Quin Snyder pense pouvoir faire de Utah une destination à la mode : et pourquoi pas ?

Le 13 juil. 2016 à 22:27 par Francois M

Le Jazz a attiré un des free agent les plus convoitées de cet été, Joe Johnson. Pourtant généralement ce profil de joueur – expérimenté, ancien All-Star, avançant doucement vers la fin de carrière- préfère rejoindre un prétendant au titre ou un gros marché. Tout à l’inverse de Salt Lake City, petite ville sous-médiatisée avec une équipe visant les Playoffs mais pas immédiate contender pour le titre. Mais alors, est-ce que Utah peut devenir une destination privilégiée pour les free agents ?

Quand les joueurs libres recherchent une nouvelle destination, l’histoire NBA a prouvé une forme de dichotomie entre “petits” et “grands” marchés. Le calcul est simple : des franchises installées à New York, Los Angeles ou Miami offriront toujours une médiatisation bien plus importante que d’autres implantées à Minneapolis, Memphis ou encore Milwaukee. D’un côté des villes immenses où le star system bat son plein et où le climat est généreux, de l’autre des villes pommées au milieu d’états dont la population est en majorité rurale et très peu dense, le plus souvent plus passionnées par le foot US ou le baseball que par la balle orange. En dehors du critère de la qualité de vie, l’exposition médiatique fait la différence entre ces villes. Par exemple, prenons “la Linsanity” : si Jeremy Lin avait explosé aux Bucks ou à la Nouvelle Orléans, il n’y aurait pas eu tout ce tapage médiatique. Parce que c’est New York, parce que le Madison Square Garden est “la Mecque du basket-ball”, ses performances ont été commentés des sites de basket du monde entier jusqu’au JT de Jean-Pierre Pernaud. Et bien sûr une telle couverture médiatique, ça amène les publicitaires, et donc des jolies valises de dollars. Devenir le visage des Knicks ou des Lakers donne accès à toutes sortes de choses, et surtout beaucoup de thunes.

Même si elle existe, cette séparation n’est peut être pas si nette qu’elle le laisse penser. En effet, on a vu récemment les free agents se bousculer pour signer à Cleveland, San Antonio ou Oklahoma City. Dans ces cas, il semble que c’est l’aspect sportif qui prime : la quête d’une bague est très importante, surtout chez les vétérans, et ce n’est pas David “opportuniste” West qui vous dira le contraire. Soyons clair, Cleveland est une ville vraiment pas sexy, peu médiatisée, avec un climat pas terrible : enfin comme le dit Joakim : “Cleveland sucks”. Mais là encore, qui veut dire favori au titre dit franchise qui gagne, et qui dit franchise qui gagne dit… médiatisation. Et oui, le beau discours sur le palmarès, la bague, est bien réel mais il ne faut pas oublier que la NBA est un business. Gagner est synonyme de meilleure exposition et donc de plus grosses offres de la part des publicitaires. Mais alors comment font les franchises qui ne rentrent pas dans ces deux cases ?

Et bien on l’a vu dans l’histoire récente, elles galèrent : Orlando, Minnesota ou Philadelphie  n’ont toujours pas su se relever de la fin de leur période dorée et des départs de leurs stars. Pour ces franchises, parmi lesquelles on pourrait inclure Utah, il existe deux voies pour revenir sur le devant de la scène puisqu’elles ne peuvent espérer qu’un LeBron ou un Durant les choisissent comme destination. Traditionnellement c’est par la Draft : le Shaq et Howard pour le Magic, Erving et Iverson pour les Sixers, Garnett pour les Wolves. Trouvez un franchise changer comme Tim Duncan ou LeBron James, ajoutez quelques victoires et vous pouvez redevenir une destination privilégiée par les joueurs sans contrat. La seconde solution est, puisque ces franchises n’ont pas accès ni aux stars ni aux meilleurs vétérans, de faire des paris sur des jeunes ou carrément de surpayer des bons joueurs. C’est ainsi que Joe Johnson s’est retrouvé pendant plusieurs années avec le plus gros contrat de la NBA à Atlanta alors qu’il n’était pas au niveau des superstars, même s’il était tout de même un All-Star régulier. C’est d’ailleurs ce même J.J. qui vient nous faire nous interroger sur un éventuel changement du paysage NBA, tout comme Greg Monroe, qui avait choisi Milwaukee l’an dernier. Assiste-t-on a une évolution du comportement des free agents ? Le coach de Utah a donné son opinion sur le sujet :

Je pense que Joe est un très bon fit pour nous, et on est heureux qu’il le reconnaisse et pense la même chose. J’hésite à dire qu’on joue sur le même plan que les Knicks ou Miami, certains veulent des plus gros marchés, mais il y a beaucoup de bonnes choses à Utah, et nous sommes je l’espère aussi récompensé pour la qualité de notre organisation. C’est certainement le cas avec Joe, je sais que George est très heureux d’être ici, nous avons beaucoup de joueurs qui aiment jouer ici. Il n’y rien de tel que gagner pour obtenir du momentum, et je suis personnellement très enthousiaste quant à ce que peut apporter Joe à notre équipe. Il a été All-Star, il a beaucoup d’expérience, c’est quelqu’un à qui on peut donner la balle dans les moments chauds et il a une grande versatilité. Nous sommes très heureux de l’avoir, nous sommes heureux qu’il ait choisi Utah et j’espère que nous continuerons à gagner et il y aura alors plus de Joe Johnson à venir vers nous.

Joe Johnson est assuré niveau salaire et gains en carrière. Courtisé après son buy out à Brooklyn par la majorité des favoris aux titres, il avait finalement rejoint South Beach. Un choix logique, dans une équipe ambitieuse où le septuple All-Star avait en plus des garanties de temps de jeu. Du coup, plus d’un ont été surpris quand il a rejoint Salt Lake City, qui plus est pour un contrat bon marché quand on regarde son niveau et les prix actuels des contrats. Mais voilà, le Jazz commence à se faire une réputation. D’abord, comme le souligne Quin Snyder, les victoires appellent les free agents, et après avoir échoué de peu dans la course à la huitième place, la franchise des Mormons a parfaitement négocié son été. Le noyau du  groupe est composé de jeunes joueurs qui progressent chaque année, Dante Exum va revenir, et le front office est allé chercher Boris Diaw contre 2 bouteilles de vins, et un meneur solide en la personne de George Hill contre pas grand chose. Forcément, avec leur stabilité et un coach de la qualité de Snyder, le Jazz est projeté en Playoffs. De plus, en enchaînant les bonnes décisions et en mettant en place une culture de franchise autour de leur coach, Utah a un système qui commence à gagner en renommée. A l’image de ce que les Spurs ont construits, de ce que Brad Stevens est en train de créer à Boston – qui a permis d’attirer Horford- ou Budenholzer à Atlanta – pour Howard -, les joueurs semblent effectivement de plus en plus intéressés par cette forme de stabilité. Cela donne la garantie d’un environnement sain, ainsi que la volonté de bien intégrer le nouveau venu au sein du collectif, et donc qu’il puisse s’épanouir. Puis c’est avec les résultats que viendra la médiatisation. Comme le dit si bien Snyder, Joe Johnson est probablement le premier d’une longue liste de Joe Johnsons si la greffe prend bien cette année et que Utah se montre en Playoffs.

Nous n’irons pas jusqu’à dire que le balance petit – grand marché de la NBA a changé. On voit encore des Pelicans ou Kings devoir recruter des joueurs de devoir au nom peu connus. En fait,  Utah est à un croisement :  ils sont parvenus à monter une équipe assez compétitive pour attirer certains free agents grâce à bons choix de Draft et un projet stable et intelligent. Si cette année ils reviennent en Playoffs, ils pourraientt entrer dans un cercle vertueux, où les victoires attirent les bons joueurs qui eux même attirent les victoires et ainsi de suite. Avec la culture de la franchise, il se pourrait que de longues années s’écoulent avant que les dirigeants ne les fassent sortir de ce cercle par un mauvais choix...

Source podcast : soundcloud Sirius XM

Source image : AP – Rick Bowmer via deseretnews.com


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