Dossier spécial three-peats ratés : la troisième marche serait-elle la plus dure à franchir ?
Le 16 avr. 2014 à 18:09 par Giovanni Marriette
Dans 3 jours, le Heat de Miami empruntera les premiers sentiers du long chemin qui les guidera, peut être, vers la gloire d’un troisième titre consécutif. Pour cela, il leur faudra cette année écarter tout un lot de contenders, à l’Est comme à l’Ouest, dans des PlayOffs peut être plus ouverts que jamais. On revient dans ce dossier sur ces équipes qui, comme le Heat, ont tenté de faire la passe de trois, mais sans y parvenir. Fin de cycle, concurrence trop forte, dissensions internes ? Voyons-voir ce qui a bien pu causer la chute de ces équipes en quête de triplé. En espérant pour les fans du Heat que les doubles champions en titre s’en inspirent à partir de samedi…
Depuis la création de la NBA, peu de franchises ont réussi l’exploit d’enchaîner, au moins, 3 titres de champions NBA consécutifs. Il s’agit des Lakers de Minneapolis (52,53,54), des Celtics de Red Auerbach (8 titres consécutifs et même 10 titres en 11ans de 1959 à 1969!), des Bulls de Jordan (à 2 reprises dans les 90’s) et des Lakers de Kobe et Shaq (2000/01/02). Mais quel est le point commun entre les Lakers de 1989 et 2011, les Pistons de 1991 et les Rockets de 1996 ? Facile si vous avez lu ces lignes depuis le début. Ces quatre équipes sont les dernières à avoir échouées sur la dernière marche d’un three-peat. On profite donc du début des PlayOffs pour revenir sur ces différents échecs, en mettant à chaque fois en parallèle la situation actuelle du Heat. Pour y voir plus clair…
LAKERS 1989
En cette année 89, un vent de révolte souffle sur la NBA. Ce vent de révolte contre le show-time de Magic and co. porte un nom: les Bad Boys. Et face à des Lakers en bout de course, cette équipe faite de chiens de garde absolument détestables en défense va infliger aux doubles champions en titre l’un des camouflets les plus sévères de leur histoire. Déjà en difficulté lors des PlayOffs 88 (Utah, Dallas et ces mêmes Pistons défaits en 7 matches) avec malgré tout le titre au bout, les hommes de Pat Riley vont cette fois-ci prendre de plein fouet l’insolence et l’agressivité de Joe Dumars et sa bande. Malgré 3 premiers tours envoyés les doigts dans le nez face à Portland, Seattle et Phoenix (3 sweeps), la finale n’aura rien d’identique à celle de l’année précédente. Premier fait à prendre en compte pour ces Lakers en quête de triplé, la méforme de Magic, blessé, lui le véritable cœur de l’attaque californienne. Et même si en face, Isaiah Thomas est également amoindri, c’est la défense des Bad Boys et leur insolente adresse en attaque, notamment Dumars, qui vont précipiter les Lakers au fond du trou. 4 matches joués au dernier quart-temps, mais quatre défaites dans la besace des Californiens, qui vont subir là un des sweeps les plus fous de l’histoire des Finales. Ils devront attendre 11 ans avant de reconquérir la NBA…
Le Heat: difficile de ne pas voir de rapprochement entre ces 2 équipes, entre ces 2 époques. Comme les Lakers en 89 avec Magic, le Heat possède cette année en Dwyane Wade un capitaine fragile, même si LeBron a depuis récupéré les clefs du camion (LeBron James qui devra d’ailleurs également gérer son physique de cyborg, on en parlera plus bas…). Un D-Wade donc, dont la méforme est un frein évident à la santé de son équipe. De son état de forme durant les PlayOffs dépendra la réussite de Miami dans la quête d’un éventuel troisième titre. De même, la saison passée, les Spurs ont poussé le Heat dans ses derniers retranchements. Et si le squad de Popovich n’a pas cette année l’once de l’intensité défensive des Pistons 89, impossible de croire qu’une revanche sera plus simple à aborder pour les Three Amigos, eux qui ont eus toutes les peines à se défaire des Texans l’an passé… Vers une revanche bien différente cette année ?
PISTONS 1991
Une ballade lors des PlayOffs 89 avec l’apothéose dont on parle ci-dessus. Un 2ème titre en 1990 malgré une grosse opposition des Bulls en finale de Conférence et voici en 91 des Pistons à l’assaut d’un three-peat historique. Les héros des deux saisons précédentes sont toujours là, l’identité est restée la même. Meilleure défense de NBA, les Bad Boys ne laissent rien à leurs adversaires mais cette année là c’est l’attaque qui est grippée (24ème de la ligue). Puis en 1991, et ce n’est pas la plus mince des raisons de leur échec, un homme, si tant est qu’il soit humain, va mettre pour la première fois de sa carrière la NBA à ses pieds. Cet homme, c’est évidemment Michael Jordan. Déjà au sommet individuellement, il va cette saison là emmener ses Bulls en finale, avant de la remporter, en terrassant au passage les vieillissants joueurs de Motown. Face à des Bulls exceptionnels en attaque, articulés autour du trio Jordan/Pippen/Grant, les Pistons ne trouveront pas les arguments nécessaires en défense pour contester la furia chicagoane et s’en tireront cette fois-ci avec un sweep retentissant, 4 défaites absolument logiques et l’obligation de s’incliner devant le nouveau patron de la ligue, et ceci pour de très nombreuses années…
Le Heat: Quand on se rappelle la domination de Jordan en 91 à l’aube de son premier titre, on peut vite penser à un autre extraterrestre des parquets NBA, peut être à même de contester l’hégémonie grandissante du Heat. Le martien dont on parle c’est bien entendu Kevin Durant. Attaquant le plus doué de sa génération et parti pour exploser un tas de record tout au long de sa carrière, il semble enfin mûr pour aller chercher un titre, absolument inarrêtable et bien épaulé par ses lieutenants, au sein d’un collectif qui progresse d’année en année depuis maintenant plusieurs saisons. Comme Jordan en son temps, quasiment personne aujourd’hui (pas même LeBron ?) ne semble capable d’arrêter KD et si Westbrook, Ibaka et, dans une moindre mesure, Reggie Jackson sont au niveau requis durant les PO, cette équipe risque d’être une sacrée épine dans le pied du Heat en cas de confrontation finale… Kevin Durant, l’arme anti three-peat?
ROCKETS 1996
Quand les Rockets remportent leurs 2 titres de champions en 94 et 95, portés par un Olajuwon alors au sommet de son art (27.6 points, 11.4 rebonds, 3.5 assists, 1.6 steals et 3.6 blocks sur les 2 saisons !), les mauvaises langues diront qu’ils profitent de l’immense vide laissé par Jordan, parti tâter de la batte pendant quelques temps. Un peu vrai. Mais derrière la toute puissance de l’un des meilleurs pivots de l’histoire, une vraie équipe s’est formée. Et si la saison régulière ne met pas en avant la force des Rockets, c’est en PlayOffs que l’on se rend compte du talent des Texans. Si Phoenix et surtout les Knicks, en finale, poussent les hommes de Rudy Tomjanovich vers un 7ème match en 94, on assiste l’année suivante à une démonstration des Rockets en finale face au Magic et à un Shaquille O’Neal à l’aube de la carrière qu’on lui connaît. Mais à l’heure de viser le three-peat, 2 raisons vont faire que ce doux rêve va rester en l’état… Tout d’abord, en 1996, qui d’autre que les Bulls auraient bien pus devenir champions? Dire que cette équipe des Bulls est peut être à ce jour la plus belle équipe jamais vue sur un parquet NBA ne relève pas de la folie et tout simplement personne n’a pu lutter cette année là. Deuxièmement, après 2 titres, les Rockets ne dominent plus autant leur sujet, Hakeem Olajuwon est trop seul et une nouvelle génération de joueurs est en train de mettre la main sur la ligue. Les duos Stockton/Malone et Payton/Kemp sont de ceux-là et ce sont d’ailleurs ces mêmes Sonics qui vont mettre fin aux rêves de triplés des Rockets en leur infligeant un bon vieux sweep derrière les coups de vice de Payton, les envolées du “Reign Man” et grâce à l’apport d’un supporting cast de choix (Hawkins, Ellis, Schrempf, Perkins). Des Sonics à 64-18 sur la saison et qui ne tomberont en finale NBA que face au Dieu Jordan, tout simplement injouable cette année là, comme tant d’autres années d’ailleurs…
Le Heat: difficile dans ce cas-là de trouver quelconque rapport entre ces 2 situations. Certes la concurrence s’accroit au fil des ans pour LeBron James et ses teammates, mais si Durant a dominé la ligue de la tête et des épaules cette saison, le Thunder, même s’il revient dans les discussions pour le titre, n’a rien de l’épouvantail que représentait Chicago en 96. Malgré ça, un Russell Westbrook concerné par le collectif et non-pas par sa feuille de stats pourrait très bien représenter l’arme anti-Heat par excellence, encore plus quand on connaît la faiblesse de Miami au poste 1… Et si le banc du Thunder ne représente pas la même force de frappe que celui des Sonics en 96 (Lamb, Butler, Fisher, Collison, Adams sont des joueurs pouvant apporter mais loin d’être aussi efficaces que le banc du Heat), essayez d’imaginer un duo Westbrook/Durant sur la même longueur d’onde en attaque. On en a déjà mal a la tête et le Heat aussi croyez-moi sur parole… Et contrairement aux Rockets qui ont semblé vivoter sur leur double acquis, le Heat a gardé absolument la même force de frappe, ne perdant cet été que Mike Miller, récupérant même avec Greg Oden de la viande qui lui sera forcément utile au moment de répondre au défi physique en PlayOffs… Sans parler d’un supporting cast génialement pensé pour des phases finales avec un Chris Andersen représentant l’homme parfait en matière d’intensité, un Udonis Haslem sorti d’outre-tombe pour amener toute son expérience au meilleur des moments et un Ray Allen que personne sur Terre ne voudrait avoir en face de lui un soir de finale… Sans parler de Chris Bosh, aka le troisième homme, qui a depuis quelques saisons complètement changé son jeu, devenant ainsi une menace plus que plausible derrière l’arc et qui pourrait bien être le facteur X en puissance d’une éventuelle nouvelle finale pour le Heat… Non, là, vraiment pas de fin de cycle en vue, et si les Floridiens devaient échouer dans leur quête, ce ne sera pas à cause de leur effectif ou de leur méforme, mais bien par la faute d’un adversaire plus fort et plus malin.
LAKERS 2011
Plus proche de nous pour finir, la dernière franchise à avoir échoué au pied d’un three-peat historique. Pour cette équipe-là, aucune excuse à chercher du côté d’outsiders éventuels qui auraient joué le meilleur basket de leur vie au pire des moments pour les Lakers (quoique les Mavs n’étaient pas bons à prendre en Juin de cette année-là)… Non, car pour les Lakers 2011 le mal est à chercher du côté de la forme de ses cadres, ou plutôt de leur méforme. 4 finales consécutives pour Kobe Bryant et Pau Gasol, le tout agrémenté de 2 olympiades faisant de ces 4 ans une course contre la montre beaucoup trop compliquée à gérer pour de simples humains… Preuves en sont les récentes blessures de Kobe, pour beaucoup reliquats de ces 4 années folles sans se reposer, et un Pau Gasol jamais revenu au niveau qui était le sien lors du back-to-back. Le résultat en 2011 ? Un coup de balai retentissant face à Dallas qui filera quelques semaines plus tard vers le titre en finale face au Heat de Dwyane Wade. Tiens d’ailleurs on va en parler dans quelques secondes de celui-là…
Le Heat: D-Wade, justement, et on en parle déjà un peu plus haut dans ces lignes, pourrait bien être le baromètre du Heat lors de ces PlayOffs. Après avoir raté une trentaine de matches cette saison, plus ou moins volontairement, on ose croire en Floride que le bonhomme sera frais pour la post-season. Les Lakers avaient souffert en 2011 de la fatigue de ses leaders, le Heat ne s’en sortira pas non plus sans un Wade à 100%. Ils ne s’en sortiront pas non-plus sans un LeBron en pleine possession de ses moyens, malgré une fin de saison régulière où Spoelstra ne l’a malgré tout pas vraiment reposé. Car après une saison éreintante faisant suite à des PlayOffs de folie terminés au bout du bout d’un game 7, le robot James pourrait bien se mettre à grincer un jour… La cellule médicale est prévenue, la conquête d’un three-peat pourrait bien passer par la qualité des soins prodigués au n°3 et au n°6 floridiens… Et puis c’est plus sympa pour les autres de taper une équipe au complet car à vaincre sans mérite, on triomphe sans gloire…
Quatre histoires avec une triste fin, quatre antécédents avec des composantes à prendre en compte pour le Heat s’il veut aller au bout cette saison, et ce pour la troisième année consécutive. Car si la route semble plutôt dégagée à l’Est du fait de la forme actuelle des Pacers et que le Heat devrait selon toute vraisemblance rejoindre cette année encore les Finales NBA, on ne sait pas encore si c’est Kevin Durant, Tony Parker, Stephen Curry ou encore James Harden qui pourra causer la perte de Miami. On ne sait pas non plus si Dwyane Wade et ses genoux ne vont pas abandonner les double-champions en titre au plus mauvais moment, ni si James élèvera son niveau de jeu au point de marcher sur tout le monde en PlayOffs… Soyons honnêtes, même si la conquête d’une troisième bague sera tout sauf une ballade, le Heat peut clairement conserver son titre, il en a les moyens, et ainsi rentrer dans l’histoire dans 2 mois.
Allez, fini de rire et lâchez les chevaux, le départ de la course est prévu samedi. Il ne faudra pas être en retard car l’histoire, elle, n’attend pas.