Basket aux Jeux Olympiques – Melbourne 1956 : 4 à la suite pour les Américains, ramenez Julien Lepers
Le 18 mars 2024 à 11:25 par David Carroz
On prend les mêmes et on recommence ? Certes, les joueurs ont bougé depuis les Jeux Olympiques de 1952 à Helsinki, mais l’édition du tournoi de basket des JO 1956 à Melbourne ressemble beaucoup à l’édition précédente. Du moins dans le contexte international qui l’entoure et le podium qui la conclut.
Comme en 1952, le basketball ne concerne toujours que les hommes selon le CIO. Vous êtes bien gentilles mesdames, mais on s’en cogne de vous. Voilà le message même si les Soviétiques continuent de pousser pour que cela bouge. Il faut dire qu’avec quatre titres européens consécutifs depuis 1950, ils pensent que leurs filles ont de belles chances de médailles. Et même de battre les Américaines. S’ils ne peuvent pas valider cette hypothèse, il leur reste la possibilité de se frotter à leurs ennemis chez les hommes.
Une façon de s’affronter sans les armes. Ou sans avoir d’autres pays pantins interposés alors que l’ambiance est toujours festive à travers le monde : invasion de la Hongrie par les chars du pacte de Varsovie, crise du Canal de Suez, conflit entre Egypte et Israël, révolution en Algérie… Le tableau n’est pas très reluisant, même si les Accords de Genève, le décès de Staline en 1953 ainsi que la fin du maccartysme en 1954 réchauffent un poil les relations entre USA et URSS.
Les Jeux Olympiques ont beau se vouloir en dehors des questions politiques, ils n’échappent pas aux tensions de l’époque. La Suisse, les Pays-Bas et l’Espagne boycottent cette olympiade. Des pays arabes – Égypte, Irak et Iran – critiquent la présence d’Israël. La République populaire de Chine quitte Melbourne après avoir vu le drapeau de Taïwan levé dans le ciel australien.
Et là, on ne parle pas encore de sport, car sur les terrains – ou plutôt dans la piscine – les tensions se font aussi sentir. L’événement le plus marquant est le bain de sang de Melbourne, la demi-finale de water-polo entre l’URSS et la Hongrie qui tourne à la baston et les blessures teintent l’eau du bassin de rouge.
Rassurez-vous, pas de Royal Rumble dans l’Exhibition Building où se déroule le tournoi de basketball. Un peu de bagarre tout de même car l’enceinte est partagée avec la lutte, ainsi que l’haltérophilie. Si lever des poids semble être un hobby partagé par les Américains et Soviétiques qui repartent avec sept médailles chacun (4 d’or, 2 d’argent, 1 de bronze pour les USA, 3 d’or et 4 d’argent pour l’URSS), la lutte est moins disputée. L’Union Soviétique domine la discipline (13 médailles dont 6 d’or) alors que les Américains font de la figuration. Et au basket alors ?
Suspens… non pas vraiment en fait. Les Américains roulent sur la compétition. Comme à leur habitude depuis que la balle orange est en compétition lors des Jeux Olympiques. L’édition de 1956 à Melbourne n’échappe pas à la règle. Les Soviétiques ont beau avoir lancé leur chasse aux géants après la défaite en finale de 1952 pour pouvoir rivaliser en termes de taille avec les USA, cela ne suffit pas.
Certes, ils disposent désormais de leur baobab dans la raquette. Le Lituanien Jānis Krūmiņš (2m20) a rejoint le club de Riga entraîné par Aleksandr Gomelsky et l’équipe nationale. Petit problème, blessé il ne prend part qu’à 5 des 8 rencontres lors du tournoi olympique. Stasys Stonkus et Arkadi Bochkarev apportent aussi plus de deux mètres chacun dans la raquette. Mais sur les autres postes, les Américains restent plus grands, plus forts. Sans compter qu’avec la nouvelle règle des 30s, Soviétiques et autres adversaires des USA ne pourront plus “geler” la balle. Une stratégie utilisée en 1952 pour ralentir le jeu et casser le rythme.
Pire pour l’URSS, ils sont malmenés dès la phase de groupe par les Français (victoire des Bleus 76 à 67 grâce à une défense de zone). Puis ils perdent une nouvelle rencontre lors du deuxième tour face aux Américains. Malgré cela, les Soviétiques passent en demi. Ils retrouvent l’équipe de France tandis que Team USA se frotte à l’Uruguay. Les deux grandes puissances internationales s’imposent et s’offrent donc une nouvelle version de leur affrontement de 1952 en finale. Si le déroulé diffère, la conclusion est la même. Les Américains sont sont les boss et repartent avec une quatrième médaille d’or consécutive.
Bill Russell et ses coéquipiers n’ont laissé que des miettes aux autres pays, moins nombreux – 15 à Melbourne contre 23 en 1952 à Helsinki – à cause des boycotts. Avec 99,1 points de moyenne et seulement 45,6 points encaissés par rencontre, ils affichent un différentiel de +53,5 points. Un record que même la Dream Team de 1992 n’a pas approché (“seulement” 43,75 points d’écart en moyenne en 1992). Les Soviétiques et l’Uruguay complètent le podium de l’épreuve de basket aux Jeux Olympiques de 1956 de Melbourne.
La France, malgré sa victoire au premier tour sur l’URSS, doit se contenter de la médaille en chocolat. Henri Grange, Robert Monclar, Jean-Paul Beugnot et compagnie ne seront pas les successeurs d’André Buffière ou André Even sur un podium olympique, argentés huit ans plus tôt. La faute à une fin de tournoi qui a mis à mal les bons résultats initiaux, la France s’inclinant en demi contre l’URSS et lors de la petite finale face à l’Uruguay, deux nations pourtant battues quelques jours plus tôt. La fatigue accumulée et les deux côtes cassées de Beugnot n’ont certainement pas aidé à finir en beauté. Pas plus que le retour en forme de Jānis Krūmiņš dans la raquette soviétique lors de la demi-finale.
Des Soviétiques qui en plus de leur médaille d’argent repartent avec une paire de Converse Chuck Taylor chacun offerte par les Américains. Avant la finale, les deux pays s’échangent des cadeaux. Lors de discussions avec les joueurs de l’URSS – avec l’aide d’autres athlètes parlant le russe – les coéquipiers de Bill Russell ont appris que les Soviétiques rêvaient es chaussures américaines. Un lot de consolation en attendant de pouvoir peut-être battre un jour Team USA.
Du 22 novembre au 1er décembre 1956
Royal Exhibition Building de Melbourne
15 équipes
Or – États-Unis
Argent – URSS
Bronze – Uruguay
Source image : FIBA