Le mois de décembre de Victor Wembanyama : un piège à Roanne, un second à Strasbourg, les défaites forgent les victoires
Le 04 janv. 2023 à 15:56 par Arthur Baudin
Quand les conquistadors s’en allaient découvrir le Nouveau Monde, leurs femmes se rendaient au port pour les y gratifier d’une dernière embrassade. Cette saison, Victor Wembanyama entame sa dernière danse dans le corps d’un joueur de basket-ball français, avant de bondir outre-Atlantique en très probable qualité de first pick. Ce suivi mensuel est notre manière à nous de l’embrasser.
Fos-sur-Mer
Première case du calendrier de l’avent et déjà le meilleur chocolat. C’en est à la fois surprenant et décevant. Pour cette réception de Fos-sur-Mer, Victor Wembanyama claque 32 points à 12/20 au tir, 10 rebonds, 3 passes, 4 contres, 1 faute pour 9 provoquées, et seulement 3 ballons perdus pour… 36 d’évaluation. Titanesque, les superlatifs à foison, la tendance se confirme : Victor sera le 1er choix de la Draft 2023 et très probablement le MVP de Betclic Élite. Les Metropolitans 92 sont en tête du classement avec neuf victoires pour une seule défaite, et même si Monaco revient fort, aucune individualité ne fait autant que Victor (et aucune ne promeut aussi bien notre championnat, ce à quoi Alain Béral et son équipe ne sont pas indifférents). Comme l’impression que le trophée individuel est déjà dans ses mains donc, et qu’il s’apprête à lâcher un mois de décembre dans la continuité de novembre, c’est-à-dire à grands coups de 30, 32, 35 ou 39 unités selon son humeur du jour. Mais à contresens de sa forme installée, la hype Victor Wembanyama faiblit un peu. On parle moins du prospect car on commence à s’y habituer. Sa spéciale « 3-points sur une jambe » n’impressionne plus comme en octobre. Les chiffres liés aux articles à son propos décroissent. Il va nous falloir un nouveau prospect de 2m30 qui prend des fadeaways du logo pour relancer l’engouement. Quelle époque.
Le doute
Onze jour de compétition que Wembanyama n’inscrira pas dans ses mémoires. Sur le papier, le déplacement à Roanne s’annonçait périlleux. L’équipe de Jean-Denys Choulet surfe sur une vague de trois victoires consécutives et commence à distribuer les baffes aux historiques du championnat : Cholet y est passé, Gravelines aussi, les Mets 92 pourraient être les prochains. Mais voilà, par « périlleux », on gardait quand même en tête l’idée d’un Victor Wembanyama XXL sur un secteur intérieur qui ne comporte “que” Yannis Morin. Excellent poste 5 du championnat de France hein, les segments dominants, mais rien de très innovant pour embêter celui que personne n’a limité en-dessous des 30 points sur le mois de novembre. Et pourtant, aucun des deux intérieurs ne sera vraiment au rendez-vous. Toute proportion gardée bien sûr : Yannis Morin fait un non-match à 5 points et 4 fautes en 16 minutes de jeu, alors que Wemby produit 15 points à 7/14 au tir. Une base saine mais pas folle, Victor a été maintenu en-dessous de ses standards par… Silvio De Sousa, un poste 5 tassé aussi large d’épaules que haut de corps. Double-double de forgeron, le torse bombé, la grinta du no name : vrai match de vétéran pour rappeler au marmot qui est aux commandes.
T’es là, tu subis ta première défaite en championnat depuis le 23 septembre, et ça recommence d’emblée le week-end suivant.
« Ça va c’est Monaco » direz-vous, et c’est un peu vrai. Sur le plan individuel, Victor s’en est même sorti avec brio : 27 points à 11/20 au tir dont 0/5 du parking (zut), 11 rebonds, 3 assists, 3 interceptions, 2 ballons perdus et 2 fautes pour 5 provoquées. Mais problemo non négligeablo, le siège de leader file au profit des Monégasques. Les Mets 92 sont sur deux défaites consécutives et espèrent sortir du tunnel le 17 décembre à Paris. Un derby à Carpentier pour relancer une machine enrayée, pas la plus simple des perspectives. Un sentiment bien ambivalent, comme l’impression que ça va être facile sans trop l’être, contre une équipe pleine de chouettes individualités. Bon spoiler, c’était facile : les Mets 92 se sont effectivement relancés avec une victoire 71 à 91, tranquilou-bilou, grâce à un génialissime duo Tremont Waters – Hugo Besson. Victor ? Boarf, 11 points à 4/11 au tir dont 1/5 à 3-points, 5 rebonds, 6 contres et 2 interceptions. Une sortie sur cinq fautes en fin de rencontre. Le kop du Paris Basket ne l’a jamais vraiment lâché : « Victor, Victor, SUR-CO-TÉ ! ». Aamir Simms non plus. Excellent boulot de l’intérieur adverse avec un torse inbougeable au poste, et une belle latéralité pour éviter la douille.
Victor Wembanyama est parfaitement lock-down par Aamir Simms 🔐 pic.twitter.com/ER1nqH5WPu
— Arthur TrashTalk (@ArthurJBaudin) December 17, 2022
Christmas Day(s)
Ça sent le sapin dans le salon. Les Mets 92 reçoivent Cholet pour un nouveau duel de haut de tableau. Menés sur toute la rencontre avec un Victor peu lucide dans sa sélection de tirs, les Franciliens s’en sortent finalement dans les derniers instants de la partie, victoire 92 à 87. Et devinez quoi ? Victor a été grandiose. T’sais le rédacteur un peu binaire. Au finish, le prospect de Levallois a balancé trois bombinettes de loin, salvatrices de Mets 92 reboostés. Un énorme contraste avec son corps de match. En difficulté sous le cercle, Victor n’a pas arrêté de s’écarter pour prendre des trucs pas simples sur une jambe, un peu à la manière de Kristaps Porzingis après ses premières blessures en carrière. Les travaux de défensifs de Justin Patton et Kim Tillie sont à souligner, mais pas normal de se faire aussi bien lock-down sur ce mois de décembre. Quand on dit « pas normal », c’est par rapport à ses standards personnels hein. Pour le reste c’est évidemment très propre. Surtout pour un bonhomme de 18 ans (19 aujourd’hui).
Dommage de ponctuer la période de Noël sur une défaite à Strasbourg. De surcroît une défaite bien difficile à analyser avec 26 points à 6/18 au tir et 12/12 aux lancers-francs, 18 rebonds (record perso), 2 passes, 3 contres, 3 interceptions, 1 faute pour 7 provoquées pour… 36 d’évaluation. Deux stats sur trois sont géniales, mais difficile de faire comme si le 6/18 au tir n’existait pas. Et à côté de ça Victor brise quand même son record en carrière avec 18 rebonds. Du coup si on dit qu’il a été bon le lectorat s’indigne à coups de « Et le 6/18 au tir c’est du ping-pong ? », alors que si on parle d’un match moyen, dans la demi-mesure, ça sort des « Ah d’accord donc 26 points et 18 rebonds pour un jeune de 18 ans c’est juste “moyen”. Et vous êtes journalistes basket céssa ? ». C’est là toute la magie de Victor. Il divise des observateurs unanimes. Le gosse est génial mais peut parfois mieux faire. Et quand il n’est pas bon, y’a clairement pas mort d’homme. Mais ce n’est pas pour autant qu’on va ignorer ses rares lacunes. Tout cela, Vincent Collet l’a excellement résumé au sortir de la défaite à Strasbourg.
« Il a été l’un de ceux qui ont trop forcé. Il ne s’est pas adapté au système défensif adverse. Cela fait deux matches, à l’image de l’équipe, qu’il y a moins de fluidité, pas assez de passes. On devra bosser là-dessus.
Malgré tout, son 37 d’évaluation montre à quel point il est exceptionnel. S’il avait changé quelques-uns de ses tirs en passes, il aurait pu finir à 45 sans marquer beaucoup de points. Cela montre qui il est et qui il peut devenir. »
– Vincent Collet, pour L’Équipe
La plus brillante des étoiles
Ce n’était pas l’évènement de l’année mais ça se note sur le CV : Victor a terminé MVP du All-Star Game de Betclic Élite avec 27 points à 1/9 du parking, 12 rebonds et 4 passes décisives. C’aurait dû être Juhann Begarin, et ça tombe bien puisque Wembanyama lui a passé son trophée de MVP dans le vestiaire. Jolie bromance entre ces deux grands généreux, que l’on peut aussi réunir sous l’appellation collective du « futur de la NBA ». Présomptueux pour Juhann ? Peut-être un peu, mais on lui souhaite tout ce bonheur.
👑 VICTOR WEMBANYAMA MVP DU ALL STAR GAME BY GORILLAS !
🏆 27 PTS, 12 RBDS & 32 D’ÉVAL 🫡#ASG2022 pic.twitter.com/ZifAfL411p
— LNB (@LNBofficiel) December 29, 2022
LE MOIS D’OCTOBRE DE VICTOR WEMBANYAMA EN CHIFFRES :
- 2 décembre vs Fos sur Mer (championnat) : 32 points à 12/20 au tir et 5/7 aux lancers, 10 rebonds, 3 passes, 4 contres, 1 faute pour 9 provoquées, et seulement 3 ballons perdus pour… 36 d’évaluation
- 6 décembre @ Roanne (championnat) : 15 points à 7/14 au tir, 6 rebonds, 2 passes, 3 contres, 2 ballons perdus et un +/- de -17
- 11 décembre vs Monaco (championnat) : 27 points à 11/20 au tir dont 0/5 du parking, 11 rebonds, 3 passes, 3 interceptions et 2 ballons perdus pour 32 d’évaluation
- 17 décembre @ Paris (championnat) : 11 points à 4/11 au tir dont 1/5 à 3-points, 5 rebonds, 6 contres, 2 interceptions et aucun ballon perdu
- 23 décembre vs Cholet (championnat) : 24 points à 8/21 au tir et 4/4 aux lancers-francs, 8 rebonds, 2 passes, 2 contres, 1 interception, 22 d’éval et un +/- de -17
- 26 décembre @ Strasbourg (championnat) : 26 points à 6/18 au tir et 12/12 aux lancers-francs, 18 rebonds (record perso), 2 passes, 3 contres, 3 interceptions, 1 faute pour 7 provoquées pour… 36 d’évaluation
Un mois sans grosses vagues. Rien d’autre que du championnat, des pourcentages globaux à parfaire, mais encore et toujours cette capacité à décider du sort d’une rencontre. Trois défaites c’est trop, mais tout ne lui appartient pas. Et à la fois beaucoup de choses lui appartiennent. On ne sait pas trop en fait. Lé bizarre ce type.
Merci à « @_ad.visual_ » sur Instagram pour ses photographies.