[Légendes] Une génération nous quitte (Part 1)

Le 19 juil. 2013 à 16:10 par Alexandre Martin

Début Juin, en marge de l’actualité des playoffs, deux grands joueurs ont annoncé leurs retraites. Grant Hill d’abord, puis Jason Kidd, tous deux âgés de 40 ans, tous deux draftés en 1994 et co-rookie de l’année en 1995. Ils ont décidé de ranger définitivement les sneakers au placard. Ces départs nous rappellent qu’actuellement, toute une génération de joueurs mythiques est en train de nous quitter, de quitter les parquets NBA.

Je veux parler ici de cette génération de joueurs draftés dans les années 90, qui ont été au sommet pendant toutes les années 2000 et qui commencent doucement à décliner depuis 2010. De véritables monstres en matière de talent, de professionnalisme, de travail, de leadership et de longévité. Des monstres du basketball que la NBA n’est pas près d’oublier. Je dois reconnaître qu’au moment d’écrire les noms de ces joueurs monuments qu’on ne verra bientôt plus en tenue, un véritable sentiment nostalgique m’envahit. Et à chaque nom auquel je pense, je me dis : «Ah mais oui, lui aussi il va partir. Mais comment on va faire ? C’est pas possible…»
Steve Nash (39 ans, 17 saisons), Ray Allen (38 ans demain, 17 saisons), Kevin Garnett (37 ans, 18 saisons), Tim Duncan (37 ans, 16 saisons), Kobe Bryant (35 ans, 17 saisons), Paul Pierce (35 ans, 15 saisons) et Dirk Nowitzki (35 ans, 15 saisons) ne vont malheureusement pas tarder à imiter le quarantenaire Jason Kidd (40 ans, 19 saisons) et à prendre des retraites bien méritées. Quatre «Guards» et quatre «Forwards» de légende. D’ici environ deux ans, trois peut-être, tous ces joueurs auront très probablement raccroché. Enfin pour ce qui est de Nash, Duncan, Allen et Garnett, c’est sûr. Pour Paul Pierce, Kobe Bryant et Dirk Nowitzki qui n’ont encore «que» 35 ans, ça dépendra de leur santé aussi bien physique que mentale.

Nous ne verrons plus leurs grandes carcasses se mouvoir sur les parquets NBA. C’est triste mais le basket, comme tous les sports, est un éternel renouvellement. La roue tourne, d’autres joueurs vont reprendre le flambeau. Certains ont même d’ailleurs déjà bien commencé mais ils ne pourront pas faire oublier les fabuleuses carrières, les multiples exploits réalisés par ces légendes du basket. Rendez vous compte, le 5 majeur de cette génération pourrait être : Kidd, Bryant, Pierce, Garnett, Duncan avec sur le banc, quelques très bons «remplaçants» tels que Nash, Allen, Nowitzki, auxquels pourraient se joindre Rasheed Wallace, Grant Hill, Vince Carter ou Allen Iverson qui ont tous les trois marqué leur époque. Même si, pour des raisons de titres, de longévité, de mental ou tout simplement de talent pur, ils ne rentrent pas dans la même catégorie que les «8 fantastiques» que sont Kidd, Nash, Kobe, Allen, Pierce, Nowitzki, Duncan et Garnett.

Ils sont de toute évidence tous les 8 de futurs Hall of Famer. Ils ont dominé la NBA depuis la fin des années 90 jusqu’en 2010. Certains d’entre eux comme Kobe Bryant et Tim Duncan sont encore très dominateurs malgré le poids des ans. D’autres, comme Ray Allen, Paul Pierce, Dirk Nowitzki et Kevin Garnett éprouvent de plus en plus de difficultés mais sont encore des joueurs clés dans leurs effectifs respectifs. Steve Nash, lui, ne va vraiment pas tarder à rendre sa tunique de joueur et rejoindre son copain Kidd dans le monde des «Staff» en tant Directeur Technique National pour la Team Canada.
A presque 40 ans, le double MVP (2005 et 2006) ne peut plus diriger le jeu comme il nous a habitué à le faire à Dallas puis à Phoenix car son physique ne suit plus. Nash est un meneur d’attaque, un meneur qui aime quand ça joue vite, quand il a la balle en main, qu’il doit faire des choix et que ses coéquipiers se mettent à son diapason comme pendant ses années passées à Phoenix. La saison dernière, non seulement Nash a eu des problèmes de blessures à répétition mais il a du composer avec Kobe Bryant qui est, lui aussi, très habitué à avoir la balle en main très souvent. Il faut dire que le Black Mamba a fait toute sa carrière aux côtés de meneurs de seconde zone comme Smush Parker ou Derek Fisher, des meneurs qui n’en avaient que le titre mais ni les talent ou les épaules. Il reste encore deux saisons dans le contrat de Steve Nash aux Lakers. Va-t-il aller jusqu’au bout ? Ou va-t-il prendre sa retraite dans un an après avoir tenté une ultime fois d’aller chercher cette bague qui manque tant à son palmarès très fourni ? Il aura alors plus de 40 ans et, bague ou non, il pourrait partir avec le sentiment du devoir accompli comme l’a fait J-Kidd il y a quelques semaines.

En tous cas, Kidd et Nash auront marqué la NBA et plus spécifiquement le poste de meneur. Nous parlons ici du deuxième (Kidd avec 12 091) et du quatrième (Nash avec 10 249) meilleurs passeurs de tous les temps… Rien que cette phrase suffit à classer ces deux-là parmi les légendes du jeu. Nous parlons ici de meneurs qui ont révolutionné le jeu de toutes les équipes pour lesquelles ils ont œuvré. Deux meneurs qui resteront des références pour les jeunes qui arrivent ou arriveront bientôt en NBA tant ils ont dominé grâce à leur intelligence de jeu, leur sens de la passe, du shoot (surtout pour Nash) et de l’interception (surtout pour Kidd). Deux meneurs-patrons à l’ancienne comme il en existe de moins en moins de nos jours…
A Los Angeles, Steve Nash pourra compter sur Kobe Bryant pour tenter de remporter un titre. Le fils spirituel de Jordan va revenir en cours de saison prochaine après s’être tristement blessé au talon d’Achille juste avant les derniers playoffs. Bryant est en quête d’une sixième bague. Bryant veut et peut dépasser son idole au classement des meilleurs marqueurs de l’histoire. Il en est à 31617 points et Jordan s’est arrêté à 32 292. Il est comme ça Kobe, il aime se fixer des objectifs très hauts et il n’accepte pas de ne pas les atteindre. Le prototype du compétiteur au mental d’acier, à la détermination sans faille. Quoiqu’il arrive désormais. Qu’il revienne très fort ou non. Qu’il aille chercher un 6ème titre ou non. Qu’il pique quelques records à Michael Jordan (ou pas). Kobe Bryant restera comme le deuxième meilleur arrière scoreur de l’histoire, celui qui s’est le plus approché du maître : aussi génial et gracieux en attaque que dur et motivé en défense. Car si beaucoup d’aigris critiquent régulièrement le numéro 24 des Lakers, la régularité de ces reproches n’a d’égal que la régularité impressionnante des performances du Black Mamba. En 17 saisons dans la ligue, Bryant tourne grosso modo en 25/5/5 (point, passes, rebonds) le tout à 46% au tir dont 34% à 3 points. Personnellement, j’ai vu des «croqueurs» bien pire que celui-là ! On aime ou on n’aime pas Kobe Bryant. Il est arrogant, il est égoïste, il a un melon plus gros que celui de Carmelo Anthony et John Wall réunis mais il assume cet aspect de sa personnalité, il en joue même parfois et il assure quelque soit le niveau de pression. 5 bagues, 2 MVP des Finales, 15 fois All Star, des coups de chaud hallucinants avec 26 fois plus de 50 points et 5 fois plus de 60 points dont un match à 81 points qui est entré dans l’histoire, des “buzzer-beater” en pagaille… Respect à toi Kobe.

Dans le style arrière scoreur mais avec un profil très différent de Bryant, on ne présente plus Ray Allen. RayRay sévit en NBA depuis 17 ans et va avoir 38 ans demain. Ce sera alors une bonne occasion de ressortir quelques vieilles vidéos de ses débuts en NBA. L’occasion de constater, pour ceux qui ne l’ont pas connu à l’époque, que Ray Allen a toujours été un scoreur complet qui, quand il portait le maillot des Bucks ou celui des Sonics, était capable de marquer de toutes les manières – en drive, par un floater, un gros dunk, après un step back ou en sortie de dribble – et pas seulement derrière l’arc comme c’est de plus en plus le cas aujourd’hui. Celui qu’on surnomme «Jesus» ou «Hollywood» est tout de même, à ce jour, le 21ème meilleur marqueur de l’histoire NBA avec 23 804 points en carrière. C’est plus que Tim Duncan, Charles Barkley, Vince Carter ou Clyde Drexler ! Deux raisons à cela : une éthique de travail sans faille qui lui a permis d’entretenir son niveau au cours de 17 saisons et une qualité de shoot hors du commun.
C’est simple, Ray Allen n’est pas seulement le shooteur à 3points le plus prolifique de l’histoire (2857 tirs primés réussis en carrière) mais il possède tout simplement le geste de tir le plus pur de l’histoire. Un modèle d’équilibre, d’alignement des épaules, de coordination entre bas et haut du corps et une finition «poignet cassé» absolument parfaite. Afin de progresser au tir, bon nombre de joueurs devraient juste commencer par regarder des heures et des heures de vidéos de RayRay en train de shooter. Ensuite, il ne reste plus qu’à shooter pendant des heures et des heures… tous les jours…
D’ailleurs, cette qualité de shoot vaut de l’or, elle permet à Allen de continuer de peser alors que son physique le lâche petit à petit. Il nous l’a encore prouvé lors des dernières Finales pendant lesquelles RayRay a shooté à 54,5% derrière l’arc (12/22) et il a notamment inscrit cet énorme 3 points – en step back, les jambes en vrac mais les épaules toujours parfaitement en place – qui a permis au Heat d’arracher la prolongation dans ce match 6 d’une intensité incroyable. A presque 38 ans, il reste un assassin capable de surgir avec le shoot qui tue. Si ça ce n’est pas le signe d’un immense joueur…

Jason Kidd, Steve Nash, Kobe Bryant et Ray Allen : quatre «Guards» qui auront marqué non seulement toute une génération mais aussi l’histoire de la NBA. Quatre arrières que nous n’allons, petit à petit, plus voir sur les parquets de la grande ligue. Quatre arrières qui vont manquer. Les triples double et la magie de J-Kidd, les passes lumineuses de Steve Nash, la “clutchitude” de Kobe, les mimiques de Ray Allen.. Oh que tout ça va nous manquer. C’est comme ça depuis toujours : la roue tourne, les joueurs se succèdent, des légendes apparaissent et disparaissent mais la NBA ne s’arrête jamais.

A demain pour parler des Quatre «Forwards» : Pierce, Garnett, Nowitzki et Duncan.