Zach Randolph, triste symbole de l’intérieur à l’ancienne dont le jeu ne colle plus avec 2015

Le 15 déc. 2015 à 14:21 par Bastien Fontanieu

Dans le jargon, on appelle cela ‘jouer au mauvais endroit, au mauvais moment’. Sauf que pour le baobab des Grizzlies, le problème est beaucoup plus profond. Zach Randolph pourrait changer d’adresse, cela ne changerait pas grand chose : son profil n’est tout simplement plus compatible avec la NBA actuelle.

La NBA actuelle, justement. Parlons-en. En constante évolution, décennie après décennie, notre jungle préférée s’est toujours adaptée aux tendances apportées par ses acteurs principaux et les progrès effectués dans tous les domaines, notamment celui des capacités athlétiques. Dans les années 90, il fallait un géant technique capable de recevoir la gonfle au poste et aller chercher deux points. Dans les années 2000, il fallait un arrière gracieux capable de scorer à outrance et d’émuler Jordan. Concernant 2010 ? La question ne devrait même pas se poser, quand on voit la compétition proposée au poste de meneur, les phénomènes d’environ six pieds se bousculant soir après soir pour tenter de trouver leur place dans le classement des dragsters. Et dans cette phase de transition inévitable qui s’impose à la NBA environ tous les dix ans, chacun prend celle-ci d’une façon différente : soit comme une main tendue vers le progrès, soit comme une claque tamponnée dans la gueule. On se souvient notamment du pauvre Steve Nash, gêné par les pépins physiques mais surtout symbole de ce passage entre la génération lente et technique vers celle supersonique et nourrie à la TNT. Propriétaire d’une carrière exceptionnelle, le magicien ne pouvait plus tenir face aux jeunes d’en face, ses grigris balle en main faisant difficilement concurrence aux coast-to-coast proposés par les buffles de l’ère 2K10. Une fin de parcours triste mais évidente pour le meneur, qui était justement une des plus grandes victimes de cette mutation naturelle.

Le rapport avec le client du jour ? Zach Randolph, ou Zibo pour les intimes, est lui aussi en plein dans le viseur de Mère Nature, son jeu étant de façon évidente en totale inadéquation avec le jeu proposé par la NBA aujourd’hui. Les intérieurs old-school qui charbonnaient au poste ? Terminé. Les ailiers-forts imposant leur boule dans la raquette mais incapables de s’écarter au large ? Terminé. Les camions-citernes aux hanches généreuses, obligés de vomir leurs poumons car ne pouvant tenir deux contre-attaques ? Terminé. Aujourd’hui, au poste quatre, les pépites se nomment Draymond Green ou Anthony Davis. Des Blake Griffin et LaMarcus Aldridge aussi, certes, mais avant tout des hommes polyvalents, possédant un jeu de jambes rapide et une cardio exceptionnelle. Plus ou moins un profil à l’opposé de Randolph, la référence du Tennessee étant coincée entre la fin des 90’s et le début des années 2000. Oui, malheureusement pour le natif de Marion dans l’Indiana, son jeu n’est plus compatible avec ce qui est demandé en NBA actuellement. Et du coup, tout le monde se régale sur son compte, que ce soit Serge Ibaka en pick-and-pop, Paul Millsap sur le drive ou même Jon Leuer en intensité, comble du comble. Vendre des cartes téléphoniques alors que tout le monde a son smartphone, pas vraiment le genre de deal qui plait à tout le monde, surtout Dave Joerger qui a enfin pris la bonne décision. Le coach des Grizzlies a-t-il entendu la preview de la saison effectuée en octobre dernier ? Installer Zibo sur le banc pour enfin rencontrer le jeu d’aujourd’hui, voilà ce qui fût mentionné et enfin appliqué, les fans de la franchise devant se rendre à l’évidence.

Oui, Zach Randolph a marqué l’histoire de Memphis. Porte-drapeau de ce Grit & Grind sanglant, lui qui réservait des séances de tortures insupportables aux adversaires, le numéro 50 représentait cette résistance du jeu old-school, avec sa papatte gauche et son fessier rebondi. Son bandeau, ses câlins avec Marc Gasol et son blabla avec Tony Allen, tout ceci faisait des Grizzlies une équipe redoutée car physique et spécialisée dans l’étranglement. Mais aujourd’hui ? La défense du Tennessee est une vaste blague, les intérieurs adverses se sont marrés en voyant Zach dans le cinq de départ, envoyant un quatre fuyant pour faire courir la bête et ainsi créer des décalages énormes dans la forteresse locale. Non, évidemment, il n’y a pas que le jeu de Randolph qui peut expliquer le début de saison mi-figue mi-déprime des Oursons. Cependant, quand on voit l’adaptation physique d’un Tim Duncan aux Spurs ou la capacité de Dirk à planter de huit mètres, il y a des mouchoirs à sortir pour Randolph. Et malheureusement pour Al Jefferson comme pour Pau Gasol, pour ne citer qu’eux, la guillotine devrait elle aussi tomber sous peu, si leur entraîneur arrive à prendre la plus lourde des décisions : enlever un point d’encrage intérieur pour respecter la Ligue actuelle. Avant, il fallait un monstre pour tenter de défendre sur le Shaq. Puis il fallait un pitbull pour défendre sur Kobe et LeBron. Dans une NBA dirigée inévitablement par les meneurs nouvelle génération et les intérieurs polyvalents, Zach Randolph est à un tournant de sa carrière. Lui comme d’autres doivent se regarder dans le miroir et réaliser ce que certains ont su faire le plus rapidement possible. Adapter leur jeu pour ne pas disparaître dans le silence le plus complet.

Plus intéressant et en cohésion avec la compétition, le nouveau cinq majeur des Grizzlies est difficile à analyser mais a au moins effectué un pas vers le progrès. La victime principale de cette transition ? Zibo, intérieur old-school dont on appréciera désormais les hooks en sortie de banc, lui qui ne peut plus tenir face aux phénomènes actuels à son poste. Quand on voit les résultats de Charlotte depuis l’absence d’Al Jefferson, on préfère annoncer tout de suite la couleur : Memphis a fait le bon choix, aussi dur fût-il émotionnellement parlant. Les résultats devraient s’en ressentir cependant, et assez rapidement. 

Source image : heraldsun.com.au