Le billet d’Alex : à mort l’arbitre ?

Le 30 janv. 2023 à 15:07 par Alexandre Martin

Tatum faute sur LeBron arbitre 2
Source : YouTube / Chris Smoove

Pour beaucoup de fans, voir les Lakers se faire enfumer par l’arbitrage n’est qu’un juste retour des choses, de l’histoire. Encore plus face aux Celtics, lors d’une semaine que la NBA a baptisée la “Rivals Week” ! Pour beaucoup de fans, les défaites s’expliquent désormais en premier lieu par des erreurs des hommes et femmes en gris… Au-delà de ce supportérisme exacerbé qu’on peut qualifier de clubbisme, n’y a-t-il pas un sujet à approfondir à la vue de toutes ces réactions concernant les décisions de l’arbitre ? Spoiler : il y a un gros sujet. 

“Il y avait faute sur LeBron.

– Oui, mais de toute façon, il y avait marcher au départ.

– Tu connais la règle du gather step ? LeBron doit avoir deux lancers. C’est scandaleux que l’arbitre ne siffle pas. Il nous prive d’une victoire.

– Les Lakers n’ont pas perdu sur cette action mais par la suite, en prolongation.

– Ils auraient dû gagner dans le temps réglementaire !

– Il fallait assurer avant les dernières secondes…”

Ça peut continuer ainsi pendant des heures et ça a été le cas pendant une bonne partie de la journée d’hier. Un dimanche marqué par une erreur d’arbitrage qui empêche probablement les Lakers de s’assurer une victoire à Boston dans un match de régulière important pour les Angelinos, puisqu’ils luttent dans l’espoir de gratter un strapontin pour le play-in. Il est bien précisé que cette erreur d’arbitrage empêche “probablement” les Lakers de gagner. Car encore aurait-il fallu que LeBron James rentre au moins un de ses deux lancers. Les probabilités nous disent que le King (77% de réussite dans l’exercice cette saison) en aurait mis au moins un des deux mais sait-on jamais. Les arbitres auraient peut-être trouvé un autre moyen de faire perdre les Lakers.

Non, je déconne, ne tenez pas compte de cette dernière phrase. C’est de la pure provocation. 

On pourrait refaire le match, dire que cette erreur d’arbitrage est flagrante et pénalisante pour les Lakers mais qu’on a vite tendance à oublier qu’un match “se joue sur 48 minutes”. On pourrait revenir sur le fait qu’à 14 secondes de la fin de ce match, après avoir donné l’avantage aux siens au rebond offensif puis pris un rebond défensif crucial, Patrick Beverley a été envoyé sur la ligne des lancers. Il avait l’occasion de mettre les Lakers devant de 4 points mais il n’a rentré qu’une seule de ses deux tentatives. Sur l’action suivante, Horford a raté un tir à 3-points mais le rebond (offensif) fut pris par un Jaylen Brown trop libre de ses mouvements et qui ne se fit pas prier pour marquer, avec en prime une faute de… Beverley. Brown planta son lancer supplémentaire. Avec deux lancers rentrés par Beverley et un rebond mieux protégé, il y aurait pu y avoir 106-102, mais c’était bien 105 partout que la table de marque affichait avec 4 secondes sur l’horloge.

Il n’en reste pas moins que LeBron James a subi une faute, non sifflée, sur la dernière action du temps réglementaire. C’est indéniable. Les arbitres se sont trompés et ont certainement privé les Lakers d’une victoire. Le fait que les Lakers auraient pu mieux gérer leur fin de match en évitant quelques erreurs et le fait qu’ils ont subi une erreur de l’arbitre sont deux sujets différents. D’un côté, il s’agit pour les joueurs et l’équipe de mieux jouer. De l’autre, il s’agit pour les arbitres de ne pas rater un coup de sifflet qui change le sort du match. Car si on ne retient souvent que les fautes qui, selon nous, font tout basculer en fin de rencontre, c’est parce qu’elles font effectivement tout basculer. Dans l’exemple du jour, qu’ils aient bien géré ou pas certaines situations, les Lakers avaient la balle à 105 partout et l’occasion de gagner à Boston. Une erreur, humaine, les en a empêchés. 

C’est là qu’on en arrive à la partie la plus incompréhensible et dure à avaler de toutes ces situations où l’arbitrage est au cœur de la polémique. Aujourd’hui, un match de Basketball, surtout en NBA, est filmé par beaucoup de caméras. Par conséquent, le système arbitral  de la NBA a évolué au fil des années. Il prévoit de nombreux cas dans lesquels les arbitres peuvent consulter la vidéo pour affiner leur décision voire la changer. Ces cas sont référencés et expliqués dans un document officiel (ICI, c’est la règle n°13). On ne va pas tout détailler dans ces lignes mais il est beaucoup question d’horloge, de temps, de vérifier si un panier est à deux ou trois points, de vérifier à qui est la possession, de constater (ou non) une faute flagrante, etc… À aucun moment il n’est question de revoir les images d’une action litigieuse en fin de match pour s’assurer de la pertinence du choix des arbitres d’avoir sifflé ou pas. 

Depuis quelques saisons, la règle du challenge a été intégrée (règle n°14 du même document officiel). Elle apporte un outil tactique supplémentaire aux coachs et leur permet de mettre les arbitres devant leurs responsabilités et parfois de réparer une erreur. Mais pour que cela fonctionne il faut que l’équipe ait encore son challenge (un seul par match) et il faut que l’arbitre ait sifflé. Dans les dernières minutes, le challenge est souvent déjà utilisé et, dans le cas précis de la faute sur LeBron, Darvin Ham n’aurait rien pu faire de toute façon vu que les arbitres n’avaient pas sifflé. Il n’y avait rien à “challenger”. En revanche, les replays de l’action circulaient en boucle, notamment grâce à Patrick Beverley.

Donc, pour résumer, tout le monde peut revoir n’importe quelle action litigieuse et en tirer des conclusions, sauf… les arbitres !! 

Ils se retrouvent bloqués par le système. Le trio arbitral peut passer de longues minutes devant la vidéo pour quelques dixièmes manquant au chrono de match mais il ne peut pas s’assurer qu’un non-call au buzzer est juste. Un comble. En plus, ces mêmes arbitres vont se faire afficher dans les fameux “Last Two Minutes Reports”. Celui du match entre Celtics et Lakers de samedi (ICI) indique bien que la décision des arbitres sur ce drive de LeBron James est incorrecte. Voilà, c’est tout. Les Lakers vont évidemment avoir du mal à se sentir compensés par cette reconnaissance d’erreur. Une erreur humaine qu’on peut revoir mais qu’on ne peut pas corriger parce que les personnes habilitées à effectuer cette correction ne peuvent pas utiliser tous les outils à disposition. Frustrant, non ? 

L’idée n’est pas de vouloir revoir toutes les actions d’un match. Le Basketball est déjà suffisamment haché comme ça. Pour autant, on peut réfléchir à des compromis afin d’améliorer la situation des arbitres et le ressenti des fans envers eux ou elles. Comment pourrait-on avoir un arbitrage le plus propre possible, en utilisant la vidéo, tout en gardant un rythme et une fluidité propices à un bon spectacle ? Serait-il envisageable de donner la possibilité aux arbitres de revoir une action décisive en fin de match ? On limite à celles qui se déroulent au buzzer ou aux 24 dernières secondes. Pourquoi n’essaierait-on pas ? Cela pourrait donner un bel outil aux arbitres pour éviter de faire basculer par erreur un match sur la dernière action. Bien sûr, ça ne va pas régler le problème des éventuelles erreurs précédentes. Il y en a dans tous les matchs de Basketball. Ils en sont même remplis tant ce sport va vite et propose de multiples situations où même 10 ralentis ne permettent pas de trancher avec certitudes. Mais s’il est possible de trancher et si cela scelle le sort d’un match, pourquoi ne pas le faire ? D’autant plus que le cas se présente régulièrement…

On aime les fins de matchs serrées. On les adore. Force est de reconnaître qu’elles sont régulièrement entachées d’un doute sur une décision arbitrale. La solution parfaite n’existe pas mais des évolutions semblent nécessaires afin de donner aux juges du jeu tous les moyens de faire leur boulot et d’en corriger les erreurs quand il y en a. Ce serait le premier pas vers une belle réconciliation entre les arbitres, les joueurs et les fans.