La saison rookie de Victor Wembanyama : vers l’infini et au-delà (Partie 2)

Le 28 avr. 2024 à 10:32 par Julien Vion

Saison Rookie Victor Wembanyama Partie 2 25 avril 2024
Source image : montage TrashTalk

Nous nous étions quittés en plein milieu de la saison rookie de Victor Wembanyama, entre deux performances lunaires et une déclaration pleine d’ambition. Pour lire la partie 1 et tout comprendre, ça se passe juste en-dessous. Et pour la suite de la suite, c’est encore un peu plus dessous.

La saison rookie de Victor Wembanyama : vers l’infini et au-delà (Partie 1), juste ici

Après la soirée de zinzin de Victor face aux Bucks, Giannis Antetokounmpo lui-même avait encensé le Français. Et ce dernier n’a pas perdu de temps pour continuer ses bêtises. Attrapez une boisson chaude et une place dans un bon canap’, la suite est toujours aussi riche… Et mon chat encore du voyage. Vers l’infini.

Chapitre 1 : Vivre vite

Peu importe si Victor Wembanyama veut toujours avancer à vitesse grand V, ses alertes à la cheville ont été prises très au sérieux par Gregg Popovich et le staff de San Antonio. Conséquence directe, il doit suivre une restriction de minutes stricte à partir du 21 décembre. Autrement dit, le rookie ne joue que 24,5 minutes de moyenne pendant plus de 3 semaines, c’est-à-dire presque la moitié d’un match complet.

Chez certains fans, la frustration domine. D’abord, on doit se satisfaire de moins de Wemby. Mais surtout, Popovich n’est pas enclin à répondre aux journalistes qui tentent de savoir combien de temps peut durer cette situation. Mais le coach suit un plan bien précis : en plus de protéger son corps, Victor doit apprendre à faire plus avec moins.

Il n’y a pas plus belle illustration de ce nouveau statut qu’un froid déplacement d’hiver dans l’Oregon, du côté de Portland. Les Spurs se baladent et Wembanyama n’a le droit qu’à 24 minutes sur le parquet, ce qui ne l’empêche pas d’envoyer… 30 points, 6 rebonds, 6 passes et 7 contres. Au passage, il devient le premier rookie de l’histoire à poser cette ligne de stat depuis David Robinson. Mais si on commence à écrire “Il devient le plus jeune joueur depuis Harold Kottman en 1946 à faire ses lacets de la main gauche en ayant mal dormi…” à chaque fois, on ne s’en sort pas. Et pourtant on pourrait, et on va se le permettre de temps en temps.

Victor Wembanyama put on a SHOW tonight as the Spurs pick up the win in Portland! 🤩

30 PTS / 6 REB / 6 AST / 7 BLK

Wemby is the 2nd rookie in NBA History to record 30+ points, 5+ rebounds, 5+ assists, and 7+ blocks in a game (David Robinson – 03/19/1990). pic.twitter.com/0mtmHjD0fC

— NBA (@NBA) December 29, 2023

Mais forcément, tout le monde se demande ce qui aurait pu se passer s’il avait joué 30, 35 ou 40 minutes. Le quadruple-double dans un coin de la tête, on découvre une nouvelle qualité du Français : savoir faire vite, mais savoir le faire mieux. Contre les Blazers, il n’a manqué que 5 petits tirs (9/14) et n’a perdu qu’un seul ballon. Comme Cell dans Dragon Ball, Wemby change de forme et augmente sa puissance. Et il n’a fort heureusement pas besoin d’absorber un coéquipier pour cela.

À la mi-janvier, il est autorisé à jouer 27-28 minutes par soir, mais il faut attendre le mois de… mars pour le revoir enchaîner 3 matchs consécutifs en dépassant la trentaine. Pour autant, pas de quoi frustrer le principal intéressé :

“J’ai appris à surmonter la frustration liée au temps de jeu limité, c’est comme ça. Mon corps a besoin de temps pour s’adapter à la charge de travail et à la longueur d’une saison NBA. Une fois qu’il sera prêt, on ira à fond, mais il n y a pas lieu d’être frustré. Je garde en tête mes objectifs à long terme.” – Victor Wembanyama, le 8 janvier

Deux jours après cette déclaration, San Antonio se déplace à Détroit dans un duel de cancres de la ligue. Victor ne joue que 21 petites minutes, mais en profite pour réaliser son premier triple-double en carrière. 16 points, 12 rebonds et… 10 passes décisives. Dans l’histoire, seul Russell Westbrook (20 minutes) en avait déjà enregistré un en moins de temps passé sur le parquet.

Un caviar longue distance façon foot US pour débuter, des petites offrandes sans regarder pour continuer, et le tout sans oublier de caler des gros dunks. Ces highlights dans un autre registre sont toujours aussi sympas. 10 passes, pas une seule perte de balle, encore une exception statistique.

Les semaines suivantes, la frustration de ne pas voir le rookie dépasser les 30 minutes côtoie le plaisir de le voir s’épanouir sur le parquet. Plus appliqué que jamais, Wemby bénéficie aussi de l’intégration de Tre Jones en tant que titulaire. L’association est évidente. Entre octobre et janvier, quand Tre Jones est sur le terrain, Victor Wembanyama affiche un True Shooting % (un indicateur de son efficacité au tir) de 58,9%, contre à peine 50 quand le meneur est sur le banc.

Jones est un meneur de jeu gestionnaire parfaitement complémentaire au Français. Il sait l’envoyer au alley-oop à 10 mètres – là où un Jeremy Sochan était beaucoup critiqué – sait faire mal sur pick-and-roll, et le scoring de Wembanyama augmente significativement à ce moment-là. S’il voit le MVP Joel Embiid passer comme une météorite et inscrire 70 points à la fin du mois, il n’a ce soir-là pas à rougir de ses 33 points en 28 minutes face aux Sixers.

The Spurs have a -9.1 net rating this season, but a +4.9 net rating in the 795 possessions Victor Wembanyama and Tre Jones have played together pic.twitter.com/xUX8YAN1vf

— Jackson Frank (@jackfrank_jjf) January 13, 2024

Le 27 janvier, Wemby n’a besoin de personne pour caler un Shammgod sur Rudy Gobert et casser l’Internet. Un Shammgod, c’est une variante du crossover qui consiste à feinter un départ en dribble avant de ramener la balle côté inverse main opposée. Pour la faire courte, la coordination des membres ne devrait pas être aussi fluide à 2m24 du sol. Moi et mon mètre 80 n’en sommes pas capables en tout cas. “C’est un move de dingue. Je le dis juste comme je le vois” hallucine la légende des Wolves Kevin Garnett. Pour ma part j’ouvre un paquet de croquettes tout neuf pour le chat, c’est la fête à la maison.

Wemby hit ‘em with the Shammgod 😳 pic.twitter.com/UqtV7LaMtp

— NBA TV (@NBATV) January 28, 2024

Si Victor Wembanyama n’est pas récompensé d’un prix Goncourt pour Vivre vite, ses performances lui valent tout de même son premier trophée de rookie du mois. C’est d’ailleurs la première fois de l’histoire de la NBA qu’un joueur (tout âge confondu) marque 24 points de moyenne sur un mois tout en jouant moins de 28 minutes par match. Et on parle d’un rookie qui avait encore 19 ans le 3 janvier.

Chapitre 2 : L’Anomalie

Quand les Spurs entament leur road-trip annuel début février, et enchaînent 9 rencontres à l’extérieur, Wembanyama semble un peu rincé. Toujours utilisé avec précaution, il apparaît peu à son aise en Floride contre Orlando. Il ne gobe qu’un seul petit rebond, puis quatre le soir suivant à Brooklyn. On se dit que cette anomalie statistique est normale dans une saison rookie, qu’il faut sans doute s’attendre à plusieurs jours dans le dur et… bonsoir non. L’anomalie statistique, c’est lui-même qui nous la fournit deux jours après. Ce zinzin.

En déplacement à Toronto, Victor est littéralement PAR-TOUT en première mi-temps. 19 points, 6 rebonds, 5 passes décisives, 3 contres et 2 interceptions avant la pause : cela n’avait jamais été fait avant. Par personne. Never. Et parce que ce serait bête de s’arrêter en si bon chemin, Wemby envoie SEPT CONTRES dans les deux quarts-temps suivants. Il termine avec un triple-double à 10 contres, dont cinq sur le seul Jakob Poeltl. 

Seuls trois autres joueurs avaient réussi cet exploit sur les 10 dernières années. Avec 27 points (10/14 au tir), 14 rebonds et 5 passes pour agrémenter le tout, le Canada tout entier songe à émettre un mandat d’arrêt international. Gradey Dick, qui a terminé sur les fesses devant le Français, s’en remet toujours péniblement. Chamboulé par ces émotions, le chat tente de sortir prendre l’air mais se fait contrer par Wembanyama avant la porte. Et de 11, il est vraiment partout.

NE MONTEZ PAS SUR WEMBY pic.twitter.com/KjDXAoxdDR

— TrashTalk (@TrashTalk_fr) February 13, 2024

Wemby profite à peine du premier petit break dans la saison lors du All-Star Week-end, puisqu’il participe aux festivités dans l’Indiana. Membre de l’équipe “first picks” pour le Skills challenge et participant du Rising Star Game, son passage ne reste toutefois pas mémorable. Anthony Edwards avait décidé de shooter main gauche pour le “fun” tandis que l’équipe de G League est arrivée avec plus d’envie pour s’imposer face aux rookies NBA. On retiendra qu’on a pu voir Victor et Bilal Coulibaly dans la même équipe le temps d’un soir, et ça fait plaisir. Mais c’est à peu près tout.

La session shooting de la Team First Picks avec Victor 🇫🇷#NBAAllStar pic.twitter.com/mxqDzNZtvV

— NBA France (@NBAFRANCE) February 18, 2024

Le retour aux affaires ne tarde pas, et Victor en profite pour encore hausser son niveau de jeu. Et pourquoi pas ?

Votre prof de mathématiques vous a probablement déjà dit qu’on ne pouvait pas atteindre l’infini mais simplement tendre vers l’infini. C’est toujours difficile à imaginer, mais Wembanyama en fait la démonstration en nous offrant l’occasion de faire des maths. Accrochez-vous un peu si vous n’êtes pas familier avec la matière.

La NBA moderne est ultra dominée par les statistiques, pour le meilleur comme pour le pire. Ce sont des outils imparfaits mais utiles pour évaluer la production des athlètes. Les cinq catégories principales sont les points, les rebonds, les passes, les interceptions et les contres. Réaliser un five-by-five, c’est enregistrer minimum 5 unités par catégorie. Autrement dit, ça n’arrive pas tous les quatre matins. Seuls 14 joueurs l’avaient réalisé jusqu’à lors.

Mais le 22 février, il enregistre 19 points, 13 rebonds, 4 passes décisives, 5 interceptions et 5 contres. Il crée la sensation en passant à une passe près de l’atteindre. Il le fera sans doute assez tôt se dit-on. Littéralement le… lendemain, le 23 février, il pose 27 points, 10 rebonds, 8 passes, 5 interceptions et 5 contres. Évidemment le plus jeune à le faire, il banalise le five-by-five avec aisance. Anomalie, définition.

 

Wembanyama rejoint d’ailleurs Michael Jordan comme unique joueur ayant enregistré 5 interceptions et 5 contres deux jours consécutifs. En conférence de presse d’après match, le rookie pointe toutefois du doigt qu’il n’a gagné aucune des deux dernières rencontres :

“Je me demande s’il {Michael Jordan, ndlr} l’a fait dans des victoires et pas des défaites. Pour moi, c’est secondaire. J’espère que nous pourrons regarder en arrière et penser que c’est une bonne performance. Aujourd’hui, je ne peux pas me satisfaire d’une défaite.” – Victor Wembanyama

L’état d’esprit est exemplaire, car il a raison. Il a évidemment raison de souligner le caractère secondaire des statistiques dans le genre. S’il avait délivré une passe de plus face aux Kings, la soirée aurait-elle été dix fois plus belle ? Un contre de moins face aux Lakers aurait-il tout changé ? Pour lui, pas vraiment. Sauf si on parle de l’action cruciale pour l’emporter.

En NBA, les statistiques sont un formidable outil qui permet à nous fans, journalistes ou amateurs de basket de comparer. On aime quantifier une performance de façon plus tangible, ou manger des tableaux entiers sur Basketball Reference pour les plus fous de chiffres. Mais Wembanyama ne cesse de le répéter en interview depuis plusieurs années : si le basket ne doit avoirqu’une seule finalité, c’est gagner.

🏀 #NBA
🗨️ Spurs – Wembanyama après son “five by five” historique : “Pour moi, c’est secondaire” #beINSPORTS #Interview #NBAextra pic.twitter.com/MWvteKoTy3

— NBAextra (@NBAextra) February 24, 2024

Le mois de février arrive à son terme, mais compte un jour supplémentaire en cette année bissextile. Et ça tombe bien, un magnifique Spurs – OKC est prévu au menu, avec un alléchant duel entre Victor Wembanyama et Chet Holmgren. Rencontrer son ex-rival pour le titre de Rookie de l’année (la course n’en est plus vraiment une) fait toujours autant saliver le Français. Pendant 32 minutes, Wemby propose un show cinq étoiles à tous les fans présents au Frost Bank Center. Du trois-points (5/7), du rebond, de la passe, du contre mais surtout… une action humiliante au possible sur Holmgren.

Alors que l’Américain tente de jouer le 1 contre 1 dans le money-time, Wemby se détend de tout son long pour le contrer. Résultat, Holmgren termine les deux fesses par terre, regard levé vers celui qui l’a contraint à s’asseoir. Les Spurs, derniers de l’ouest, font même tomber une des meilleures équipes de la ligue. La joie de Victor Wembanyama est démonstrative, à la hauteur de celle de mon chat. Oui, le chat n’aime pas le Chet.

😱😱 Wemby HUMILIE Chet Holmgren sur ce contre !!!! #Action #NBAextra #NBA pic.twitter.com/kPlTMrAE3s

— NBAextra (@NBAextra) March 1, 2024

Ces 29 jours de février constituent peut-être, sans vouloir trop s’avancer, l’un des plus gros mois d’un rookie dans l’histoire de la NBA moderne. S’il marque moins qu’en janvier, il affiche une propreté folle et est encore plus dominant en défense. Wembanyama a disputé 12 matchs avec des moyennes de 21,3 points (47% au tir, 41% de loin, 83% sur la ligne), 10,7 rebonds, 4,5 passes, 2 interceptions et 3,9 contres.

Dans le lot, un triple-double avec les contres et un five-by-five. Certes, beaucoup de défaites. Mais avec toujours moins de 30 minutes par soir (!), comment lui demander plus ? Qu’elle soit statistique ou visuelle, c’est une anomalie. Mais une anomalie XXXL.

Avec 47 contres en février, Victor en compte d’ailleurs plus que… 5 équipes NBA. On parle bien d’équipes complètes. Les Hornets (45), Kings (45), Clippers (37), Heat (35) ou Blazers (34) font moins bien. Mon chat s’étouffe dans ses croquettes.

Victor Wembanyama had more blocks than 5 teams in February:

Wembanyama 47
Hornets 45
Wizards 43
Clippers 37
Heat 34
Blazers 34

— Underdog NBA (@Underdog__NBA) March 1, 2024

Chapitre 3 : Tous les athlètes n’habitent pas la ligue de la même façon

La fin de la saison de Victor Wembanyama est un doux mélange entre gestion des petites douleurs à la cheville et rythme de croisière.

D’abord, Wemby commence à toute berzingue en enregistrant la performance la plus propre de sa carrière face aux Pacers. Au-delà des 31 points, 12 rebonds, 6 passes et 6 contres – qui semblent désormais habituels mais relèvent toujours de l’exceptionnel – il est à 11/17 au tir, avec un seul petit trois-point manqué sur 4 tentatives. Rien de mieux que le troisième mois de l’année pour le martien, qui empoche la victoire par la même occasion. Les mots ne servent pas à grand-chose, les images suffisent.

Mais là où il impressionne, c’est dans sa capacité à remettre ça presque immédiatement. Deux matchs manqués à cause d’une cheville douloureuse, un retour en douceur en apparaissant emprunté physiquement et… un nouveau carnage quand les Nets viennent payer une visite au Frost Bank Center.

Il y a des soirs comme ça où on ne peut que s’asseoir et le regarder sans rien comprendre à ce qu’il se passe. Encore un classique à 33 points, 15 rebonds, 7 passes et 7 contres, la victoire en prime. Au passage, il devient le troisième joueur de l’histoire de la NBA avec cette ligne de stat, mais ça ne surprend plus personne. La rédaction de TrashTalk est estomaquée, mon chat aussi.

Watching Victor Wembanyama against the Nets pic.twitter.com/vdDQPWnFMA

— NBA Memes (@NBAMemes) March 18, 2024

Au milieu de tout ça, les Spurs commencent enfin à gagner. Derrière sa star, le groupe de Gregg Popovich semble avoir trouvé son équilibre. Devin Vassell fait parfaitement le travail de co-star, pouvant prendre feu offensivement et à trois-points quand le V est plus concentré sur la défense.

En cause également, une défense qui a haussé d’un ton dans le sillage du Français. Jeremy Sochan, vrai pitbull polyvalent dans la raquette ou sur le périmètre, n’est pas en reste. Au mois de mars, les Spurs ont un rating défensif de 106 quand Wembanyama est sur le terrain, ce qui serait le plus haut de toute la ligue. Sans lui, c’est tout l’inverse.

“Je pense que c’est l’un des plus forts de la ligue dans la protection d’arceau. Il faut savoir où il se trouve à tout moment – sa longueur, son timing, sa capacité à couvrir beaucoup de terrain rapidement. Et avec le temps, il va devenir de plus en plus fort (…) Vous voyez les séquences qu’il fait. Ça ne s’apprend pas. C’est de l’instinct.” – Tom Thibodeau, coach des New York Knicks

Et alors qu’il envoie presque 4,5 contres par match depuis le All-Star Game, des arguments qui feraient de lui le… défenseur de l’année commencent à émerger. Wemby DPOY ? Jamais un rookie ne l’a été, mais le simple fait de se retrouver dans la conversation reste un sacré accomplissement.

Certes, de l’autre côté du terrain, les pertes de balles restent son péché mignon tandis que les pourcentages au tir varient un peu plus. Mais à trois-points, la différence est flagrante selon le type de shoot. Très mauvais en catch-and-shoot, le Français brille en sortie de dribble. Et parmi les joueurs ayant tenté au moins une cinquantaine de stepbacks pendant la saison, Victor Wembanyama est même… le plus efficace, devant des arrières d’un mètre 90.

Highest Step Back 3PT% This Season:

46.2% — Victor Wembanyama
45.3% — Darius Garland
44.7% — Donovan Mitchell pic.twitter.com/VdvVd3WFZL

— StatMamba (@StatMamba) April 13, 2024

Le 29 mars, Victor Wembanyama envoie le chef d’œuvre de sa jeune carrière. Les commentaires de Tom Thibodeau cités un peu plus haut viennent de ce jour-là, quand le rookie s’est mis sur son plus beau 31. Au mois de novembre, il avait connu une soirée très compliquée au Madison Square Garden, et compte bien se racheter à domicile. Mais en face, Jalen Brunson est sur une autre planète. Le meneur des Knicks envoie 38 points en deuxième mi-temps (60 au total sur le match) dans ce qui devait être une promenade New-yorkaise.

C’était sans compter sur le natif du Chesnay, qui s’est s’en doute réjoui quand il a vu un adversaire visiter la galaxie à ses côtés. Au-delà d’un festival offensif (4/9 de loin, 13 points dans le quatrième quart) Wemby gobe rebond sur rebond – 20 au total – donc cinq offensifs malgré Mitchell Robinson et Isaiah Hartenstein. Et la soirée ne serait pas belle sans un Français clutch au possible.

Alors que les Spurs mènent d’un petit point à une minute de la fin des prolongations, Victor Wembanyama envoie une ogive en sortie de dribble. Ficelle à trois-points, la barre des 40 unités atteinte et la victoire dans la poche dans la foulée. L’opulence statistique n’a d’égale que la taille du sourire sur le visage des fans de San Antonio. Le lendemain, je suis obligé d’emmener mon chat chez le vétérinaire. On lui diagnostique une overdose de croquettes, je vais devoir réduire la cadence.

WEMBY CLUTCH 3 FOR 40 ‼️

A new career high for the rookie 👏

Knicks-Spurs | Live on the NBA App
📲 https://t.co/XQAjh3HuFW pic.twitter.com/iISuhLhbNj

— NBA (@NBA) March 30, 2024

Dans le même temps, ses progrès dans les caviars distribués (7 contres les Knicks, 5 de moyenne depuis 15 matchs) ne passent pas inaperçus. En plus de sa capacité à contrer, on commence à se demander sérieusement s’il ne va pas réussir l’exploit de réaliser un jour un quadruple-double. Au moins dix unités statistiques dans quatre catégories, ce n’est pas arrivé plus de 4 fois depuis 1974. Victor semble être le mieux armé pour s’en rapprocher, et c’est exactement ce qu’il fait… trois jours plus tard.

En déplacement chez les champions en titre, et pas effrayé par l’altitude, Wembanyama pose 23 points, 15 rebonds, 8 passes et 9 contres. S’il passe à deux offrandes et 1 contre de marquer les livres d’histoire, il se console en bâchant Nikola Jokic un bon paquet de fois sur la rencontre. Il s’affirme déjà comme l’un des joueurs les plus polyvalents de toute la NBA. Monsieur peut tout faire, et en grande quantité. Je suis obligé de priver mon chat de croquettes pour le bien de son estomac.

C’est face à ces mêmes champions en titre que Wembanyama clôture sa saison à la mi-avril. Il ne pouvait évidemment pas baisser le rideau sans frapper un grand coup, et marquer 34 points dont 17 sur une séquences de 3 minutes.

Dans un effectif sans Devin Vassell, Jeremy Sochan ou Keldon Johnson, les Spurs viennent quand même gâcher la fête à Denver. Les Texans l’emportent 121 à 120 et privent les Nuggets de terminer la saison à la première place de la Conférence Ouest.

Les 17 points (!!!!) de Victor Wembanyama en 3 MINUTES 😭 pic.twitter.com/TbkAmqVhBu

— TrashTalk (@TrashTalk_fr) April 13, 2024

San Antonio gagne 11 de ses 23 dernières rencontres, porté par son rookie qui ressemble à un vétéran aguerri. Mais ces résultats ne font même pas les affaires de la direction, puisqu’ils gagnent presque trop de matchs dans une perspective de lottery. Les Hornets et les Blazers font un meilleur job à perdre dans les règles de l’art, et sont désormais mieux positionnés pour récupérer un bon choix pour la Draft 2024. Mais Victor n’en a évidemment rien à cirer. Le V de victoire et le V de Victor, ça va ensemble.

“C’est quelque chose dont je ne parle pas. Je n’ai pas envie d’en parler, parce que je n’ai pas envie d’en entendre parler […] Je suis sur le terrain pour gagner, rien d’autre.” – Victor Wembanyama

Maintenant, il faut se souvenir du 5 janvier, quand il avait déclaré que chaque match serait un “statement”. Osé à l’époque du haut de ses 20 ans, mais on ne peut pas dire qu’il n’a pas assumé. En plus d’avoir été ultra dominant pendant trois mois et demi, le niveau affiché par Victor Wembanyama a semblé en constant progrès. Sur les sept dernières rencontres de régulière : 28 points, 13,3 rebonds, 6,6 passes, 1,3 interception et 4,6 contres. Je ne peux pas contenir mon rire nerveux en écrivant cette ligne, c’est quoi ce bazar.

Chapitre 4 : Au revoir là-haut

Mais toutes les bonnes choses ont une fin, et le temps de la fin de la saison arrive. Mais pour lui dire au revoir, il va falloir sacrément lever la tête. Mon chat tire la tronche depuis la mi-avril, je pense de plus en plus à lui acheter un maillot. Wembanya-matou, numéro 1 sur un maillot noir. Idée pas totalement convaincante encore.

Mais ce sont d’abord aux fans de San Antonio à qui il va manquer. Car Victor apparaît toujours très enclin à manifester sa joie, signer des maillots et prendre du temps pour les enfants présents au bord du terrain. Lors de chaque victoire à domicile ou presque, il s’adresse à la foule avec enthousiasme. Et ça se voit qu’il adore ça.

“I missed this sh*t. I love it!”

Spurs rookie Victor Wembanyama is happy to play in front of the home crowd for the first time since early February 🗣️pic.twitter.com/bGEZ7JOVeV

— ClutchPoints (@ClutchPoints) March 1, 2024

A l’heure de faire un bilan, difficile de trouver d’autres choses à ajouter. On se doit toutefois d’insister sur la courbe de progression qu’on a pu observer depuis le mois d’octobre, avec le sentiment que quelque chose s’est débloqué début janvier. Tout était plus simple, plus fluide, et Tre Jones jamais loin de tout ça.

Au bout d’une vingtaine de rencontres, Wemby a pu être critiqué pour son adresse de 43% au tir et 25% de loin. Sur les 50 matchs suivants, il affiche 48% au global dont 35% derrière l’arc, le tout sur des volumes qui augmentent. Sans oublier qu’à la passe, loin d’apparaître comme l’une de ses qualités principales, il n’a cessé de surprendre. 2,6 caviars en octobre-novembre, 3,3 en janvier et 5,4 en mars-avril. Donc si nos calculs sont bons… 10-11 l’an prochain à la même période ?

On pourrait aussi avoir un mot sur son effet dissuasif dans la raquette. Personne n’ose s’approcher de trop près, ou alors termine comme les Raptors, qui ont trop tenté de le tester. Une séquence à Memphis en fin de saison illustre à merveille le petit doute qui s’immisce dans les têtes adverses quand ils aperçoivent le Français. Ce n’est pas pour rien s’il a – déjà – été désigné meilleur défenseur de la ligue par ses pairs.

Victor Wembanyama STOPPED Grizzlies’ fast break 3v1 just by standing 😳pic.twitter.com/bHwcj23QV1

— BasketNews (@BasketNews_com) April 10, 2024

Je sais pas si on se rend compte.

En un an.

Une saison. https://t.co/cVayMuASZM

— TrashTalk (@TrashTalk_fr) April 22, 2024

Ce qui est également remarquable défensivement, c’est sa capacité à contrer sans faire de fautes. 254 contres pour 153 fautes en saison régulière, et rares ont été les rencontres dans lesquelles il a dû rejoindre le banc prématurément pour cette raison. Wembanyama se distingue aussi en réussissant souvent à garder le ballon après un contre, plutôt que de l’envoyer valser dans les tribunes. Tout ça mérite bien 23 minutes pour apprécier la totalité de crêpes envoyées cette année. Dans cet excellent montage du compte X @VicWembanyamaFR, c’est même Nikola Jokic qui apparaît le plus de fois (8).

TOUS LES BLOCKS DE WEMBY
CETTE SAISON

DE 1 à 254 😤

ENJOY pic.twitter.com/0iV4SWYFuN

— Wemby France 👽🇫🇷 (@VicWembanyamaFR) April 20, 2024

Des statistiques folles, il y en a dans tous les sens, mais c’est loin d’être le plus important. Gregg Popovich est d’ailleurs de cet avis. Quand Benjamin Moubèche lui demande si le five-by-five du rookie a une importance particulière, il rétorque dans son style bien à lui : “Tu ne me connais pas très bien. Je me fiche de ses stats, tant qu’il joue bien et intelligemment.” Ça tombe bien, c’est dans les habitudes du bonhomme.

Si on peut insister sur un dernier point, c’est sa relative bonne santé physique au fil de la saison. Victor Wembanyama a disputé 71 matchs sur 82, et c’est en soi une énorme satisfaction. Le pari de Popovich de jouer plus en jouant moins plutôt que de jouer moins en jouant plus a payé.

Au final, on se retrouve avec une flopée d’actions légendaires, de lignes de stats anormales, des moments de communion avec le public, des tweets insensés à 3h38 du matin, des compliments dans tous les sens et un chat qui n’arrête pas de ronronner. Si on regarde dans le rétro, il devrait terminer son exercice rookie avec le trophée du ROY, un podium pour le titre de DPOY, et une apparition dans une équipe All-Defense ? Sacré rookie.

“Le fait de mener les rookies dans la plupart des catégories statistiques et de mener la ligue en contres. Je suis vraiment fier de ça.” – Victor Wembanyama

La saison rookie de Victor Wembanyama :

71 matchs joués sur 82
29,7 minutes de moyenne

21,4 points
10,6 rebonds
3,9 passes
3,6 contres
1,2 interceptions

Meilleur contreur de toute la NBA.
3 fois élu rookie du mois.

Extraordinaire.
Merci pour cette aventure.
On s’en… pic.twitter.com/fxMmKlXru2

— TrashTalk (@TrashTalk_fr) April 13, 2024

Conclusion : La Vie devant soi

Le titre de Romain Gary, pour rester dans le thème, est celui qui doit conclure le propos. Oui, Wembanyama a fait tout ça. Mais oui, Wembanyama est né en 2004 et n’a que 20 ans. Alors on peut être tenté de penser à la future rivalité avec Chet Holmgren, aux futures séries de Playoffs ou à des nombreuses récompenses ou exploits en tout genre. Mais personne n’est pressé par le temps. L’effet Wembanyama, c’est déjà ces milliers de fans qui se lèvent pour l’acclamer dans les salles adverses, ces légendes de la ligue qui lui envoient des compliments à la pelle, ou son maillot parmi les plus vendus de toute la NBA.

Certes, sa saison n’est en aucun cas proche de la perfection et tous ses défauts ne vont pas disparaître tout de suite. Mais quand on prend un peu de recul et qu’on regarde les éléments qui composent ce récapitulatif, on se dit quand même qu’on touche à quelque chose de spécial. “Je suis à 15% de mes capacités” ose-t-il déclarer à la fin de la saison. Impossible d’imaginer ce qu’il peut devenir, même si des idées complètement folles nous passent par la tête. Vu le rythme, on risque de rapidement devoir passer une licence en mathématiques pour tout comprendre.

L’heure est d’abord au repos. Dans quelques mois, Wemby découvrira les Jeux Olympiques avec l’Équipe de France, avec l’occasion de briller à domicile. Et l’an prochain, l’objectif de gagner plus de rencontres est déjà affiché. Mais c’est un problème pour plus tard.

“Je ne veux surtout pas que la prochaine saison se termine aussi tôt. Je veux continuer et viser les playoffs.” – Victor Wembanyama

Gros cœur à tous les passionnés qui nous ont accompagnés pour suivre d’encore mieux ou d’encore plus près  sa saison rookie. Le génial Benjamin Moubèche, les nombreux comptes X parmi lesquels @SASpursFr et @VicWembanyamaFR, ainsi que tous les rédacteurs de TrashTalk qui ont couvert le phénomène depuis plusieurs années. Merci aussi à Tigrou, fidèle félin amateur de basket.

Et merci à l’Alien, pour toutes ces nuits à nous maintenir éveillés comme des fous. Continue ton chemin, on est juste là pour t’accompagner. Victor Wembanyama n’est pas parti pour avoir un buzz éclair, mais bien pour tracer sa route vers l’infini, et au-delà.

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