Star de demain – Luka Doncic : la traduction de précocité et talent en slovène

Le 10 nov. 2017 à 12:40 par Benoît Carlier

Luka Doncic
Source image : YouTube/Euroleague

Chaque année, ils sont plusieurs centaines à s’inscrire à la Draft pour tenter d’y décrocher un spot dans l’une des 30 franchises NBA. Mais au milieu de ce vivier de jeunes talents, quelques joueurs tirent déjà leur épingle du jeu et sont promis à un grand avenir chez les pros. Parmi eux, Luka Doncic, la nouvelle pépite du basket slovène.

Fils d’un ancien basketteur et filleul du grand Rasho Nesterovic aperçu en NBA entre 1998 et 2010, Luka Doncic était prédestiné pour ce métier. Mais le talent de ses aînés n’a rien de comparable avec la pépite qui s’apprête à rejoindre la meilleure ligue du monde à partir de l’année prochaine. Déjà en train de peser la gonfle et de scruter tous ses contours alors qu’il était encore dans le berceau, il n’a jamais laissé tomber la grosse balle orange. A seulement sept ans, il était surclassé au bout de 16 minutes d’entraînement dans son nouveau club. Toujours aussi à l’aise au milieu d’enfants de deux ans de plus que lui, il était de nouveau surclassé après seulement un entraînement pour rejoindre l’équipe des U14 au sein de l’Union Olimpija où jouait son père chez les professionnels, en Slovénie. Jernej Smolnikar, son entraîneur de l’époque, se rappelle pour ESPN que son élève avait du mal à délaisser les parquets, même lorsqu’on lui demandait de rester chez lui.

“Je disais souvent à Luka, ‘Demain tu es libre, reste à la maison, joue avec tes jouets ou fais autre chose, tu dois te reposer.’ Le lendemain, ses parents m’appelaient à midi pour me dire, ‘S’il vous plaît, est-ce que Luka peut venir à l’entraînement, il nous supplie pour jouer.’ Sa passion pour la compétition était incroyable.”

Cette même année, Sasa Doncic le paternel évolue aux côtés d’un jeune prospect âgé de 21 ans qui fait désormais partie des leaders du Heat de Miami, Goran Dragic. A l’époque, le meneur est sur le point de se présenter à la Draft et il porte déjà tous les espoirs slovènes sur ses épaules. Quelques mois avant de traverser l’Atlantique pour lancer sa carrière NBA à Phoenix et recevoir les conseils de Steve Nash, il a le souvenir du petit Luka qui accompagne son père dès qu’il en a l’occasion, jusque pour les matchs professionnels.

“Même à cet âge, on voyait déjà qu’il avait le sens du jeu comme son père. Il s’asseyait toujours sous le panier. A chaque fois que nous sortions du vestiaire à la mi-temps, il était en train de prendre des tirs. J’ai toujours cette image dans la tête.”

A force d’être observé un peu partout en Slovénie et en Europe, le petit Doncic finit par se faire repérer par le Real Madrid grâce à un match hallucinant où il réalise un triple-double à 54 points, 11 rebonds et 10 assists en finale du tournoi U13 de Lido di Roma, dont il remportera évidemment le trophée de MVP en avril 2012. Le petit bois et le charbon étaient là, il ne manquait que la petite étincelle pour faire décoller sa jeune carrière. Son coach, Srecko Bester, sait qu’il vient d’assister à l’un des derniers matchs de son poulain sous le maillot d’Olimpija.

“A ce moment-là, j’ai dit à quelqu’un qu’il me rappelait Drazen Petrovic dans sa jeunesse. C’était un tueur avec une tête d’enfant. C’était tellement facile pour lui.”

A 13 ans, Luka Doncic fait donc ses valises pour rejoindre la capitale espagnole où il vient de signer un contrat de cinq ans. L’adaptation est compliquée pour le Slovène qui ne connait ni la langue ni la culture hispanique avant de débarquer dans le royaume de Felipe Reyes et Sergio Rodriguez. En 2014, il débute avec l’équipe B du Real Madrid, au quatrième échelon national. La saison suivante, il intègre le groupe pro et remporte l’Euroligue et le championnat en plus d’être élu dans le cinq des meilleurs espoirs de la Liga en compagnie des frères Hernangomez, qui évoluent tous les deux en NBA depuis l’année dernière. Entre temps, Luka Doncic est également devenu le troisième plus jeune joueur de l’histoire à disputer un match de Liga ACB et même le plus précoce du Real Madrid à 16 ans, deux mois et deux jours. Les sacrifices du début ont été récompensés et il ne pouvait rêver meilleur endroit pour développer son jeu et sa carrière de basketteur professionnel.

“C’était dur, très dur, surtout pendant les deux ou trois premiers mois. Je n’avais pas mes parents pour m’accompagner. Mais j’étais très soudé avec tous les autres joueurs. J’avais 13 ans et j’avais besoin de ça pour me préparer à tout ce que je vis aujourd’hui. Je veux remercier Dieu pour être là où je suis aujourd’hui.”

La saison 2016-2017 est déjà celle de l’explosion pour Luka Doncic qui transforme tout ce qu’il touche en or. Après un été à bosser son physique à Santa Barbara, le jeune prodige revient en Espagne avec la volonté de tout casser. A 17 ans, il s’installe pour de bon dans la rotation du Real, champion d’Europe en titre, derrière Sergio Llull et Rudy Fernandez notamment. A plusieurs reprises, il est élu meilleur joueur de la journée en Euroligue, une compétition dont il se fera éliminer en demi-finale par le Fener mais qui lui accordera le titre de meilleur espoir 2017 devant une autre pépite comme Ante Zizic, alors que c’est toujours sa mère qui l’emmène à l’entraînement en voiture tous les matins. En club comme en sélection, “el Niño Maravilla” comme on le surnomme à Madrid impressionne ses coéquipiers par sa précocité. Parmi eux, Anthony Randolph est bien placé pour parler de Doncic qu’il côtoie au Real mais aussi en équipe de Slovénie, depuis qu’il a obtenu la nationalité pour pouvoir disputer les compétitions internationales avec les verts.

“Je ne veux pas qu’il prenne la grosse tête mais c’est sûrement l’un des joueurs les plus talentueux que j’ai jamais vu, surtout à son âge. C’est incroyable. La façon dont il joue malgré sa taille et son comportement sur et en dehors des parquets… Il est très polyvalent. Je veux dire, ce gosse frôle le triple-double de moyenne quand il le veut.”

L’ancien intérieur des Nuggets sait de quoi il parle, les deux amis viennent de vivre la plus forte émotion de leur carrière à Istanbul où la Slovénie est devenue championne d’Europe pour la première fois de son histoire. Là encore, Doncic s’est fait remarquer devant les scouts du monde entier avec des performances qui devraient résonner un moment dans la tête des fans. Ses 27 points contre la Lettonie de Kristaps Porzingis en quart de finale ou ses 11 pions, 12 rebonds et 8 passes  (sans balle perdue) contre l’Espagne au tour suivant lui ont permis de changer de dimension, alors qu’il a pris plus de rebonds que Pau Gasol sur l’ensemble de la compétition malgré son poste d’arrière. Il a pris le relais de son père pour seconder Goran Dragic dans l’obtention du titre le plus imprévisible et le plus rafraîchissant enregistré depuis bien longtemps dans un EuroBasket. Logiquement sélectionné dans le meilleur cinq de la compétition en compagnie du dragon, de Pau Gasol mais aussi d’Alex Shved et de Bogdan Bogdanovic, son nom est déjà craint en Europe et ne va pas tarder à le devenir chez nos cousins outre-Atlantique. Pourtant, comme Lojze Sisko, l’un de ses anciens coachs en Slovénie l’explique, Luka n’a jamais pris le melon. Un piège qui a déjà ruiné plus d’une carrière de jeunes talents comme lui.

“La chose la plus folle pour moi c’est sa façon de changer de personnalité. Il était toujours confiant sur le terrain et voulait gagner à tout prix. Il était toujours très concentré sur le parquet mais quand le match se terminait il devenait un incroyable petit garçon. Il était toujours souriant et blaguait avec les autres. Il avait une personnalité magnétique à son âge.”

Cette maturité, Luka Doncic l’avait déjà au départ mais il l’a entretenu en prenant part à plus de cinquante matchs d’Euroligue à seulement 18 ans ou en remportant un EuroBasket dans une équipe outsider en tant que titulaire. Quand la plupart de ses adversaires à la Draft 2018 découvrent seulement la NCAA cette année, il dispute déjà sa troisième saison professionnelle avec l’équipe A du Real Madrid et a déjà rencontré à de nombreuses reprises des All-Stars NBA. Kristaps Porzingis, Dragan Bender ou Mario Hezonja n’avaient pas d’aussi bonnes statistiques à son âge alors que Nikola Jokic ou Frank Ntilikina jouaient à des niveaux inférieurs. Avec 201 centimètres sous la toise et plus de 100 kilos sur la balance, Doncic fait partie de ces joueurs modernes listés comme arrières mais capables de jouer sur tous les postes extérieurs sans aucune difficulté. Sa lecture de jeu et ses fondamentaux lui permettent une polyvalence que l’on ne retrouve que chez les meilleurs joueurs actuels, un signe de plus qu’il va falloir compter sur un jeune qui n’a pas froid aux yeux et qui est prêt à assumer ses responsabilités.

“J’ai envie d’être le héros du match. J’ai toujours voulu avoir la balle entre les mains, depuis le début. J’ai déjà raté des gros tirs par le passé mais ça doit servir de leçon. Il faut passer à autre chose. Que vous ayez eu un bon ou un mauvais match, il y en aura encore mille autre après.”

Pressenti pour être le premier choix de la prochaine Draft, Luka Doncic devra convaincre les GM que son physique et ses qualités athlétiques dans la moyenne sont compensés par une maturité et une expérience largement supérieures à de nombreux candidats au first pick. Le Slovène pourrait devenir le deuxième joueur européen à être appelé en premier le soir de la Draft et ainsi succéder à Andrea Bargnani, même si on a déjà suffisamment de preuves pour dire que sa carrière sera plus belle que celle de l’Italien en NBA.

Son match de mammouth contre la Lettonie

Sa démo face à l’Espagne

Son nouveau record en Euroligue

Sources : ESPN, Bleacher Report


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