Bulls 1996 vs Warriors 2016 : points communs et différences entre deux escouades de légende

Le 15 avr. 2016 à 19:48 par David Carroz

Chicago Bulls vs Golden State Warriors comparaison

Alors que les Warriors viennent de taper une saison à 73 victoires et au rythme des comparaisons avec les Chicago Bulls de 96 qui réalisaient eux aussi un exploit très proche, il est temps de dresser un bilan entre ces deux équipes. Loin de nous l’idée de tenter de dire qui aurait mis la misère à l’autre – même si tout le monde sait que Scottie Pippen aurait éteint Steph Curry et que Draymond Green aurait appris à Dennis Rodman à défendre – mais l’envie nous a pris de voir ce qui rapprochait ou différenciait ces deux exercices exceptionnels.

Deux exercices qui ont donc abouti sur plus de 70 victoires en saison régulière, mais dont les genèses sont diamétralement opposées. D’un côté Chicago sortait d’un gros échec, éliminé en demi-finale de Conférence par le Magic. La remise en question fut lourde, les mouvements estivaux conséquents avec en première page le recrutement de Dennis Rodman. Beaucoup de preuves à faire donc, mais surtout un paquet d’interrogations. De l’autre, des Dubs qui viennent de décrocher le Graal, que beaucoup considèrent comme un aboutissement. L’effectif est inchangé ou presque et après les 67 victoires en saison régulière et un titre, confiant dans sa dynamique et dans sa force. C’est d’ailleurs ce qui impressionne chez les Warriors, d’avoir su élever leur niveau après avoir été champions, d’avoir eu encore plus faim quand beaucoup se reposent sur leurs lauriers. Depuis 1975 – soit il y a plus de 40 piges maintenant -, seules onze équipes ont offert un meilleur bilan dans l’exercice qui a suivi leur sacre. Sans vouloir faire peur aux Dubs, parmi ces candidats, huit ont échoué ensuite en Playoffs au moment de conserver leur couronne, les exceptions étant les Bulls de 1992, les Lakers de 2002 et enfin le Heat de 2013.

Avoir la dalle, voilà justement un point commun entre les deux groupes. Emmenés par leur franchise player respectif, Bulls 96 et Warriors 2016 se sont comportés comme des morfales. Soif de vaincre, haine de la défaite, et perfectionnisme poussé à l’extrême que Michael Jordan et Stephen Curry illustrent tellement. Une volonté de bien faire et de pousser l’équipe vers les sommets. Pour MJ, il s’agissait donc de redevenir le boss alors que Steph voulait faire taire ceux qui dénigraient le titre des siens. Il y avait des bouches à fermer dans les deux cas, et force est de constater qu’on les entend bien moins. Parce qu’avec cette impression de force inébranlable et cette suprématie affichée durant 82 rencontres, il n’y avait plus grand monde pour leur chercher des noises, même si les haters trouveront toujours quelque chose à redire.

Bulls warriors comparatif

Ces deux immenses stars étaient magnifiquement encadrées et on retrouve quelques points communs dans la construction des effectifs, même si certains relèvent plus de la coïncidence anecdotique mais sympa à relever. On pense par exemple à Luc Longley et Andrew Bogut, les deux pivots australiens qui squattent le 5 majeur. A croire qu’il faut un Wallabie pour aller chercher le record. Il reste donc un espoir pour les Cavs de Dellavedova, même si on a du mal à l’imaginer in the paint. D’ailleurs, on le sait tous, si la franchise de l’Illinois a misé sur Cameron Bairstow, c’est pour reprendre son bien dans le futur. Mais revenons en à nos comparaisons et à des joueurs qui comptent bien plus, les lieutenants toujours proches du franchise player. Scottie Pippen et Dennis Rodman d’un côté, Klay Thompson et Draymond Green de l’autre. Quatre excellents défenseurs dont le soutien indéfectible a permis aux deux franchises de surfer sur une telle dynamique de victoire. Il est marrant de constater d’ailleurs à quel point les ailiers forts peuvent se ressembler, avec l’émotion apportée dans leur jeu, l’intensité déployée, leur capacité à se coltiner quasiment n’importe qui en défense (Rodman avait défendu sur Jordan à son époque Pistons avant de se payer Shaq par exemple en 1996, Draymond Green switche sans problème sur les pick and roll pour glisser du pivot à l’extérieur adverse) et leur force quand il s’agit d’aller prendre des fautes techniques (29 pour Dennis en 96, leader de la catégorie statistique, 12 pour Draymond Green qui a encore de la bouteille à prendre pour rivaliser). Quant à Klay Thompson et Scottie Pippen, on les voit bien s’épanouir comme franchise player loin de leur coéquipier star, mais ce rôle de second leur va à ravir. Chien de garde, option numéro 2 en attaque, les deux All-Stars sont peut-être moins charismatiques que Jordan et Curry, mais tout autant essentiels.

Sur le banc aussi, la présence d’un sixième homme de grande classe a eu un impact prépondérant dans ces deux parcours. Certes, Toni Kukoc et Andre Iguodala évoluent dans des registres bien distincts, mais leur apport dans ce nombre faramineux de victoires ne peut pas être négligé. La touche européenne, si rare à l’époque, du côté des Bulls, alors qu’Iggy consolide l’effectif, avec sa capacité à tout bien faire sur le parquet, mais surtout par son expérience dans un groupe relativement jeune. Car c’est peut-être bien là que se situe l’une des principales différences entre les taureaux de 96 et les Guerriers de 2016. Les hommes de l’Illinois avaient déjà bien roulé leur bosse (29,9 ans de moyenne d’âge) en NBA avec plusieurs trentenaires dont les carrières étaient plus proches de la fin que du début. Alors certes, cela ne les a pas empêchés de briller encore jusqu’en 1998, mais grâce à leurs acquis et à leur expérience, pas parce qu’ils avaient une marge de progression importante. A l’inverse, si les Dubs ne sont pas non plus des puceaux, avec moins de 28 ans de moyenne et le Big Three (Curry-Thompson-Green) encore loin des 30 piges (27-25-25), leur âge laisse entrevoir que les limites du potentiel ne sont peut-être pas encore atteintes. Et là on ne parle que des trois joueurs les plus importants. Voilà pourquoi Steve Kerr, nouveau lien fort entre ces deux générations, peut envisager l’avenir avec optimisme. A condition bien entendu de gérer au mieux les prochains marchés estivaux. Un coach qui a pu se souvenir des années passées sous les ordres de Phil Jackson sur les bords du Lac Michigan. Nul doute qu’il a bien retenu les leçons de l’utilité du small ball que les Warriors maitrisent à la perfection et qui faisait déjà partie des armes des Bulls en 1996. Comme quoi, qu’on le veuille ou non, un véritable parallèle existe entre les deux exploits réalisés à 20 ans d’intervalle.

D’ailleurs, George Karl – qui a croisé les Bulls de 96 en Finales NBA alors qu’il était à la tête des Sonics et les Warriors 2016 car il a eu l’honneur de coacher les Kings toute cette saison – a livré sans ambiguités son sentiment sur ces deux équipes mythiques :

Pour moi, cette équipe des Bulls était une équipe incroyablement, incroyablement dure défensivement. Mais ils pouvaient aussi vous exploser à la tête offensivement, ils pouvaient vous scorer dessus mais quand le match devenait lent et rugueux, il était quasiment impossible de marquer.

Et je pense aussi que Golden State est une bonne équipe défensive mais leur capacité à exploser est juste… Je crois avoir utilisé le terme ‘jeux vidéos’… Je suis impressionné par Golden State mais je dirais que l’équipe que nous avons joué quand nous étions à Seattle avait son gros point fort en défense et était bonne en attaque. Je pense que c’est un peu l’opposé avec Golden State. Je pense que le point fort de Golden State est leur capacité à faire exploser le score et que leur défense est bonne, peut-être même meilleure que bonne.

Pour finir, 20 ans et 73 victoires plus tard, voici comparaison chiffrée entre ces deux équipes légendaires…

Bilans

Bulls 1996 : 72 victoires – 10 défaites. 39 – 2 à domicile et donc 33 – 8 à l’extérieur.

Warriors 2016 : 73 victoires – 9 défaites. 39 – 2 à domicile et donc 34 – 7 à l’extérieur.

Attaque

Bulls 1996 : 105,2 points par match (1er), 115,2 en offensive rating (1er)

Warriors 2016 : 114,9 points par match (1er), 114,2 en offensive rating (1er)

Défense

Bulls 1996 : 92,9 points encaissés (3ème), 101,8 en defensive rating (1er)

Warriors 2016 : 104,1 points encaissés (19ème), 103,8 en defensive rating (5ème)

Ce qui nous donne d’ailleurs des +/- assez sympathiques puisque les Bulls proposent un joli + 12,3 pendant que les Warriors affichent un non moins agréable + 10,8.

Nous ne sommes pas là pour dire laquelle de ces deux équipes légendaires est la meilleure. L’une d’elles détient désormais le record absolu de victoires sur une saison, l’autre fut la première à passer le cap des 70 wins et elle a pratiqué une domination statistique encore plus indécente que la première. Pour autant, il nous a paru intéressant de faire le parallèle en comparant les statistiques pour relever les similitudes et les différences, en notant entre autres l’utilisation parfaite du small ball malgré des époques différentes. Car c’est aussi à ça qu’on reconnait les escouades mythiques : elles dominent sans partage les ères dans lesquelles elles évoluent. Et nous avons justement eu la chance cette saison d’apprécier une de ces équipes historiques. Maintenant, les Warriors ne doivent pas oublier que ce record – tout aussi fabuleux soit-il – ne doit être qu’une sorte de grosse cerise sur le gâteau. Le back-to-back est leur plus gros objectif, il doit valider cet exercice exceptionnel. La quête démarre dès ce weekend….

Source image : Mark J. Rebilas-USA TODAY Sports et Andrew D. Bernstein/ NBAE via Getty Images, montage @TheBigD05