Dans l’univers de Mxii, chapitre 1 : de Cergy à New York, quand le rêve devient réalité
Le 28 oct. 2015 à 18:45 par Leo
Il y a quelques temps, nous avions fait la découverte de Mxii, jeune freestyler en herbe du 95. D’une première interview sincère (consultable ici) a découlé l’envie d’en savoir un peu plus sur les motivations du bonhomme, sur ses impressions mais aussi sur les émotions disparates qu’il éprouve dans l’exercice de sa passion de créateur artistique, de vecteur de plaisirs de la balle orange. Ainsi, à chaque fin de mois, nous vous livrerons une part de son intimité sous la forme d’un carnet de bord romancé qui illustrera tour à tour ses voyages, ses projets, ses joies, ses peines et bien d’autres surprises. Prêt à embarquer dans le récit d’une aventure humaine au bout du monde ? C’est parti !
Je jouis d’une chance exceptionnelle que beaucoup tentent de saisir tout au long de leur existence : celle d’avoir réalisé mon rêve, d’en avoir fait ma réalité. Cependant, loin de moi l’idée de vous mentir ou de me montrer non reconnaissant envers l’immense joie qui anime mes journées aujourd’hui, ce n’était pas nécessairement le rêve unique et magnanime que je cultivais au départ. Comme tout nouveau amoureux de basket, je vouais un véritable culte à Michael Jordan, à tout ce qu’il avait accompli durant sa carrière mémorable et surtout à sa manière singulière d’exceller devant le regard admiratif de ses contemporains. Ses gestes, son envol dans les airs, son aura : mon plus grand souhait était de lui ressembler et, un jour, d’arriver moi aussi en NBA. Rien de bien original jusqu’ici, je vous l’accorde, mais que voulez-vous… Quand vous contemplez les prouesses du meilleur joueur de l’histoire d’un sport qui réveille tous vos sens, comment ne pas être curieux de suivre ses pas ?!
Pour y parvenir, j’ai tout de suite choisi une voie qui était peu orthodoxe mais qui reflétait les multiples nuances de ma personnalité. Ayant commencé assez tard la pratique du cuir car d’abord enivré par la rythmique de la danse, le streetball a su me donner des ailes et les moyens de m’épanouir durant toute mon adolescence. Le basket a ce quelque chose de purement musical qui n’a cessé de me faire cogiter, d’enrichir mon imagination et mon rapport à l’art au point de construire ma vie autour de lui. Une pensée qui a marqué pour de bon l’un de mes premiers entraîneurs de l’époque et qui me la récite à chaque fois que nous nous croisons, même dix ans plus tard… Ainsi, dans la cour du lycée, je me surprenais à amuser mes petits camarades qui s’étonnaient de me voir rentrer des dunks en 360 lors des pauses déjeuner. Leurs réactions m’intriguaient, me ravissaient, me confortaient dans l’idée que j’empruntais bel et bien la bonne direction. Donner du plaisir aux gens qui m’entourent, voir la petite étincelle briller dans leurs yeux de spectateurs ébahis, voilà véritablement ce qui me fait vibrer !
Pourtant, cette notion de partage universelle, je pensais l’avoir perdue une fois que j’ai commencé sérieusement à pratiquer le basket en club. Je trouvais dommage qu’un public vienne se divertir plutôt qu’on ne le divertisse, nous les acteurs de leur entertainement ponctuel. Cela allait à l’encontre de ma conception de la communion, de ma propre perception du spectacle. Ce n’était plus ce que je recherchais, clairement pas. Or, je persistais à constamment me persuader que le nœud de mon désir le plus cher était le bon mais il me manquait le réel fil directeur pour effleurer le noyau de ma passion.
C’est alors que le freestyle a considérablement étoffé mes horizons et sublimé ce que j’étais déjà capable de réaliser devant une foule qui se demandait ce que j’étais en train de créer, en impro totale devant elle. Et directement, j’ai souhaité me démarquer du freestyle tel qu’il était pratiqué jusqu’alors. Bon nombre d’adeptes, qui étaient devenus des références en la matière au début du siècle, aimaient beaucoup faire rebondir la balle et dribbler dans tous les sens à la And 1. A l’inverse, je voulais fusionner mon amour irréversible pour la danse dans les différentes arabesques auxquelles je réfléchissais de jour en jour. J’avais la volonté d’innover sans relâche, bercé par la musique et les images qui fusaient dans mon esprit afin que le show dont j’étais le héros soit total, qu’il y en est pour tous les goûts, que les gens s’en souviennent.
Et un beau jour, à mon insu, une amie a jugé bon qu’il serait pas mal que je poste quelques uns de mes exploits sur YouTube. Sans surprise, j’ai hésité longuement, me laissant guider par ma pudique timidité et finalement je me suis lancé, me suis mis à nu sur la Toile, sans réelle prétention ni attente spécifique. N’oubliant pas de me faire remarquer d’ajouter mes coordonnées en description de la vidéo en question, celle-ci avait vu juste car une fois mise en ligne, cette première vidéo va se révéler comme étant mon passeport vers la reconnaissance, une ouverture sur le monde que je savoure dorénavant chaque seconde ! A partir de ce moment-là, tout s’est enchaîné à une vitesse qui a dépassé toutes mes espérances : une invitation pour un concert de la Sexion d’Assaut, une autre à Lille devant 300 personnes puis bon nombre d’échos flatteurs à l’étranger se sont faits entendre. Et où ça ? Aux States, oui oui !
L’effet boule de neige était amorcé malgré moi, je passais progressivement de l’autre côté de la barrière. Je passais lentement mais surement du statut du simple passionné avec des fantasmes plein le crâne à artiste en devenir, capable d’émerveiller une assemblée spécialement venue pour observer ce que j’avais à lui offrir de plus beau, de plus authentique à lui transmettre. En d’autres termes, j’apprenais à me friter aux exigences du monde de l’événementiel et j’adorais ça, cette excitation avant de monter sur l’estrade, cette opportunité de ne faire qu’un avec le public. En juillet 2013, la capitale américaine m’invite à donner une représentation en son sein, moyennant un passage dans une radio locale et quelques interviews annexes pour en savoir un peu plus sur ma personne, d’où je venais, comment j’en étais arriver là. Comme un gosse qui vit un rêve éveillé, je me préparais avec soin à embrasser la destinée qui allait être la mienne, celle que je m’imaginais alors je commençais à peine à savoir me servir correctement d’un ballon, mon futur et principal outil de travail. Appelé entre temps en Europe, en Allemagne puis en Suisse notamment, je suis retourné par la suite accomplir ma mission originelle à New York, dans la “Ville qui ne dort jamais”, temple des rêves où tout demeure possible avec une pointe de culot et de talent…
A peine arrivé sur le tarmac de JFK, je suis trimbalé aux quatre coins de la ville tel un prince qui absorbe les convoitises de toute part. J’exagère peut-être un poil mais c’était tellement inconcevable sur le moment… Si mon corps semble éreinté à la nuit tombée, mon esprit n’a rien perdu de sa lucidité et je décide de mettre un terme à cette journée enrichissante par une visite anodine de Times Square, ma balle toujours greffée à la paume de ma main et une enceinte sous le bras. La gorge nouée par le théâtre lumineux qui se dresse devant moi, mes sens sont en ébullition et je ne peux ne pas me mettre à freestyler au milieu de la masse qui m’entoure. Me croyant tout seul au centre de mon jardin secret, transposé par les vibrations de la chanson Numb de Jay-Z & Linkin Park, je pensais avoir changé de dimension lorsque j’ai décidé d’ouvrir grand mes mirettes. Extrait de ma transcendance par des cris sourds, je me retrouve littéralement encerclé par une multitude de gens hétérogène, un melting pot de visages différents qui m’encourage dans l’expression de mon bonheur le plus fou. A cet instant précis, mes émotions, teintées de magie et de symbiose humaine, valent tout l’or du monde.
Pour l’anecdote, l’effet de groupe fut tel que des policiers ont été obligés de remettre de l’ordre dans la rue car tous ensemble, sans nous en rendre vraiment compte, nous bloquions la moitié de la circulation ! L’asphalte et le trottoir étaient bondés mais pas seulement : mon cœur l’était tout autant, rempli de splendeur et d’adrénaline. Cette nuit-là fut un symbole, le marqueur au sceau étincelant de ce que je voulais faire de ma vie et ce que je voulais offrir aux autres. Un nouvel horizon initiatique sur le globe s’ouvrait alors à moi, me donnant la force d’assouvir ma soif éternelle d’harmonie, de contribuer au plaisir de mes spectateurs. Oui, j’ai, du bout de mon doigt, touché mon rêve. Et avec le recul, allez savoir, ma rencontre tant espérée avec Michael ne serait pas si irréalisable que ça…
Source image : Chaîne officielle YouTube de Mxii Le Freestyler