Jeux Olympiques de Paris 2024 : l’Équipe de France pourrait jouer dans un Hall Porte de Versailles, le foutage de gueule maximal est atteint

Le 16 mars 2022 à 15:54 par Arthur Baudin

Paris 2024
Source image : montage TrashTalk

C’est à peine croyable. À peine croyable, parce que c’est tout simplement inconcevable. Dans ce lien s’affichent les différents sites de compétition et leur assignation pour les Jeux olympiques de 2024, qui auront donc lieu à Paris. Les phases finales de basket-ball prendront place à Bercy, rien à redire là-dessus. Mais la phase de poules ? Elle aurait apparemment lieu dans le Hall 6 du Parc des Expos de la Porte de Versailles, là où aucun match ne s’est jamais disputé. Entre hauteur de plafond limite et Salon de l’Agriculture au calme, le foutage de gueule maximal est atteint. 

Sur le papier, cela s’appelle l’Arena Paris Sud 6, mais en réalité, c’est un hangar métallique dans lequel se tiennent chaque année le Salon de l’agriculture, la Paris Games Week et le Salon du chocolat. On aurait adoré que ça soit une vanne, une intro foireuse à lire au millième degré (dédicace au Gorafi), mais le site du comité d’organisation est formel : Kevin Durant dribblera là où Maruel – taureau robuste et pur produit de Lozère – a remporté le prix de la race Aubrac le 2 mars dernier.

L’idée n’est pas de mépriser ce fabuleux évènement qu’est le Salon de l’agriculture, l’endroit idoine pour découvrir les régions de France et se murger avec un éleveur du Poitou. Le problème est ailleurs. Comment le basket-ball, premier sport collectif olympique et second au nombre de licenciés en France (629 000 à ce jour), avec une Équipe de France masculine vice-championne olympique, peut-il en arriver là ? À l’origine de cette controverse, le transfert du stade aquatique olympique vers le quartier de la Défense. La gymnastique y faisait déjà local et a dû bouger à Bercy. Sauf que Bercy était assigné au badminton, qui récupère donc la future salle de la Porte de la Chapelle, lieu initialement choisi pour jouer la phase de poules du tournoi de basket. Notre sport est ainsi redirigé dans le hall 6 du Parc des Expos de la Porte de Versailles, là où aucun match ne s’est jamais disputé.

Ces mots sont ceux d’un rédacteur qui n’a connu le badminton qu’au lycée – entre un trimestre d’ultimate et un autre de 3×500 – mais les badistes ont-ils réellement besoin d’une salle de 8000 places ? En construction depuis mars 2020, la Paris Arena II de Porte de la Chapelle est la future résidence du Paris Basketball. C’est une salle de basket. Le souci rencontré par le comité d’organisation, c’est que le badminton et la gymnastique requièrent une hauteur de plafond de 11m et 12m. Au Parc des Expositions, la taule n’excède pas les 9m. Or le cahier des charges de la FIBA n’exige que 7m de hauteur de plafond. Comme de nombreuses personnalités autour du basket, Evan Fournier a donc furieusement réagi à cette délocalisation. Des propos accordés aux confrères de l’Équipe.

« C’est une blague ? Si c’est vrai, si c’est vraiment ce qui arrive, c’est de la grosse m… Cela n’a aucun sens ! Le sport majeur des JO, c’est l’athlétisme. Mais en tant que sport collectif, le basket est numéro 1. Nous sommes vice-champions olympiques, on est chez nous, et ils ne garantissent pas une vraie salle ? Encore une fois, si c’est le cas, ce sont des pipes et ils se foutent de nous.

Et ils pensent vraiment faire jouer Team USA, ses stars qui pèsent des dizaines de millions et jouent dans des Arenas géantes tous les soirs, dans ces conditions ? Et s’il y a un problème d’humidité, des blessures ? On n’est pas à l’abri que les franchises, quand elles comprendront, fassent pression sur leurs joueurs pour ne pas y aller. […] Je suis déçu, en colère. Cela me fout la haine. Un truc comme ça n’arriverait jamais aux États-Unis. On ne respecte rien » – Evan Fournier

Des mots forts, probablement sans précédents dans le basket-ball français. Ou du moins, des propos aussi logique qu’inconcevables à une trentaine de mois de Jeux Olympiques historiques à Paris. Cet amateurisme montré par le comité olympique représente un point de non-retour. Que Tony Estanguet et son équipe rencontrent un problème de « hauteur de plafond », c’est une chose, mais on ne peut pas accepter que dans sa solution, elle y laisse un sport à l’abandon. Un sport qui, encore une fois, a tous ses indicateurs au vert dont une Équipe de France au sommet. Et si cela ne concernait que l’EDF, ça se saurait : accueillir les meilleurs basketteurs du monde dans un local où la hauteur de plafond ne permet pas un cube d’affichage numérique, c’est un abandon. Miser sur un système de climatisation inapte qui pourrait rendre le parquet glissant, c’est un abandon. Quand Jean-Philippe Gatien – le directeur des sports de Paris 2024 – confie à l’Équipe qu’aucun plan B n’a été envisagé, c’est un abandon.

Mais outre la logistique, c’est la première fois depuis 1924 que la France accueille les Jeux olympiques. Le propos tenu ici n’est pas nombriliste, le basket a été l’un des sports fédérateurs à Tokyo. Quand l’Équipe de France a vaincu la Slovénie sur un ultime scotch de Nicolas Batum – une image passée à la postérité – les frontières de notre discipline se sont élargies. D’autres sphères se sont prises au jeu. En pays hôte, il est donc indécent de raisonner par la seule logique de l’équité. On ne peut pas accorder les mêmes moyens à tous les sports, cela ne s’est jamais fait. Et même si c’était le cas, le basket ne se jouerait pas dans une grange où Kevin Durant risque à tout moment de déraper.

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Les Jeux de Paris 2024 dans un hangar pour le premier tour, c’est un scandale et un manque de respect absolu pour notre sport.

Une honte.

— David Cozette (@DavidCozette) March 16, 2022

« C’est un scandale et un manque de respect absolu pur notre sport ». Les mots de David Cozette sont réfléchis. Cinglants, mais réfléchis. Cette décision est une décision déconnectée prise par des personnes déconnectées. Il est impossible que sobre, en pleine possession de ses capacités auditives, visuelles, cognitives et tout le bordel qui s’ensuit, un gars décide d’assigner le basket-ball au hangar, moins d’un an après les Jeux olympique de Tokyo. Sur Twitter, Evan Fournier a interpellé Jean-Pierre Siutat, le président de la Fédération française de basket-ball. Un message aux allures de S.O.S, suivi de la mention « on ne peut pas laisser passer ça !!! » Il a également regretté que d’autres personnalités n’interviennent que sous couvert d’anonymat : « Il va falloir arrêter d’avoir peur de s’exprimer et assumer à un moment donné. “Un proche du dossier”, “une personnalité du basket français”. Vous me faites marrer les mecs ». Pour obtenir gain de cause, il est certain que des personnalités – autres que Vincent Poirier ou Nicolas Batum – devront prendre la parole. On attend le premier mouvement de la part de Tony Parker. Les jours qui viennent s’annoncent déterminants pour la réputation du basket français.

Isidore de Braize et moi arrivant au Hall 6 du Parc expo pour le premier match des Jeux Olympiques ⁦@Paris2024⁩.
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@ffbasketball⁩.
@FRABasketballpic.twitter.com/JeUxJA4LzZ

— Evan Fournier (@EvanFourmizz) March 16, 2022

Le compte à rebours est lancé, le comité d’organisation doit absolument reboucher le pinot noir et faire volteface. Peu de spectateurs, un risque évident de blessure et un bras de fer impossible avec la FIBA, l’équipe de Tony Estanguet a pris une décision qu’elle ne peut pas appliquer. Si les tenants et aboutissants sont évidemment nombreux et plus complexes que ceux vus de notre canapé, il est temps de faire marche arrière. Le basketball ne peut pas tolérer une telle situation à venir, après tant de travail réaliser pour démocratiser ce merveilleux sport. Wake the fuck up.