Basket aux Jeux Olympiques – Londres 1948 : USA seconde, Don Barksdale première
Le 08 mars 2024 à 15:59 par David Carroz
Après un tournoi UNSS en 1904 pour sa première en tant que sport d’exhibition puis la version combat dans la boue lorsqu’il est devenu sport officiel aux Jeux Olympiques en 1936, les instances semblent avoir enfin compris comment jouer au basket en 1948 : entre pays, dans un gymnase. Ce n’est pas trop tôt.
En même temps, les personnes responsables ont eu douze ans pour analyser et comprendre ce qui avait pu clocher depuis l’olympiade à Berlin, la faute à un conflit mondial. Oui, ce n’était pas la fête à l’époque et ces Jeux de Londres marquent le retour des grandes compétitions sportives – même si les JO sont toujours loin d’être la grande foire commerciale pardon médiatique qu’on connaît aujourd’hui. La seconde guerre mondiale qui a même permis aux Anglais de se préparer pépères puisqu’à la base ils devaient organiser les Jeux en 1944, s’ils n’avaient pas eu mieux à faire.
Trêve d’analyse douteuse, malgré les difficultés financières et la réflexion de refiler le bébé aux États-Unis histoire d’éviter les dépenses, c’est bien Londres qui accueille pour la seconde fois (après 1908) les JO. Sous le signe de l’austérité. Mais le basketball ne souffre pas tellement des restrictions budgétaires et le tournoi se déroule dans la Harringay Arena, une salle du nord de Londres pouvant accueillir une dizaine de milliers de fans dans un confort bien supérieur aux pelouses qui entouraient la Basketballplatz à Berlin en 1936. Preuve que la balle orange gagne en légitimité.
Mais ce n’est pas la seule avancée.
Un autre changement se trame depuis l’autre côté de l’océan Atlantique, chez l’Oncle Sam. Les Américains n’en sont pas à se poser la question d’envoyer une Dream Team composée de joueurs NBA – les professionnels sont interdits aux Jeux – mais la composition du roster qui doit prendre le bateau pour Londres est porteur d’une nouveauté.
Donald Argee “Don” Barksdale.
Aucun lien de parenté avec D’Angelo Barksdale de The Wire – même si le nom a été donné au personnage de la série en hommage. À l’époque, Team USA se compose à moitié de joueurs universitaires, de l’autre de mecs évoluant en Amateur Athletic Union. La sélection se fait lors d’un tournoi entre les meilleures équipes NCAA et AAU. Les 66ers coachés par Bud Browning gagnent la finale face aux Kentucky Wildcats d’Adolph Rupp. Cinq joueurs des 66ers valident donc leur billet pour les Jeux, idem pour l’université.
Restent quatre wildcards pour boucler l’effectif que Browning – pour avoir remporté le tournoi – va coacher, assisté par Rupp. Suite à la pression de Fred Maggiora, membre du comité olympique et politicien, Don Barksdale est dans le lot. Rien d’anormal, l’ancien de UCLA est l’un des meilleurs joueurs du pays.
Oui mais voilà, Barksdale est Afro-américain.
Jamais un membre de sa communauté n’a porté le maillot de basket de Team USA pour des JO. Et si cela ne tenait qu’à Adolph Rupp, dont le manque d’ouverture sur les questions raciales n’est plus à démontrer, cela ne doit pas bouger. Et le coach des Wildcats pousse en ce sens. Tant pis pour lui, il ne va pas avoir le choix, car Browning s’est laissé convaincre par le talent de Don Barksdale qui embarque donc lui aussi pour le Vieux Continent afin de défendre les couleurs de son pays. Comme tant de soldats afro-américains l’ont fait quelques années plus tôt.
London’s calling
Comme 1936, vingt-trois équipes sont prévues pour le tournoi de basket. Et cette fois-ci tout le monde se pointe, ce qui offre à la compétition une grande diversité de styles. Celui des équipes asiatiques – Corée du Sud, Philippines et Chine – à base de vitesse et de passes rapides leur vaut une victoire symbolique, celle de la sympathie des observateurs. Car niveau classement, les Coréens s’en sortent le mieux avec une huitième place. Ce sont plutôt les Amériques qui tirent leur épingle du jeu. Outre les USA qui repartent bien entendu avec l’or, ces rapaces qui ne veulent laisser personne d’autre croquer, le Brésil, le Mexique, l’Uruguay et le Chili squatte quatre autres des six premières places.
Nous sommes en 48. Toute la planète basket est occupée par les Américains. Toute ? Non ! Car un pays peuplé d’irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l’envahisseur.
Et oui, la France brille.
Pas forcément grâce à son jeu, basé sur la solidité et la défense, mais par ses résultats. Une défaite face au Mexique sans conséquence au premier tour, puis les succès qui s’enchaînent, jusqu’à la finale face aux USA. Alors que les Bleus n’encaissent que 36 points par rencontre en moyenne, ils en prennent 65 de la part de l’Oncle Sam.
Des Américains qui vont pouvoir repartir invaincus au pays. Huit matchs, huit victoires. En dehors d’une petite frayeur face aux Argentins (59-57), on pourrait même parler de huit branlées. 33,5 points d’écarts : 65,5 marqués, 32 encaissés (on a fait le calcul pour ceux nuls en maths). Une démonstration à laquelle Don Barksdale apporte son écot puisqu’il est le troisième meilleur scoreur de l’équipe derrière Alex Groza, la star des Wildcats, et Bob Kurland, le pivot considéré comme le meilleur joueur amateur de l’époque.
Avec cette médaille d’or, notre pionnier devient le premier Afro-américain à remporter la breloque du plus précieux des métaux dans un sport collectif. Alors que nous, petits Français, nous pouvons imaginer faire partie de l’élite de la balle orange et s’imaginer peut-être aller chercher à l’avenir le titre. Spoiler : on va se contenter de perdre deux autres fois en finale. You’re so French.
Le basketball au Jeux Olympiques de Londres en 1948 – en bref
Du 30 juillet au 13 août 1948
Harringay Arena à Londres
23 équipes
Or – États-Unis
Argent – France
Bronze – Brésil
Source image : FIBA