Le jour où George Gervin et David Thompson luttaient pour finir la saison meilleur scoreur : planter 73 points et avoir le seum, c’est possible
Le 09 avr. 2020 à 13:00 par Alexandre Taupin
Il y a 42 ans jour pour jour, George Gervin et David Thompson étaient au coude à coude pour finir meilleur scoreur de la NBA. Il reste alors un seul match à disputer et chacun se doit de sortir le grand jeu pour prendre l’avantage sur son rival. Coup d’œil dans le rétro pour analyser l’un des plus beaux duels à distance de l’histoire de la ligue.
Nous sommes le 9 avril 1978. Internet n’existe pas encore, personne ne sait qui est Michael Jordan et la mode en NBA est alors faite de coupes afro et de shorts moule-bite. Les stars de l’époque s’appellent Moses Malone, Kareem Abdul-Jabbar, Julius Erving mais aussi George Gervin. Et en ce dimanche 9 avril 1978, c’est justement “Ice-Man” qui est la meilleure gâchette du pays avec 26,8 points de moyenne. Son poursuivant direct est la star des Nuggets, David Thompson. L’ancienne idole de His Airness n’a que 16 points de retard sur le scoreur des Spurs avec un match restant à jouer. Problème : Denver est déjà qualifié pour les Playoffs et ce match n’a absolument aucun intérêt si ce n’est ce titre de meilleur marqueur. Larry Brown en est conscient et il laisse le choix à sa star. Thompson ne fait pas de ce titre une priorité absolue mais il va quand même jouer. S’il réussit une grosse performance, la pression sera sur Gervin, qui ne joue que le soir face au Jazz. Et c’est parti à la Cobo Arena, l’ancienne salle des Pistons, sous les yeux rêveurs de… 3500 personnes. Des fans qui vont en avoir pour leur argent puisque “Skywalker” va enchaîner les buckets vitesse grand V. Cela commence avec un petit huit sur huit d’entrée et… 32 points dans le premier quart-temps. Le joueur ne le sait pas lui-même mais c’est un record NBA qu’il vient de battre, celui de Wilt Chamberlain (31 points). Excusez du peu. Le match est très disputé, ce qui va permettre à Thompson de jouer jusqu’au bout pour gonfler sa marque. Sa fiche de stats ? 73 points, 7 rebonds à 28/38 et 17/20 sur la ligne. On rappelle pour ceux qui l’ignorent qu’on parle là d’un extérieur, pas un mec qui passe sa vie sous le cercle. 73 points c’est aussi, à l’époque, la troisième marque de l’histoire de la NBA derrière Wilt Chamberlain (100 et 78 points). Monsieur David Thompson, mesdames et messieurs.
Pendant que Dave met le feu à la défense de Detroit (mais perd tout de même), George Gervin arrive du côté de la Nouvelle-Orléans où il va défier le Jazz. Non, vous ne rêvez pas, il s’agit bien des New Orleans Jazz. Maintenant que votre cerveau a fait une mixtape rapide entre Stockton, Malone, Chris Paul et Anthony Davis, on va revenir sur ce match palpitant. Au coup d’envoi, Ice-Man sait que son rival a fait le show du côté de Detroit et il doit planter 58 pions au Jazz au risque de perdre le titre qui lui tendait les bras. Le challenge est lancé, la suite est raconté par David Thompson qui écoutait le match à la radio !
“J’ai commencé à écouter à partir du second quart-temps et à la mi-temps il était déjà à 53 points. J’ai tout de suite compris que j’avais marqué 73 points pour rien. J’ai été le meilleur scoreur de la ligue pendant sept heures. Même mon record sur un quart-temps a été battu. Il a fallu seize ans pour battre le record de Wilt et sept heures pour battre le mien.”
George Gervin finira le match à 63 points (23/49) dans une défaite de 20 points contre New Orleans… S’il n’a jamais remporté de bague, Gégé n’en était pas moins un scoreur fou, capable de prendre feu rapidement et d’enchaîner les cartons. Ce premier titre de meilleur scoreur sera d’ailleurs suivi par trois autres dans les années 80. Son arme de prédilection ? Le finger roll : un mouvement du bout des doigts pour déposer le ballon dans le cercle, un geste qui est aujourd’hui utilisé par tous les joueurs de la balle orange, c’est dire l’héritage laissé par celui qui fut longtemps le visage des San Antonio Spurs. Son record sur un quart-temps mettra 30 ans à être égalé (Carmelo Anthony en 2008) et il faudra attendre 37 ans pour voir Klay Thompson le surpasser (en 2015 contre Sacramento). Mais si l’ancienne star des Spurs est autant célébrée pour sa performance c’est aussi que David Thompson a su élever la compétition à un niveau que peu de joueurs ont atteint au cours de leurs carrières. Comme dirait l’adage, il n’y a pas de grandes victoires sans grands adversaires.
Le 9 avril 1978, George Gervin et David Thompson ont écrit l’histoire, chacun leur tour. Si l’ailier des Spurs aura son nom dans les bouquins d’histoire c’est bien le basket qui sera le grand gagnant du jour grâce aux prouesses de deux de ses légendes. Et pour les amoureux de sensation forte sur un match, n’hésitez pas à aller mater aussi le duel Robinson/O’Neal pour le titre de meilleur scoreur en 1994 mais aussi Russell Westbrook dans sa quête du triple-double de moyenne en 2018 contre Memphis.