Les Los Angeles Clippers démarrent fort : quoi de mieux qu’une équipe de bons ouvriers pour une reconstruction ?

Le 23 nov. 2018 à 16:55 par Victor Pourcher

Clippers
Source Image : NBA LEAGUE PASS

Ils font partie des surprises de ce début de saison, les Clippers pointent fièrement à la troisième place de la Conférence Ouest avant d’affronter, cette nuit, les Memphis Grizzlies et leur infatigable duo Mike Conley – Marc Gasol. Une récompense méritée pour une équipe talentueuse et travailleuse en pleine reconstruction.

En deux ans, la maison Clippers a pas mal changé. On pourrait même dire qu’on y est allé à coups de bulldozer pour tout raser du côté de Los Angeles, puisque dans le roster de cette année, il n’y a qu’un seul survivant de la saison 2016-17 : Luc Mbah a Moute, et encore, il s’est offert une pige à Houston avant de revenir. Et sans manquer de respect à Lulu, on ne peut pas dire que ce soit le premier joueur auquel on pense quand on cherche des acteurs majeurs de la franchise sur ces dernières années. Lob City, c’est désormais bien terminé ! Chris Paul et Blake Griffin déjà partis, DeAndre Jordan ne s’est pas éternisé dans la Cité des Anges. Avec autant de pertes, on se préparait déjà à ne plus revoir les Clippers jouer les premiers rôles avant un bon moment. On s’est même peut-être moqué doucement une ou deux fois, pendant que les fans des Clippers planifiaient tranquillement leurs vacances en avril pour les cinq prochaines années.

Pourtant, il n’en est rien. On avait beau connaître et rappeler les qualités de meneur d’hommes de Doc Rivers, on avait beau dire qu’il pouvait faire des miracles avec une équipe solide mais a priori moyenne, sans véritable star, peu y croyaient réellement. D’ailleurs, on a encore du mal à ne pas être surpris quand on se lève le matin et qu’on aperçoit les Clippers sur le podium de l’Ouest. Car avec 11 victoires pour 6 défaites, c’est bien à la troisième place que s’est installée la franchise ! Alors forcément, il fallait se poser pour décrypter comment cette équipe de super-ouvriers a accéléré sa reconstruction, s’est définie une nouvelle identité et s’est hissée, pour l’instant, dans le haut du classement.

# Les fondations : les plans sont clairs et tout le monde est à son poste

Cette saison, les Clippers sont pragmatiques : pour gagner, il faut plus de points que l’adversaire. Cela peut paraître un peu con dit comme ça, mais ça se traduit dans le jeu par une attention particulière portée sur l’attaque et une défense moyenne mais sérieuse qui fait le taff autant qu’elle peut. Par conséquent, d’un côté, les Clippers marquent beaucoup. Non mais du genre vraiment beaucoup : 117,9 de moyenne par match, ils sont tout simplement la troisième meilleure attaque dans ce domaine, devant des équipes réputées offensives comme, disons au pif, Golden State. Pareil au rating offensif où ils grattent à la porte du top 5, bien aidés par une autre tendance de leur jeu : ça joue vite, ça court, ça cavale, rangez votre dico des synonymes, on clot la chose en disant qu’ils ont la huitième pace de la Ligue (103,4) ce qui, vu la tendance actuelle, est clairement rapide. Une grosse attaque donc, mais qu’en est-il de cette défense dite moyenne ? Avec une quatorzième place au rating défensif (108,4) et la quinzième moyenne de contres par match, les Clippers appliquent décidément le plan à la lettre et il serait compliqué de se situer plus au milieu. Seule petite surprise : une jolie dernière place en interceptions. Et puis on a imaginé Marcin Gortat ou Boban se jetant sur une ligne de passe en transition… Ok, c’est pas si étonnant en fait.

Autre directive claire, et sûrement la plus importante : s’appuyer sur un collectif. Là encore, c’est bateau chez les Clippers (celle-là c’est cadeau) et ça fait un peu langue de bois d’interview d’après-match. Mais on les connaît ceux qui viennent encenser le rôle du collectif et qui enchaînent les triple-doubles avec 30 tirs tentés par match… Non, on ne vise personne. Bref, chez les Clippers, tout le monde participe à la fête offensive puisque l’on compte cinq joueurs à plus de 10 points de moyenne, dont quatre à 15 et plus : Tobias Harris en plante 21,4, Lou Williams est à 18,8, l’ami Danilo Gallinari à 18,6, le héros de Châteauroux Montrezl Harrell en écrase 15,5, et l’épatant rookie Gilgeous-Alexander pointe le bout de son nez avec ses 10,5 points. Une marque habilement répartie et donc un sacré bordel à défendre pour l’équipe en face, d’autant plus qu’il ne faut pas s’attendre à un banc faiblard puisque le duo Williams – Harrell s’impose comme les chefs du second unit. Gortat sort et le buffle Harrell rentre. On croit s’en être débarrassé et voilà un immense Boban qui se ramène. Un des deux relous que sont Avery Bradley et Pat Beverley s’en vont, dites bonjour au rookie affamé Shai Gilgeous-Alexander qui vous rentre dans la gueule. On ne voit jamais le bout d’un des rosters les plus deep de NBA.

# Les finitions : venez les gars, on va se faire la peinture !

Les bases c’est bien beau, mais comment finit-on les actions du côté des Los Angeles Clippers ? Sortez vos rouleaux tout neufs, on va repeindre la raquette. Parce qu’avec un Tobias Harris en meilleur scoreur au poste 4 et un trio Gortat – Harrell – Marjanovic qui ne peut pas prendre l’ascenseur en même temps, le secteur intérieur des Clippers fait trembler chaque soir l’adversaire et le sol du Staples Center. On fait tourner le cuir correctement, on attaque le cercle et on pilonne à l’intérieur. Résultat, plus de 53 points inscrits dans la peinture tous les soirs (sixième de la Ligue). Surtout, à force de provoquer et de jouer dur, les lancers-francs tombent (deuxième de la Ligue) et comme nos amis californiens utilisent les briques pour se reconstruire plutôt que de les balancer, ils les rentrent avec le meilleur pourcentage de NBA. Et là pas de place au hasard, quand on va souvent sur la ligne et qu’on est adroit, pas étonnant d’inscrire 20% de ses points aux lancers.

C’est si simple le basket ! Et vous nous direz : “mais qu’ils sont cons en face, si c’est prévisible, ils ont qu’à les bouger sous le cercle !” Alors déjà, allez-y on vous regarde vous encaisser les bumps de Montrezl, Boban et toute la clique… Et puis, tout cela est possible grâce à une bonne dissuasion extérieure : s’ils font partie des équipes qui prennent le moins de shoot derrière l’arc, elle n’en reste pas moins celle qui présente le meilleur pourcentage de loin (deuxième, à 38,5% de ficelles). On laisse pas Dani et Tobi dans un coin…

# Le chef de chantier : au fait, c’est qui le patron ? 

Tant de partage, tant de cohésion, que c’est mignon… Mais en NBA, la pratique veut que chaque équipe puisse compter sur un leader, sur un mec qui les porte (et on parle pas de ses coéquipiers…) quand il faut prendre ses responsabilités et arracher une victoire décisive. Si vous avez bien suivi, il est difficile de sortir un seul gars de ce roster, on aurait plutôt tendance à penser que chacun possède son rôle et ses moments. Forcément, quand on part en quête d’un leader, on regarde d’abord du côte du scoring et de ce côté-là, c’est Tobias Harris et ses 21 points par match qui apparaît comme la locomotive du groupe. L’ancien de Detroit case un agréable 52% de réussite au tir, de quoi être la principale arme en attaque d’une des meilleures machine offensives du début de saison : vous la sentez l’envie d’être All-Star en février ?

Seulement, il y a un autre petit gars, un sixième d’exception qui sort de sa boîte dans les moments cruciaux, un créateur pas maladroit du nom de Lou Williams. Le double Sixth of the Year prouve que ses titres ne sont pas venus par hasard car, au-delà de ses stats (18,8 points et 4,5 assists), c’est lui qui est à la baguette quand la tension monte comme, par exemple, dans la victoire 128-126 contre Milwaukee. Overtime, une vingtaine de secondes à jouer, balle en main pour Loulou, un contre un, drive jusqu’au cercle, finition acrobatique : 2 points plus la faute, 0,3 sur l’horloge, merci d’être venu. Pour ne pas être injuste, on n’oubliera pas que, moins dans le stats que visuellement (quoique…), les couilles sont clairement soulevées d’une seule main par Montrezl Harrell, grosse partie de l’âme de cette équipe et énorme boule de rage, d’énergie et de muscles. Au final, on dit ça comme ça, mais s’il y a autant de “patrons” manifestes, chacun dans son registre, le véritable chef ne serait-il pas Doc Rivers qui, pour l’instant, maîtrise bien son discours et ses rotations ? Allez, on vous laisse penser à ça.

# Une pierre après l’autre : ok, mais il y en a des plus importantes que d’autres

On a l’habitude de parler de momentum dans un match ou dans une saison, et de ces événements qui font basculer d’une dynamique positive au bordel total (coucou les Warriors !) ou l’inverse. C’est peut-être encore plus pertinent quand on l’applique à une équipe qui mise énormément sur le collectif : un groupe se forme et se soude autour de ces grands moments, de ces matchs références. Et ça tombe bien pour les Clippers, ils ont pris l’habitude de cocher les bonnes dates sur le calendrier. Houston, OKC, Washington ou encore San Antonio, tous ont chuté contre les Angelinos. Mi-novembre, lors de leur série de cinq victoires consécutives, ils se sont même offerts les Bucks en prolongation, équipe en forme du début de saison, avant d’enchaîner avec les champions en titre de Golden State. Car oui, si l’attention a été monopolisée par les mots doux de Draymond Green à Kevin Durant rebaptisé pour l’occasion, les Clippers ont effectivement tapé les Warriors, également en overtime. Cause ou conséquence d’un gros collectif ? Probablement un peu des deux, et c’est grâce à ce genre de spirale positive qu’une grosse saison peut s’annoncer. En tout cas, vous saurez qui remercier pour le drama le plus suivi des dernières semaines !

Alors bien sûr, malédiction de l’Apéro oblige, les Clippers sont tombés après avoir mené de 20 points face à des Washington Wizards qui ont décidé d’arrêter de s’entre-tuer pour jouer au basket. Pas grave, une occasion de se rattraper se présente dès ce soir, dans un duel de teams surprenantes contre les Memphis Grizzlies au Staples Center. Si vous aimez le bling-bling, ce ne sera pas votre style de soirée, mais pour voir des baraques se mettre sur la tronche pendant 48 minutes, voire plus, de la bataille au rebond, du dunk de daron et du tir appliqué, c’est là que ça se passe.

Alors on sort les tableaux des previews : qui avait prédit les Los Angeles Clippers sur le podium en début de saison ? Attention les menteurs, on vous voit ! Ceci dit, c’est un départ parfait pour une équipe sérieuse, travailleuse et sûre de son jeu. Remplie de darons pas si chers qui font le taff, sans superstar mais avec un collectif qui roule bien, tout le monde attend de voir jusqu’où les Clippers peuvent aller. Fini de penser à reconstruire, on se retrouve en Playoffs ?


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