Que sont-ils devenus – Hasheem Thabeet : de numéro 2 de la Draft à une carrière éclair dans les ligues taïwanaises

Le 09 août 2022 à 14:52 par Arsène Gay

Hasheem Thabeet 8 août 2022
Source image : YouTube

La NBA est le théâtre parfait pour réaliser des rêves de gosse, mais la NBA a également pour particularité de parfois éteindre la lumière plus vite encore qu’elle ne l’a allumée. Période creuse oblige, on se penche cet été sur des noms qui nous sont familiers, certains plus que d’autres, des noms qui nous « disent quelque chose » mais qui ne font plus vraiment les premiers titres. Des histoires qui ramènent à une douce mélancolie. Cold Case Affaires classées mais version NBA, avec l’ambition de vous donner quelques nouvelles de ces mecs qui ont fait partie fut un temps de notre quotidien. Septième épisode ? Un Tanzanien qui n’aura jamais réussi à s’imposer dans la Grande Ligue : Hasheem Thabeet.

Si certains parviennent à rebondir après un passage compliqué en NBA, d’autres semblent ne jamais réussir à remonter à la surface. Hasheem Thabeet fait malheureusement partie de la deuxième catégorie. Et même si les nouvelles ne sont pas forcément bonnes, il est tout de même important d’aller en prendre. Préparez-vous, car on ne va pas se fendre la margoulette aujourd’hui.

Si nous devions choisir un seul joueur NBA pour représenter l’exact opposé d’une feel good story, Hasheem Thabeet serait sans doute un candidat plus que sérieux au poste. Et pour cause, l’histoire de l’un des plus gros bust de l’histoire de la Grande Ligue n’est pas forcément jolie à écouter… ni raconter. Mais pour que la fin soit aussi décevante, il faut que le début soit prometteur, et ce fut le cas. Ayant commencé le basketball à l’âge de 15 ans, le Tanzanien n’arrive aux États-Unis qu’au moment des années lycée. Un peu tard pour être repéré non ? La plupart du temps, nous aurions eu tendance à vous répondre oui, mais comme le pivot mesure 2m21 pour 119 kg, on vous avoue qu’il lui était difficile de passer inaperçu. Alors qu’il n’est même pas classé nationalement, ce dernier reçoit pas mal d’offres de la part de plusieurs grandes universités. Au final, c’est dans le Connecticut que le géant atterrira, pour jouer avec les Huskies d’UConn. Chaque année, le garçon va progresser, jusqu’à être nommé National Defensive Player of the Year et dans la All-America Second Team lors de sa troisième et dernière saison en NCAA, où il tourne en 13,6 points, 10,8 points et 4,2 contres de moyenne. Une hype s’installe tranquillement, en attendant la Draft 2009, à laquelle ce dernier décide de se présenter.

Deuxième. Voilà en quelle position Hasheem va être sélectionné (par Memphis). Juste après Blake Griffin, numéro un indiscutable de cette cuvée. Plus loin ? Des garçons comme James Harden, Stephen Curry, Jrue Holiday, DeMar DeRozan… Oh boy. C’est une surprise, même pour le joueur, qui devient assez magistralement le premier Tanzanien à intégrer la NBA. Une pression immense, que notre ami ne va clairement pas supporter. Soyons clairs : il n’y a pas grand-chose à retenir du passage du géant dans la Grande Ligue, alors pas besoin d’y passer beaucoup de temps. Après deux ans à Memphis où il n’arrive à rien ou pas grand-chose, le natif de Dar es Salaam est envoyé à Houston, puis à Portland, avant d’enfin se retrouver à Oklahoma City. Là-bas, Hasheem va retrouver un peu le sourire auprès de Kevin Durant et Russell Westbrook. Il y enregistre notamment son meilleur match en carrière avec un 13/10/2/2/4 en 27 minutes lors d’un blowout face aux Bobcats (114-69) –  pouah… imaginez juste la purge que ça devait être – mais ne parvient pas pour autant à convaincre. Tradé à Philadelphie qui le coupe dans la foulée, ce dernier finira sa carrière NBA en étant signé puis coupé à nouveau par Detroit, avant de rejoindre le temps d’une cinquantaine de matchs la D-League. Avec des moyennes de 2,2 points et 2,7 rebonds en 224 rencontres, la carrière de Thabeet n’aura évidemment jamais été à la hauteur d’un choix numéro deux de Draft. Interrogé par Marc J. Spears en 2016 pour Andscape, ce dernier revenait d’ailleurs sur ce statut ayant beaucoup pesé dans l’échec du bonhomme, qui se considère comme victime de sa propre sélection :

“Je n’ai jamais pu contrôler la manière dont j’ai été drafté. Je n’avais rien demandé. Je n’avais même pas fait de workout avec Memphis. Donc, je suis drafté, et tout le monde s’attend à quelque chose. Cinq ans aux US, et je suis déjà l’un des plus gros choix de la Draft… Je suis genre : ‘c’est vraiment en train d’arriver ?’ Il y a un an [lorsqu’il est coupé par Detroit, ndlr.], j’étais brisé. Rien n’allait. En arrivant dans la Ligue en tant que pick numéro 2, j’ai l’impression que beaucoup de choses m’ont été balancées au visage. J’étais attaqué, j’entendais des “il ne fait pas ce qu’il devrait faire”. J’avais l’impression d’être coincé, comme si toute l’attention m’enfermait. Tout est arrivé si vite. J’étais à terre, tout ce que je faisais était mal, les gens avaient des attentes très élevées, et moi je ne savais pas dans quoi je m’embarquais.”

Wow, difficile de rester insensible face à ce genre de témoignages, qui nous font prendre conscience qu’être dans la lumière peut très vite devenir pesant. D’autant plus que les choses ne vont pas forcément s’arranger par la suite. Absent des terrains pendant deux ans… car personne ne veut de lui, Hasheem continue de bosser dans son coin avec Frank Matrisciano, son coach personnel. Et comme aucune franchise NBA ne semble prête à lui redonner une chance, le pivot va partir au Japon, où les Yokohama B-Corsairs lui offre un contrat. Avec environ 13 points, 8 rebonds et 2 contres de moyenne, Thabeet parvient à montrer de belles choses dans la faible ligue japonaise, qu’il quittera à la fin de la saison 2017-18. C’est alors que le grand bonhomme va pouvoir croire à nouveau au rêve américain en signant en G League avec les Fort Wayne Mad Ants en 2019. Résultat ? Huit matchs seulement avant d’être coupé, car Hasheem joue juste mal. Et même si des franchises comme les Nuggets, les Bucks, les Warriors, les Knicks et les Sixers organisent des workouts avec ce dernier, il faut se rendre à l’évidence : Thabeet n’a pas le niveau pour jouer en NBA.

À ce stade, beaucoup auraient déjà décidé de mettre un terme à leur carrière pour se tourner vers du coaching ou un rôle de consultant, mais pas Hasheem. Non, pas question d’abandonner comme ça, le géant va se battre jusqu’au bout, et ce même si personne ne veut de lui. En 2020, il signe avec les Hsinchu JKO Lioneers, à Taïwan, où il réalisera sans aucun doute la meilleure saison de sa carrière professionnelle. Compilant 18,3 points, 14,3 rebonds et 3,3 contres, ce dernier va devenir Défenseur de l’Année. Cela fait une ligne sur son CV, mais qui ne vaut presque rien compte tenu de la faiblesse de la ligue taïwanaise. À l’époque, son agent Jerry Dianis tente même d’utiliser cette saison réussie pour attirer une nouvelle fois l’œil des scouts NBA : “Hasheem a hâte d’aider une franchise NBA qui a besoin de dimension athlétique et de taille en sortie de banc. Je n’ai aucun doute sur le fait qu’il sera inondé d’opportunités dans le monde entier“. Raté. En réalité, le garçon va juste signer un contrat en octobre 2021 avec les Tainan TSG GhostHawks… mais ne jouera jamais pour eux. La raison ? Aucune idée, le coach de l’équipe indiquant simplement deux mois plus tard que Thabeet ne les rejoindra “probablement pas”. Bien vu mec, car il n’y a en effet aucune trace de notre ami là-bas. Début 2022, d’autres rumeurs annonçaient notre ami aux Fujian Sturgeons, équipe de la Chinese Basketball Association (CBA), par laquelle des garçons comme Christian Wood ou Amar’e Stoudemire sont notamment passés :

“Hasheem est le meilleur protecteur d’arceau de la planète. La Chine compte 1,4 milliard de personnes et il a hâte de pouvoir jouer à ce niveau. Son but ultime est de retourner en NBA, chose qui pourrait arriver dès cette année.” –  Jerry Dianis

Spoiler : il n’existe là encore aucune trace d’un quelconque match de Hasheem Thabeet avec les Sturgeons, pas plus que le moindre début de rumeur annonçant un potentiel retour de ce dernier dans la Grande Ligue. Et puis quant au fait qu’il puisse s’agir du “meilleur protecteur d’arceau de la planète”, merci pour le fou rire hein. La réalité, c’est surtout que le gaillard de 35 ans a pris sa retraite il y a quelques mois. Désireux de rester près de sa famille mais aussi de transmettre la passion du basketball aux enfants de son pays, Hasheem explique n’avoir aucun regret par rapport à sa carrière, lui qui estime avoir tout donné à ce sport qu’il aime tant. Pour le retrouver, la seule indication que nous pouvons vous fournir serait de participer à un camp en Tanzanie, chose qui n’est pas si simple à faire, on vous le concède. On peut toutefois noter que ce dernier aurait été aperçu sur des terrains américains cet été, en compagnie de Russell Westbrook et Victor Oladipo. Qui sait, peut-être n’a-t-il pas réellement abandonné ?

PG at the PRO RUN with Russ, Victor Oladipo, and Harrison Barnes 🔥

(via austinjaustinj/IG) pic.twitter.com/y3wTk1ChMy

— Overtime (@overtime) August 3, 2022

Hasheem Thabeet est sans conteste l’une des plus grosses déceptions de toute l’histoire de la Grande Ligue. Et si on a logiquement envie de montrer de la compassion envers le Tanzanien, n’oublions pas que ce dernier a quand même eu le temps d’engranger plus de 16 millions de dollars lors de ses cinq années passées au sein de la NBA. Finalement, il n’y a pas que du mauvais à être un bust.

Sources texte : Andscape / Hoopsrumors / Clutch Points / Sporting News / Basketball Reference / ProBallers