Spike Lee et les New York Knicks, une histoire d’amour vieille de plus de 50 ans

Le 05 mai 2023 à 18:27 par Clément Hénot

Spike Lee Knicks
Source image : YouTube

Si les Lakers ont Matt Pokora Jack Nicholson, les Knicks, eux, ont Spike Lee. Chaque jour depuis une trentaine d’année, vous pouvez voir le célèbre réalisateur de films aux premiers rangs du Madison Square Garden, toujours affublé de ses vêtements aux couleurs de sa franchise de cœur. Mais comment est-ce devenu l’amour fou entre eux ? Récit de cette histoire entre Spike Lee et Knicks.

Spike Lee, de son vrai nom Shelton Jackson Lee (le surnom “Spike” venant de sa mère, qui l’appelait ainsi dans son enfance), est né à Atlanta en 1957, à priori, pas de lien avec la ville de New York pour l’instant. Mais heureusement pour lui, il n’aura pas à supporter les Hawks puisqu’il va vite déménager dans la Big Apple après le collège.

Il y fera ses études par la suite, plus précisément à l’Université de New York, à l’Université de Columbia mais aussi la Tisch School of the Arts. Il habite dans le quartier de Fort Greene situé à Brooklyn. “Mais pourquoi il ne supporte pas les Nets alors” nous demanderez-vous ? Tout simplement parce qu’à l’époque, les Nets sont dans le New Jersey, et que les Knicks sont la seule équipe située dans New York intramuros, et ont donc la voie royale pour conquérir le cœur du réalisateur. Il s’est également pris d’amour pour les autres équipes de sports de la ville, notamment les New York Giants en NFL (football américain), les New York Rangers en NHL (hockey) et les New York Yankees en MLB (baseball). Mais ce sont bien les Knicks qui sont numéro uno dans son cœur.

“Imaginez si j’obtenais un dollar pour chaque personne qui me le demande (si je vais devenir un fan des Nets), je pourrais financer un autre film. Non non et non, je ne peux pas ! Je suis orange et bleu baby !” – Spike Lee

Comme on le disait, cela fait une trentaine d’années que Spike Lee est assis courtside au MSG, pouvant même parfois interagir avec les joueurs présents sur le parquet.

Son échange le plus célèbre s’est déroulé avec Reggie Miller pendant les Playoffs 1995 lors des demi-finales de conférence face aux Pacers d’Indiana. Malheureusement, c’est l’arrière des Pacers qui aura le dernier mot ce soir-là, Miller prenant soudainement feu. En effet, c’est le jour des fameux 8 points en 9 secondes de la légende d’Indiana. Les Knicks gagnaient 105 à 99, ils ont finalement perdu 107 à 105. C’est l’une des histoires que les anciens aiment bien raconter. Quelque temps plus tard, le shooteur fera ensuite ce geste si caractéristique du “choke”, en mettant ses deux mains à son cou pour mimer un étranglement après un match remporté par Indiana au Madison, suite à un dernier quart-temps d’anthologie. Aujourd’hui, les deux hommes sont toutefois en bons termes.

Malgré cet “incident”, Spike Lee n’a jamais reculé devant grand monde, et fait partie de l’ADN Knicks. Il a toujours les meilleurs sièges, et fait partie des meubles dans cette franchise qu’il a supportée contre vents et marées, même lorsque le franchise-player était Allonzo Trier ou encore Landry Fields (dont il a fréquemment porté le maillot à l’époque).

Reggie Miller est loin d’être le seul à avoir croisé la route de monsieur Lee. Kobe Bryant a déjà trollé monsieur Lee également, idem pour Michael Jordan et Scottie Pippen. MJ en scorant 55 points au Madison Square Garden, et Pippen en allant aplatir Patrick Ewing sur un dunk, avant de l’enjamber, créant ainsi une échauffourée entre joueurs. C’est à ce moment-là que Pip’ est parti susurrer quelques mots doux à l’oreille du réalisateur. Plus récemment, Anthony Davis et LeBron James ont également trollé Spike Lee après le coup de sifflet final.

C’est aussi tout cela qui fait la personnalité de Spike Lee. Sa loyauté à toute épreuve le rend toujours plus dévoué pour soutenir son équipe, quitte à parfois être trop extrême dans ses saillies verbales, ou à trop motiver les joueurs adverses. Cela représente à merveille la personnification du fan des Knicks un peu timbré sur les bords. Spike Lee a même déjà été pris à partie par certains journaux, notamment après le choke de John Starks et les siens à domicile face aux Pacers de Reggie Miller. Le lendemain, la presse new-yorkaise titrait notamment “Merci Spike” ou encore “Tais-toi” à l’encontre du réalisateur, en réponse aux défaites probablement causées en partie par ses tentatives de trashtalking.

Mais son comportement en bord de terrain semble correspondre à sa personnalité en tant que scénariste et producteur/réalisateur de films. En effet, bon nombre des œuvres de Spike traitent des communautés et minorités pouvant être victimes de racisme et de discrimination, et pointent du doigt ces problèmes sociaux et sociétaux, quitte à créer des polémiques. Sa véhémence aux abords du parquet du Madison Square Garden est donc en adéquation avec les combats qu’il mène loin du Garden, dans ses différents films.

Mais tout cela aurait bien pu dégénérer et prendre fin le jour où le réalisateur de He Got Game est passé par l’entrée des employés du MSG le 2 mars 2020, une entrée qu’il utilise pourtant depuis plus de 20 ans déjà. La saison n’est pas encore arrêtée par le COVID, mais Spike Lee a déjà décidé qu’il ne viendrait plus voir les Knicks de la saison après le traitement qui lui a été réservé. En effet, avant de pouvoir revenir dans l’antre de son équipe de cœur, le réalisateur a d’abord été invité à quitter les lieux, et on peut voir une vidéo montrant une altercation musclée avec la sécurité. Et si la hache de guerre a depuis été enterrée avec James Dolan, propriétaire des Knicks, le communiqué montre tout de même une certaine amertume. Voici également ce qu’a déclaré Shelton Jackson Lee à postériori.

“L’agent de sécurité m’attendait comme si j’avais volé quelque chose chez Macy’s (NDLR : le grand centre commercial situé à Manhattan). Il voulait que je sorte, puis que je rentre à nouveau, mais ce n’était pas possible car ils avaient déjà scanné mon ticket. Je leur ai dit que je ne bougerai pas. […] Je dépense environ 300 000 dollars par an pour assister aux matchs. Je reviendrai la saison prochaine, mais c’en est terminé pour celle-ci.”

Director Spike Lee denied entry to MSG. Rumors are circulating that MSG CEO James Dolan didn’t want the famed director to enter. #SpikeLee #MSG pic.twitter.com/0gZVaHDXBP

— BroTalkLive (@brotalklive) March 3, 2020

“Je ne bougerai pas (3 fois), vous allez me traiter comme Charles Oakley ?”
NDLR : Charles Oakley a précédemment été exclu du MSG pendant une certaine période, pour un comportement et des propos envers James Dolan soi-disant inappropriés.

New York Knicks Statement on Spike Lee pic.twitter.com/19JcvhFKO7

— NY_KnicksPR (@NY_KnicksPR) March 3, 2020

“L’idée que Spike Lee puisse être une victime parce qu’on lui a demandé à plusieurs reprises de ne pas utiliser l’entrée pour les employés, mais celle spécialement pour les VIP (qui est utilisée par toutes les autres célébrités qui viennent au Garden), est risible. C’est décevant que Spike crée cette controverse, il est toujours le bienvenu au Garden par l’entrée VIP ou l’entrée générale, mais pas par l’entrée des salariés. C’est ce sur quoi il s’est mis d’accord avec Jim, au moment où ils se sont serré la main.”

Depuis, les deux clans se sont rabibochés, mais cet incident est probablement encore dans les têtes new-yorkaises. Spike Lee est finalement revenu plus d’un an plus tard (les restrictions sanitaires et jauges de l’époque n’ayant pas aidé) pour supporter les Knicks, haranguer ses joueurs et provoquer les adversaires. Quand on vous dit que sa passion est inébranlable… C’est au point de lancer la préparation d’une série sur les Knicks des années 90.

Pour la petite histoire, sachez que Spike Lee avait 13 ans lorsqu’il arpentait les travées de La Mecque du basket pour la première fois en 1970 lors des Finales NBA remportées 4-3 par les Knicks face aux Lakers, avec un Walt Frazier à 36 points et Willis Reed qui jouera cet ultime match sur une jambe malgré une déchirure à la cuisse pour galvaniser la foule. Assurément le plus grand moment de basket vécu par l’intermédiaire des Knicks par un Spike encore gamin. A partir de là, plus rien ne pouvait ébranler la passion du jeune Shelton J. Lee.

Spike Lee est ce que l’on appelle un die hard fan des Knicks, n’ayant pas peur de se faire vanner par des joueurs adverses ou de se montrer véhément aux abords du parquet. Les Knicks ont de nombreux fans dans tout le globe, mais c’est assurément à lui que l’on pense en premier lorsque l’on évoque la franchise de New York. 30 ans que cela dure, et plus encore à venir.

Sources texte : The Knicks Wall, Clutch Points, FanSided


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