Nikola Jokic et la Serbie, une histoire compliquée : MVP aux States, mais pas prophète en son pays

Le 21 oct. 2021 à 17:48 par Alexandre Taupin

Nikola Jokic 21 octobre 2021 résumé
Source image : Youtube / NBA Europe

Superstar NBA, MVP en titre, Nikola Jokic attire les éloges et les fans. Pourtant, dans son pays natal, l’image du pivot est loin d’être aussi glorieuse. C’est l’heure pour un gros dossier made in Serbia. 

Du talent plein les mains, une vision du jeu digne des plus grands meneurs, des actions qui s’empilent dans les Top 10 chaque semaine et des performances incroyables. Bref, Nikola Jokic est un sacré phénomène et un cadeau offert par les dieux du basket pour occuper chacune de nos nuits. Adulé dans les Rocheuses, le Joker a également une solide réputation sur le Vieux Continent, surtout qu’il est devenu récemment le troisième MVP européen de l’histoire après Dirk Nowitzki (2007) et Giannis Antetokounmpo (2019-2020). Pourtant, malgré les apparences, Jokic est loin de faire l’unanimité, dans un pays en particulier. Petit problème : il s’agit de la Serbie. Durement critiqué par ses compatriotes à plusieurs reprises, le pivot continue de souffler le chaud et le froid avec les siens. Une relation conflictuelle qui ne date malheureusement pas d’hier et qui, encore aujourd’hui, reste compliquée à gérer. Jovan Buha, journaliste pour The Athletic, a décidé de se rendre dans l’ancien état yougoslave pour comprendre le fond du problème.

Selon l’insider, les premiers remous remontent à 2017. Un an après avoir récupéré la médaille d’argent aux Jeux de Rio, la Serbie se présente à l’EuroBasket avec des grosses ambitions. L’effectif est de qualité mais un joueur brille par son absence : Nikola Jokic. Le Big man a préféré faire l’impasse sur la compétition. Dans un pays qui ne jure que par son équipe nationale, ce refus est vu comme un abandon de poste, certains parlent carrément d’une… trahison. Les critiques sont sévères envers le jeune joueur et celui-ci, ne souhaitant pas rajouter d’huile sur le feu, prend la décision de s’éloigner des médias serbes. Présent avec la sélection en 2019 mais éliminé en quart de finale, Jokic était de nouveau espéré pour les Jeux de Tokyo. Pas de chance, nouvelle impasse du pivot, lequel préfère se reposer après deux saisons particulièrement épuisantes. Si on ne peut pas reprocher à Niko le fait de vouloir souffler, le scénario va malheureusement lui être particulièrement préjudiciable. Malgré un tournoi de qualification à domicile et un tableau plutôt jouable, la Serbie se fait sortir chez elle par l’Italie : c’est un énorme camouflet pour une équipe qui est alors vice-championne olympique en titre ! Face à cet échec, il faut forcément des coupables et, puisque les absents ont toujours tort, la star des Nuggets va déguster.

En clair, c’est bien beau de réussir sur le sol US mais quel intérêt si c’est pour zapper l’équipe nationale (Jokic a raté trois des cinq compétitions FIBA depuis son arrivée en NBA) ? Quel intérêt si cela n’aide pas la Serbie à briller face aux autres nations ? On pourrait parler un peu d’un syndrome à la Messi, héros en club mais mal-aimé au pays à cause des résultats. Un fait qui est d’autant plus vrai avec le trophée de MVP acquis l’an dernier. Pour les Serbes, les récompenses individuelles sont une chose mais rien n’égale une médaille acquise avec son pays. Voilà pourquoi, malgré son talent, ses récompenses, son statut de symbole de la Serbie, Jokic apparaît en retrait par rapport aux Vlade Divac, Peja Stojakovic ou encore Dejan Bodiroga, tous moins forts en talent pur mais qui ont tous gratté une médaille d’or en sélection. Un constat qui est partagé par l’animateur d’un podcast local, interrogé par Buha.

“La plupart des gens savent qu’il est le meilleur joueur serbe de tous les temps. Mais à leurs yeux, il est loin d’être le meilleur joueur serbe de tous les temps car, pour cela, il faut montrer les médailles. Et c’est le plus important ici”.

Autant dire que le Big Man sait ce qui lui reste à faire pour regagner l’admiration de ses compatriotes. Avec l’EuroBasket en 2022, la Coupe du Monde en 2023 et les JO en 2024, il aura bien des occasions de ramener un titre du côté de Belgrade. L’occasion, peut-être, de refermer certaines blessures du passé et d’acter une bonne fois pour toutes son statut de numéro un all-time au sein du basket serbe.

Star des Denver Nuggets, Nikola Jokic ne jouit d’aucun traitement de faveur dans son pays. Joueur de club pour les uns, déception nationale pour les autres, le pivot vit une relation tumultueuse avec sa mère patrie. À lui d’inverser la tendance pour acquérir l’estime des siens. 

Source texte : The Athletic