Les Celtics ont bien foiré leur Game 6 : entre faillite offensive et gros coups de fatigue, récit d’une soirée qui a mal tourné
Le 17 juin 2022 à 09:23 par Arthur Baudin
À chaque carrefour gagnant s’égare un perdant. Dans la nuit de jeudi à vendredi, les Celtics ont manqué le coche en s’inclinant 90-103 à la maison, au moment où la victoire n’était plus une option. Cette saison 2021-22 s’éteint donc sur ce Game 6 lors duquel l’équipe d’Ime Udoka, envahie par la fatigue, n’a pas respecté ses principes de jeu. Débrief.
Jour de fête.
Nous sommes le jeudi 16 juin 2022. Il est 8h du mat à Boston et ce soir, c’est Game 6. Un bisou à madame, une tapote derrière le crâne des enfants, et Francisco Javier part au boulot avec le sourire. Dans le métro, tout le monde sait que tout le monde sait. À plusieurs reprises, Francisco Javier croise le regard d’inconnus, moins discourtois qu’à l’accoutumée. L’un d’eux lui adresse même un signe de camaraderie : un poing serré, en l’air, comme s’ils étaient envoyés au front dans le même bataillon. Ce monsieur a simplement dû apercevoir le trèfle brodé sur le portefeuille de Francisco Javier. L’ambiance chaleureuse d’un jour de match – qui plus est le plus important de la saison – absorbe l’impolitesse de la société. Un peu de stress, de l’excitation et une certaine dose de laisser-aller. Au bureau, Francisco Javier décapsule sa première Kro’ à 14h30. Le patron passe, et Francisco Javier essaie de camoufler la bouteille sous son poste de travail : « Mon dieu, mais que faites-vous pauvre inconscient !? ». Comme tout employé pris en flagrant délit de boisson, Francisco Javier accuse Djibril, un collègue que le patron a déjà dans le viseur puisqu’il a embouti sa Chrysler le mois dernier en « tentant un créneau avec les pieds ». Furieux, le patron fait demi-tour et revient trois minutes plus tard avec… un caisson de 1664 dorées comme du bon beurre : « On est en pleine canicule et vous buvez une Kro’ tiède, que je ne vous y reprenne pas Francisco. Où est le décap’ ? ». Abasourdi, Francisco Javier ne parvient pas à trouver ses mots. Son patron enchaîne : « Eh bah tiens, ça vous dirait de venir voir le match à la maison Francisco ? ».
Le début des emmerdes.
Il est 13h47. D’un brin de soleil entre les rideaux – révélateur d’une colonne de poussière – Francisco Javier ouvre les yeux. Il est en slibard, allongé sur un canapé en cuir marron, au milieu de ce qu’il pense être le salon de son patron. Sur une table basse en verre, un message confirme cette hypothèse : « Salut Francisco, tu dormais comme Jayson Tatum donc je ne t’ai pas réveillé. Je suis parti rendre le canon à nains, la location s’arrêtait à midi et j’ai quand même lâché 500 dollars de caution. Eh, ça fait suer pour les Celtics, mais un pari est un pari, et franchement Sebastiano ne t’as pas manqué ». Oulah, sur les quelques références faites par son patron, Francisco Javier n’en réassimile aucune. Qu’a-t-il bien pu se passer ? Il file dans la salle de bain pour se mettre la tête sous l’eau, retire son t-shirt, et découvre avec effroi le « pari » auquel faisait allusion le patron : sur la partie droite de son torse, un tatouage de Stephen Curry qui dribble avec son téton. Le Sebastiano en question s’est même permis de signer sous son œuvre. Épouvanté, Francisco Javier chute en arrière et parvient in extremis à s’accrocher à la poignée du placard. Plus de peur que de mal, mais toujours l’un des meilleurs meneurs all-time qui dribble avec son téton. Il lui faut des réponses. Francisco Javier retourne dans le salon, récupère son téléphone dans la fente du canapé et ouvre l’application NBA. C’est le choc : cette nuit, les Celtics ont pris une boursouflée. Tout lui revient. Il se souvient que le banc de Boston n’a scoré que 5 points pour 45 minutes de jeu en cumulé. Il se souvient qu’après deux “restitutions intestinales” liées à l’alcool, la lecture des stats de Jayson Tatum lui en a provoqué une troisième. Il se souvient que malgré la défaite, son amour pour Al Horford – 19 points à 4/5 à 3-points et 14 rebonds – n’a pas perdu de son grain. Il se souvient avoir appelé un homonyme de Derrick White pour lui demander de quitter le Massachussetts sous peine d’« assaillir la façade de sa maison avec un canon à nains ». Mais par-dessus tout, il se souvient du sourire narguant d’un Stephen Curry MVP des Finales, que son équipe n’a jamais su arrêter.
À l’année prochaine.
Huge rejection by @Al_Horford ❌ pic.twitter.com/8eNX9Q7zMt
— Boston Celtics (@celtics) June 17, 2022
Même dans la défaite, de l’optimisme. Ce gros block d’Al Horford a le mérite de montrer les efforts du TD Garden dans sa tentative d’« enflammade » du Game 6. Un lay-up rentré à -15 ? La bronca. Une interception à -21 ? La bronca. Mais ne parvenant pas à faire dégraisser l’écart sous la barre des huit ou neuf unités, les Celtics n’ont jamais converti toute cette énergie en bonne dynamique. Il a manqué un zeste de condition physique à Jayson Tatum pour terminer – ou essayer de prolonger – sa série avec efficacité et dignité. Par « condition physique », on ne sous-entend bien sûr pas qu’il a besoin de faire un footing une fois par semaine. Pour le coup, on l’a senti diminué dans sa capacité à, non pas analyser le jeu, mais plutôt exécuter ses idées. Des drives forcés, une finition de dromadaire et quelques manquements défensifs : a-t-il touché ses limites ? D’autres gars de l’effectif – comme Derrick White et son +/- de « – 26 » – n’ont pas joué avec la flamme. Celle qui alimente les efforts d’un joueur quand il sait que deux matchs le séparent de son premier titre NBA. L’escouade d’Ime Udoka a tourné autour du périmètre, sans jamais parvenir à trouver une ouverture. La défense californienne était trop soudée, et minute après minute, l’on sentait venir la fin de parcours pour Boston. Au réveil, la gueule de boise risque de jouer à Pong dans le crâne.
« L’avenir est prometteur et nous ne faisons que commencer. » – Ime Udoka, en conférence d’après-match
Les Celtics ont déjoué et ça la fout franchement mal. Il convient toutefois d’honorer – presque de célébrer – la magnifique campagne de postseason des hommes d’Ime Udoka, donnés hors course en janvier, mais terminés sur la seconde marche du podium. L’histoire est belle.