Detroit Pistons 2.0, rébellion dans le Michigan

Le 10 août 2013 à 08:50 par Benoît Carlier

Après quatre campagnes non fructueuses lors desquelles les troupes de Joe Dumars ne sont pas parvenues à accrocher le wagon des PlayOffs, l’heure est aux changements, et aux souvenirs aussi.

Tout va mal dans la Motor City, ou presque. Déclarée en faillite économique depuis quelques semaines, la capitale historique de l’industrie automobile présente une dette supérieure à 18 milliards de dollars. Dans son malheur, elle incarne la faible santé financière de tout un peuple, mis à mal par la crise économique de 2008. Cinq ans déjà, près de cinq ans aussi que les Pistons semblent sur le déclin après une époque dorée symbolisée par l’acquisition d’un titre en 2004. Dans le même temps, la NBA continue de prospérer au pays de l’Oncle Sam et voit vert dollar lorsqu’il s’agit d’évoquer son avenir ; entre commercialisation d’espaces publicitaires toujours plus nombreux et internationalisation du marché. Envahie de nouveaux propriétaires aux poches obscures bien remplies, la Ligue assiste à un renforcement de ses places fortes, au détriment des autres et de la politique de régulation développée par David Stern.

Génération 2004, le retour des héros

Loin de Brooklyn et ses 100 millions de masse salariale pour la saison prochaine, les Pistons ont tout de même effectué un vrai mercato cet été, se risquant à quelques paris, mais faisant aussi appel à de vieilles connaissances. C’est notamment le cas pour le Sheed qui délaisse définitivement les terrains pour s’installer confortablement au premier rang du Palace d’Auburn Hills. Non, Rasheed Wallace ne sera pas abonné d’honneur à Detroit mais fera bien partie du staff de la franchise à partir du 30 octobre prochain et la venue de Washington dans le Michigan. Son rôle ? Épauler Mo Cheeks et prendre en charge les jeunes pousses du secteur intérieur composé du très prometteur Andre Drummond (19 ans), de Greg Monroe (23 ans) et du rookie Tony Mitchell (21 ans). Mais au delà du jeu, le quintuple All-Star devra surtout insuffler à ses troupes la soif de vaincre qui le caractérisait si bien une fois le jersey sur les épaules. À tous nos trashtalkers, pas de panique, votre slogan préféré devrait retentir cette saison encore sur les parquets de la NBA.

« Ball don’t lie ! »

Nostalgique, la Motown s’est permise le retour d’un autre pensionnaire de l’épopée 2004, probablement même le plus célèbre en la personne de Chauncey Billups. Pour sa 17ème saison dans la Ligue, Mister Big Shot apportera toute son expérience à un groupe encore jeune (25,6 ans de moyenne d’âge), entre deux tirs primés et un étirement des adducteurs. Un appui de poids pour soigner seconder l’une des recrues phares de l’été du côté de Detroit, un certain Brandon Jennings.

Billups et WallaceDetroit se rappelle aux bons souvenirs avec Billups et Wallace.

Phil Jackson en gage de réussite ?

Car oui, outre le recrutement de deux rescapés du groupe sacré en 2004, il aura bien été question de business cet été dans le Michigan. Et qui de mieux pour venir conseiller le club de Tom Gores que son vieil ami Phil Jackson ? Doté d’une influence incommensurable dans la Grande Ligue, le Zen Master décide de revenir aux affaires et son premier acte fût de signer Maurice Cheeks, à défaut d’un Brian Shaw aux envies plus prometteuses. Le successeur de Lawrence Franck est un homme simple et discret, fort de deux vraies expériences de coaching depuis 2001 (Portland puis Philadelphie, avant de retrouver un poste d’assistant auprès de Scott Brooks à OKC en 2009). Sa tâche ne sera pas simple pour relever le tout nouveau défi de ces Pistons 2.0 et gérer les nouveaux poids lourds fraîchement débarqués à Motor City.

En effet, inspectant la Free Agency avec attention dès la saison achevée, Detroit s’est offert un premier gros calibre avec la signature de J-Smoove. Transfuge en provenance d’Atlanta, ce All Star en puissance viendra dynamiter le secteur intérieur des Pistons sous la coupe du Sheed. Ce dernier lui enseignera sa science du jeu placé pour enrichir un peu plus la palette offensive de l’ex-faucon. Avec Josh Smith, Detroit tient son franchise player, à la fois capable de porter son équipe dans les fins de match au couteau et de remobiliser ses coéquipiers dans la moitié de terrain qui compte le plus à l’Est, celle de la défense. À 56 millions de dollars sur quatre ans, on n’en attend pas moins de lui dans le Michigan.

Mais le Zen Master et Joe Dumars ne se sont pas arrêtés en si bon chemin dans la refonte de leur effectif. Ils ont récemment pris la décision d’effectuer un trade majuscule, faisant une croix sur les talents du jeune Brandon Knight et les benchers Khris Middleton et Viacheslav Kravtsov, pour s’offrir les services de Brandon Jennings. Celui-ci, bien qu’il ne jure de ne plus céder au croquage intensif, nous laisse perplexe. On sait les promesses friables, et Michael Beasley nous en a encore proposé une récente démonstration – dans un tout autre domaine, on vous le concède. Et c’est donc là que le MVP des Finales 2004 intervient pour jouer les rôles de thérapeute et transformer son coéquipier en passeur hors pair, n’acceptant que les tirs ouverts et dans le sens du jeu. Bien sûr, les soirs de fièvre – 55 points pour un rookie, les dolipranes étaient alors inutiles – toute ordonnance sera temporairement mise de côté pour laisser au jeune homme la possibilité de s’apaiser à sa manière.

Le pari est donc pris à Detroit, qui table sur une alchimie des deux tireurs fous que sont Smith et Jennings dans un environnement relativement prospère, fait de joueurs d’expérience et jeunes de talent. Faisons confiance au Zen Master pour que ses choix s’avèrent judicieux, comme ils l’ont si souvent été par le passé.

philPhil Jackson ne fréquente plus les bancs de la Ligue mais son réseau fonctionne toujours.

Le Palace souhaite vibrer de nouveau

Aujourd’hui, le basket-brawl du 19 novembre 2004 ne semble plus qu’un lointain souvenir et feu Ron Artest, devenu Metta Wolrd Peace – on nous signale dans l’oreillette qu’il envisagerait encore un changement de patronyme – a quitté l’Indiana pour rejoindre des marchés plus juteux. Une situation redevenue à la normale dans la Grande Ligue, qui laisse aussi entrevoir des jours meilleurs à Detroit.

Autour du trio d’hommes forts composé de Brandon Jennings, Josh Smith et Andre Drummond, l’expérience des quelques cadres comme Charlie Villanueva devra compléter la fougue des plus jeunes, puisque l’effectif de Detroit ne comptera pas moins de quatre rookies lors de la saison à venir. Avec Jennings, Billups et Bynum, le poste 1 semble sécurisé et lancera sur de bonnes bases un front court alléchant depuis l’arrivée de J-Smoove. Capable de switcher entre le poste d’ailier et d’ailier fort, il sera la plaque tournante des Pistons et devrait rapidement s’imposer comme l’homme à tout faire de la franchise.

En draftant le shooting guard Kentavious Caldwell-Pope en huitième choix, un peu à la surprise générale, Detroit reste simplement fidèle à sa ligne de conduite et renforce son secteur le plus dégarni, le poste d’arrière. En complément de Rodney Stuckey, qui devrait rapidement perdre des tickets shoot suite aux arrivées estivales, le rookie en provenance de Georgia proposera son surprenant dévouement au rebond pour un joueur évoluant à ce poste (il affichait 7,1 prises par match l’an dernier), et une agressivité qui lui permet de souvent fréquenter la ligne des lancers-francs. De nouveau dotés d’une rotation solide, les Pistons afficheront un effectif de taille à affronter les 82 matches de saison régulière sans crainte. Une renaissance ?

La récente décharge, collectant les tickets de loterie pour la Draft semble enfin avoir retrouvé son écusson et proposera des ambitions nouvelles pour l’exercice 2013-14. Un strapontin pour les PlayOffs semble être l’objectif le plus honnête pour un groupe qui tient enfin ses stars de renom et des jeunes capables d’exploser lors des saisons à venir. Mais à l’heure où Detroit se renforce, Cleveland, Washington ou encore Orlando semblent aussi plus forts que par le passé. La lutte à l’Est est lancée, et toutes les victoires seront précieuses dans la course aux huit premières places.