Goose Tatum story – part 5 : un Globetrotter à part avec un statut de star
Le 06 juin 2025 à 09:00 par David Carroz

Dans le monde de la balle orange, peu de noms sont à la fois aussi emblématiques mais aussi peu connus du grand public que celui de Reece “Goose” Tatum. Certes, sa période de gloire remonte à une ère révolue, mais son impact sur l’une des équipes les plus populaires de l’histoire n’en demeure pas moins exceptionnel. Car cet athlète Afro-américain aux talents multiples a mené les Harlem Globetrotters au sommet du basketball chez l’Oncle Sam puis tout autour du monde alors que les lois ségrégationnistes Jim Crow rythmaient la vie aux USA. Cinquième partie de notre portrait consacré à Reece Goose Tatum, avec les difficultés que connait le joueur en dehors des parquets.
Grâce aux confrontations face aux Lakers, les Globetrotters ont prouvé qu’ils n’étaient pas seulement des artistes ou des clowns mais aussi des athlètes de haut niveau. Et à cet égard, Goose Tatum – qui cumule donc d’énormes qualités sportives à un sens inné du spectacle – bénéficie d’un traitement de faveur puisque son salaire grimpe jusqu’à plus de 45 mille dollars par saison. Une très grosse somme puisque George Mikan n’en touche que 35 mille. Avec une subtilité tout de même. Pendant que le pivot des Lakers se contente d’une centaine de rencontres par an – condensées sur cinq ou six mois – Tatum revêt le jersey des Trotters quasiment tous les soirs de l’année. Du moins quand il ne disparaît pas.
Car le solitaire, qu’il était jeune, subsiste. Bien entendu, il apprécie de faire rire le public et il en tire une grande fierté. Mais il ne s’est pas pour autant habitué à la popularité et aux contraintes qui peuvent aller avec. Régulièrement, il quitte l’équipe sans prévenir et personne ne sait où il est ni ce qu’il fait. Forcément, cela crée quelques tensions avec Saperstein en plus de l’incompréhension auprès des coéquipiers. Abe n’a pas d’autres choix que de le sanctionner en le suspendant sans salaire, mais à chaque retour il l’accueille à bras ouverts. Le proprio des Harlem Globetrotters sait très bien ce qu’il doit à sa star qui continue à se bonifier sur les terrains à mesure que les années passent.
Saperstein ne s’y trompe pas : il entend bien le public qui réclame Goose lors de ses absences. Si bien que même s’il n’a jamais placé un joueur au-dessus de l’institution Globetrotters – quitte à diminuer l’impact des cadres dans le passé – le propriétaire a dû mal à ne pas reconnaître que sans Goose Tatum, la donne n’est pas la même pour ses Trotters. La relation oscille donc entre le très haut et le très bas au gré des absences de Goose Tatum. Régulièrement, les deux hommes semblent au bord de la rupture. D’un côté le caractère solitaire et les envies vagabondes de Goose, peu compatibles avec la vie d’une équipe de basket-ball. De l’autre un propriétaire omnipotent qui veut tout contrôler. Et les deux qui jonglent, aussi bien pour leur propre réussite que pour celle de l’autre, ce partenaire différent mais nécessaire.
En tout cas, les deux hommes cohabitent, plus souvent pour le meilleur que pour le pire. Les augmentations salariales successives qui font de Goose Tatum un homme riche dans l’univers du sport afro-américain y jouent certainement et le début des fifties semble indiquer une forme d’apaisement dans les relations entre Tatum et Saperstein. 3500 dollars par mois alors que le salaire annuel moyen d’un ménage américain est à 3300$, ça aide à relativiser et à freiner sur les RTT sauvages et sans solde.
Source : Spinning The Globe de Ben Green