Trop fort, trop seul : LeBron James perd sa troisième Finale NBA mais n’a pas à avoir honte
Le 16 juin 2014 à 08:02 par Bastien Fontanieu
On l’annonçait hier, ici. Envoyé avec passion et optimisme, ce petit article dont les réactions furent vives a au moins permis de mettre aujourd’hui sur pause certaines comparaisons des fois trop excessives. L’heure est donc au repos, pour nous comme pour LeBron et Jordan.
Dans le quotidien d’une star de la NBA, la difficulté de vivre dans une société de surconsommation et de rapidité d’information, c’est qu’on peut tout savoir tout de suite n’importe où et quand on veut. En conséquence, les attentes sont alors démultipliées de la part de nombreuses personnes. C’est notamment le cas concernant LeBron James, un des plus grands fantasmes de la planète basket, qui vient d’échouer une troisième fois en Finales dont une deuxième avec le Heat. Avec un tatouage Chosen One inscrit en large sur son dos massif et des rituels particuliers à ses débuts comme le port du numéro 23 à Cleveland ou le lancer de talc dans les airs avant chaque rencontre, le natif d’Akron s’est tout de suite attiré les foudres des puristes en 2003. Comment ? Ose-t-il défier Michael Jordan du regard ? Cette défense compréhensible mais tout aussi irritante de la légende des Bulls a permis à de nombreux joueurs de se trouver une carrière (coucou Kobe) mais aussi d’en briser d’autres, trop rapidement catégorisées ‘nouveau Jordan’. Vient alors aujourd’hui la question : et LeBron ?
S’il y a bien un point sur lequel le cyborg marque des points et en a marqué par le passé, c’est que les titres ne définissent pas toute une carrière. En effet, si les récompenses collectives sont nettement plus valorisées et appréciées que les individuelles, on ne peut quand même pas avancer le fait qu’un Steve Kerr ait davantage dominé qu’un Larry Bird. Et avec deux titres en poche en 5 tentatives, LBJ n’a pas à rougir. Surtout cette année, en ayant affronté une exceptionnelle équipe des Spurs, en quête de rédemption qui plus est. C’est assez simple : au sommet de son art en terme de self-control, de science du jeu et de domination technique comme physique, James s’est retrouvé seul. Vraiment seul, comme un naufragé sur un radeau. Y’a quelqu’un ? Silence complet. Bosh ? Manucure. Wade ? Rhinoplastie. Chalmers ? Garderie. Et Allen ? Pré-retraite. Alors qu’on voyait le Heat dérouler dans une Conférence Est des plus faibles, c’est la claque de la Finale et du changement de niveau qui a déstabilisé 90% de l’équipage floridien. Terminées les performances de Dwyane face aux Pacers, bonjour la bouillabaisse des Games 2, 4 et 5. L’assurance de Chris Bosh et son avantage facteur-X ? Disparus, tous à la poubelle avec ses déclarations d’avant match qui garantissent une victoire du Heat à San Antonio. On ne fera pas tout le tour du roster puisqu’il nous faudrait trois pages, deux fossoyeurs et un architecte, mais ce qu’on sait c’est la chose suivante : LeBron James a été complètement délaissé sur ces Finales 2014. En attaque comme en défense, dans l’intensité physique comme vocale.
Il suffisait de le voir, une nouvelle fois, sur ce Game 5 à San Antonio. Avec ce regard, cette détermination, un air de Boston 2012 qui faisait peur à un paquet de monde et annonçait une partie légendaire. Tout de même : quelques 16 points et 6 rebonds à la fin du premier quart, c’est assez solide pour un leader qui souhaite montrer la voie. La suite ? Rien. La faute à plein de choses, c’est vrai. Certains diront son manque d’agressivité, d’autres le manque de soutien. La faiblesse de Spoelstra peut-être, aussi. Mais comment lui en vouloir ? Après avoir explosé le premier quart et occupé la balle un bon bout de temps, il fallait bien mettre en avant et en rythme ses coéquipiers, lui qui a régalé la NBA ces deux dernières saisons avec une balance sublime entre la domination individuelle et collective. Un chef d’orchestre rêvé, qui pouvait compter sur l’Orchestre philharmonique de Berlin pendant ses épopées printanières, et non Zebda quand il commençait à faire chaud. Il aura fallu voir cette possession en première mi-temps, sans le moindre mouvement de la part de ses coéquipiers et 24 secondes de dribbles par James pour comprendre la frustration vécue par le phénomène. Un calvaire, vécu seul, et sans la possibilité de pointer qui que ce soit du doigt. Une quatrième participation en Finale, peut-être celle de trop pour certains. Mais certainement pas pour James, qui a fait sa part du boulot.
Aurait-il dû continuer sur son rythme et finir la rencontre à 60 points, 20 rebonds et 4 passes ? Peut-être. Mais on lui aurait enfilé l’étiquette de soliste qui n’y arrivera jamais seul, pendant que Wade demande la balle en conférence de presse. Aurait-il dû dire autre chose que ‘c’est ma faute’ après le match, lui qui ne pouvait pas réellement faire mieux ? Le soutien est réel cette fois-ci : après des années passées dans le rôle du vilain, il serait peut-être temps de donner un break à LeBron. Non ce n’est pas Jordan, oui il doit être critiqué. Mais quand c’est le cas, autant être franc et juste, pas comme certains de ses coéquipiers. James était seul sur ces Finales : c’est à Pat Riley de trouver une solution, pas le King désormais.
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