Gregg Popovich, on raccroche cet été ? La fin est moche mais elle ne doit pas faire oublier tout le reste

Le 27 mars 2020 à 12:18 par Benoît Carlier

Gregg Popovich
Source image : nba league pass

Près d’un quart de siècle après son début de règne sur le banc des Spurs, Gregg Popovich vit probablement ses dernières heures en tant que coach à San Antonio. On imaginait forcément une fin un peu différente mais ça ne doit pas effacer toutes ces belles années passées dans le Texas. Allez, Saint-Émilion.

Pour la première fois depuis 1997, Gregg Popovich ne devrait pas aller en Playoffs. Pour la première fois depuis 1997, Gregg Popovich pourrait terminer une saison dans le négatif. Et dire que c’est probablement sa dernière sur le banc des Spurs… A ce niveau-là, on peut même parler de SON banc tellement le septuagénaire a eu le temps de sculpter la forme de son derrière sur les chaises en courtside du AT&T Center et même de l’Alamodome (ça rajeunit pas tout ça). Oui, les silver and black risquent de mettre fin à une série de 22 qualifications consécutives en Playoffs lors desquelles ils sont allés soulever le trophée à cinq reprises, mais c’est peut-être aussi parce que Pop a trop bien formé la concurrence. Parmi tous les assistants et joueurs passés sous les ordres de l’ancien capitaine de l’équipe des forces armées, on retrouve Mike Budenholzer, Brett Brown ou encore Steve Kerr qui font tout simplement partie des meilleurs entraîneurs de la Ligue et Kawhi Leonard qui terrifie toute la planète basket avec son rire diabolique. A force de transmettre son savoir-faire et d’habituer les concurrents à la perfection tous les ans pendant plus de deux décennies, il arrive forcément un jour où les padawans prennent le pouvoir.

Car depuis sa prise de poste en décembre 1996, le natif de l’Indiana n’a cessé de montrer l’exemple en inculquant des valeurs de travail, de tolérance et d’humilité à ses joueurs et son staff. Symbole de cet héritage à la Pop, le Big Three le plus victorieux de l’histoire des Playoffs formé par Tim Duncan, Manu Ginobili et Tony Parker. Deux étrangers, évidemment, pour celui élevé par un père serbe et une mère croate. La franchise ne s’est pas encore remise des départs à la retraite successifs de ces trois monuments à l’instar de Pop qui n’a pu retenir ses larmes au moment de célébrer ses anciens souffre-douleurs lors de leur retrait de maillot à San Antonio. Il est comme ça avec tous ses joueurs. Aimant et strict, exigeant et fier de ses progénitures. Alors depuis ce divorce compliqué avec le MVP des Finales 2014, la perte de sa femme en 2018 et le départ à la retraite de TD, Gino et TiPi, on savait que la fin était proche pour lui permettre de faire ce qu’il apprécie peut-être encore plus que le basket : faire la tournée des caves pour partager un verre et un moment de convivialité avec les meilleurs vignerons. On espérait qu’il allait annoncer sa retraite sportive avec une bouteille de Bordeaux qui dépasseraient de son sac, mais l’humeur pourrait être un petit peu moins joyeuse si les Spurs ne poursuivent pas leur saison au-delà de la saison régulière. Tant pis… il y aura encore les Jeux Olympiques pour se rattraper.

Même si le coronavirus essaye de jouer avec notre patience et nous force à refaire tous nos agendas, Gregg tient à obtenir sa médaille olympique. Pour finir sur une bonne note et rentrer définitivement au Panthéon des tous meilleurs coachs de l’histoire bien qu’il y soit déjà depuis un bon moment. Cinq titres on l’a dit et 1272 victoires (troisième all-time) en 1883 matchs, en attendant de pouvoir en gratter encore quelques-unes si la saison reprend un jour. Ce qui est sûr, c’est que le grognon n’abandonnera pas. Qu’il ira jusqu’au bout de ses engagements comme il l’a fait depuis toujours. On pourrait même avoir une surprise si Pop décide de revenir pour laisser son bébé dans un meilleur état dans un an par exemple. Mais il est temps et on imagine que les lectures sur l’œnologie qu’il aura eu le temps de faire pendant ce confinement ne vont pas lui donner envie de repousser encore son départ. Il aura alors un an pour préparer convenablement Tokyo 2021 en espérant quand même que le calendrier ne nous prive pas une nouvelle fois d’une quinzaine de rêve avec LeBron et une clique de MVP et de All-Stars au service de Barbe Blanche pour venger l’affront de la Coupe du Monde 2019 et repartir de Tokyo avec le plus beau métal. On n’a pas oublié tous les forfaits et les mauvaises excuses pour ne pas aller en Chine en septembre et on vous en veut encore…

Du côté de San Antonio, on commence aussi à préparer la suite. Becky Hammon est devenue première assistante de Coach Pop alors que Tim Duncan a lui aussi rejoint le staff des Spurs puisque son grand pote argentin a refusé le poste. Néanmoins, il semblerait qu’il faille aller chercher ailleurs pour trouver le futur entraîneur des Éperons pour un paquet d’années on l’espère. Le nom de Bill Self est sorti de nulle part en cours de saison pour se positionner parmi les favoris mais l’été qui vient devrait aussi donner lieu à une exceptionnelle valse des coachs lors de laquelle de nombreux manieurs de tablettes pourraient faire leurs valises. Et justement, un autre nom semble quand même parfaitement indiqué pour succéder au monument du coaching à Fort Alamo. Parti de Brooklyn dans des conditions mystérieuses avant même la fin de la saison, Kenny Atkinson a tous les atouts pour plaire aux Spurs. Travaillant main dans la main avec Sean Marks, un autre ancien du crew de Pop tiens donc, pendant quatre ans, le jeune entraîneur avait réussi à construire une vraie identité et à instaurer une culture dans une franchise sans direction claire jusque-là. Les valeurs pourraient bien matcher avec celles de Pop qui risque aussi d’avoir son petit mot à dire pour désigner sa succession. Parce qu’il ne faut pas croire, Popovich ne lâchera jamais son bébé totalement et sera toujours là en cas de pépin.

L’heure des hommages n’est pas encore arrivée, elle viendra plus tard et nul doute que les avis seront unanimes aux quatre coins de la Ligue. Alors profitons des derniers instants de Pop, de ses ultimes fautes techniques et autres punchlines en conférence de presse avant qu’il ne soit trop tard. Un coach all-time, s’il en fallait un.