Tony Parker : The Final Shot sur Netflix – le debrief : 1h38 de TP, pour se rendre compte un peu plus de son impact sur le basket français
Le 06 janv. 2021 à 20:27 par Giovanni Marriette
C’est l’histoire d’un gamin bercé par un basket venu de l’autre côté de l’Atlantique, un gamin dont les rêves ne seront finalement rien à côté de ses accomplissements. On connait tous l’histoire, mais elle nous est aujourd’hui racontée autrement, par les yeux de Tony Parker mais également de ses plus proches alliés. Sa famille évidemment, ses amis, et des coéquipiers qui le sont devenus. The Final Shot c’est l’histoire du plus grand basketteur français de l’histoire, tout simplement.
Comme une annonce d’un casting grandeur nature, l’aventure The Final Shot démarre avec une suite de visages bien connus. Zinédine Zidane, Thierry Henry, Teddy Riner et Killian Mbappe pour le côté baguette camembert, Snoop pour la fame, Tim Duncan, David Robinson, Manu Ginobili et Gregg Popovich pour la Spurs Family, puis LeBron James, Nicolas Sarkozy et Barack Obama pour le côté présidentiel et présidentiable. Et Kobe Bryant. Kobe Bryant à qui ce documentaire est officiellement dédié et qui, premier spoiler, nous file des frissons à chacune de ses apparitions.
“J’ai accompli tout ce que je voulais accomplir dans le monde du basket, et donc je me sens bien. J’étais prêt à tourner la page.” – Tony Parker
Tu m’étonnes.
L’histoire commence dans des rues probablement belges, et on y aperçoit alors une boutique Eram, ça c’est pour vous prouver qu’on a bien TOUT regardé. Tony, Pierre, T.J., puis Tony le daron et Pamela la maman, Notre belle famille à la sauce franco-américano-hollando-belge. Très logiquement on part donc sur des souvenirs qui remontent à la fin des années 80, les premières images avec son premier club de basket, à Fécamp, les voyages aux Etats-Unis avec un paternel basketteur professionnel mais surtout fan absolu de NBA, une photo de famille avec un Michael Jordan au sommet de son art et qui deviendra 25 ans plus tard son patron, et cette archive que les vrais connaissent : Tony Parker en train de taffer les p’tits potes sur un playground :
“Le match c’est Chicago contre San Antonio.”
Si tu savais mon frère…
Michael Jordan ? Il apparait évidemment dans The Final Shot et, énorme surprise, il lâche évidemment son petit bisou à Tony :
“J’ai la chance de le connaitre et d’être son ami.” – Michael Jordan
Comme The Last Dance par exemple, peut-être bien comme un paquet d’autres docus d’ailleurs, mais on n’a pas le temps de les regarder, The Final Shot prend son point de départ en 2018, à la signature de Tony à Charlotte, et balaie en parallèle un quart de siècle de basket à la sauce Parker. Ou comment passer ensuite d’un Vincent Collet nous apprenant qu’il avait coaché contre un Tony de dix piges à un Nicolas Batum qui se fait reprendre par le boss à son arrivée chez les Hornets parce qu’il passe sa vie à bouffer.
Kemba Walker qui parle de l’aide de Tony sur le plan mental, Pau Gasol qui nous explique à quel point un vieux doit savoir s’adapter à la jeunesse qui monte, et on rebascule ensuite vers les années folles, celles qui débutent en 1997, celles qui virent Tony débarquer à l’INSEP en 2 CV avec maman, celles qui virent Tony rencontrer Ronny Turiaf et Boris Diaw, et celles qui emmèneront cet incroyable trio jusqu’à un exceptionnel titre de champions d’Europe Juniors à Zadar en 2000. A l’époque Tony Parker n’est qu’un nom un peu trop ricain mais qui commence à résonner pour le grand public, à tel point que même le légendaire Henri Sannier en parle dans Tout le Sport. Là, on tient quelque chose, si seulement vous saviez.
Tony a 18 ans, et si Henri Sannier s’y intéresse, la NBA a également un œil sur le petit génie. C’est le début de l’histoire entre Tony et les Spurs, une histoire qui commence mal comme beaucoup d’entre vous le savent déjà. C’est l’heure du fameux premier test avec la franchise texane, et on ne part clairement pas sur de bonnes bases :
“La toute première fois que je l’ai vu jouer, je l’ai trouvé un peu ridicule sur le terrain. Il n’était pas assez solide. Au bout de quelques entrainements, il m’a prouvé que j’avais tort.” – Gregg Popovich
Tony est nul, c’est lui qui le dit, et Gregg Popovich a donc l’air d’accord. On apprend ensuite que le soir de la Draft c’est avec une casquette des… Celtics que Tony aurait très bien pu repartir, mais les dirigeants de l’époque lui préfèreront alors un certain Joe Forte, 30 points… en carrière en NBA. T’as bien fait de lui laisser la casquette Tony, t’as bien fait.
Sélectionné par les Spurs avec le 28ème choix, TP fait officiellement le grand saut, il se tape des pleines pages dans L’Equipe (l’occasion de remarquer que TMC proposait à l’époque de la plongée en prime time, l’occasion de vous rappeler une deuxième fois qu’on a vraiment décrypté ce docu comme des porcs), et voilà que notre Frenchie se plie aux règles en devenant le caddie officiel des plus anciens. Un coconut pour Tim Duncan, un café pour Steve Smith, ça fait le crack à la boulangerie mais en vérité la vie n’est pas si rose. Car Tony bosse mais Tony Parker n’a pas encore convaincu son immense n°21 de coéquipier, dans une ronde amoureuse qui durera plus d’une année avant que notre héros soit enfin accepté par le boss.
“Tony ne semblait pas prêt, il ressemblait à un gamin chétif. Pour être honnête, on n’attendait pas grand chose de lui.” – Tim Duncan
Oui mais voilà. Tony va trop vite, Tony va plus vite que tout le monde. 30 octobre 2001 ? Premier bucket en carrière face aux Clippers. 6 novembre ? Titulaire à la mène d’une équipe qui vise le titre, le plus jeune titulaire de l’histoire de la NBA à son poste. Too fast sur le terrain, mais aussi too furious à l’entrainement. Gregg Popovich le sait mais passe surtout son temps à lui en mettre plein la tronche à chacune de ses erreurs, Tim Duncan le sait mais ne le dit pas encore, Terry Porter le sait mais, lui, il le dit :
“Il était rapide comme l’éclair, je ne voyais que son dos à l’entrainement.” – Terry Porter
Un petit mug de l’ASVEL plus loin car les placements de produit c’est bien, c’est l’heure de l’apparition divine. Nouveau spoiler, nous sommes à 29’50” et un étrange liquide coule de nos yeux. Ah oui tiens, on chiale un peu :
“Je m’appelle Kobe Bryant, j’ai joué contre lui durant de très nombreuses années, et c’est de sa faute si je n’ai pas gagné plus de titres. J’essayais de détester les mecs contre qui je jouais, mais je n’ai jamais réussi avec lui. C’était vraiment un bon gars, même s’il te défonçait sur le terrain. Parce qu’il le faisait poliment.” – Kobe Bryant
Kobe Bryant dans tout ce qu’il a de plus Kobe Bryant, qui nous racontera plus tard comment il consulta Ronny Turiaf pour apprendre comment trashtalker Tony en français, et une transition parfaite vers quelques unes des plus grandes bastons de Tony : celles face aux Lakers. Victoire en demi-finales de Conférence en 2003, même Claire Chazal (ou Beatrice Schonberg, on a vérifié) s’en mêle, et quelques semaines plus tard le premier milestone atteint : sa première bague. Tony a 21 ans et il est sur le toit du monde, et dire que tout ne fait que commencer.
“Il sera reconnu comme le joueur qui a fait de la NBA un sport plus international.” – David Robinson
Qui dit grande carrière dit mauvaises passes, et on bifurque donc ensuite très vite sur… l’Euro 2003. Tony est en Suède, il est capitaine de l’EDF à 21 ans, et ses déclas sont aussi maladroites que son talent déjà immense. Te bile pas Tony, ton heure viendra. Une heure qui reste pour l’instant américaine puisqu’en 2005 c’est l’heure de la deuxième bague, dans ce qui commence à ressembler à un début de dynastie pour un Tony devenu une figure incontournable des Spurs, mais aussi de la ville tout entière, n’est-ce pas la mémé qui montre le bout de son nez à 43’03”.
“J’avais peur qu’il se présente comme maire car il aurait facilement pu gagner au vu de sa popularité.” – Edward Garza, maire de San Antonio
Nouveau saut dans le temps, nous sommes le… 3 mai 2017, et c’est le tendon du quadriceps droit de Tony qui fait des siennes. TP est devant la première grosse blessure de sa carrière, elle sera la seule, et une absence potentielle de huit ou dix mois se transforme en six, parce que le mec a taffé, parce que le mec en a chié, parce qu’à 35 balais il lui restait encore quelques hectomètres à parcourir.
Mode DeLorean enclenché, et retour en 2006. Chip Engelland a décidé de s’occuper du tir de Tony, et il le façonnera à l’image de son fameux tear-drop, arme encore plus fatale qu’un duo Mel Gibson / Danny Glover. Belle idée tiens, Tony progresse, ses défauts n’en sont bientôt plus, et en 2006 c’est à son premier All-Star Game que le meneur des Spurs est convié. Il y en aura cinq autres.
“A un moment donné, c’était le joueur le plus rapide de la Ligue avec un ballon dans les mains.” – Marc Spears
Un an plus tard on parle alors de l’apogée individuelle du joueur, une troisième bague face à un tout jeune LeBron et à laquelle s’ajoute le trophée de MVP des Finales. Tony Parker est le meilleur joueur de la meilleure équipe de la meilleure ligue au monde, et ça claque encore plus qu’un vieux calendos. David Stern joue les boomers en lâchant un mythique “Congratulations and bonne chance” qui ne veut absolument rien dire, Thierry Henry y va de son non moins légendaire “Hey Tony tu sens l’alcool“, et TP peut donc profiter de son apex avec… Eva Longoria, car dans l’histoire le Frenchie s’est quand même débrouillé pour se maquer avec une star d’Hollywood, le rêve américain dans tout ce qu’il a de plus idéal.
Apex sportif, mais pas question de rester les bras croisés en attendant que les choses se passent. Tony pense présent mais pense aussi avenir.
“Il était toujours ne train de réfléchir. Pas seulement au moment présent mais à l’avenir aussi. Où il serait dans trois ans, dans cinq ans.” – Bruce Bowen
“Il est né avec ce don là, ce don de gagner et de porter le basket à un autre niveau.” – Marie-Sophie Obama
“Peut-être qu’il remplacera un jour R.C. Buford, peut-être qu’il deviendra président, General Manager, aucun autre joueur NBA ne me semble aussi capable que lui de le réaliser.” – Marc Spears
Switch logique sur son rôle de président puis propriétaire de l’ASVEL, sur la création de son académie à Villeurbanne ou son rapport avec la Chine via l’équipementier Peak… puis on repart sur les parquets, avec un mélange de bois de lattes et de… coups de lattes. Esprits finauds vous l’aurez compris : c’est l’heure du chapitre franco-espagnol de The Final Shot, celui où l’on a tous envie de mettre ce fameux final shot entre les deux fesses de Rudy Fernandez. La faute de Rudy sur Tony, les défaites qui s’enchainent face à une équipe encore plus forte qu’elle n’est insupportable, et après le firmament individuel en 2007 place au firmament collectif, au firmament bleu blanc rouge, à une réussite qui renvoie Tony treize ans en arrière avec ses potes Ronny et Babac : le titre à l’Euro 2013. Un speech mémorable en demi face à l’Espagne, une raclée en finale face à la Lituanie et voilà Les Trois Frères là où ils s’étaient promis d’être un jour alors qu’ils révisaient leurs équations à trou. C’est pas fort ça hein, c’est absolument incroyable.
Incroyable comme la dernière bague du garçon, en 2014, un an à peine après avoir connu l’une des pires désillusions de sa carrière suite à un tir légendaire de Ray Allen. Tony n’a jamais aussi bien joué au basket, les Spurs pratiquent un basket incroyable, la médaille de 2013 est encore toute chaude, difficile de faire plus abouti au moment de résumer une carrière. La suite ? Ce fameux départ à Charlotte donc, puis les frissons all-time du 11 novembre 2019. Tony a pris sa retraite après une année plutôt correcte avec les Hornets, mais c’est à la famille Spurs qu’il appartient et qu’il appartient désormais à jamais, depuis que son n°9 s’est élevé dans les hauteurs de l’AT&T Center comme pour d’autres légendes avant lui. Une cérémonie fascinante d’émotion, ponctuée par un dernier let’s go Spurs à l’unisson, une soirée magique vécue avec son clan, et vécue par des milliers de fan de Tony Parker et des Spurs comme la dernière page d’un pu-tain de bouquin dont les trois mots clés seraient travail, respect et réussite. Tony les yeux embués aux côtés d’Axelle et de ses deux enfants, un Tony qui montre peu à peu ses émotions, c’est nouveau chez lui, et qui les montrera d’ailleurs bien malgré lui quelques mois plus tard, à Lyon lors de la remise par Jean-Michel Aulas de la médaille de l’ordre du mérite. Axelle toujours, puis ses amis, puis son père, c’était trop pour un Tony qui se découvre humainement pour l’une des premières fois de sa vie publique.
Générique de fin sur quelques images inédites d’un homme resté un gamin, d’une fiesta à l’américaine où se côtoient David Robinson et Maitre Gims. Car Tony Parker c’était ça. Un monstre all-time, une légende du jeu, en France comme ailleurs, mais surtout… un gosse qui prend sa première licence en Normandie et qui s’amuse à jouer un Bulls – Spurs sur un playground brumeux en imaginant le jouer un jour “pour de vrai”. Vous connaissez la suite… l’histoire n’est pas belle, elle est sensationnelle.