La légende Didier Mbenga : retour sur la carrière du Belge le plus connu de Los Angeles, 120 kilos de muscle et de coeur sur la balance

Le 30 déc. 2018 à 16:04 par Clément Mathieu

DJ Mbenga
source image : youtube

Dans la rédaction de Trashtalk, nous avons pleins de petits chouchoux différents. Tous les fans de la NBA sont en admiration face au talent des superstars actuelles mais parfois, ce sont les petits joueurs peu connus qui nous font le plus d’effet. Les chauffeurs de banc, les dixième hommes et les role player ont ce quelque chose en plus. Ils sont humains et c’est peut être pour ça que l’on s’attache autant à eux. Didier Mbenga est de cette catégorie. Petit joueur en minutes sur le terrain mais grand homme dans tous le reste. 

Si vous ne connaissez pas l’histoire, accrochez vous bien à vos sièges parce qu’on part sur quelque chose digne d’un scénario de film hollywoodien. Didier Mbenga dit “DJ” est né au Zaïre en 1980. Malheureusement pour lui, en 1997, la première guerre du pays éclate. Le président Mobutu Sese Seko est chassé du pouvoir par le chef rebelle Laurent Désiré Kabila qui renomme le pays la république démocratique du Congo. La leçon d’histoire est gratuite, vous nous remercierez plus tard. Le père de notre héros du jour, sous prétexte qu’il travaillait pour l’ancien régime, est alors envoyé en prison avec toute sa famille. Le paternel négociera pour que son fils et sa femme soit sauvés. Le géant de 17 ans s’échappe donc de prison alors qu’il devait se faire exécuter, il arrive à convaincre un employé d’aéroport en impro totale et s’envole pour la Belgique, seul et sans le sou. Cette aventure aurait eu raison de beaucoup de gens. Mais Didier n’est pas seulement grand par la taille, son coeur est tout aussi énorme. Grâce à son physique facilement repérable, 2m13 pour 120 kilos, l’international belge Willy Steveniers le convainc de suivre une formation de basket. Il est rapidement naturalisé et intègre la ligue professionnelle dès 2001. Lors de sa première saison, il joue sous le maillot des Stella Artois Leuven Bears pour des moyennes de huit points par match. En 2003, il rejoint les Spirou de Charleroi (on ne se moque pas) où il disputera 12 matchs, pour des statistiques anecdotiques, avant d’être repéré par les Dallas Mavericks.

Décidément, à chaque fois que l’on parle d’un européen, les Mavericks sont toujours impliqués dans l’histoire. Depuis la trouvaille Dirk Nowitzki en 1998, la plupart des scouts de Mark Cuban sont constamment sur le vieux continent. Les mecs se sont désintéressés très tôt de la NCAA en fait. En même temps, lorsque tu vois le talent du Wunderkind, faut pas s’étonner quand tu commences à parler allemand couramment. En juin 2004, le géant belge signe un contrat de deux ans avec l’équipe texane pour 3,4 millions de dollars, le rêve américain peut commencer et en duo avec un agent du nom de Bouna Ndiaye, qui signe là son premier joueur. A peine arrivé, il ouvre une fondation pour aider les réfugiés congolais en Belgique. Peu importe ce que la vie lui réserve, Didier n’oublie pas d’où il vient. Coté basket néanmoins, tout ne se passe pas comme prévu. Sa première année dans la grande ligue est minée par les blessures et il ne dispute que 15 rencontres pour des moyennes faméliques. La deuxième saison commence cependant bien mieux. Malgré ses gros problèmes de rapidité et son faible niveau technique, Mbenga parvient à s’imposer grâce à sa présence physique dans la raquette et joue 43 matchs. Si offensivement, son apport est presque inexistant hormis de bon gros écrans de bûcherons, DJ est un très bon défenseur sous le cercle. Défenseur de ses proches, aussi. Lors de la campagne de Playoffs 2006 et pendant les finales de conférences face aux Suns, il est suspendu six matchs pour avoir visité les tribunes adverse afin d’aider la femme du coach face à des fans un peu éméchés. Malgré la bonne intention du geste, la NBA le sanctionne tout de même. Ce n’est qu’un détail, mais il est assez symbolique de la carrière réussie de notre ami. Joueur d’équipe avant tout, basketteur au grand coeur, ce n’est pas un hasard si l’international Belge a disputé quatre finales en huit ans de carrière. Ça fait déjà quatre de plus que Chris Paul.

Pour avoir une longue carrière en NBA, il ne suffit pas seulement d’être un grand joueur. Il faut savoir accepter un rôle et s’y tenir. DJ a vite compris qu’il serait un joueur de bout de banc dans une équipe qui vise le titre. Plutôt que de prendre plus d’argent et d’avoir plus de temps de jeu dans une franchise condamnée à tanker, il a judicieusement choisi de gagner des matchs. En carrière, il ne tourne qu’à 7 min par rencontre, il pourrait donc être remplacé facilement. Mais son caractère, sa bonne humeur et son enthousiasme font de lui un joueur essentiel à la vie d’une équipe. Pendant la saison régulière, les coéquipiers sont ensemble tout le temps, il est primordial que l’ambiance soit bonne. Par exemple, le succès des Warriors n’est pas uniquement lié au basket mais aussi à la mentalité du groupe et des stars. Peu importe les minutes, Didier Mbenga a tout de même plus de bagues que Carmelo Anthony certains. Après avoir joué trois ans à Dallas et à la suite d’un court passage à Golden State, il signe plusieurs contrats de dix jours avec les Lakers avant que ces derniers ne l’engagent définitivement pour le reste de la saison 2007-08. Il laisse derrière lui un grand nombre de fans au Texas. Lorsque son maillot fut mis en vente par les Mavs, les chiffres étaient impressionnant pour un joueur de son calibre. Son rôle est toujours le même à Los Angeles. Chauffeur de banc, coéquipier modèle et chouchou du public. Mais comme le montre le début de son histoire, Didier est un monstre de détermination et parvient peu à peu à obtenir de petites minutes dans la rotation de Phil Jackson. Suffisamment pour qu’il soit conservé pendant trois ans et pour qu’il puisse glaner deux baguouzes au passage.

Premier Belge et premier Congolais champion NBA, Didier Mbenga accumule les accomplissements. Ses progrès depuis son arrivé dans la ligue sont criants. Il a aussi pu compter sur l’autre Congolais à l’époque, Dikembe Mutombo, afin de garder sa place dans la Ligue. Si vous n’êtes pas encore convaincu, on peut vous rappeler que son plus grand fan lorsqu’il portait la tunique pourpre et or n’était ni plus ni moins que Kobe Bryant, qui le surnomme encore Congo Cash. Quand on sait comment le Mamba peut traiter certain de ses coéquipiers, le fait qu’il adule l’intérieur est une nouvelle preuve du sérieux et de l’éthique de travail exemplaire de ce dernier. A la manière d’un Brian Scalabrine, DJ est adulé partout où il passe. A chaque lancer franc, les clameurs montent des tribunes, à chaque panier, on entend des “MVP” dans toute la salle. Puisqu’on vous dit qu’il est légendaire cet homme là. A-t-on besoin de rajouter que Johnny Hallyday mange du caviar avec lui à L.A ? Qu’en plus de son gabarit imposant, il est ceinture noire de judo ? Que lui et Kobe ont discuté par textos pendant tous les JO 2008 après chaque match ? Ce sont tous ces détails qui font de lui un personnage attachant et un joueur qu’on n’arrive pas à oublier. Ce qui n’est pas le cas de tout le monde d’ailleurs. Lors du dernier match de la carrière du numéro 24, Didier Mbenga s’est fait refuser l’entrée de la boite dans laquelle tous le gratin de Los Angeles fêtait les soixante points du nouveau retraité. Le videur ne se souvenait pas de lui, contrairement à nous. Beau joueur, il s’est adressé aux caméras en montrant sa bague de champion. What else ?

DJ Mbenga finira sa carrière en Chine puis y mettra un terme après un ultime essai aux Knicks en 2014. Si vous voulez découvrir le joueur dans un autre axe que la balle orange, on vous met les trois vidéos du reportage qui lui est consacré, “l’enfant du Congo”. L’amour qu’on a pour le joueur est si grand qu’on se devait de le partager en ce 30 décembre 2018, jour de l’anniversaire de LeBron James mais surtout du vrai GOAT, Monsieur Mbenga. 


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