Portland, terre spécialisée en adieux inévitables
Le 29 sept. 2023 à 09:22 par Alexandre Taupin
Alors qu’il a toujours clamé son envie de jouer toute sa carrière à Portland, Damian Lillard est finalement parti. Une triste fin d’histoire entre la star de l’Oregon et son équipe de toujours et, malheureusement pour les Blazers, c’est un scénario qui a tendance à se répéter…
Si on devait composer un podium des plus grandes légendes de l’histoire des Blazers, trois noms viendraient en tête assez rapidement. Les trois en question ? Bill Walton, Clyde Drexler et Damian Lillard. Tout le monde pourra s’écharper quant à savoir dans quel ordre les ranger mais toujours est-il que ces trois joueurs ont marqué la franchise de Portland à tout jamais.
Si les trois squattent les records et les plus hauts faits de l’Oregon, ils partagent aussi un autre point commun : leur histoire avec les Blazers s’est terminée à chaque fois en queue de poisson.
Bill Walton et le staff médical de Portland
Commençons donc par Mr Bill Walton, le plus ancien du lot. Drafté en première position par les Blazers en 1974, Bill Walton avait tout du chouchou à Portland. En seulement 3 ans, l’intérieur Hall of Famer avait fait passer Portland de la dernière place de la Conférence Ouest au sommet de la NBA, remportant le titre en 1977. Au moment de célébrer le titre dans les rues de la ville, personne n’aurait imaginé que le MVP des Finales NBA allait demander son trade 14 mois plus tard.
Imaginez un instant Nikola Jokic qui demande à partir en 2024.. quel séisme ce serait ! Et pour les fans des Blazers en 1978, ce fut un sacré ascenseur émotionnel également. Comment en est-on arrivé là ?
La fin de l’histoire entre Bill Walton et les Blazers, c’est malheureusement quelque chose qui va souvent hanter la franchise dans les décennies suivantes : les blessures. Touché au pied durant la saison 1977-78, le pivot n’avait que peu goûté aux méthodes du staff médical de l’équipe, lequel avait semble-t-il l’habitude de faire jouer certains joueurs avec des pilules anti-douleurs ou des injections. Walton avait ainsi blâmé sa propre équipe au moment de se briser le pied durant les Playoffs 1978. Quelques semaines plus tard, il demandait son trade, lequel n’interviendra qu’un an plus tard après une saison blanche. Clairement pas la fin attendue pour celui qui demeure encore à ce jour le seul MVP de l’histoire de la franchise.
Clyde Drexler, une histoire de timing
On continue d’avancer dans le temps avec celui qui a succédé à Walton dans le cœur des fans. Certains diront peut-être que sa présence a empêché Michael Jordan de finir à Portland (au contraire de Sam Bowie…) mais Clyde Drexler est une immense légende du jeu et surtout des Blazers.
Onze saisons et demi dans l’Oregon, des records en pagaille (ensuite battus par un certain monsieur avec une montre), Clyde Drexler a marqué son époque, même si l’ombre de joueurs comme Magic, Bird et évidemment MJ ont rendu ses accomplissements un poil moins impressionnants aux yeux du grand public. Il n’en reste pas moins que The Glide était un géant de la balle orange et lui aussi n’est pas passé loin d’offrir un titre aux Blazers.
En 1990 (face aux Pistons) et en 1992 (face aux Bulls), Portland va se retrouver deux fois en Finale NBA. Deux occasions manquées car les Bad Boys et la troupe à Jordan vont repartir à chaque fois avec le trophée.
L’histoire aurait pu continuer mais la direction, constatant une baisse des résultats les deux saisons suivantes (probablement due aux bobos de Drexler), va commencer à anticiper une reconstruction. Pas au goût du joueur, qui pensait avoir encore une chance de gagner avec sa franchise. Ce dernier va alors orchestrer son départ pour les Rockets, où il gagnera le titre avec son ami Hakeem Olajuwon dès sa première saison.
Pour le podcast de James Posey (Posecast), Drexler était revenu en 2020 sur son départ des Blazers. Là encore, une fin qu’il n’avait pas prévu…
“La seule raison pour laquelle j’ai quitté Portland, c’est qu’ils commençaient à reconstruire. Après toutes ces belles années, j’ai eu des blessures aux genoux. Et ils ont abandonné un peu trop tôt. Ils ont donc commencé à reconstruire et se sont débarrassés de Kevin Duckworth. Et j’ai dit : “Attendez les gars, nous n’avons pas de pivot”.
Puis ils ont commencé à dire : “Nous devons reconstruire, nous devons échanger certains de ces vétérans tant qu’ils peuvent encore jouer afin d’obtenir quelque chose pour eux”. C’est à ce moment-là que j’ai orchestré mon transfert à Houston. Mais s’ils ne l’avaient pas fait, j’aurais terminé ma carrière là-bas”.
Damian Lillard, marre d’attendre
Voilà ce qui amène donc à notre dernier nom en date, Damian Lillard himself. Pendant onze saisons, le meneur All-Star aura enchainé les cartons au scoring et la montre pointée du doigt. Une décennie toute entière à croire en un titre avec sa franchise de Portland.
Au cours de ces onze années, le joueur a répété à de multiples reprises qu’il ne se voyait pas ailleurs. Les superteams ? Non, pas pour Dame, ou alors les autres viennent chez les Blazers mais ne comptez pas sur lui pour rejoindre une armada. Le titre n’aurait pas la même saveur. C’est à Portland que le numéro 0 voulait gagner et pas ailleurs. Un rêve qu’il ne réalisera probablement pas (à moins d’un retour en fin de carrière pour un baroud d’honneur).
Il faut dire aussi que le guard n’a pas franchement été aidé par sa direction et Neil Olshey (l’ancien GM) en particulier. Pendant des années, les Blazers ont enchainé les refus de la part des principaux free agents et les choix douteux au moment de signer des joueurs. Toujours plus facile de construire quelque chose de solide avec un management digne de ce nom. Malheureusement pour Lillard, pas de R.C. Buford, de Bob Myers ou de Pat Riley aux commandes du navire dans le Nord-Ouest des États-Unis. On ne le répétera jamais assez, vous pouvez dormir tranquille quand vous avez des personnes de qualité dans les bureaux.
Malgré les appels du pied de Dame à sa direction pour demander du renfort, aucun nom clinquant n’a débarqué à Portland. À aucun moment, les Blazers n’ont semblé faire partie des favoris pour la victoire finale. Au mieux bien placés (comme cette Finale de Conférence en 2019) mais jamais en mesure de vraiment y croire.
L’arrivée de Joe Cronin aux manettes avait annoncé le début d’une nouvelle ère dans la cité des roses. Damian Lillard avait l’espoir que cette ère rimerait avec une compétitivité retrouvée et de l’ambition mais l’incapacité (ou l’absence de volonté) de sa direction à monter une équipe compétitive cet été aura eu raison de sa patience.
Encore un joueur qui voulait finir à Portland, encore un qui reviendra avec un autre maillot sur les épaules, pour le grand malheur des fans.
Source texte : Posecast / New York Times