Flashback : Yao Ming contre Yi Jianlian, un match devant 200 millions de téléspectateurs
Le 09 nov. 2024 à 15:44 par Maxime Chauveau
Si la NBA est aujourd’hui la plus grande ligue de basketball au monde, et un mastodonte du sport en général, c’est en grande partie car elle cherche continuellement à s’exporter. Avant de tenter de séduire la France ou les Émirats arabes unis comme elle le fait désormais, la Grande Ligue avait une autre cible prioritaire : la Chine. Et pour conquérir le cœur de tout un pays, quoi de mieux qu’un affrontement entre deux de ses plus beaux représentants ?
Au moment d’évoquer la riche histoire entre la NBA et la Chine, impossible ou presque de passer à côté du nom de Yao Ming. Est-ce parce que le garçon a des mains de magicien mais le corps d’un géant (2,29m), ou parce qu’il est ce que l’Empire du Milieu a envoyé de mieux outre-Atlantique ? Sans doute un savant mélange des deux. Toujours est-il que Yao Ming est un phénomène, sportif comme médiatique. Dès sa Draft par les Houston Rockets, en 2002, Yao est programmé pour gagner. Sélectionné avec le premier choix, sans ne jamais avoir joué en NCAA – une première pour un joueur international à l’époque – le pivot chinois porte les espoirs de gloire de tout un pays sur ses larges épaules.
A special day in #Rockets history.
On this day in 2002, Yao Ming was drafted #1 by the Houston Rockets.
20 years. What a journey it’s been! 👏 pic.twitter.com/9kicOSj8do
— Houston Rockets (@HoustonRockets) June 26, 2022
Ces espoirs, justement, ils se comptent par milliards. Quand James Naismith invente le basketball, en décembre 1891, les Chinois sont parmi les premiers peuples à tomber sous le charme de la balle orange, qui ne l’était pas vraiment d’ailleurs à l’époque. Très vite, le basket devient un sport central dans la culture chinoise. Alors forcément, quand une anomalie génétique comme Yao Ming voit le jour, difficile de ne pas s’imaginer au sommet du panier-ballon mondial. D’aucuns diront d’ailleurs que l’existence même de Yao aurait été programmée par le gouvernement chinois. Mais restons factuels, ici point de spéculations.
Dès ses premières années en NBA, celui que l’on surnomme désormais “The Great Wall”, en référence à la Grande Muraille de Chine, prouve qu’il n’a pas que des centimètres en plus. Non, Yao Ming est un joueur différent, un géant bourré de talent. Si, sur le parquet, c’est son immense carcasse qui attire l’œil des plus novices, les vrais avertis, eux, décèlent autre chose. Malgré sa grande taille, Yao est étonnant de toucher et de fluidité. Il se déplace à merveille et est capable de trouver le cercle les yeux fermés. Un profil de joueur inarrêtable, excepté par des genoux capricieux, et qui conduira Yao Ming à réaliser une carrière extraordinaire. D’abord rival du Shaq en personne, puis octuple All-Star et enfin, membre du prestigieux Hall of Fame. Jamais un basketteur chinois n’aura fait mieux. Jamais, peut-être, un basketteur chinois ne fera mieux.
Yao Ming’s TOP 10 PLAYS for the @HoustonRockets! #NBATop10 #16HoopClass pic.twitter.com/zU4d1uBtWk
— NBA (@NBA) September 7, 2016
Forcément, la Chine ne peut que se féliciter d’un tel succès, et tenter de vouloir le reproduire. Alors quand Yi Jianlian, phénomène en CBA, la ligue de basket chinoise, débarque en NBA via la Draft 2007, c’est tout l’Empire du Milieu qui se frotte les mains. En parlant de mains, celles de Yi ne sont pas celles de Yao, mais sont loin d’être mauvaises. Plus petit, listé à 2m13, Jianlian est toutefois bien plus athlétique que Yao Ming, et possède un profil différent de son compatriote. Malgré son gabarit, Yi joue davantage dans les ailes que sous le cercle. L’ailier-fort est un joueur doué à mi-distance, bon en transition et capable de défendre le plomb correctement.
Dans le championnat national, Yi Jianlian est un monstre, un vrai. On parle d’un garçon quadruple All-Star, triple champion, MVP des Finales et même Défenseur de l’Année. Une machine à gagner, qui a a priori tout ce qu’il faut pour briller, même dans la meilleure ligue du monde. Quand le poste quatre chinois arrive en NBA – sélectionné par les Bucks avec le 6e choix de la Draft 2007 – la Chine dispose de deux cracks sur la plus belle scène qui soit. Parce qu’à ce moment-là, Yao Ming sort de l’une des plus belles saisons de sa carrière, en tout cas sur le plan individuel.
Fuck it, Yi Jianlian highlights. pic.twitter.com/tVExNzv9Ix
— Nets Fan (@OfficialNetsFan) June 6, 2024
Maintenant, savez-vous ce qu’il y’a de mieux que d’avoir deux représentants d’un même pays en NBA ? C’est évidemment quand ils se rencontrent, et encore plus la première fois. Ce premier duel entre Yao Ming et Yi Jianlian en NBA, justement, a finalement lieu le 9 novembre 2007. Un moment historique pour le basket chinois. Pour remettre un gros contexte, les Rockets de Tracy McGrady et Yao Ming sont en pleine bourre en ce début de saison, et reçoivent des Bucks qui se cherchent encore. Fraîchement débarqué en NBA, Yi Jianlian montre déjà de belles choses.
Première bonne nouvelle pour les fans et la NBA, les deux joueurs chinois sont titulaires. Une aubaine pour la Grande Ligue, qui a senti le coup venir. En Chine, le match est diffusé sur dix-neuf chaînes de télévision, dont CCTV-5, la chaîne sportive nationale. De son côté, la NBA a organisé une soirée spéciale visionnage pour les fans, à Pékin. Parce que qui dit affrontement exceptionnel, dit dispositif à la hauteur.
Et comme à son habitude, David Stern ne s’est pas trompé. Sportivement, la Chine montre au monde entier que ses joueurs sont capables de briller. Yao Ming continue sa moisson, et envoie 28 points, 10 rebonds et 3 contres. Le tout, en inscrivant l’entièreté de ses 14 lancers-francs tentés. Qui a dit que les grands ne savaient pas tirer ? En face, Yi Jianlian livre aussi une prestation plus que solide. Le rookie boucle la rencontre avec 19 points, 9 rebonds et 2 interceptions. Pas mal pour un sixième match en NBA.
6 x CBA Champion Yi Jianlian announced his retirement
Between 150-200 million people in China watched his first game against Yao Ming in 2007. The 06 Super Bowl had about 93M viewers in the US & the 06 NBA Finals had an average of about 13M viewers.
pic.twitter.com/CK4QvUf9Ho
— Ballislife.com (@Ballislife) August 30, 2023
Mais malgré ces statistiques flatteuses et la victoire de Houston, ce ne sont probablement pas ces chiffres qui l’Histoire va retenir. Non, ce qui compte vraiment sera révélé un peu après la rencontre. Comme prévu, le match a cartonné. Au total ? Deux-cent millions de viewers sur l’ensemble des plateformes en Chine. Des chiffres complètement fous, mais à la hauteur de l’engouement. À titre de comparaison, la finale du Super Bowl 2024, programme le plus regardé de l’histoire de la télévision américaine, a rassemblé plus de cent-vingt millions de téléspectateurs constants sur les différents canaux. Une nouvelle preuve, s’il en fallait, que le basket est une institution dans l’Empire du Milieu.
Aujourd’hui, une quinzaine d’année plus tard, certaines choses ont changées. Si la Chine aime toujours autant le panier-ballon, le pays est un peu moins reluisant sportivement. On ne compte quasiment plus de joueurs chinois en NBA, excepté Kyle Anderson, naturalisé il y a un an, et Cui Yongxi, en two-way contract avec les Nets. Une période de creux, en attendant de voir, peut-être un jour, la prochaine superstar chinoise destinée à tout casser dans la plus grande ligue de basket au monde.
Sources texte : ESPN, BBC