Star de demain – Sekou Doumbouya : the next big thing from l’Hexagone

Le 13 nov. 2018 à 15:27 par Benoît Carlier

Sekou Doumbouya
Source image : YouTube/Vice Sports

Chaque année, ils sont plusieurs centaines à s’inscrire à la Draft pour tenter d’y décrocher un spot dans l’une des 30 franchises NBA. Mais au milieu de ce vivier de jeunes talents, quelques joueurs tirent déjà leur épingle du jeu et sont promis à un grand avenir chez les pros. Parmi eux, le plus grand espoir du basketball français cette année, Sekou Doumbouya. A même pas 18 ans, il patiente tranquillement à Limoges avant de réaliser son American Dream.

Né à Conakry en Guinée, Sekou Oumar Doumbouya arrive en France avant de souffler sa première bougie. Au cœur de la région Centre, à Fleury-les-Aubrais, il grandit dans un petit appartement de quartier avec sa mère, ses trois sœurs et un cousin, loin de sa figure paternelle restée au sein de l’armée de son pays en Afrique. Les contacts avec son père son rares et c’est une époque difficile pour Sekou qui devient rapidement l’homme de la famille alors qu’il n’est qu’un enfant. Il se souvient de cette période compliquée dans un bel entretien avec Yann Ohnona, notre confrère de L’Equipe.

“C’était difficile car j’ai des liens forts avec lui, même si je ne l’avais connu que petit. J’étais le seul homme à la maison, ma mère me le rappelait souvent. Je devais montrer l’exemple. Je crois avoir toujours gardé la tête sur les épaules malgré les sollicitations. Chaque fois que je franchis un palier et que certains hallucinent, moi je trouve ça normal. Ce n’est pas de l’arrogance. J’ai juste confiance et je sais où je veux aller.”

Mais le jeune homme n’a pas toujours eu cette certitude, lui qui fait partie de ces nombreux joueurs à avoir découvert la balle orange par hasard. D’abord membre de la grande secte des footeux dans la région Centre, c’est en accompagnant un de ses potes à son entraînement de basket au CJF Fleury-les-Aubrais qu’il va être repéré par le coach, Benoist Burguet. C’est le début de la carrière du “petit” Sekou, il a alors 12 ans. Après quelques entraînements, il décide d’abandonner les ballons de taille 5 pour se concentrer à faire trembler les ficelles avec un T7. Sa première année en benjamin 2 laisse entrevoir un fort potentiel même s’il ne progresse pas aussi vite qu’il le souhaiterait comme il le raconte au micro de Vice Sports.

“Au début, je n’étais pas bon mais j’avais des bonnes mains en-dessous de la raquette parce que j’ai commencé en pivot. Main gauche, main droite, je tirais des deux mains. Physiquement, je mettais deux ou trois dunks en entraînement et en match.”

La saison suivante, il rejoint directement les minimes France où il se confronte à des jeunes de deux ans ses aînés. Là encore, la concurrence n’est pas prête pour ce monstre de la nature qui se rapproche déjà du double mètre avant ses 14 ans. Du coup, il s’impose quelques contraintes comme ce fameux match terminé à plus de 30 points en ne se servant que de sa main gauche pour ne pas abîmer sa papatte droite qui venait d’être blessée. Très vite, les appels d’agents se succèdent et sa mère reçoit jusqu’à 47 appels en un week-end avec des propositions en tout genre. Tout le monde veut Doumbouya, des Etats-Unis à l’Ukraine. On lui offre de l’argent, des voitures ou des séjours en yacht. Même le Real Madrid est sur le coup, proposant un million d’euro au clan Doumbouya alors qu’il n’a que 14 ans. Encore Guinéen, nos voisins transpyrénéens sont ainsi tentés de reproduire le même schéma qu’avec Serge Ibaka en le captant avant la majorité pour obtenir sa naturalisation au détriment de la France. Mais la famille ne cède pas et reste accrochée à ses principes pour tenter de garder un environnement stable autour de la jeune pépite qui est revenu sur toutes ces sollicitations dans une vidéo de présentation pour le PB86.

“Il ne faut pas être tenté par les choses comme ça. J’étais jeune, je ne pouvais pas quitter ma famille comme ça et aller dans un autre pays. Ça allait être compliqué pour ma mère. Mon objectif n’était pas de jouer au plus haut niveau le plus vite possible, c’était de jouer. Je suis jeune, j’ai besoin de montrer.”

Après un court passage au pôle espoir d’Orléans, il décide de partir au Centre fédéral où il joue avec les cadets France. En octobre 2015, il devient le premier joueur né en 2000 à fouler le parquet d’une des trois divisions françaises professionnelles. Mais en dehors des parquets, le caractère de Doumbouya lui joue des tours et il est exclu de l’INSEP pour des problèmes disciplinaires au terme de la saison 2015-16. En charge de son dossier à l’époque, le DTN Patrick Beesley explique le tempérament du jeune garçon à Xavier Colombiani dans L’Equipe.

“Il n’a pas fait de fautes graves, mais a eu des comportements inadaptés dans le cadre de la vie scolaire.”

La famille se met alors à la recherche d’un club professionnel et formateur dans lequel Sekou pourra poursuivre son développement, lui qui n’a toujours que 15 ans. Sans garanties suffisantes de la part de l’Orléans Loiret Basket qui ne lui garantie de pas de jouer avec l’équipe fanion en Pro A, c’est à Poitiers qu’il pose finalement ses valises en deuxième division française pour suivre les traces d’Evan Fournier avec qui il partage le même agent, Bouna Ndiaye.

“J’ai beaucoup parlé avec lui. Il m’a parlé de l’intérêt de choisir ce club qui fait jouer les jeunes.”

Sous les ordres de Ruddy Nelhomme, l’assistant de Vincent Collet en équipe de France, il progresse à vue d’œil à l’instar de son temps de jeu. Ailier physique mesuré à 2,04 mètres, il peut défendre des postes 2 à 4 grâce à son explosivité et une belle mobilité pour son gabarit. Sorte de LeBron James, il prend surtout exemple sur Paul George pour tenter de devenir un two-way player extrêmement complet comme on les aime en NBA. En avance sur son âge, il est finalement retenu pour disputer les championnats d’Europe U18 au terme d’un marathon administratif afin d’obtenir la nationalité française dans les temps. En Turquie, il confirme tout son talent et explose un peu plus à l’échelle internationale en devenant le meilleur marqueur de la meilleure équipe du tournoi. A tout juste 16 ans, il est retenu dans l’équipe type de la compétition en compagnie de Frank Ntilikina avec des moyennes de 17,8 points, 7 rebonds, 1,3 interception et 1,2 contre. De retour au PB86, il poursuit son ascension et s’impose comme un titulaire indiscutable lors de sa deuxième saison en Pro B. Son club sait qu’il ne le retiendra plus très longtemps mais tente de profiter du phénomène autant qu’il peut. En février 2018, il tape son career high avec 26 points à 7/7 au tir et 9/9 sur la ligne mais la joie est de courte durée et contraste avec la déception du match suivant dans lequel il termine avec une bulle. Pourtant, il en faut plus pour casser le mental du Franco-Guinéen qui surprend son coéquipier Ron Anderson Jr. par son professionnalisme au micro de Bryan Meler de Slam Online.

“Ce qui me surprend le plus à propos de Sekou, c’est sa capacité à rebondir. Je ne me souviens pas d’un autre jeune de 17 ans qui aurait pris ça aussi personnellement. C’est un jeune homme qui essaye de gagner sa vie grâce au basket mais qui arrive aussi à profiter de sa vie d’ado.”

Quelques semaines plus tard, il est invité au Basketball Without Border Camp de Los Angeles où il est nommé All-Star en marge du match des étoiles des grands. Mais Sekou garde la tête sur les épaules et retourne en France pour préparer son bac pro en transports et logistique lorsqu’il n’est pas à la salle. A 17 ans, soit une année avant de pouvoir s’inscrire à la Draft NBA, il décide de continuer sa progression en s’engageant au CSP Limoges pour rejoindre l’élite et découvrir sa première compétition européenne professionnelle. Mais que les fans Limougeauds se gavent bien cette année, car leur numéro 45 ne devrait pas faire long feu dans le championnat de France. A sept mois de la Draft, il est annoncé dans le Top 5 de sa génération. Un rêve qui paraissait lointain mais qui semble se dessiner petit à petit, comme il le confie à l’AFP.

“Me faire drafter serait un grand rêve d’accompli déjà. Aller en NBA, c’est le rêve de tout basketteur. C’est un gros objectif et c’est réalisable. Il suffit juste de travailler, au fond.”

Grand fan des Bulls depuis l’époque de Derrick Rose, les résultats de Chicago et les estimations des spécialistes semblent concorder pour dire qu’un fit est possible. De là à devenir le nouveau français drafté le plus haut dans l’histoire ? Et pourquoi pas ?

Source texte : L’Equipe, Vice Sports, SLAM Basket, PB86