Bill Russell emporte avec lui une immense carrière : mais quelle place le pivot des Celtics occupe-t-il véritablement dans l’histoire de la NBA ?

Le 01 août 2022 à 20:22 par Arsène Gay

Bill Russell 01 août 2022
Source image : YouTube

Plus grand winner de la NBA depuis sa création, défenseur all-time, leader d’une dynastie à la domination encore inégalée, Bill Russell possède à n’en pas douter les arguments nécessaires pour s’asseoir à la table des plus grands joueurs de l’histoire de notre sport. Mais concrètement, quelle place le pivot des Celtics occupe-t-il dans cette dernière ? Il est l’heure de sortir nos loupes pour se pencher sur la question.

C’est une question que nous aurions aimé nous poser dans d’autres circonstances. Après le décès de Bill Russell hier soir à l’âge de 88 ans, les souvenirs, anecdotes, accomplissements de ce dernier resurgissent tous de concert pour nous rappeler à quel point le pivot des Celtics fut un joueur hors norme, au sens propre comme au figuré. Pour certains, Whiskers est le plus grand joueur de l’histoire de la NBA car il est celui ayant gagné le plus de titres. Raisonnement audible, mais bien trop simpliste. Pour d’autres, il ne devrait même pas être dans cette discussion en raison de l’époque à laquelle il jouait, dont le niveau de jeu serait apparemment insignifiant. Raisonnement audible, mais bien trop simpliste aussi. Tout au long de sa vie, Bill Russell n’aura eu de cesse de sortir du lot, jusqu’à devenir une légende de la balle orange à de nombreux égards.

Déjà, comme l’immense majorité des fans le savent probablement, Billou reste à ce jour l’humain ayant remporté le plus de titre de champion NBA, avec onze bagouzes aux doigts en seulement treize saisons. Il y a quand même de très fortes chances pour que plus personne ne puisse réaliser une telle performance. Et on ne vous parle même pas du fait que sur ces onze bannières, huit d’entre-elles furent accrochées à la suite au plafond du TD Garden. Quand on voit que même les Warriors de Stephen Curry ne parviennent pas à réaliser un three-peat… Et puis n’oublions pas qu’à l’époque, aucun MVP des Finales n’est désigné. Si Michael Jordan peut donc aujourd’hui se targuer d’être le seul à l’avoir été nommé à six reprises, il existe un monde où Mister Russell en a quasiment le double. Car oui, qu’on le veuille ou non, The Stuffer est le leader incontestable de l’une des plus grandes dynasties de l’histoire, ou du moins la plus victorieuse : les Celtics des années 60. Le meilleur joueur de l’une des meilleures équipes, forcément, ça vous met le bonhomme dans les plus hautes strates de la grande Ligue.

Perhaps more than anyone else, Bill knew what it took to win and what it took to lead. On the court, he was the greatest champion in basketball history. Off of it, he was a civil rights trailblazer—marching with Dr. King and standing with Muhammad Ali.

— Barack Obama (@BarackObama) July 31, 2022

Et s’il n’y avait que les bagues… Individuellement, The Good Lord fut nommé MVP à cinq reprises, un club assez fermé puisqu’il n’est accompagné que par MJ (5) et Kareem Abdul-Jabbar (6). Hormis sa saison rookie où il préchauffe, il sera chaque saison nommé All-Star, soit douze fois. Au-delà de l’aspect purement technique, c’est donc d’une véritable reconnaissance dont bénéficie le pivot, celle d’un joueur qui, malgré un effectif huilé derrière lui, est considéré comme un monstre à part entière. Wilt Chamberlain a beau tourner en 50/25 lors de la saison 1961-62, c’est bien Bilou qui est nommé MVP car le boss : c’est lui. Le patron, il l’a toujours été, quelles que soient les circonstances. En 1968 puis 1969, il se permet même de devenir le premier homme à devenir champion en tant que joueur ET coach. Le Shaq lui-même avoue qu’il n’oserait jamais se comparer à son prédécesseur. Car qui oserait dire que ce qu’il a réalisé était simple ? Qui oserait dire que sans lui, les C’s auraient autant dominé ? Il y a des questions que nous sommes en droit de nous poser, mais il y a aussi des vérités que nous ne pouvons remettre en cause.

À l’inverse, il y a donc des éléments que nous ne pouvons pas faire semblant de ne pas voir. Oui, il y a plus de talent dans la NBA qu’à l’époque. Mais quoi de plus normal puisque près de 60 ans se sont écoulés, et que les mecs jouaient en Converse à 40 000 à l’heure. Il n’y a pas lieu de comparer, nous serons donc d’accord là-dessus. Mais on peut analyser, décortiquer, et se rendre compte que dans une ère elle aussi peuplée de Hall of Famer en puissance, Billou a dominé comme peu l’ont fait. En défense ? On parle sans doute du garçon qui l’a rendu essentielle pour gagner des titres. Si les contres étaient comptabilisés ? On peut vous dire qu’on connaît quelqu’un qui aurait noirci la ligne de stat. Et lorsque vous êtes le premier à réaliser quelque chose de devenu banal aujourd’hui, vous êtes tout simplement un précurseur, un pionnier qui a ouvert la voie à une nouvelle forme de basketball, à un tout nouveau sport en réalité. Alors oui, Bill Russell n’était pas un attaquant flamboyant – seulement 15,1 points par match en carrière à 44% au tir – mais dans son style, il était le meilleur. Avec 21 620 prises, il est le deuxième plus gros rebondeur de l’histoire de la NBA. Seul joueur du top 10 à n’avoir jamais atteint les 1000 matchs joués, il n’en reste pas moins loin devant l’illustre Kareem Abdul-Jabbar, troisième. Comme bien souvent dans le domaine, seul Wilt Chamberlain parvient à lui tenir tête.

Tout ceci étant dit, qu’est-ce que ces éléments permettent d’indiquer à l’heure de faire un classement des meilleurs joueurs ayant évolué en NBA ? 

La carrière de Bill Russell est sans doute quelque chose qui n’arrivera jamais deux fois. Des pivots ont bien évidemment outrageusement dominé le jeu, de son rival Wilt Chamberlain à Kareem Abdul Jabbar, en n’oubliant bien sûr pas Hakeem Olajuwon et Shaquille O’Neal. Ce que Russell a en plus ? Bien sûr, des titres. Dans la majorité des cas, des distinctions individuelles aussi. On le sait assez bien : classer un joueur selon ses trophées est un critère, mais il n’est pas le seul. Dans l’apport au sport et à la ligue, Bill Russell possède très clairement des cartes en plus. Il a bien sûr précédé les autres noms écrits ci-dessus, mais leur aussi et surtout ouvert le chemin. Dans une NBA qui était à des années lumières de celle des autres aussi, mais sa dominance et l’avance sur son époque étaient juste indécentes. Sans Russell ? La NBA n’aurait pas pris aussi vite, avec autant d’intérêt la notion de défense. L’homme a rendu primordial le fait d’être performant à l’heure de protéger son panier. La place qu’il doit occuper dans un classement all time est très subjective, mais il serait tout sauf correct de placer M’sieur Bill hors du top 10. À l’heure de faire le Top 100 All Time, nos deux (h)experts Bastien et Alex ont d’ailleurs respectivement placé The Stuffer en 7e et 6e position. Là encore, il appartient à chacun de faire son choix, mais très peu de joueurs peuvent aujourd’hui prétendre à être placés devant Russell dans une telle liste.

De ses premiers titres en NCAA jusqu’aux décorations officielles pour l’entièreté de son œuvre, Bill Russell aura laissé une empreinte indélébile sur la NBA, le sport et même l’Histoire avec un grand “H”. S’il est impossible de dire la place précise qu’il occupe dans un classement des plus grands joueurs de la Ligue, on a du mal à imaginer une telle légende hors du top 10, et certains vous diront même qu’il est impossible de trouver cinq joueurs ayant plus marqué le basketball que lui.

Source : NBA, ESPN


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