Comment se passe la sélection des arbitres pour les Finales NBA ? Zoom en coulisses avec Monty McCutchen, président de la commission des zèbres en NBA
Le 13 juin 2022 à 12:39 par Nicolas Vrignaud
Après quatre matchs de Finales NBA joués entre Warriors et Celtics, certains joueurs des deux formations ont trouvé à redire sur la qualité des prestations proposées par les arbitres. Longuement interrogé par ESPN, le président de la commission des arbitres Monty McCutchen est revenu sur le processus de sélection des officiels qui sifflent lors des phases finales. Spoiler : c’est du très très costaud.
C’est depuis très longtemps un sujet qui cristallise beaucoup de tensions lors des Finales NBA. La qualité de l’arbitrage n’est (très) souvent pas la raison première de la défaite d’une équipe, contrairement à ce que beaucoup pourraient exprimer sur les réseaux sociaux notamment. Maintenant, il faut également reconnaître que certains faits de jeux à un moment X ou Y de la rencontre peuvent prêter à interrogation quant à leur traitement par le corps arbitral. Même avec l’utilisation de multiples caméras, certains contacts semblent encore échapper à la vigilance des chemises grises. Pour expliquer le pourquoi et le comment des choses, Monty McCutchen – vice président de la NBA délégué à la commission des arbitres – a accordé une longue interview à Tim MacMahon de chez ESPN. Au programme, beaucoup d’explications intéressantes sur les méthodes de sélection des arbitres. Du début de la saison à la fin des Playoffs, les zèbres sont constamment évalués sur la base de leurs coups de sifflets et leurs oublis.
“Le processus de sélection est le même pour l’ensemble des Playoffs. Nous répétons l’opération à chaque nouveau tour. Nous sommes un comité de six ‘experts’ comprenant Joey Crawford, E.F. Rush, Mark Wunderlich, Bennett Salvatore, Bernie Fryer et moi-même [d’anciens arbitres]. J’utilise ce terme sans aucune prétention, mais nous avons dédié nos vies à l’arbitrage et nous sommes profondément impliqués dans cela. Nous avons beaucoup travaillé à l’objectivité de nos jugements.
Nous organisons un pourcentage [pour classer les arbitres] et les équipes. Le département d’analyse de la ligue aussi. Ce sont des reviewers indépendants. Ce ne sont pas d’anciens arbitres, ce sont des reviewers spécialisés, ils revoient toutes les fautes sifflées et non sifflées de chaque arbitre pour toute la saison, des milliers et des milliers de décisions par personne. À la fin, tout cela nous donne 36 noms au premier tour, puis 28 en demi-finales, 20 en finales de Conférence, et 12 en Finales NBA.” – Monty McCutchen
Ok, pour de la sélection, c’est de la sélection, car la NBA est évidemment déterminée à ne pouvoir compter que sur ses meilleurs éléments pour arbitrer lors de la dernière série de la saison. Le classement qui ressort au final est d’ailleurs d’une précision d’horloger suisse, puisque les pourcentages vont tutoyer les quatre décimales après la virgule. Dans certains cas de figures impliquant d’aussi infimes écarts, le chef des arbitres explique que des discussions sont engagées pour décider de manière collégiale qui sera l’heureux élu.
“S’il existe un écart de 0.008 dans le classement, nous en discutons en groupe. Cela veut dire l’équipe analytique et mon équipe, puisque logiquement les franchises ne sont pas conviées. Notre président des activités de la ligue Byron Spruell ainsi que le vice président des opérations basket, Joe Dumars, y participent aussi. Quand deux arbitres sont très proches, nous tranchons sur l’apport intangible de chaque candidat.”
Le point soulevé par McCutchen est très intéressant. Au delà des qualités d’analyse pure du jeu, il est également demandé à un arbitre de faire preuve de gestion humaine des situations. On l’a déjà vu lors de certaines rencontres de Finales NBA par le passé : des décisions mal expliquées peuvent contribuer à chauffer les esprits… et une fois qu’un joueur perd l’estime qu’il avait envers le corps arbitral, bon courage pour aller lui expliquer son tort sur une faute. Il en va de même pour les fins de matchs sous tension, à cause du score et de l’enjeu. C’est dans cet esprit que la sélection s’effectue aussi en prenant compte de la capacité de chacun à gérer des moments chauds.
“Vous ne pouvez pas être à ce niveau en manquant beaucoup de fautes et en espérant que votre force de caractère et votre courage vous feront passer au dessus. En tant qu’experts, nous devons savoir où les gens seront à l’aise, s’ils seront capables de se montrer dans le quatrième quart ou en prolongations, car les décisions sont très difficiles à prendre et la pression très importante. Certains arbitres gèrent cette pression un peu mieux que les autres, et nous devons récompenser cela. Nous devons développer ceux qui n’en sont pas capables, et ils ne pourront pas avoir les meilleures opportunités tant que ce n’est pas le cas.”
Se farcir un Draymond Green chauffé à blanc dans un Game 7 de Finales NBA ? Il faut être bien accroché d’une part, et faire preuve d’un mental d’acier de l’autre. Il en va de même pour les coachs, qui ont bien sûr pour mission de préserver leurs joueurs en montant au créneau sur les questions d’arbitrage, quitte à prendre la foudre. Steve Kerr sait par exemple se mettre en pétard quand les choses ne vont pas dans le sens des Warriors, et Ime Udoka peut en faire tout autant dans le même cas de figure côté Celtics. Il est donc primordial de savoir réagir dans un esprit de conciliation, mais aussi de faire preuve d’une froide fermeté si les mots échangés dépassent le cadre d’une conversation entre acteurs d’une rencontre de basket. Tout est une affaire de jugement millimétré et, soyons honnêtes, si c’est bien facile de critique derrière nos écrans ce serait évidemment bien plus compliqué en revanche de prendre le sifflet pour expliquer à Dray ou a Pat Beverley qu’il a commis une faute.
Siffler une faute, c’est à la fois très simple et très compliqué, d’autant plus quand l’enjeu n’est rien de moins qu’un titre NBA pour l’une des deux équipes. Face à l’importance du rendez-vous, la NBA se doit d’envoyer ses meilleurs éléments pour assurer le bon déroulement des choses. Avec ces précisions du boss de l’arbitrage de la ligue, on est désormais conforté à l’idée que c’est bien le cas.
Source : ESPN