L’arrivée de Sean Marks aux Nets en février 2016 : leçon de patience et de gestion à Brooklyn

Le 07 déc. 2019 à 18:33 par Benoît Carlier

Sean Marks Brooklyn Nets
Source image : YouTube/YESNetwork

Il fut un temps pas si lointain où les Nets étaient encore la risée de la Ligue avec des choix de draft bradés offerts aux Celtics sur un plateau dans l’un des pires trades de l’histoire de la NBA et un potentiel de hype anormalement peu exploité pour la ville. Puis Sean Marks est arrivé en février 2016 et tout a commencé à s’améliorer. Comme par magie… ou simplement grâce des décisions rationnelles et réfléchies assaisonnées d’une pincée de patience.

Le simple nom de Sean Marks à qui l’on peut désormais aussi ajouter celui de Kenny Atkinson permet de redonner le sourire à un fan de Brooklyn lorsqu’il a l’impression de passer une mauvaise journée. C’est pour dire la cote de popularité de ce GM sorti un peu de nulle part après une longue mais faible carrière en tant que joueur NBA puis une formation accélérée auprès de Gregg Popovich et R.C. Buford en tant qu’assistant coach chez les San Antonio Spurs entre 2013 et 2016. Il faut avouer qu’en trois ans, le natif d’Auckland en Nouvelle-Zélande a enchaîné les manœuvres pour remettre le paquebot dans le sens de la marche. Aujourd’hui, la franchise fait cap sur l’avenir avec sérénité et ambition, deux mots qui avaient totalement disparu du vocabulaire de ce borough new-yorkais depuis le déménagement des Nets au Barclays Center en 2012 et plus particulièrement encore depuis ce fameux trade de juillet 2013 avec les Celtics privant Brooklyn de ses premiers tours de draft jusqu’en… 2019. On dit merci Billy King ! Au moment de rejoindre le navire le 18 février 2016, Sean Marks avait donc trois bouts de ficelle, un morceau de bois et son cerveau pour mener la reconstruction complète de la franchise.

Pour entamer un tel chantier et tenter de changer la culture des Nets, l’architecte avait d’abord besoin d’un coach bricoleur qui partage la même mentalité que lui et capable de développer ses joueurs pour exploiter au maximum leur potentiel. Il a trouvé encore bien plus que ça avec Kenny Atkinson, pioché à Atlanta parmi les assistants d’un autre ancien de la maison des Spurs en la personne de Mike Budenholzer. Normalement, voici un autre nom qui inspire confiance dans le milieu malgré son relatif manque d’expérience à l’époque. C’est ainsi que deux rookies occupant les deux postes majeurs au sein du secteur sportif d’une franchise NBA ont commencé les grands travaux dans l’espoir de redorer le nouveau blason des Nets à moyen terme. Cela a commencé par l’échange de Thaddeus Young à Indianapolis pour obtenir un TDD leur permettant de récupérer Caris LeVert en 20ème position de la Draft 2016. Premier gros coup de pif du duo quand on voit le développement du swingman qui ne semble pas encore avoir atteint son plafond. Toutefois, le pari Anthony Bennett réalisé cet été là sera raté tout comme celui de Yogi Ferrell qui ira finalement exploser à Dallas après avoir été libéré par Brooklyn, mais les Nets tentent des choses en se disant que certains paris finiront bien par payer.

La chasse aux picks les mènera aussi à Washington juste avant la deadline 2017 pour y échanger Bogdan Bogdanovic dans sa dernière année de contrat et Chris McCullough contre quelques deals envahissants et surtout un premier tour de draft qui se transformera quelques mois plus tard en Jarrett Allen, l’actuel pivot titulaire à Brooklyn. Vous voyez les planètes commencer à s’aligner ou c’est encore trop vague ? Droit dans ses bottes et peu dérangé par le bilan de 20 victoires pour 62 défaites de l’équipe lors de sa première saison complète à New York, Sean Marks continue d’exécuter son plan avec un trade marquant à l’été 2017. Adieu Brook Lopez et merci pour tout ! Le plus grand joueur de l’histoire de la franchise va forcément laisser un vide (et plein de records) derrière lui mais son départ est nécessaire pour permettre la venue d’un jeune talent qui n’attendait qu’une nouvelle opportunité pour justifier sa position à la Draft 2015. On ne parle pas du gros Timofey Mozgov servant à faire le contrepoids dans l’échange mais bien de ce cafteur de D’Angelo Russell. Même si cet accord a aussi coûté un pick aux Nets se révélant être Kyle Kuzma, il n’y a rien à regretter quand on voit comment Kenny Atkinson a réussi à transformer son meneur en seulement deux ans.

C’est aussi pour ça que Sean Marks l’a choisi pour prendre la tête d’un groupe sans vraie direction à l’époque. En seulement trois ans, le coach a transformé D’Lo en All-Star ; Spencer Dinwiddie signé par le GM après avoir libéré Yogi Ferrell en candidat au titre de Sixth Man of the Year, vainqueur du Skills Challenge 2017 et aujourd’hui crédible pour réclamer une place pour le match des étoiles de Chicago en février prochain avec ses statistiques de franchise player alignées en l’absence de Kyrie Irving ; et enfin Joe Harris en sniper d’élite sélectionné pour représenter son pays à la Coupe du Monde avec Team USA et vainqueur du Three Point Contest en 2018. Pas tout mal pour un numéro 2 de Draft devenu indésirable dans sa franchise initiale, et deux seconds tours de Draft rapidement coupés avant d’être recueillis par les Nets. En trois ans, le duo a donc totalement transformé la culture de l’organisation basée à Brooklyn tout en récupérant quatre premiers tours de Draft dans différents trades pour arriver à la Free Agency 2019 avec suffisamment de cap pour signer un contrat max et la hype nécessaire pour attirer ce fameux gros poisson grâce à une campagne de Playoffs inespérée obtenue quelques mois plus tôt au terme d’une saison régulière terminée à la sixième place à l’Est (42-40).

La suite est encore toute fraîche dans nos mémoires. Le marché des agents-libres n’est ouvert que depuis quelques secondes lorsque Kevin Durant annonce qu’il rejoint les Nets pour quatre ans dans ce qui se révélera être un sign-and-trade permettant aux Warriors de récupérer D’Angelo Russell tandis que Kyrie Irving rejoint son grand ami à Brooklyn dans la foulée pour lancer la mode d’une NBA de duos qui ne fait que commencer. Le MVP 2014 ne devrait pas jouer de la saison et Uncle Drew est gêné à l’épaule mais le grand défi de Sean Marks est d’ores et déjà gagné. Après avoir connu 116 défaites en deux saisons, l’architecte est parvenu à redonner de l’élan à une franchise qui est déjà annoncée comme l’une des principales favorites pour le titre NBA en 2021. Pour cela, il a fallu affronter les moqueries, absorber des contrats empoisonnés dans la masse salariale des Nets en échange de TDD, développer des joueurs en qui personne ne croyait et commencer doucement à instaurer une culture de la gagne au sein du vestiaire pour redonner envie aux free agents de venir à Brooklyn.

Sean Marks ne sera peut-être pas nommé Executive of the Year cette saison, Kenny Atkinson ne recevra probablement pas la statuette de meilleur technicien de la Ligue et pourtant ce duo a réussi à faire passer une franchise malade de cancre à future surdouée de la NBA. Si Mikhail Prokhorov n’a pas eu la patience d’attendre jusque là, Joseph Tsai pourrait finalement tenir la promesse de son prédécesseur comme propriétaire des Nets en offrant un titre aux fans moins de cinq ans après son arrivée. Alors juste un peu de patience, car le boss sait ce qu’il fait.


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