce lay-up et ainsi réaliser un stop crucial en cette fin de match. Le numéro 6 est déjà en l’air, il parvient à se décaler derrière le panneau et semble alors en position de perdre le ballon ou alors de réaliser une passe foireuse. Que nenni, le monsieur possède l’un des hang time les plus longs de l’histoire et dans un élan d’adrénaline, il tend son bras encore plus loin derrière le panneau avant de le rabattre de l’autre côté de l’arceau. Il lâche la balle, le cuir rebondit sur la planche et vient finir sa chute dans le panier. Chaque personne ayant assisté à ce match s’en souviendra. Magic Johnson ira même dire qu’il était ébahi devant ce move. Alors rookie, le meneur voulait même qu’il recommence encore et encore, c’est le plus beau geste qu’il a vu sur un terrain de basket. Erving, auteur de 23 points ce soir-là, aida à remporter la victoire contre son admirateur et ses 28 points. Finalement ce sont bien les Angelinos qui s’imposeront dans cette Finale 4 victoires à 2.

Pire souvenir au Spectrum

On avait déjà écrit à propos du pire souvenir en Playoffs des Sixers, en 1977. Un bon gros choke des familles. De notre côté on va s’attarder sur une campagne entière, certainement la pire de l’histoire, la saison 1972-73 de Phila qui fut un désastre all-tme puisqu’ils iront chercher le record de défaites en une année avec un bilan de 9 victoires pour 73 revers. La saison débuta avec 15 L de rang pour enchaîner avec une autre série de 20 losses. Au 11 février 1973, ils affichaient un bilan de 4 victoires pour 58 défaites et ne s’arrêteront pas en si bon chemin puisqu’ils finiront la saison par une streak de 13 humiliations. Cette année-là, ils sont la pire défense avec 116,2 points encaissés (en 1973 !) et ne sont même pas la pire attaque, 13ème sur 17 avec 104,1 pions marqués. Dans l’effectif, il y a tout de même dix joueurs à plus de 10 points et même si les blessures étaient au rendez-vous (seulement trois joueurs ont disputé la totalité des matchs), le reste de l’effectif n’a pas su tenir le navire. Le management dirigé par Don DeJardin aura même essayé de changer de coach après une cinquantaine de match, sans succès puisque le deuxième fera semblablement la même chose, c’est-à-dire perdre. S’offrant même un double record de nullité en établissant 59 matchs de retard sur le leader de la Division Boston, le surnom des “Nine and 73-ers” resta un petit bout de temps collé sur le front des joueurs. Il faut tout de même noter que les joueurs ont dû faire perdre un paquet de pognon aux parieurs de l’époque puisqu’ils gagneront contre Milwaukee, Baltimore et New York, trois franchises qui finiront la saison à plus de 50 victoires. Malgré les quelques Finales perdues, le pire souvenir dans la tête des fans doit être d’avoir assister à ce carnage basketballistique, les copains qui étaient fans de Philadelphie au début des années 2010, on a trouvé pire que vous.

Maillots retirés au plafond du Spectrum

  • #6 : Julius Erving, le 18 avril 1988
  • #10 : Maurice Cheeks, le 6 février 1995
  • #13 : Wilt Chamberlain, le 18 mars 1991
  • #15 : Hal Greer, le 19 novembre 1976
  • #24 : Bobby Jones, le 7 novembre 1986
  • #32 : Billy Cunningham, le 17 décembre 1976
  • Dave Zinkoff (ancien speaker des Sixers), le 25 mars 1986

Palmarès au Spectrum

  • Champions NBA (1983)
  • Champions de Conférence (1977, 1980, 1982 et 1983)
  • Champions de Division (1968, 1977, 1978, 1983 et 1990)
  • Meilleur bilan : 65-17 (1983)
  • Pire bilan : 9-73 (1973)

La suite

Les Sixers ont déménagé à l’ouverture du Wells Fargo Center en 1996 et laisseront le Spectrum à l’abandon. Détruit en novembre 2010, un énorme morceau de l’histoire des Sixers est parti en fumée, heureusement que les bannières sont là pour nous rappeler ce que Phila a accompli dans le passé. Désormais présents dans une nouvelle salle, le Process arrive à son terme et les joueurs comptent bien accrocher de nouveaux titres au plafond et ainsi rejoindre leurs prédécesseurs.

Le Wells Fargo Center n’a pas encore connu de grands accomplissements malgré un Allen Iverson ahurissant en début de siècle, il n’aura pas été suffisant à ramener un titre dans sa ville. En espérant que de nouvelles et futures légendes du jeu débarquent, les fans des Sixers ont toujours du spectacle à se mettre sous la dent.

Source image : YouTube/NBA