Basket 3×3 : une année historique, portée par des acteurs et actrices héroïques
Le 26 nov. 2024 à 10:23 par Giovanni Marriette
Ce week-end à Hong Kong, quatre Français sont passés à un Worthy De Jong près de tirer le plus beau feu d’artifice qui soit sur la saison 2024 de basket 3×3. Cette fois-ci c’est bel et bien fini, et il fallait, nous aussi, qu’on referme cette page avec respect et reconnaissance.
A la couverture physiquement éprouvante d’une saison NBA, le jour, la nuit, les week-ends et jours fériés, s’ajoutent chez TrashTalk l’envie de vous parler de l’Équipe de France, d’EuroLeague, des prospects français ou non amenés à dominer dans quelques années. L’envie et le besoin d’écrire des bouquins, des agendas, de tourner des vidéos, d’organiser des soirées, des voyages, d’imaginer des visuels et de les mettre sur des fringues. Entre autres.
Cette année ? Un petit frère a toqué à la porte du bureau et a exigé qu’on s’occupe un peu de lui. Ce petit frère c’est le basket 3×3, et il a pris beaucoup, beaucoup de place dans nos vies, nos emplois du temps et nos cœurs respectifs. Retour sur une année 2024 fabuleuse sur le demi-terrain mais surtout, ne restons pas bloqués en 2024.
Women Series
Pourquoi commencer crescendo quand on peut taper très fort d’entrée. Cette saison, l’Équipe de France féminine a été plus que solide sur le circuit mondial des Women Series. Cinq tournois disputés pour trois victoires, une finale et une cinquième place, ce qui nous donne au final une quatrième place au classement mondial, derrière les Pays-Bas, le Canada et l’Espagne.
Marie-Eve Paget, Hortense Limouzin, Laetitia Guapo, Myriam Djekoundade, Marie Mané, Ngo Djock et Jodie Cornelie ont tabassé quasiment tout le monde avec sourire et détermination, la plus grosse récompense pour les filles de Yann Julien étant sans doute la victoire lors du grand final de ces Women Series le 8 septembre à Hanghzou. Marie Mané, Myriam Djekoundade, Hortense Limouzin et Marie-Eve Paget sur le toit du monde, la première des quatre élue MVP du tournoi, et une consolation heureuse après un été tourmenté, on y reviendra un peu plus bas. La confirmation, en tout cas, que sur la durée les Bleues font partie du gratin mondial, cinq ans après leur titre de championnes du monde.
World Tour
L’équivalent des Women Series chez les hommes ? Le World Tour, à la différence près qu’il ne voit pas s’affronter des nations mais des “clubs”, la professionnalisation du 3×3 étant un chouïa plus avancé chez les gars que chez les filles. Sur le World Tour cette année, trois équipes françaises se sont distinguées. Ermont SENEF et Bordeaux Ballistik ont chacun disputés un Masters, plus haut level du circuit, et plusieurs Challengers, mais la figure de proue en 2024 fut bien entendu la formation de 3×3 Paris, créée en 2022 dans l’optique d’offrir à la France une chance d’être compétitive lors des Jeux de Paris 2024. Les Jeux on y viendra, mais en ce qui concerne le World Tour, disons que Paris 3×3… a fait du sale.
Franck Seguela, Jules Rambaut, Hugo Suhard, Paul Djoko, Alex Vialaret et Alexandre Aygalenq ont disputé huit Masters et ont atteint la finale à… six reprises, permettez-nous de tousser. Marseille, Lausanne, Shanghai, Macau, Manama, Shenzhen, six finales et une victoire historique (la deuxième de l’histoire de 3×3 Paris après Wuxi en 2023) en sortie de JO à Lausanne. Un parcours qui a propulsé Franck Seguela, Jules Rambaut, Paul Djoko et Hugo Suhard à Hong Kong pour la “Finale” du World Tour, finale dont ils ont atteint la finale, une nouvelle fois. Finale perdue après prolongation à l’issue d’un scénario cruel qui a vu un shoot à 2-points pour la gagne finalement compté à 1 point, avant le game winner du hollandais Worthy De Jong, là aussi on en reparlera très vite…
L’histoire se répète 🥲
Comme à Paris cet été, Worthy De Jong crucifie nos français avec un tir à 2 points inscrit en prolongations 🥶
Amsterdam remporte les FIBA 3×3 World Tour Finals mais quel parcours de Paris pour le dernier match de son histoire 👏@FIBA3x3 @3x3ffbb… pic.twitter.com/ugn093mS3H
— Sport en France (@sport_en_france) November 24, 2024
Une désillusion passagère très vite écrasée par la fierté ressentie par Karim Souchu et ses joueurs, par tous les gens ayant suivi cette équipe cette année, aux quatre coins du globe et toujours à 200% malgré la fatigue accumulée par un road trip incessant commencé le 31 mai.
Coupe d’Europe
En sortie de JO, la Coupe d’Europe à Vienne doit permettre un retour en douceur sur Terre, mais si possible avec une ou deux médailles. Chez les mecs Franck Seguela et Paul Djoko sont accompagnés du très jeune et très costaud Baptiste Oger, puis du tout aussi costaud mais un peu moins jeune Raphael Wilson, l’un des piliers de l’Équipe de France victorieuse de son TQO quelques mois plus tôt. Les Lettons et les Anglais sont battus en poule mais la Lituanie est trop solide en quarts, la France quitte Vienne sur une valse balte, il y en aura d’autres.
Chez les filles ? Marie-Eve Paget est la capitaine d’une équipe new look. Marie-Michelle Milapie, Noémie Brochant et Camille Droguet sont aux côtés de MEP pour faire goûter de nouveau le podium au 3×3 français. L’Ukraine et l’Italie sont balayées en poule, l’Autriche ne fait pas le poids en quart et les terribles hollandaises, championnes d’Europe en titre, sont battues en demi à l’issue d’une fin de match exceptionnelle de la GOAT Marie-Eve Paget. Malheureusement, en finale les Espagnoles se pointent avec quatre médaillées olympiques et les Françaises sont lessivées de leur demi. Médaille d’argent tout de même, une vraie perf qui symbolise la profondeur du vivier français.
UNE STATUE POUR MEP 🤯💙
Marie-Eve Paget inscrit un panier décisif pour envoyer la France en finale de la Coupe d’Europe ! 👏
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— 3×3 FFBB (@3x3ffbb) August 25, 2024
Paris 2024
Une chaise confortable, un rafraichissement, quelques minutes de tranquillité. Voilà ce qu’il a fallu au rédacteur de cet article avant de se lancer sur ce dernier paragraphe.
Difficile de revenir sur cette semaine olympique au Parc Urbain de la Concorde, difficile car on l’a vécu de l’intérieur, difficile car, presque quatre mois plus tard, l’émotion est à ce point encore vive qu’elle en fait trembler nos doigts. Ce qu’il s’est passé à Paris du 30 juillet au 5 août 2024 ? Compliqué de le définir avec des mots, tentons tout de même. Incroyable ? Fabuleux ? Terrible pour les unes et magique pour les autres ? Partons simplement sur un terme usité à des centaines de reprises en cet été olympique : iconique.
Malheur aux vaincues pour commencer.
Laetitia Guapo, Marie-Eve Paget, Myriam Djekoundade et Hortense Limouzin avaient tout pour réussir. Le talent, l’envie, l’expérience d’un titre de championnes du monde glané cinq ans plus tôt, l’appui d’une Arena exceptionnelle tant dans sa conception que dans l’ambiance qui y régnait. Mais tout ça était finalement… un peu trop pesant pour les quatre françaises. Un shoot avec la planche lors du premier match qui aurait pu changer l’entièreté du tournoi s’il n’était pas rentré, une autre défaite face à des Espagnoles agressives, des Espagnoles hein, et déjà les Bleues sentaient le poids de la pression malgré le soutien indéfectible des fans. Une victoire et une défaite le lendemain mais surtout deux terribles défaites d’un point contre Team USA et l’Allemagne, futures médaillées de bronze et d’or, tournoi terminé dans des hectolitres de larmes que partagent avec les filles une Concorde abattue.
Mais ces Jeux de Paris 2024 ne pouvaient clairement pas s’arrêter sur ces images. Horty, MEP, Laeti, Mymy, quatre valeureuses guerrières qui purent donc, on se console comme on peut, pousser leurs alter egos masculins à se dépasser. Attention, les lignes qui suivent relèvent de la science-fiction.
Franck Seguela, Jules Rambaut, Lucas Dussoulier, Timothé Vergiat.
Passés par deux interminables TQO pour se qualifier pour ces Jeux, étape validée grâce à quelques dingueries signées Rambaut, Vergiat ou Wilson, les Bleus se pointent à Paris, contrairement aux filles, avec une étiquette d’outsider. Moins référencés que les habitués serbes ou lettons par exemple, bénéficiant de moins de hype que les Hollandais ou les Américains, les joueurs de Karim Souchu attendaient juste de voir comment la Concorde allait les aider à monter en puissance, c’est pas nous qui le disions, c’est Franck Seguela lui-même, et c’est même à nous qu’il l’avait dit, au détour d’un café pris dans un hôtel marseillais deux mois plus tôt.
Le tournoi des Français ? Entré dans l’histoire, n’ayons pas peur des mots.
Deux géants gérés de main de maître les deux premiers jours : deux victoires. On rentre dans le dur les deux jours suivant avec quatre défaites face à la Serbie, la Lettonie, les Pays-Bas et les États-Unis. La défaite face aux Américains est problématique, celle face aux Hollandais logique, celle contre les Lettons rageante et celle face aux Serbes homérique, à l’issue d’une soirée terminée sous la pluie dans une ambiance indescriptible, s/o Vincent Royet et toute son équipe, véritables GOAT de l’entertainment sur du 3×3.
Le véritable virage de ce tournoi masculin ? Il a lieu le dimanche 4 août. Les Bleus ont besoin d’une victoire face à la Chine pour arracher un play-in et c’est chose faite avec panache. La Serbie sera l’adversaire de l’EDF, véritable bête noire de nos Français et accessoirement meilleure équipe du monde. La suite ? Des images valent toujours plus que des mots.
LA FRANCE QUI VIENT DE SORTIR LA SERBIE SEXTUPLE CHAMPION DU MONDE DE BASKET 3X3 !!!
JULES RAMBAUT, VERGIAT, VOUS ÊTES DES MALADES !!! 🇫🇷🇫🇷🇫🇷🇫🇷🇫🇷pic.twitter.com/SG0plkUSa2
— Feuille de Match (@fdematch) August 4, 2024
Les invincibles Serbes sont au tapis, les Bleus se rapprochent d’une médaille, Paris a littéralement tremblé sur le dernier shoot de Timothé Vergiat. La France file en demi face à la Lettonie, championne olympiques en titre et invaincue sur le tournoi. Résultat des courses ? Jules Rambaut bousille un Letton sur un poster, Lucas Dussoulier rentre le lancer de la gagne à l’issue d’un match tout en maitrise et les Bleus filent en finale, la quatrième dimension est atteinte.
L’ÉQUIPE DE FRANCE SE QUALIFIE POUR LA FINALE DU BASKET 3X3 !!! 🇫🇷🇫🇷🇫🇷
LUCAS DUSSOULIER, JULES RAMBAUT, FRANCK SEGUELA, TIMOTHÉ VERGIAT, VOUS ÊTES INCROYABLES MESSIEURS !
ON SERA DERRIÈRE VOUS EN FINALE À 22H30 ! 💪💪💪 pic.twitter.com/4McwNOxtCV
— TrashTalk (@TrashTalk_fr) August 5, 2024
La suite, tout le monde la connait, avec une finale à la fois terriblement cruelle mais finalement… terriblement 3×3. La meilleure publicité possible pour ce sport, avec un shoot légendaire de la star hollandaise Worthy De Jong, on y revient, qui crucifie la France et les Français en prolongation. Le shoot d’une vie pour l’un, la fin de l’aventure d’une vie pour d’autres, mais quelle promotion incroyable pour le 3×3, devant 5 000 personnes estomaquées qui ne savent plus si leurs larmes doivent être de tristesse ou de bonheur d’avoir vécu cette folie de si près…
#Paris2024 | 😭 NOOOOOOOOON !!! C’EST TERRIBLE !
🇳🇱 Les Pays-Bas climatisent complètement la Concorde en prolongation avec cet ÉNORME tir à deux points de De Jong !
🇫🇷🥈 La France termine deuxième de ce tournoi olympique avec une MAGNIFIQUE médaille d’argent. pic.twitter.com/GpLuEMyYJl
— francetvsport (@francetvsport) August 5, 2024
Le bilan de cette saison 2024
Il est exceptionnel, merci, au revoir.
Plus sérieusement ?
- Une médaille d’argent olympique (H)
- Une médaille d’argent à la Coupe d’Europe (F)
- 1 Masters en 6 finales (H)
- 2 Challengers en 3 Finales (H)
- 3 victoires aux Women Series (F)
- 1 Finale du World Tour (H)
- 1 victoire en Finale du World Tour (F)
- Marie-Eve Paget 4ème au ranking individuel
- Franck Seguela 5ème au ranking individuel
- Trois Français dans le Top 15, quatre dans le Top 20
- Un rédacteur en sueur pendant six mois
Cette année le basket 3×3 n’est pas né en France, les Kevin Corre, Perrine Le Leuch ou autres Dominique Gentil ne nous contrediront pas. Cette année, le basket 3×3 s’est démocratisé, il s’est popularisé, il nous a offert des victoires incroyables, des défaites épouvantables, mais des émotions, toujours, inégalables.
A l’issue de cette saison 2024 des choses vont bouger dans le 3×3 français. 3×3 Paris, par exemple, va devoir se réinventer. Franck Seguela, Jules Rambaut et Hugo Suhard ont fait part de leur ambition de poursuivre sur le circuit, pourquoi pas au sein d’une nouvelle entité toulousaine, pour pouvoir prétendre à une nouvelle épopée olympique en 2028 à Los Angeles. Des jeunes joueuses et joueurs se positionnent déjà pour l’avenir de nos Bleus et Bleues, (Droguet, Cauwet, Plaucoste) mais la bonne tenue du 3×3 ne se fera pas sans aide, aussi bien publique que privée. C’est le lot de tout sport “émergeant”. Ceci est en quelque sorte un appel, mais finissons plutôt par quelques remerciements.
Pour toutes celles et ceux qui ont fait vivre le basket 3×3 en 2024, de Paris à Vienne, de Hambourg à Lausanne en passant par Abu Dhabi, paye ton détour mais on s’est compris. A tous ceux qui luttent becs et ongles depuis des années pour faire reconnaitre ce sport en tant que tel et qui ont eu, enfin, droit à un peu de reconnaissance. A tous ceux là merci pour les émotions, bravo pour les prestations, et à très vite pour la confirmation.
3×3 out, mais pour quelques semaine seulement.