Il y a 10 ans, Kobe Bryant marquait l’histoire avec 81 points : un magnifique conte… de grand-mère

Le 22 janv. 2016 à 13:26 par Bastien Fontanieu

Kobe Bryant

Ce soir, Kobe vivra son dernier 22 janvier avec le maillot des Lakers. Une date particulière, historique même, car c’est un 22/01/2006 que le ‘Mamba’ deviendra une véritable légende vivante : retour sur les 81 du numéro 8, le plus grand opéra de notre époque.

En une décennie, on a eu le temps de la tourner, retourner et routourner, cette performance historique. Un marathon du scoring orchestré par ce génie moderne de la balle orange, Kobe vivant enfin une partie de son rêve le plus doux avec un Shaq disparu de la région, lui qui prenait beaucoup trop de place, physiquement comme médiatiquement. D’un point de vue collectif, on s’en souvient avec effroi, la suite est nettement moins glorieuse puisque les Lakers 2006 font un premier clin d’oeil à ceux de 2016, grâce à ce cirque proposé chaque soir par Smush Parker et Chris Mihm, les randoms représentant deux des meilleurs associés du Mamba à l’époque. Ambiance, UCPA. Cependant, individuellement ? Difficile de savoir où se situe Kobe dans sa tête, lui qui s’approche de l’âge idéal pour tout sportif professionnel qualifié (28 ans) mais sort d’une saison laborieuse, notamment marquée par l’affaire du Colorado Hotel, un lieu de repos dont on ne commentera pas le personnel sur TripAdvisor. La condition physique et technique du numéro 8 est intouchable, certes, mais c’est dans sa tête que le blocage réside. Un tourment qui grattera longtemps le futur troisième meilleur scoreur de l’histoire, avant de trouver la solution dans quelques transferts bien placés et une paix intérieure retrouvée.

Sauf que durant cette saison 2006, Kobe possède déjà toutes les clés de la franchise et personne n’est là pour lui dire que faire, comment jouer, que changer. Phil Jackson tente certes deux ou trois sessions thérapeutiques avec son client de luxe, mais autant parler à un mur avec la bouche collée sur le papier peint, le ‘Mamba’ a la tête ailleurs. Et notamment à la destruction des défenses qui se dressent devant lui, chaque soir, chaque semaine, chaque mois. Tout le monde y passe, le mois de novembre négocié comme préchauffage permet l’explosion du mois de décembre, avec 32 points de moyenne et quelques pépites marquantes. L’avertissement face à Dallas -justement- offre déjà un bel aperçu de la tornade à venir : 62 points en 3 quart-temps, soit plus de pions que les Mavs au complet, une première hallucination numérique constatée en Californie et qui mettra les couverts pour l’apothéose du 21 janvier 2006. Ce fameux 81, nombre tatoué ad vitam eternam sur le dos de Kobe. Un match qu’on a déjà vécu et revécu des dizaines de fois, mais nous fige constamment devant ces mêmes questions. Qui a bien pu motiver un tel déluge ? Comment peut-on rationaliser une performance aussi irrationnelle ? Existe-t-il un élément déclencheur précis qui aurait pu demander la concentration absolue du ‘Mamba’ ce soir-là ?

couverture

Source : Instagram

La réponse nous vient, en grande partie, de Pennsylvanie où Kobe a grandi. Enfant d’abord élevé en Italie suite aux choix de carrière de Papa, le gamin rentre chez l’Oncle Sam avec de nombreux obstacles à parcourir, comme son accent lorsqu’il parle anglais ou tout simplement la solitude qu’il affronte à un aussi jeune âge. Car même si Bryant est constitué de la même façon que les autres enfants de son époque, son isolement lui coupe accès à de nombreuses formes de vie sociale tout en lui offrant la possibilité de pratiquer son plus grand plaisir : jouer à la balle orange. Un dilemme qui le poursuivra pendant longtemps, notamment avec ses coéquipiers qui auront du mal à comprendre son comportement et ses mécanismes de pensée dans la vie de tous les jours. Kobe mange, dort, respire et transpire uniquement pour le basket, sa seule forme d’affection venant tout simplement de sa famille. D’où, également, son mariage avec Vanessa à un aussi jeune âge, Bryant se sentant suffisamment mature et ayant lui aussi besoin de se créer une famille, sa propre famille. Les amis se font rare, sa bande de potes étant composée de Stéphane Spalding, Louis Arceau, Camille Ficelle et Charles Raquette. Du coup, ce 22 janvier 2006, lorsque la grand-mère du joueur se rend à Los Angeles afin de le voir jouer en NBA pour la première fois de sa vie, c’est un moment exceptionnel qui doit lui être proposé. Un hommage, à elle comme à son mari défunt mais né un vingt-deux-zéro-un, Kobe ressentant le besoin de rendre fière son aînée ainsi que son grand-père. Le temps d’un soir, le temps d’une performance, de quoi remercier celui qui -pendant des années- lui enverra des montagnes de vidéos sur des basketteurs à imiter en cachette. De quoi remercier celle qui, dans une enfance uniquement tournée autour du sport, apportera un peu de stabilité et de structure venant du monde extérieur.

Je ne m’en suis rendu compte que plus tard, lorsque j’en parlais avec ma soeur et qu’elle le mentionnait, mais c’était le premier et unique match que ma grand-mère m’a vu jouer en NBA, et c’était aussi l’anniversaire de mon grand-père qui nous avait quitté. Aller aux matchs, cela la rend nerveuse, donc elle n’aime pas trop ça. C’est toujours dur pour elle de venir, mais cette fois-ci on venait de fêter l’anniversaire de Natalia (sa fille) donc elle est venue. Je ne sais pas si c’est mon grand-père qui a fait en sorte que chaque tir rentre de là où il était, mais c’était… intéressant. Dans le monde du sport, des choses comme ça semblent souvent se produire, et vous ne pouvez que vous poser des questions. Mon grand-père était celui qui m’envoyait tout le temps des vidéos de joueurs de l’autre côté de l’océan. Il enregistrait des matchs et ajoutait des vidéos de NBA Entertainement, donc c’était cool de recevoir ça pour son anniversaire.

Des cadeaux qui ont façonnés son jeu, puis sa carrière, nous menant aujourd’hui à ce dernier virage bourré d’émotions. Ce soir, Kobe jouera les Spurs à la maison. Difficile de savoir s’il mettra à nouveau 81 points, mais peu importe. Cette date est marquée à jamais dans la tête de nombreux fans. Elle l’est aussi pour Kobe, mais surtout dans son coeur. Profitons-en, une dernière fois !

Source image : Vocativ


Tags : Kobe Bryant