Kevin Durant, l’arme offensive la plus destructrice de l’histoire ? Il y a débat, mais KD a de sacrés arguments
Le 29 sept. 2018 à 20:36 par Nicolas Meichel
Kevin Durant. Pour beaucoup, ce nom est synonyme de trahison, de cupcake, de snake. Avec son départ à Golden State, ses déclarations cheloues et son amour pour les faux comptes Twitter, KD a flingué sa cote de popularité ces deux dernières années. Mais dans le même temps, il s’est aussi affirmé comme l’un des meilleurs joueurs de l’histoire en remportant deux bagouzes, avec deux titres de MVP des Finales en prime. Qu’on le veuille ou non, Durant fait partie des très grands, en particulier quand on parle de scoreurs.
“Les gens ne l’apprécient pas assez. Il est le scoreur le plus talentueux de l’histoire. Les doigts dans le nez. Il peut marquer 30 points en marchant. Il n’a besoin que de 12 tirs pour ça. C’est très très dur à réaliser. Il est très efficace. La plupart des gars ont besoin de sentir la balle dans leurs mains pour trouver leur rythme, lui n’en a même pas besoin.”
Voici ce qu’a annoncé Andre Iguodala au début du mois d’août lors d’un entretien avec Sports Illustrated. Souvent, ce genre de déclaration est à prendre avec des pincettes, surtout lorsqu’elle vient d’un coéquipier. Combien de fois a-t-on entendu des mecs sortir des grandes phrases qui n’avaient aucune véritable substance et qui manquaient d’objectivité ? C’est monnaie courante en NBA. Sauf que dans ce cas-là, il y a quand même de quoi se poser et réfléchir sérieusement aux propos qui sont tenus. Pourquoi ? Déjà parce que l’ami Iggy est un gars sensé qui n’est pas du genre à dire n’importe quoi et puis tout simplement parce qu’il y a un débat légitime sur la place de Kevin Durant à la table des meilleurs scoreurs de tous les temps. Quand on parle de machine offensive et de capacités pour mettre la grosse balle orange dans le panier adverse, KD a incontestablement son mot à dire face à des légendes comme Kareem Abdul-Jabbar, Wilt Chamberlain, Michael Jordan, Kobe Bryant et Cie. On peut critiquer Mr. Zone de Confort sur beaucoup de choses, et on ne s’en prive pas. Régulièrement, il nous tend des perches à travers son comportement de fake thug et ses décla en carton, à croire qu’il aime ça. Mais quand il s’agit de planter des points, la superstar des Warriors fait l’unanimité aujourd’hui.
Ce qui rend Kevin Durant exceptionnel, c’est son profil unique. Dans l’histoire de la ligue, on n’a jamais vu un joueur de basket comme lui. On parle d’un phénomène qui fait dans les 213 centimètres et qui est capable de bouger comme un arrière. Habituellement, les mecs de cette taille possèdent une mobilité limitée. C’est la nature qui veut ça. Il faut croire que KD ne vient pas de la même planète que nous vu comment il se déplace sur un parquet. A ça, vous ajoutez un vrai handle, du touché, des grosses qualités de dribble et surtout, surtout, un shoot redoutable. Etre aussi grand et adroit en même temps, c’est presque injuste pour une défense. Sans aucun doute, il fait partie des meilleurs snipers de la NBA actuelle, notamment dans les moments clutch où il a l’habitude de briller. Que ce soit à mi-distance ou du parking, Durant fait très mal. Et quand il est servi dos au panier, il profite souvent de son avantage de taille pour enchaîner les paniers à travers ses fadeaways et ses shoots à la Dirk Nowitzki. Bref, il y a de quoi être découragé, non ? Demandez donc à Gérard et ses potes de Cleveland, qui ont pris un véritable bouillon lors du Game 3 des dernières Finales. Grâce à cette menace constante que représente son tir, KD peut aussi sanctionner à travers ses pénétrations ainsi que sa capacité à marquer les yeux fermés sur la ligne des lancers francs, où il n’est pas loin des 90 % de réussite en carrière. En clair, le mec est inarrêtable, surtout avec les règles d’aujourd’hui qui limitent l’impact physique des défenseurs. Car si on peut mettre en avant une petite faiblesse chez Durant, c’est peut-être sur ce point-là. Tony Allen, l’ancien chien de garde des Memphis Grizzlies, a montré par le passé qu’il était possible de le gêner en créant du contact, en étant agressif et en faisant tout pour le sortir de sa zone de confort. Mais des pitbulls comme Tony, ça ne court pas les rues.
Avec quatre titres de meilleur scoreur de la saison, presque 21 000 points au compteur à seulement 30 piges, et une moyenne en carrière somptueuse de 27,12 points à 49 % au tir, Kevin Durant a également les statistiques et le palmarès qui parlent pour lui. Dans l’histoire, seuls Michael Jordan et Wilt Chamberlain ont remporté plus de titres de meilleur marqueur (respectivement dix et sept). Ça vous montre un peu le niveau du bonhomme. Concernant la moyenne de points, ils ne sont que quatre devant KD, à savoir MJ (30,12), Wilt (30,07), Elgin Baylor (27,36) et LeBron James (27,15). Alors oui, celle de Durant va très probablement baisser au fur et à mesure que sa carrière avance, surtout s’il continue à évoluer dans une équipe aussi cheatée que Golden State. Cependant, cette stat reste superbe et il faut la souligner. Et puis, il ne faut oublier que Kevin fait partie du club très fermé des joueurs ayant terminé une campagne avec 50 % de réussite au shoot, dont 40 % du parking et 90 % de la ligne des lancers francs. C’était lors de la saison 2012-2013, quand il évoluait encore du côté d’Oklahoma City. Au total, ils ne sont que sept à figurer dans ce cercle VIP. Outre Durant, il y a du Steve Nash, Larry Bird, Dirk Nowitzki, Reggie Miller, Mark Price et son coéquipier Stephen Curry. Bonjour les tireurs d’élite. Cela montre aussi l’incroyable efficacité avec laquelle score Kevin Durant. Certains des plus grands attaquants all-time n’étaient pas réputés pour leur taux de réussite, comme Kobe Bryant ou Allen Iverson par exemple. Ces mecs-là ont enchaîné les cartons grâce à leur agressivité offensive légendaire, mais ils n’ont jamais eu des pourcentages de ouf. KD, c’est un peu l’inverse. Il n’est pas du genre à forcer les choses, il laisse le jeu venir à lui, ce qui augmente forcément son efficacité. En onze ans de carrière, il a tenté plus de vingt shoots par match qu’à deux reprises. Imaginez le résultat avec un Kevin en mode croqueur…
Pour toutes ces raisons, Durant mérite de figurer dans la discussion des joueurs les plus indéfendables de l’histoire du jeu. Il a tout ce qu’il faut, à part peut-être un truc. Les plus grands scoreurs qui sont passés par la ligue avaient presque tous un go-to-move, c’est-à-dire un move caractéristique qu’ils maîtrisaient à la perfection et qui rendait les choses impossibles pour les défenseurs adverses. Quand on pense à Michael Jordan, on pense directement à son turnaround fadeaway. Quand on pense à Kareem Abdul-Jabbar, c’est son skyhook qui vient tout de suite à l’esprit. Kobe Bryant ? Regardez son footwork et son pull-up jumper. On peut citer aussi le Dream Shake d’Hakeem Olajuwon, le fadeaway sur une jambe de Dirk Nowitzki ou encore le crossover d’Allen Iverson. Dans la conscience collective, c’est important car cela marque les esprits et donne ainsi une nouvelle dimension au joueur. Pour KD, c’est difficile de ressortir un move précis, c’est assez compliqué de l’associer à un seul geste, car il a tellement de possibilités pour marquer. Comme dit au-dessus, il peut sortir des fadeaways, des tirs du parking sur demi-terrain ou en transition…il a l’embarras du choix, mais il n’a pas vraiment de signature. En fait, ce qui le caractérise vraiment, c’est cette combinaison entre sa taille, sa mobilité et son shoot. Ce n’est pas un go-to-move en soi, mais c’est ce qui le démarque des autres. Andre Iguodala confirme.
“Michael Jordan et Kareem Abdul-Jabbar étaient ces deux mecs possédant des moves indéfendables. Mike avait le fadeaway et Kareem avait le skyhook, mais KD est un gars de plus de 2m10 capable de planter un pull-up pépère de plus de quinze mètres. C’est ça son move indéfendable.”
Malgré tout ce qu’on peut dire sur lui, Kevin Durant fait partie de ces rares joueurs qui repoussent les limites de notre sport préféré. A travers son profil unique, il représente une anomalie du jeu. Sa place parmi les meilleurs scoreurs de tous les temps est d’ores et déjà acquise, et il possède de sacrés arguments dans ce débat. On ne dit pas qu’il est l’attaquant le plus inarrêtable de l’histoire mais ce qui est sûr, c’est qu’il a gagné le droit de regarder n’importe qui dans les yeux.