Flashback : l’énorme upset des Nuggets de Dikembe Mutombo en 1994
Le 07 mai 2024 à 20:42 par Julien Vion
Une image, celle de Dikembe Mutombo en larmes et dos au sol, avec le ballon entre les mains. Contre tous les pronostics, le pivot et son équipe ont – au premier tour des Playoffs 1994 – renversé les Seattle Supersonics, pourtant premiers de conférence, en remontant un déficit de 2 match à 0. Dans un Game 5 à couteaux tirés, la gigantesque défense de Mutombo a triomphé.
Leicester champion de Premier League en 2016, la victoire de Pierre Gasly en 2020 à Monza, ou encore le parcours du Maroc à la Coupe du monde 2022 : les histoires d’outsiders font toujours rêver les fans de sport. Si on ne va pas parler de titre ici, l’upset réalisé par les Nuggets au mois de mai 1994 est à l’époque le plus gros de l’histoire de la NBA. Une équipe huitième qui fait tomber les premiers en Playoffs, ça n’arrive pas tous les quatre matins. On rembobine.
David contre Goliath, un déséquilibre criant sur le papier
Dans cet exercice 1993-94, les Denver Nuggets sont la plus jeune équipe de la NBA. Menés par Dikembe Mutombo, dans sa troisième saison NBA, et Mahmoud Abdul-Rauf à peine un an plus expérimenté, ils sont loin de figurer parmi les favoris au titre. Malgré la cinquième défense de la ligue, en grande partie grâce au pivot de 2m18, leur attaque est poussive pour ne pas dire en galère tous les soirs. Résultat, un petit bilan de 42 victoires pour 40 défaites, et un ticket pour les Playoffs accroché à la dernière seconde.
Et forcément, l’adversaire qui se dresse sur leur chemin en impose. Avec leur beau maillot vert et blanc, les Seattle SuperSonics ont roulé sur la saison régulière (63 succès, 19 revers, 1ers). Une défense bien dure (3è), une attaque rapide basée sur la transition (2è), et un meilleur marqueur nommé Shawn Kemp qui entre dans son prime. Il cale un dunk de légende en fin de régulière, histoire de bien se chauffer. Un petit mot pour la paire Gary Payton – Detlef Schrempf en supporting cast, et les présentations sont complètes. Bref, ça sent le cramé pour les Nuggets.
32 YEARS AGO TODAY
Shawn Kemp had one of the greatest & most disrespectful dunks ever!
In the same game as “The Lister Blister,” Chris Gatling gave The Reign Man props for dunking on him. pic.twitter.com/B1exRaNXyP
— Ballislife.com (@Ballislife) April 30, 2024
Game 1 : 24 points dans les dents des visiteurs, les Sonics n’ont pas le temps. Si vous pensez que le rédacteur ménage le suspense, ce n’est pas le cas, c’est une bou-che-rie en règle. Game 2, presque bis repetita, et victoire des favoris d’une dizaine de points. À l’époque, c’est une série en 5 matchs. Un dernier succès, donc, et la messe sera dite. Amen ?
La remontée des Nuggets, c’est quel type de poulet ?
Le 3 mai 1994, les Nuggets doivent gagner trois rencontres d’affilée face à la meilleure équipe de la ligue pour espérer se qualifier. Les chances sont aussi minces qu’Angel Di Maria avant le repas de midi, c’est dire. Il faudrait tout simplement un miracle.
Le premier élément qui joue en faveur des outsiders, c’est l’attitude des Sonics à l’entame du Game 3. Peut-être qu’ils n’avaient pas eu le mémo qu’un match de basket se tiendrait pour valider la qualif’, mais le groupe de George Karl a la tête ailleurs. Une claque 110 à 93 pour Denver, qui sauve l’honneur avec panache. Au cours des 82 matchs de régulière, ils n’avaient atteint ce total que… 16 fois. La stat qui tue, c’est la domination 43 à 25 au rebond, annonciatrice de la suite.
Au Game 4, Seattle se pointe (au moins), mais ne parvient pas à remettre la main sur la série pour autant. Derrière un Dikembe Mutombo qui préchauffe sévère en défense (16 rebonds et 8 contres), les Nuggets gagnent de 9 points et arrachent un Game 5 décisif ! L’exploit est déjà grand, mais aller gagner à l’extérieur semble dix étages au-dessus. Et si ? “Au coude-à-coude” : locution adverbiale désignant des personnes si proches que leurs coudes se touchent (Wikidictionnaire). L’expression résume bien le Game 5, où les défenses se tabassent mutuellement pour essayer de prendre un avantage.
Dans cette baston bien nineties, le numéro 55 au doux nom de Dikembe surnage. Les Sonics manquent de vitesse pour échapper aux longs bras de l’Américano-congolais. En mode Docteur Eggman, Mutombo est intraitable. 8 contres distribués au fil du match avec la bagatelle de 15 rebonds pour prendre le contrôle de la raquette. Surtout, il se fait un plaisir de s’occuper personnellement de Shawn Kemp, se collant dans son short pendant 45 minutes.
Si en plus Robert Pack (non-drafté) y va de ses 23 points en sortie de banc, Seattle a du souci à se faire. Forts de leurs stars, les Sonics de Gary Payton et Shawn Kemp parviennent à arracher une prolongation sur un lay-up, et pensent avoir fait le plus dur en évitant la défaite une première fois. Mais au cœur, Denver tient à son rêve et remporte l’overtime 10 à 6.
Dikembe Mutombo attrape l’ultime rebond quand le buzzer retentit dans la salle. Il s’allonge sur le sol, le ballon entre les mains, et pleure de joie devant l’exploit accompli. Des larmes qui n’appellent qu’une phrase du futur(e) : mais c’est quoi ce poulet ? Ce sont les Nuggets version 1993-94. Pour la première fois dans l’histoire de la NBA, un tel upset sur le 1er de conférence a été réalisé.
May 7, 1994: In one of the biggest upsets in NBA Playoff history, the 8th seed Denver Nuggets eliminated the #1 seed Seattle SuperSonics in the WC 1st Round. The Nuggets, became the first to upset a #1 seed since the 1st round of the Playoffs went to a best-of-5 format in 1984. pic.twitter.com/SHHsplqfpQ
— NBA TV (@NBATV) May 7, 2018
Dans cette série de premier tour des Playoffs, Mutombo a enregistré 31 contres, soit 6,2 de moyenne. Ligne de stat finale : 12,6 points, 12,2 rebonds, 2,4 passes, 0,2 interception et 6,2 contres. La défense est monumentale, et a grandement contribué à l’upset. Il découvrait pourtant les Playoffs pour la première fois de sa carrière. Ces Nuggets échoueront finalement en 7 matchs au tour suivant face au Jazz de Karl Malone et John Stockton.
Plusieurs équipes ont ensuite réitéré l’exploit de faire tomber les premiers de conférence au premier tour des Playoffs, mais la folle remontée des Nuggets – et le niveau de Dikembe Mutombo – reste dans la légende de la NBA.
Sources texte : NBA, Basketball Reference