Lamar Odom : la générosité sur les parquets pour masquer les problèmes personnels

Le 06 nov. 2015 à 15:58 par David Carroz

Lamar Odom

Depuis la nouvelle des ennuis de Lamar Odom il y a presque un mois, on a beaucoup parlé de drogue, de showbiz, de prostitués, le tout étant plus ou moins lié. On s’est souvenu du doublé réalisé avec les Lakers en 2009 et 2010, de son titre de meilleur 6ème homme de la Ligue l’année suivante. Mais on a souvent oublié l’homme et ses démons intérieurs, son histoire.

Pourtant, à l’image d’un joueur peu banal, au style inimitable ou presque, elle n’est pas commune. Derrière le grand sourire, les gestes de bonté envers les fans, un côté décontracté sur le paquet, Lamar Odom n’a pas toujours eu la vie rose et il a souvent caché ses propres tourments. Un père héroïnomane, une mère décédée d’un cancer alors qu’il n’avait que 12 ans, des galères universitaires, une Draft par la pire franchise des sports US, la drogue (déjà…) et la suspension qui va avec, un fils victime du syndrome de la mort subite du nouveau né, un accident de voiture meurtrier -il n’était que passager- ou encore un vol à main armé à son encontre… Bien assez pour un seul homme. Et le basket comme exutoire. Si on parait heureux devant les caméras, ne l’est-on pas ? On ne parle pas ici de celles de la télé poubelle et d’une famille qui s’affiche en se souciant guère que certains risquent de se brûler les ailes en les approchant. On ne leur jettera pas la pierre non plus, cela leur donnerait trop d’importance, bien plus que ce qui est mérité. Non, on évoque les images d’un Lamar Odom, entouré des autres Lakers, au moment de lancer le cri de guerre, rebondissant et entraînant ses coéquipiers avec lui “Nous sommes la meilleure équipe de la NBA !” Un maitre de cérémonie étonnant, ni capitaine, ni historique, ni meilleur joueur de son équipe. Le plus médiatique ? Sérieux on parle de L.A. avec un Kobe Bryant encore au sommet de son art à cette époque ! Un choix atypique, mais qui illustre à quel point “Candy Man” était essentiel aux “Purple and Gold.” Sur les parquets, même si Andrew Bynum, Pau Gasol et surtout le “Black Mamba” attirent plus les regards et sont les sujets de nombreuses conversations, mais surtout dans le vestiaire.

Si certains joueurs disent faire passer l’équipe avant leur cas personnel, Lamar Odom n’avait pas besoin de le crier sur tous les toits. Son comportement suffisait amplement à instaurer son statut de mec collectif. Principale contrepartie lors de l’échange envoyant le Shaq au Heat, il a pris cette place du mec sympa, drôle, la main sur le cœur dans l’effectif des Lakers. L’égo surdimensionné en moins, facilitant la cohabitation avec Kobe. Alors certes, le niveau et la domination n’étaient pas non plus ceux d’O’Neal, mais avec son jeu indéfinissable, il a tout de même permis à L.A. de retrouver les sommets. Contrarié lorsque Phil Jackson a décidé d’en faire son 6ème homme, il a rapidement accepté ce rôle pour le bien de l’équipe. Un peu comme un Tony Kukoc, autre meneur dans le corps d’un ailier et dont le style -moins physique- peut évoquer celui d’Odom. A l’aise au sein de sa famille sportive, celle qui compte le plus pour lui, le 4ème choix de la draft 1999 s’épanouit. Tant pis si certains critiquent son irrégularité au scoring, il préfère la passe. Peu importe s’il ne débute plus les matchs si sa franchise gagne. Mais son passé le hante toujours, et tout va s’écrouler si rapidement.

Eté 2011. Les Lakers veulent Chris Paul et Dwight Howard pour créer leur Big Three, oubliant que Pau Gasol et Lamar Odom sont de parfaits lieutenants pour Kobe Bryant. Alors que le fraîchement élu 6ème homme de l’année se pose la question d’un break suite à l’assassinat de son cousin et la mort d’un adolescent dû à un accident avec la voiture dans laquelle il était passager en se rendant aux funérailles familiales, les tractations chez les Angelinos vont avoir raison de l’équilibre fragile chez Odom. Et entraîner sa lente chute aux enfers, jusqu’à atteindre un point de non-retour ou presque il y a quelques semaines. Jamais remis de son départ de chez les Pourpres et Ors -la réciproque est sportivement vraie également- il a perdu le contact avec ses coéquipiers. Ceux qu’il était toujours prêt à aider. Non pas que ceux-ci l’aient laissé tomber, mais plutôt parce qu’il s’est renfermé dans sa bulle. Privé de ces liens essentiels que représentent faire partie d’une équipe. Des relations qui enrichissent, vous font tenir et vous donnent tellement de force. Ces échanges qui vous font vivre, une fois disparus, peuvent vous conduire vers une mort lente. Tout ce brouhaha, cette distraction qui vous empêche de cogiter et de ressasser les mauvais souvenirs. Un objectif commun, la compétition qui motive et qui soude un groupe. Ces raisons qui ont fait du basket une bouffée d’oxygène pour Lamar Odom des années durant et dont on néglige parfois l’importance. Devenues inexistantes pour lui, sa trajectoire n’a pas surpris ceux qui connaissent le parcours de l’homme, malheureusement.

Il y a quelques années, Jeff Van Gundy avait ces mots concernant le joueur :

Beaucoup de personnes ont gaspillé beaucoup de temps à penser qui ils voudraient que Lamar Odom soit plutôt que de l’apprécier pour ce qu’il est. Je regarde toujours en arrière d’où il vient. Dans des histoires comme celles-ci, vous ne voyez pas beaucoup de fin heureuse. Donc quand vous en voyez une, je pense que vous devriez la célébrer.

Sauf que la fin n’était pas encore arrivée et on penche plus pour la tragédie aujourd’hui, celle que les premiers chapitres laissaient envisager. Mais Lamar Odom a rouvert les yeux maintenant. Il va pouvoir attaquer sa rééducation. Si le basket n’est plus qu’un lointain souvenir désormais, espérons qu’il retrouve un équilibre personnel ailleurs qui lui permettra de laisser de côté ses addictions nocives pour oublier ses douleurs. N’oublions pas de notre part ce que notre sport préféré peut apporter comme cadre pour certaines personnes qui se retrouvent perdues lorsqu’elles ne s’expriment pas dans un groupe qui les soutient et qu’elles savent sublimer.

Source image : Michael Conroy/Associated Press via Bleacher Report


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