Basket aux Jeux Olympiques – Mexico 1968 : Spencer Haywood se présente au monde

Le 05 avr. 2024 à 10:29 par David Carroz

Jeux Olympiques 1968 team USA
Source image : FIBA

Lew Alcindor : boycott. Wes Unseld : boycott. Bob Lanier : boycott. Elvin Hayes : boycott. Pete Maravich : non sélectionné. La liste des joueurs laissés à la maison par choix ou non côté Team USA a de la gueule. Plus que l’effectif qui se déplace à Mexico pour les Jeux Olympiques de 1968. Mais les Américains ont de la réserve et ils ne vont pas changer leurs habitudes victorieuses, emmenés par un surprenant Spencer Haywood et JoJo White.

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Alors oui aujourd’hui, avec le recul et une fois qu’on connait le déroulé de la carrière des deux joueurs devenus Hall of Famers, on se dit que ça va. Team USA n’a pas traversé la frontière avec son pays voisin à poil. Qu’il y avait du matos. Mais à l’époque, la hype n’est pas folle. Et tandis que le septième tournoi de basket olympique se dessine, et bien certains se disent que l’invincibilité américaine est en danger. Que le titre ne leur est pas promis. Que pour une fois, les Soviétiques ont leur chance. Tout comme les Yougoslaves qui pèsent désormais dans le monde de la balle orange.

Car oui, USA et URSS ne sont pas les seuls sur les terrains de basket. À l’image de l’échiquier mondial, celui du sport – et donc du basket – n’est plus dévoué aux deux puissances qui sont désormais contestées. Par les pays du Sud, depuis quelques temps désormais. Mais aussi en leur propre sein.

Pour les Américains, le boycott mené par certains athlètes afro-américains mais surtout les points levés de John Carlos et Tommie Smith exposent en mondovision les problèmes de racisme au pays de l’Oncle Sam. La gymnaste tchèque Vera Caslavska, en faveur du printemps de Prague et qui critique l’invasion de la Tchécoslovaquie par l’URSS, est quant à elle le symbole des voix qui s’élèvent dans le bloc soviétique. Les désaveux existent des deux côtés et les Jeux Olympiques se présentent comme une caisse de résonance pour les exposer.

Une estrade qui aurait pu ne pas être disponible. Ou du moins pas sur le sol mexicain. Car la question de déplacer ces Jeux Olympiques aux États-Unis s’est posée. Dix jours avant le début des JO, un rassemblement sur la place des Trois Cultures à Tlatelolco, un quartier de Mexico, tourne au carnage quand l’armée décide de tirer sur les étudiants présents. Les gouvernements n’aiment pas trop voir des contestations alors qu’ils sont sur le point d’accueillir un événement comme les Jeux et ils sont prêts à tout pour faire taire les critiques.

La plèbe est bien gentille de s’exprimer, mais il ne faut pas priver non plus le peuple du cirque. Histoire de le divertir. Et parmi les sports que les locaux apprécient, il y a le basket. Ils se massent à plus de vingt-deux mille les soirs dans le Palais des Sports construit pour l’occasion. Un peu à la va-vite d’ailleurs, puisque le toit fuit et certaines rencontres sont interrompues pour sécher le parquet.

Ceux qui se font sécher aussi, ce sont les Soviétiques. Ils s’inclinent sur le fil en demi-finale. Et perdent donc leur seconde place qu’ils squattent depuis 1952, laissant les Yougoslaves tenter de mettre fin à l’hégémonie américaine sur la balle orange. L’URSS se console avec le bronze et croise probablement des doigts pour voir les USA se faire surprendre comme ses ouailles.

Pas le genre de la maison. Surtout que les Américains ont déjà pu affronter la Yougoslavie lors de la phase de groupe en s’imposant 75-58. Mais la finale est une autre histoire. Du moins la première mi-temps où les joueurs des Balkans s’accrochent sérieusement pour ne rentrer au vestiaire qu’avec trois points de retard (32-29). Quelques minutes plus tard, Ivo Daneu, Radivoj Korac et le jeune Kresimir Cosic – oui, il y avait du très beau monde dans cette équipe yougoslave – ont pris le bouillon au retour sur le parquet. 54 à 32, dont un 17-0 en quelques minutes initié par JoJo White, Spencer Haywood et la défense de Calvin Fowler. Qui ça ? Calvin Fowler, un joueur des Goodyear Wingfoots en Amateur Athletic Union. Car pour la dernière fois aux Jeux Olympiques, l’AAU envoie certains joueurs, tout comme l’armée, en plus des universitaires.

Mais c’est surtout Haywood qui impressionne avec quasiment un tiers des points américains (21 dans sa besace, en plus de ses 10 rebonds et 5 contres) lors de cette finale remportée 65 à 50. Cette fois encore, Team USA n’a pas fait dans la dentelle. Malgré une frayeur lors des poules face à Porto Rico (victoire 61-56 après avoir été mené d’un point à la mi-temps). Le commentateur français – lors des quelques minutes de retransmission en direct de la finale – a beau se planter régulièrement sur le blaze du pivot – un coup de Spencer Howard, une fois de Howard Spencer – il a bien conscience que c’est lui la star américaine, du haut de ses 18 piges.

Soit le plus jeune joueur de l’histoire de Team USA à l’époque. Et le plus grand baller amateur que le coach yougoslave, Ranko Zeravica, n’ait jamais vu pour reprendre ses propos. Pas mal comme compliment pour un cas encore inconnu quelques semaines plus tôt, mais qui ne fait que commencer d’écrire son histoire.

Voilà, une édition de plus, neuf victoires supplémentaires et une nouvelle breloque en or. Et toujours pas la moindre défaite lors des Jeux Olympiques pour les Américains, même lorsqu’on les imagine affaiblis. Rendez-vous dans quatre ans pour tenter de mettre fin à cette domination ?

Du 13 au 23 octobre 1968

Juan Escutio Palacio de los Deportes, Palais des Sports, Magdalena Mixhuca Sports City, Mexico

16 équipes

Or – États-Unis

Argent – Yougoslavie

Bronze – URSS

Source image : FIBA