Andre Iguodala, ce coéquipier modèle : lumière sur une carrière et un palmarès bâtis en toute discrétion

Le 05 juin 2019 à 07:20 par Clément Hénot

Andre Iguodala
Source image : YouTube

Alors qu’il a longtemps été la tête d’affiche des Sixers après le départ d’Allen Iverson, la carrière d’Andre Iguodala ne s’est jamais aussi bien portée que quand elle était à l’écart des projecteurs. Représentant l’archétype du joueur qu’il vaut mieux avoir avec que contre soi, Iggy continue d’émerveiller les puristes du basket, le tout à 35 ans… Retour sur une carrière qui mine de rien, représente une belle armoire à trophées.

Andre Iguodala est drafté en 2004 par les Sixers en neuvième position. 9, comme son numéro, qu’il a toujours porté dans chacune de ses franchises : Philadelphie, Denver et Golden State. Si sa carrière commence timidement, avec des moyennes n’ayant rien d’exceptionnelles, il se fait tout de même remarquer par sa polyvalence et son altruisme, mais surtout sa défense. Véritable chien de garde, cela ne l’empêche pas de claquer quelques cartons, comme lors de sa saison sophomore au Rising Stars Challenge, dont il sera élu MVP en postant 26 points et 13 rebonds dans le plus grand des calmes. D’abord dans l’ombre d’Allen Iverson, il s’impose ensuite comme son parfait lieutenant, daignant se taper le sale boulot sans rechigner tout en claquant plus de 18 points de moyenne dès sa troisième saison dans la ligue. En 2007, Iverson est transféré aux Nuggets, Iguodala devient la figure des 76ers. Certes, il est capable de scorer, mais le costume de franchise player semble beaucoup trop grand pour lui malgré une participation au All-Star Game, sa seule, en 2012. Toutefois, en Playoffs, il n’a jamais fait mieux qu’une demi-finale de conférence en 2012 après avoir disposés des Bulls, orphelins de Derrick Rose qui venait de se flinguer le genou pour la première fois de sa carrière.

Comprenant qu’ils sont destinés à plafonner avec ce joueur, aussi brave et dévoué soit-il, les Sixers décident d’envoyer Iguodala à son tour dans le Colorado, à Denver, rejoignant une flopée de bons joueurs comme Danilo Gallinari, Wilson Chandler ou Kenneth Faried. Même Ty Lawson était encore un joueur de basket à l’époque. L’équipe était prometteuse sur le papier, mais idem, AI9 n’est pas devenu le franchise player des Nuggets. Il ne score “que” 13 points par match mais ça il s’en tape car son équipe termine à la troisième place à l’Ouest avec 57 victoires pour 25 défaites. Malheureusement, ce sera une autre paire de manches puisque le collectif des Nuggets tombera dès le premier tour contre les Warriors, sur le score de 4-2. La légende des Dubs n’est pas encore en marche, mais on aperçoit nettement les prémices d’une belle association entre les Splash Brothers Stephen Curry et Klay Thompson. Et c’est là que la carrière d’Andre Iguodala (en tout cas en NBA) va basculer et que le joueur peut légitimement être considéré comme un visionnaire.

Après une saison à Denver, Andre Iguodala, alors free-agent, décide de signer chez… Les Warriors, qui viennent de le sortir des derniers Playoffs donc. Tiens ça ne vous rappelle donc rien ? Bon, on n’en est pas au niveau des cupcakes et des “fils de plage” qui ont pu être lancés à Kevin Durant en 2016, mais pour George Karl, Andre Iguodala était bel et bien une taupe dans le vestiaire des Nuggets. Le contexte est beaucoup moins dur, car Iggy n’est pas sorti aux portes des Finales, n’est pas un joueur du niveau de KD et ne rejoint pas le meilleur bilan de l’histoire. Sauf qu’il va embrasser un rôle qui lui sied bien mieux : celui du couteau suisse, faisant le sale boulot et délesté de la responsabilité du scoring : Iguodala n’a plus à planter 20 points par match, Stephen Curry et Klay Thompson s’en chargent très bien, en revanche il apporte sa dureté, sa défense tout en étant capable d’apporter des points en relais des stars, un transfert symbolique qui représente bien le bonhomme pour qui l’équipe passe avant tout. Lorsque les Dubs réalisent le potentiel d’Harrison Barnes, il accepte même de sortir du banc, pour faciliter l’éclosion du jeune poulain de North Carolina mais surtout pour le bon équilibre de l’équipe, qui s’en sort bien mieux lorsque le mastodonte jaillit du banc. Mais cette faculté à savoir se ranger au profit du collectif, se concentrer sur ce qu’il fait de mieux tout en se mettant moins de pression va l’amener à la consécration peu de temps après.

Cette consécration arrive en 2015, lorsqu’après sa deuxième saison chez les Warriors, il contribue grandement au titre obtenu face aux Cavaliers d’un LeBron James en mode retour, grâce à sa polyvalence et son apport pas forcément sous-coté mais au moins… sous-médiatisé. Adam Silver a alors bien envie de lui donner un petit coup de projecteur en le nommant MVP des Finales malgré une série de haute voltige de Stephen Curry. Iggy voit là une vraie récompense pour son travail de sape et devient même le premier MVP des Finales de l’histoire à n’avoir démarré aucun match de saison régulière dans le 5 de départ (il a été titulaire trois fois sur les six matches disputés en Finales). Et si en 2016, il échoue et fait partie de la première team de l’histoire à se faire remonter une avance de 3-1 en Finales NBA tout en se prenant un contre aussi clutch que monstrueux de LeBron James dans les ultimes secondes, il obtient deux nouveaux titres en 2017 et 2018 et a aujourd’hui une occasion en or de réaliser le three-peat après avoir récupéré l’avantage du terrain aux dépens de Drake et des Raptors. Iguodala a aujourd’hui 35 ans et une hairline pouvant faire bader LeBron James, il n’empêche que son éthique de travail, en plus de lui permettre de stocker un David West dans chaque biceps, lui permet de continuer de peser des deux côtés du terrain en freinant Kawhi Leonard, mais aussi en attaque où il peut toujours se montrer important, en témoigne ce shoot assassin qui vient sceller la victoire de Golden State au Game 2 suite à un manque de respect total de la défense des Raptors. Est-il nécessaire de préciser qu’Andre Iguodala revenait d’une blessure au mollet ? Peu importe, AI9 est un homme en mission, il doit, selon ses propres dires “protéger son héritage”. Toutefois, Larry Nance Jr. a bien remarqué l’importance du bulldozer dans le succès des Warriors.

Iggy is so underrated man.. consistently making huge plays

— Larry Nance Jr (@Larrydn22) 3 juin 2019

“Iggy est tellement sous-coté… Toujours en train de réaliser des grosses actions.”

Evan Turner, quant à lui, est encore plus dithyrambique concernant l’ancien Sixer et Nugget.

Iggy is a first ballot HOF…don’t @ me..

— Evan Turner (@thekidet) 3 juin 2019

“Iggy est un 1st ballot Hall Of Fame, ne me mentionnez pas.”

Cette phrase est un parti-pris assumé qui peut faire parler, mais lorsque l’on regarde le palmarès du joueur, ainsi que son impact, sa longévité, sa bravoure et son comportement toujours exemplaires, il y a de quoi rejoindre l’avis de l’ailier des Blazers. Réponse dans quelques années on imagine.

La reconnaissance qu’obtient aujourd’hui Andre Iguodala est le fruit d’un travail de sape. A 35 ans, l’animal est toujours capable de peser dans les gros matches et fait clairement partie des joueurs les plus sous-côtés de cette dernière génération malgré un titre de MVP des Finales qui peut encore faire couler de l’encre aujourd’hui. Son palmarès en franchise est déjà bien garni avec trois titres NBA en plus à son actif. On vous a dit qu’il a également été champion du monde en 2010 et champion olympique en 2012 avec Team USA ? Non ? Eh bien voilà c’est fait.


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