DeMar DeRozan s’ouvre sur Twitter quant à son état dépressif : un geste courageux et bienveillant
Le 27 févr. 2018 à 17:16 par Aymeric Saint-Leger
On a beau les voir tous les jours, toutes les nuits sur le parquet, dans des émissions TV, à l’entraînement, les joueurs de NBA restent des êtres humains. C’est le message qu’a souhaité faire passer DeMar DeRozan en s’ouvrant sur sa vie privée dans la Twittosphère lors du All-Star Weekend. Tout le monde traverse des moments, des périodes difficiles dans sa vie de tous les jours. On pourrait se dire qu’eux sont au-dessus de ça. Cependant, ce n’est pas être quatre fois All-Star comme l’arrière des Raptors qui empêche de cogiter et de déprimer.
Tout fan de NBA connaît le joueur qu’est DeMar DeRozan. Un incroyable joueur natif de Los Angeles, sélectionné par les Raptors à la Draft de 2009. Il a peu à peu progressé, grandi dans la Ligue, jusqu’à devenir l’exceptionnel attaquant qu’il est aujourd’hui, et un franchise player à Toronto (statut qu’il partage avec Kyle Lowry). Très fort à mi-distance, il est souvent d’un calme olympien sur le terrain, peu extravagant ni exubérant, DeRozan est sobre, appliqué et efficace. Mais on ne connaît que très peu la face cachée d’un homme discret, concentré sur sa vie de famille et le basketball. Il dégage une force, une sérénité immense. Cependant, ce n’est que la partie immergée de l’iceberg. Athlète professionnel ou pas, chacun est accablé par les tracas de la vie. On peut gagner beaucoup d’argent, jouir d’une grande célébrité, d’un amour des fans en étant joueur NBA. Malgré tout, tout le monde peut se retrouver, seul, esseulé même, avec des pensées nauséabondes qui envahissent l’esprit, et vous mettent dans un état second, que certains qualifient de dépressif. C’est le cas de DeMar DeRozan, qui semble malheureusement bien connaître ces troubles liés à la solitude, à l’anxiété. Le jeune homme de 28 ans, bien que paraissant timide et réservé, s’est confié sur ce qu’il était en train de vivre, dans la nuit du vendredi au samedi lors du All-Star Weekend.
This depression get the best of me…
— DeMar DeRozan (@DeMar_DeRozan) February 17, 2018
“Cette dépression prend le dessus sur moi.”
Sans doute avait-il besoin de se confier. Le natif de Compton n’était pas en train de profiter du week-end de festivités dans sa ville. DeRozan est revenu sur ce fléau qu’il traverse, auprès de Doug Smith du Toronto Star :
“Cela fait partie des ces choses où, peu importe à quel point on peut paraître indestructible, nous ne sommes tous que des humains. Nous avons tous des sentiments… de toutes sortes. Parfois… Cela prend le dessus sur vous, à des moments où le temps, où tout se trouve au-dessus de vous. […] J’ai toujours eu des nuits variées. J’ai toujours été comme ça, depuis que je suis jeune, mais je pense que c’est là d’où provient mon attitude. […] Je suis si silencieux, si vous ne me connaissez pas. Dans un sens, je reste distant, dans mon propre espace personnel, ma bulle, afin d’être capable de faire face à n’importe quoi auquel on est obligé de faire face.”
Notamment du fait de son enfance, de son éducation, il a compris que chacun était finalement similaire, et que chacun avait ses tourments :
“C’est un problème réel. Nous sommes tous humains au fond. C’est pourquoi je regarde chaque personne que je rencontre de la même façon. Je me fiche de qui vous êtes. Vous pouvez être la personne la plus petite de la rue, ou vous pouvez être la plus grande du monde, je traiterai tout le monde de la même façon, avec du respect. […] Ma mère m’a toujours dit : ‘Ne te moque jamais de quelqu’un, parce que tu ne sais jamais ce que cette personne traverse.’ Depuis que je suis enfant, je ne l’ai jamais fait. Jamais fait. Je me fiche de l’aspect, de la forme, de l’ appartenance ethnique, rien de tout ça ne m’intéresse. Je traite tout le monde de la même façon. On ne sait jamais. […] J’ai des amis dont je pensais qu’ils étaient absolument sereins, qu’ils allaient bien, et un beau jour tu apprends qu’ils sont toxicomanes et qu’ils ne peuvent pas se rappeler de ce qu’il s’est passé hier… Je n’ai jamais bu un verre de ma vie parce que j’ai grandi en voyant tant de gens noyant leur vie dans l’alcool, pour oublier ce qu’ils sont en train de traverser, tu vois ce que je veux dire ?”
Malgré tout, il avait besoin de se confier, et l’homme de 28 ans a été soutenu. Il espère même que son geste pourra aider d’autres personnes face à la dépression :
“Parfois vous entendez des choses sur d’autres personnes, comparables à cela [ce qu’il a écrit samedi matin sur Twitter, ndlr]. Il aurait pu y avoir une meilleure façon d’approcher ce sujet, mais j’ai reçu de supers mots de beaucoup de monde. […] Ce n’est pas quelque chose qui me fait ressentir de la honte. Maintenant, à mon âge, je comprends combien de personnes passent par là. Même si quelqu’un traverse cela, lit ça [son tweet] et se dit ‘Il arrive à passer outre la dépression et a toujours du succès dans ce qu’il fait malgré ça’, cela me convient.”
Il n’y a pas grand chose à rajouter. Le geste de DeMar DeRozan, qui pourrait sembler exhibitionniste, est juste l’expression d’un mal-être, qu’il avait besoin de partager avec d’autres. Il l’a fait simplement, sans trop en dire, sans vouloir se faire plaindre. Les retours qu’il a eu ont certainement dû lui faire chaud au cœur. À la fois fataliste et porteuse d’espoir, l’action du quadruple All-Star a vocation à montrer que personne n’est invulnérable, mais que malgré tout, tout le monde peut s’en sortir, surpasser ses démons et continuer à avancer. L’arrière des Raptors rappelle, par ce simple message, qu’on peut gagner 27 millions de dollars par an, être une célèbre star de la plus grande Ligue au monde, avoir plein d’avantages, de fans… cela n’empêche pas de se trouver perdu, déprimé, touché de temps à autres. Cela ne se contrôle pas, et ni l’argent, ni la célébrité ne peuvent y remédier. Par contre, DeRozan, lui, peut donner du courage, et inspirer les gens autour de lui en se confiant à livre ouvert sur un des détails intimes de sa vie personnelle. Sans entrer dans le pathos, mais en rappelant que plombier, artiste, cadre supérieur, infirmier, jongleur de quilles ou joueur NBA, on est tous les mêmes, tous humains, et chacun d’entre nous a son fardeau à porter et ses épreuves à traverser, alors, autant s’entraider. Du haut de ses 28 ans, il peut profiter de son aura pour donner de l’espoir, du soutien et des ondes positives à quiconque pourra se sentir touché par la démarche du joueur de Toronto.
Avec une vitrine comme la NBA, et un vecteur comme Twitter, le Dino aurait pu craindre qu’on le raille en postant ce type de message. Cela n’a pas été le cas, fort heureusement. Sur le terrain, comme dans la vie, en voilà un qui porte ses cojones, quitte à passer outre son naturel timide et peu expressif. En tout cas, bravo pour le courage et l’honnêteté, et chapeau bas, Monsieur DeMar DeRozan.
Source texte : The Star