George Gervin, froid comme la glace et chaud comme une baraque à frites
Le 05 déc. 2022 à 16:11 par Alexandre Taupin
Monstre sacré du basket à San Antonio dans les années 70 et au début des 80’s, George Gervin est l’un des joueurs les plus emblématiques de l’histoire des Spurs. Retour sur le parcours de celui qu’on appelait “The Iceman”.
Pionnier des Spurs
Quand on parle des joueurs qui ont marqué les Spurs et San Antonio, très vite certains noms viennent en tête. Impossible de zapper Tim Duncan, le meilleur joueur all-time de la franchise ou encore David Robinson, Manu Ginobili et bien sûr Tony Parker. Toutefois, un nom est bien souvent omis dans cette liste. Ce nom, c’est celui de George Gervin. Vedette des Éperons au moment de leur passage de la ABA à la NBA en 1976, l’ancien ailier a écrit de très nombreuses pages de l’histoire de San Antonio. On parle d’un véritable pionnier à Fort Alamo et le mot est plutôt bien trouvé car The Iceman va ouvrir le bal dans bon nombre de catégories.
Premier All-Star NBA de l’histoire du club, premier joueur à intégrer une All-NBA Team, premier à décrocher une récompense de saison dans la Ligue (le titre de meilleur scoreur en 1978). Et surtout, on parle de la première vraie “superstar” des Spurs. Dans son sillage, San Antonio va aller chercher ses premiers Playoffs NBA mais aussi ses premières bannières de division (à ne pas confondre avec celles du titre). Certes, aujourd’hui la franchise est référencée au sein de la NBA à travers ses résultats et un style si particulier attaché à l’équipe mais quand il a fallu mettre San Antonio sur la carte, on sait très bien qui il faut remercier.
Serial scoreur
Si résumer George Gervin à son étiquette de scoreur serait sans doute injuste, il faut reconnaître que le garçon ne faisait pas les choses à moitié quand il s’agissait de faire trembler de la ficelle. Quatre fois meilleur scoreur de la Ligue, dont trois fois consécutivement à la fin des 70’s, la dixième meilleure moyenne de points en carrière de l’histoire de la NBA (25,09), Iceman était un cauchemar pour toutes les défenses du pays. Il est aussi connu pour un move qui restera attaché à sa personne, le fameux “Finger Roll” , désormais totalement ancré en NBA. L’histoire qui résume le mieux cette facilité à planter, elle est célèbre, c’est ce duel avec David Thompson pour le titre de meilleur scoreur de l’année 1978.
Nous sommes le 9 avril 1978 et, alors qu’il reste un seul match à disputer, les deux joueurs sont au coude à coude. Gervin est quand même en tête et il le restera si Thompson ne plante pas seize points de plus que lui sur cette dernière journée. Boum, la légende des Nuggets frappe fort avec 73 pions contre Detroit ! Iceman est donc dos au mur et doit mettre 59 points contre le Jazz pour espérer l’emporter. Un challenge accepté par la star des Spurs, qui va réaliser son meilleur match en carrière avec 63 points pour coiffer son rival au poteau. C’est un immense exploit et, clin d’œil du destin, un autre protégé de San Antonio réalisera une performance similaire quelques années plus tard : David Robinson contre Shaquille O’Neal en 1994.
Une expérience mitigée avec Michael Jordan
Si George Gervin est clairement estampillé “Spurs”, la franchise texane ne fut pourtant pas son seul club en carrière. En froid avec sa direction mais aussi Cotton Fitzsimmons, coach de San Antonio à partir de 1984, Gervin est finalement tradé par les Spurs en 1985. Direction ? Les Bulls d’un certain Michael Jordan, en quête de renforts pour soutenir leur jeune pépite. On aurait pu croire que MJ allait apprécier de voir un joueur de ce calibre venir lui filer un coup de main mais celui qui est alors sophomore n’est au contraire pas emballé… Alors que le Chicago Tribune l’interroge sur le trade en ce mois d’octobre 1985, MJ refuse de commenter, se contentant d’un simple “je ne suis pas content”. Ambiance, ambiance…
La raison de cette animosité ? On pourrait croire que Jordan ne souhaite pas voir quelqu’un lui prendre ses shoots mais la vraie raison semble le fameux All-Star Game 1984 où certains joueurs (notamment Isiah Thomas) auraient décidé de ne pas passer la gonfle à Jordan pour lui “apprendre une leçon”. Ce qui est plus surprenant c’est que George Gervin, qui a bien joué le fameux match, était… dans l’équipe adverse puisqu’il représentait la Conférence Ouest. Ne pas filer la balle à MJ était donc plutôt logique.
On aurait pu s’attendre à voir MJ profiter de la présence de ce scoreur de légende pour peaufiner son jeu ou créer une relation mentor-jeune superstar, il n’en sera rien. Dans une interview pour The Post Game et Jeff Eisenband datant de 2017, Iceman confirmait le peu de liens entre les deux hommes lors de leur seule saison en commun dans l’Illinois, profitant aussi de l’occasion pour remettre le statut de GOAT de MJ en question. L’amour fou décidément.
“Non, nous n’étions pas si proches. Mike est différent. Il a fait ce qu’il voulait faire. Il n’avait pas besoin d’aide. Je sais qu’il a dû apprendre quelque chose de moi parce que je n’étais pas une mauviette. Je pouvais jouer et je pouvais jouer pendant longtemps, qu’il le dise ou non. Je ne dis pas qu’il m’a imité, mais je pouvais mettre la balle dans le trou.
Je ne dis pas qu’il a appris quelque chose de moi. Vous devriez lui demander. Je ne m’attribue aucun mérite pour son succès. C’est certainement l’un des meilleurs. Tout le monde dit qu’il est le plus grand de tous les temps, mais je n’en suis pas convaincu.”
Une place parmi les plus grands pour oublier la bague
Hall of Famer, présent dans la liste des 76 meilleurs joueurs de tous les temps, George Gervin est un géant de l’histoire de la balle orange, personne ne saurait contester ce point. Une légende à qui il aura sans doute manqué un titre pour avoir une trace plus marquante dans l’esprit des fans NBA, d’autant plus qu’il n’y avait pas les réseaux sociaux à l’époque pour mettre en lumière les perfs des uns et des autres. Cette bague, Iceman ne l’aura jamais acquise sur les parquets, où il aura atteint au mieux la Finale de Conférence. Néanmoins et par respect pour son apport à la franchise, les Spurs lui ont fait faire une bague pour chaque titre remporté par la suite. Dans une interview en date de décembre 2021 pour Michael C. Wright de Sporting News, l’ailier avait avoué qu’il avait été particulièrement touché par ce geste, même s’il ne portera jamais ces bagues…
“C’est spécial. Ils ont senti que je faisais partie des fondations pour y arriver. Je ne les ai pas gagnés en jouant au basket.
Mais lorsque vous faites partie d’une grande organisation comme les San Antonio Spurs, je fais partie de cette famille et ils me le rappellent sans cesse. Qu’est-ce qui peut être mieux que de faire partie d’une famille ? Il n’y a rien de tel dans le monde”
La carrière de George Gervin n’est pas la plus connue mais celui qu’on considère comme le roi du Finger Roll reste l’un des joueurs les plus forts de sa génération et une légende pour tous les amoureux de Fort Alamo. Son numéro 44, au plafond de l’AT&T Center, est d’ailleurs là pour le rappeler.
Source texte : The Post Game / Chicago Tribune / Sporting News / Basketball-Reference