Sun Rockers contre Magic ? Sonic contre Pac-Man ? C’est du basket, c’est au Japon, bienvenue en B. League !

Le 25 oct. 2022 à 08:53 par TrashTalk

Sonic vs Pacman 24 octobre 2022
Source image : Twitter - SEGA_OFFICIAL

Un double affrontement entre les Shibuya Sun Rockers et le Shimane Susanoo Magic, franchises appartenant respectivement aux géants Sega (Sonic) et Bandai Namco (Pac-Man) ? Un crossover idéal pour tout amateur de jeux vidéo vintage mais surtout, l’occasion de mettre en lumière un championnat japonais en plein développement.

16h et des poussières ce dimanche 23 octobre au Aoyama Gakuin Memorial Hall de Tokyo. 89-89 au tableau d’affichage. Perrin Buford, l’ailier américain du Susanoo Magic, intercepte et fonce vers le panier. Au buzzer, son tir ricoche sur l’arceau. Prolongations. Quelques minutes plus tard, Kevin Jones, même nationalité mais maillot différent, plante un énorme 3-points depuis le centre-ville de Tokyo : les Shibuya Sun Rockers s’envolent et l’emportent, malgré l’excellente performance du meneur adverse Seiya Ando. La veille, c’est le Magic qui avait raflé la mise, et assez largement, grâce notamment à un triple-double de gourmand signé Buford : 17 rebonds, 10 assists et surtout 30 points à… 11/11 au tir.

Les highlights du match de dimanche

Mais de nombreux spectateurs eurent les yeux rivés sur ce double affrontement pour une autre raison, apparue lors de la mi-temps de chaque rencontre. Deux énergumènes pénètrent sur le terrain, l’un est bleu, l’autre est jaune. L’un est un hérisson, l’autre est une… boule. L’un a connu une adaptation au cinéma plus décevante qu’une saison des Kings, l’autre a un immense sourire plus inquiétant qu’une saison des Kings. Pac-Man va t-il déguster son adversaire ? Sonic va t-il saisir la grosse tête ronde entre ses pattes et envoyer un énorme tomar avec ? Hum, ce serait oublier que nous ne sommes pas en slip sur notre canapé une manette dans les mains, passion Deandre Ayton. Désolé de briser le mythe, mais une mascotte n’est finalement qu’un humain en sueur dans un costume inconfortable, alors dur dur d’envoyer des riders avec des paluches qui ne pourraient pas tenir un stylo…

【たいたつたいけつ】今日もわちゃわちゃしてますなあ…

今夜は両キャプテンによる『太鼓の達人』対決だドンッ🎮#サンロッカーズ渋谷 #Bリーグ
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— セガ公式アカウント🦔 (@SEGA_OFFICIAL) October 23, 2022

Il n’empêche, les deux personnages font le show au centre du parquet et passent leur temps à enquiquiner les mascottes “officielles” des deux clubs, Sundy et Susatama, pendant que les capitaines des deux équipes s’affrontent sur la Switch. Mieux vaut ça que prendre une soufflante à la mi-temps…

watching basketball with sonic and pac-man pic.twitter.com/Pryk6R7ASr

— sam byford (@345triangle) October 23, 2022

C’est en tout cas un malin coup de com’ de la part de deux patrons du jeu vidéo, jeunes investisseurs dans l’industrie du basket. En 2019, Bandai Namco (Pac-Man, Power Rangers, Tamagochi…) a acquis plus de 50% des parts du Shimane Susanoo Magic (la franchise n’a absolument rien à voir avec une bande de maçons floridiens). Et en juin 2022, c’est cette fois Sega (Sonic, Football Manager, les consoles…) qui obtient sa franchise, en rachetant les Sun Rockers. Mais derrière ces investissements apparaissent des stratégies de grande échelle, comme le confirmait Hitoshi Hagiwara, président de Bandai, sur le site de l’entreprise :

“Notre champ d’action doit être le divertissement, de façon large, plutôt que de nous limiter au secteur du jeu. Notre acquisition du Susanoo Magic
confirme cette idée”.

Une démarche loin d’être nouvelle dans le sport, mais qui démontre l’attractivité d’une ligue encore jeune. Avant 2016, le basketball japonais était divisé en deux ligues. L’une était basée sur le système du keiretsu (la plupart des franchises étaient possédées par de grands conglomérats d’entreprises, comme Mitsubishi ou Toyota), et l’autre suivait plus ou moins le modèle de la NBA. Sous la pression de la FIBA au début des années 2010, les deux ligues ont fusionné pour en créer une seule : la B. League.

Et quoi de mieux que d’investir dans le basketball en s’inspirant des franchises de l’Oncle Sam, afin de proposer au spectateur plus qu’un simple sport, mais plutôt une “expérience totale” ? Et d’ailleurs, quoi de mieux que d’utiliser des mascottes souriantes pour renforcer un attachement à une marque ? Sur l’archipel, la recette est récurrente et s’appelle le yuru-chara, et même les provinces japonaises ont leur propre mascotte !

“Derrière le football et le baseball, le basket est aujourd’hui le troisième sport collectif le plus suivi au Japon” – Dan Orlowitz, journaliste sportif au Japan Times.

Une popularité encore loin d’être au top, mais croissante et accompagnée par deux phénomènes : l’engouement suscité par l’arrivée de joueurs japonais en NBA (Rui Hachimura, Yuta Watanabe), mais aussi l’appui exercé par la marque Rakuten. Entre sponsoring onéreux avec les Warriors, création d’une plateforme de streaming pour regarder la NBA et participation à l’organisation des NBA Japan Games 2022, le géant du commerce en ligne a fait d’une pierre des ricochets en étendant son empire un peu partout. Les deux affrontements Wizards-Warriors de cette fin d’été ont d’ailleurs été un succès :

Les stades étaient pleins et le public incroyable. – Dan Orlowitz

Cela dit, les axes d’amélioration sont presque aussi nombreux que sur le gameplay des Lakers. Certes, certains joueurs ont gratté des bouts de matchs en NBA, mais la B. League n’attire pas encore de stars, mis à part peut-être la légende passée par New York et Paris… Kyle O’Quinn. Et au niveau de l’ancrage local et du lien avec les supporters, Dan Orlowitz assure qu’il reste encore beaucoup de travail à faire, malgré le fait que des clubs comme les Sun Rockers, les Ryukyu Golden Kings ou les Chiba Jets aient déjà trouvé leur public.

Ou comment un duel improbable entre deux personnages de jeux vidéo – au passage un excellent coup marketing – permet de mettre la lumière sur un championnat encore méconnu mais en plein essor. Spoiler, au Japon le soleil levant pourrait bientôt se teinter d’orange…

Bonus track : des joueurs qui se tapent un Tetris… à la mi-temps de leur match, pourquoi pas comme dirait l’autre

Article rédigé par Léon Geoni