Performance All-Time : les 69 points de Michael Jordan face aux Cavaliers, une soirée légendaire

Le 28 mars 2024 à 10:44 par Julien Vion

Michael Jordan Chicago Bulls 27 mars 2024
Source image : YouTube

Michael Jordan et Cleveland, c’est une belle histoire d’amour. Peut-être ses victimes favorites dans ses premières années, les Cavs ont été témoins du sommet de la carrière de His Airness en matière de scoring. Un an après The Shot, Mike strikes again. Rétrospective, musique maestro. 

Si vous deviez choisir une bande originale pour accompagner la performance de Michael Jordan le 28 mars 1990, le choix est large. Stairway To Heaven de Led Zeppelin, Firework de Katy Perry ou No Tears left to cry d’Ariana Grande si vous avez un cousin dans l’Ohio. Alors qu’il entre dans sa sixième saison en NBA, l’arrière de 26 ans est dans son prime, et tout le monde ou presque a abandonné l’idée d’essayer de le stopper à la régulière.

“Je me souviendrai toujours de cette soirée comme étant celle où Michael Jordan et moi avons marqué 70 points ensemble.”

– Stacey King, joueur des Bulls (1989-1994), et grand comique de temps à autre

Si on va plus parler du GOAT que du King aujourd’hui, il est vrai qu’ils ont marqué 70 points points à eux deux un soir de la fin mars à Cleveland. La défense des Cavs a parfaitement réussi à contenir l’un, mais dommage, c’était plutôt de l’autre dont il aurait fallu se préoccuper.

Une fois n’est pas coutume à cette époque, les spectateurs du Richfield Coliseum s’apprêtent à vivre un nouveau supplice.

Un épouvantail avec le numéro 23 dans l’Ohio

Quelques mois avant l’événement dont il est question ici, Michael Jordan avait signé le moment le plus iconique de sa carrière dans cette même salle. Au terme d’une série de Playoffs complètement folle, il avait envoyé tout le monde au vestiaire avec un buzzer-beater venu d’ailleurs au Game 5 décisif. On comprend pourquoi les habitants de la région grimaçaient quand ils apercevaient l’uniforme rouge floqué du numéro 23. Mais ce n’est pas le dossier du jour, le récit complet de cette soirée est à retrouver ici.

This Date in NBA history, May 7, 1989…

Michael Jordan hits “The Shot” to send the Bulls to the 2nd Round! pic.twitter.com/QIyw3gluWS

— NBA History (@NBAHistory) May 7, 2023

Si les fans des Cavaliers de l’année 1989 ne portent pas Michael Jordan dans leur cœur, ceux de 1990 ne l’aiment pas beaucoup plus. Le 28 mars, l’arrière des Bulls les retrouve pour la quatrième fois de la saison, dans un classique de la division centrale. Lors des trois premières rencontres, il avait offert à la bande de Mark Price les bagatelles de 54, 38 et 41 points.

Pour autant, Price et les siens sont loin d’être des cancres dans la Conférence Est. Cette année-là, le bilan est poussif (32-37 avant le match contre Chicago), mais ils n’ont pas manqué les Playoffs depuis plusieurs années et affichaient même 57 victoires l’année précédente.

En plus du soyeux meneur de jeu, on dénote un effectif profond avec le grand gaillard Brad Daugherty, le clinquant Hot Rod William (un nom à marquer 50 points si vous voulez mon avis) ou encore le All-Star Larry Nance, le papa évidemment. Certes, les Bulls (46-23) font la course en tête au classement, mais le match est loin d’être trop déséquilibré sur le papier.

Cette fois, pas question de le laisser briller se dit-on dans l’Ohio. Servir de paillasson royal en antenne nationale, ça suffit. Dans un journal local, on peut d’ailleurs lire le titre suivant : “Mission Impossible : Ehlo va tenter de maintenir Air Jordan sur terre”. Ehlo, Craig de son petit nom, c’est l’arrière de Cleveland chargé de gérer Jojo dès qu’ils se croisent. La tâche semble ardue, mais Ehlo dispose pourtant de qualités défensives largement au-dessus de la moyenne. Le challenge est posé, et la rencontre s’apprête à débuter.

Des points comme s’il en pleuvait

D’emblée, His Airness glisse un doux fadeaway malgré un Winston Bennett dans le short. Sous les huées de la salle, il présente sa panoplie de circus shots, mi-distance et autres jordaneries. Il s’offre même une réplique de The Shot, sans le buzzer qui va avec, pour bien les titiller. Mais presque aucun dunk – sauf un en transition – n’est à noter ce soir-là. Il faut dire que la défense s’est organisée pour ne lui laisser aucun espace. Il faut qu’il s’en crée lui-même, comme avec un slalom entre trois défenseurs pour poser un doux lay-up à 3 mètres 05.

Les images sont formelles, Jordan a passé la quasi-totalité de la rencontre face au double et triple-team adverses. Manque de bol, ses jumpshots étaient particulièrement aiguisés et ni Ehlo, ni Bennett, ni Johnnie Morton qui tente lui aussi sa chance ne parvient à le stopper.

MJ est maître en l’art de provoquer des lancers-francs. Au milieu des double-team, il va chercher les fautes et le panier avec quand il a l’occasion. Les And-1 défilent, Ehlo, Lance et Williams terminent tous à six fautes. 21/23 sur la ligne au total.

À la mi-temps, Jordan est déjà à 31 points avec seulement quatre petits tirs manqués (11 sur 15). Mais MJ est à la tête d’un One man show ce soir-là, et le score n’est que de 53-50 en faveur de ses Bulls. Le supporting cast va devoir passer la deuxième, mais c’est plutôt Mike qui va enclencher la… sept ou huitième au moins. Difficile de jauger quand ça va aussi vite.

#OTD in 1990, Michael Jordan recorded his career-high 69 points against the Cavaliers 👀 pic.twitter.com/A6fEm0rKYD

— NBA TV (@NBATV) March 28, 2018

Second acte, même Jordan, et encore plus de points. Le rire des commentateurs quand il envoie une ficelle malgré une main au milieu de la figure pour atteindre 49 points ne trompe pas, la performance est irréelle. Seulement voilà, les Cavs se rebellent et Price (31 points, 8 passes) est aussi dans un grand soir.

La défense des Bulls prend l’eau. Ehlo, justement, commence à préchauffer sérieusement. À onze secondes de la fin, mené de trois points, ce bon vieux Craig envoie une ogive du parking pour égaliser. La salle est en folie. La dernière tentative de MJ est trop courte et le match file en prolongations. Et c’est peut-être le pire dans le soirée des fans des Cavs : l’espoir de gâcher la folle soirée de Jordan existe. Le Coliseum se croit en Playoffs. 

Sur les douze dernières minutes, les Bulls n’ont marqué que 16 points, dont 10 du numéro 23. Mais en overtime, la MJ dépendance est encore plus importante. 12 points pour l’équipe, 8 pour sa star. Alors que Chucky Brown est sur la ligne pour permettre aux Cavs de recoller, il manque son lancer et Michael plonge au rebond offensif. Faute volontaire derrière, 2/2 et match plié. Le sourire des fans s’évapore en quelques instants. Après l’ultime buzzer, le commentateur de TNT fait un constat indéniable :

“Cleveland est en état de choc absolu en ce moment, ils ne peuvent pas croire que MJ puisse continuer à leur faire ça. C’est incroyable.”

Comme évoqué précédemment, Michael Jordan devait sourire dès qu’il voyait l’uniforme blanc des Cavs dans ces années-là. En 1989-90, il est le meilleur marqueur de la ligue avec 33,6 points par match, mais contre les cavaliers de l’Ohio, c’est 44,8 par soir en cinq rencontres. Épouvantail, définition.

Une performance individuelle cinq étoiles

Mais là où Michael Jordan ne fait pas les choses à moitié, c’est qu’il ne se contente pas de marquer des points. MJ est aussi sur… tous les rebonds. 11 défensifs et 7 (!) offensifs, un arrière qui moissonne autant c’est plutôt inédit. 18 rebonds au total, record en carrière évidemment.

En défense, il n’est pas en reste. Une activité de tous les instants que ne peuvent même pas traduire ses 4 interceptions et son contre. Dans son prime, Jordan fait tout. Preuve en est, il termine aussi à… 6 passes. Au gré des trappes, il se permet des caviars – dont un no-look, excusez le – pour essayer d’impliquer ses coéquipiers. Pour le coup, ça, il aura plus de mal. Derrière lui, Horace Grant marque 16 points, mais aucun autre taureau ne dépasse 9. Stacey King, avec son petit point, peut se vanter d’avoir au moins participé à la fête.

Même avec 50 minutes dans les pattes, Michael Jordan n’a pas faibli en prolongations. De toute façon, il n’avait pas le choix pour gagner, comme il l’explique après la rencontre :

“Je n’ai pas pensé à la fatigue parce que je voulais gagner le match. J’ai déjà été dans cette situation où j’ai marqué beaucoup de points et nous avions perdu, et je ne voulais pas que cela se produise.”

Voici la mixtape complète de son 69/18/6/4. Douze minutes de Greatness.

Jordan dépasse la barre des 60 pour la quatrième fois de sa carrière, effaçant son ancien record à 63 points. Il confie aux journalistes qu’il vient d’envoyer la performance la plus aboutie depuis son arrivée en NBA. Qu’on regarde les images, les stats, ou le visage des spectateurs, on comprend bien pourquoi.

Bref, on parle d’un joueur qui est “un sur un million, un sur un milliard” selon les mots de l’intérieur des Cavs Hot Rod Williams. Et oui, on parle de Michael Jordan, His Airness himself

Source texte : NBA, Waitingfornextyear, Morning Journal, BasketballReference


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