Mike Krzyzewski, un entraîneur légendaire mais aux débuts difficiles : focus sur une période où il n’était pas encore le grand Coach K

Le 02 avr. 2022 à 11:44 par Nicolas Meichel

Source image : YouTube

Participant à son treizième Final Four ce week-end à la Nouvelle-Orléans, le légendaire entraîneur de Duke Mike Krzyzewski est en course pour remporter un sixième titre de champion national avant de prendre sa retraite. Mais si certains le considèrent aujourd’hui comme le plus grand coach de l’histoire du basket universitaire, il fut un temps où Mike était sur un siège éjectable.

Mike Krzyzewski est sur le banc des Blue Devils depuis tellement longtemps qu’on a du mal à imaginer Duke sans lui. Mike Krzyzewski a tant gagné durant sa carrière d’entraîneur à Durham qu’on a du mal à imaginer une période où il galérait. Et pourtant, c’est bel et bien arrivé. Bien avant les bannières de champion, bien avant le record all-time de victoires pour un coach NCAA, bien avant les treize participations au Final Four (un record s’il vous plaît) et bien avant d’être surnommé Coach K, Mike était un entraîneur contesté qui a failli prendre la porte peu après son arrivée sur le campus de Duke.

Direction le début des années 1980. Après avoir coaché plusieurs années dans la fac où il a joué entre 1966 et 1969, à savoir l’Army University, Mike Krzyzewski prend le poste d’entraîneur de Duke où il succède à un certain Bill Foster, parti pour la Caroline du Sud après avoir transformé le programme des Blue Devils en l’un des plus sérieux du pays. Entre 1977 et 1980, Duke a affiché un bilan très solide de 73 victoires – 24 défaites, avec en prime trois participations au tournoi final NCAA et même une finale nationale en 1978. Traduction, Mike débarque dans une université ambitieuse et en pleine ascension, ce qui amène à la fois de excitation mais aussi pas mal d’attentes pour ce jeune entraîneur. Celui qui a joué sous les ordres du légendaire Bob Knight avant de devenir son assistant n’a que 33 ans à l’époque et a envie de construire quelque chose de grand pour confirmer les propos très élogieux de Tom Butters, le chef de la section sportive de Duke qui considère alors Mike Krzyzewski comme « le jeune coach le plus brillant de toute l’Amérique ». Des propos qui montrent à quel point Butters croit en lui alors que des candidats confirmés comme Bob Weltlich et Tom Davis semblaient également faire partie des candidats. Bonjour la pression.

Également convoité par l’université d’Iowa State avant de choisir Duke, Krzyzewski débarque dans la très compétitive Conférence ACC où évoluent notamment les North Carolina Tar Heels du légendaire Dean Smith. Avec son jeune âge, son nom imprononçable et sa relative inexpérience, Mike est un mystère pour beaucoup de monde, ce qui n’est pas forcément un avantage quand les choses tournent mal. Parce que oui, assez vite, Mike va se rendre compte de la difficulté de la tâche. Le départ de l’intérieur Mike Gminski – qui faisait partie des piliers de l’équipe de Bill Foster lors des quatre années précédentes – fait particulièrement mal à l’équipe de Duke, et les nouveaux principes de Krzyzewski prennent du temps à se mettre en place. Résultat, les Blue Devils ne remportent que 17 matchs sur 30 au cours de la première saison de Mike sur le banc (sept de moins que l’année précédente) et n’arrivent même pas à décrocher leur billet pour le tournoi NCAA. Au lieu de ça, ils doivent se contenter d’une participation au tournoi NIT, une compétition en perte de prestige et réservée aux universités de seconde zone. Bref, pas vraiment ce qui était prévu à la base, mais Krzyzewski possède alors toujours l’argument du temps pour se défendre. Bah oui, parfois, la première année est compliquée tout simplement car une période d’adaptation est nécessaire, autant pour le coach que pour les joueurs. Le problème pour Mike, c’est que ça ne va pas s’arranger par la suite. Au contraire même. Lors de sa deuxième saison, Duke passe carrément dans le négatif avec un bilan de 10-17, bilan qui sera à peine meilleur lors de la troisième campagne de Krzyzewski (11-17). 38 victoires pour 47 défaites en trois saisons, c’est ce qu’on appelle des débuts très compliqués. Et après une véritable humiliation contre Virginia au premier tour du tournoi ACC de 1983 (défaite 109-66), ça sent plus que jamais le roussi pour lui. Une pétition circule à l’intérieur de la fac de Duke pour que Mike se fasse virer. Les fans lui envoient des « Dehors Krzyzewski » à la tronche. Sa femme Mickie est même en larmes car elle sent la fin arriver. Vous l’avez compris, le jeune entraîneur aux cheveux noirs toujours parfaitement coiffés est véritablement sur un siège éjectable.

Sauf qu’il ne se fera jamais éjecter. Mike se retrouve avec plusieurs dirigeants de Duke dans un petit restaurant d’Atlanta, ville où les Blue Devils ont pris l’eau lors du tournoi ACC. L’un des responsables de la section sportive Tom Mickle lève son verre pour dire à Krzyzewski, « Allez, on oublie ce match ». Ce dernier lève son verre à son tour avant de répondre « On n’oubliera jamais ce put*in de match ». Tom Butters mise sur la patience et réaffirme sa confiance envers Mike Krzyzewski, et c’est ainsi que l’aventure continue. Lors du premier entraînement de la saison suivante, les joueurs débarquent à l’intérieur du Cameron Indoor Stadium avec le score indiquant 109-66. Oui, comme celui de la défaite contre Virginia. Une défaite qui servira de source d’inspiration pour l’équipe de la saison 1983-84, à savoir celle de la renaissance sous l’impulsion de joueurs comme Jay Bilas, Dave Henderson, Mark Alarie et Johnny Dawkins. Ces gars-là, tous recrutés par Krzyzewski en 1982, ont gagné en maturité après leur saison freshman et deviennent par la suite les piliers du basket version Coach K jusqu’au milieu des eighties. En 1986, lors de la dernière année du quatuor, les Blue Devils remportent 37 de leurs 40 matchs ainsi qu’un titre de Conférence ACC, et arrivent même jusqu’à la finale de la March Madness.

Mike Krzyzewski et l’université de Duke devront attendre 1991 pour accrocher une première bannière de champion national au sommet du Cameron Indoor Stadium. Mais ce succès symbolisera officiellement le début d’une domination qui a su parcourir les décennies, les Blue Devils remportant cinq titres au total. Et dire qu’on a failli passer à côté de tout ça…