Boston strong : retour sur le déclic des Celtics après la blessure de Gordon Hayward, un choc salvateur
Le 21 déc. 2017 à 19:26 par Bastien Fontanieu
Dans un superbe article signé Lee Jenkins de chez Sports Illustrated, le parcours de Gordon Hayward est revisité avec minutie, dont le terrible épisode du premier soir de la saison régulière : un événement qui a créé une sorte de déclic à Boston.
Le rythme infernal de la saison régulière nous empêche de pouvoir réellement se poser sur quelconque fait majeur qui se produit un jour comme un autre, pourtant Dieu sait s’il faudrait appuyer sur le bouton pause, afin d’apprécier pleinement le travail incroyable réalisé par Brad Stevens chez les Celtics. Pas dans les résultats, pas dans le jeu, pas dans les systèmes mis en place ou les rotations. Non, c’est émotionnellement et psychologiquement que l’entraîneur de Boston est en train de faire un taf exceptionnel, en connaissant les circonstances dans lesquelles il doit s’exécuter quotidiennement. Perdre un de ses meilleurs joueurs le tout premier soir de la saison régulière, sur une action traumatisante ? Le genre de choc qui peut souder un groupe, ou bien l’exploser totalement. Et après avoir grandement modifié l’effectif des Celtics pendant l’été, il fallait justement que ce genre d’imprévu ne se produise pas. Cependant, Stevens était là, abasourdi comme tout le monde devant cette scène, obligé de mettre ses responsabilités tout en haut des priorités avant de penser à lui-même. Et comme Lee Jenkins le souligne dans son papier suivant les périodes de doutes traversées par Hayward, chacun a eu une réaction différente en voyant Gordon perdre sa cheville devant des milliers de personne. Prières, soutien, grand speech, nausées, tout a été observé et on replonge dans cette triste soirée avec une touche d’optimisme quand on connait la suite.
Le match d’ouverture était un véritable spectacle, pas à cause d’Hayward mais plutôt à cause d’Irving, qui faisait son retour sur place pour la première fois depuis sa demande de transfert pendant l’été. Peu de choses peuvent être récoltées sur les 5 premières minutes de jeu, mais Brad Stevens était enthousiaste. “Il y avait quelque chose de spécial dans notre attitude,” dit-il. “Vous vous dites que vous avez la possibilité de devenir vraiment bons.” Puis avec 6:52 restant à jouer dans le premier quart-temps, la balle dans les mains d’Irving sur le côté gauche, Hayward coupa derrière Crowder à l’opposé afin de recevoir une passe lobée. C’est un système qu’il exécutait régulièrement à Utah, et cela produisait quasiment systématiquement un dunk. Mais quand les Celtics tentaient d’en faire de même en présaison, cela manquait de rythme, et la passe d’Irving par-dessus Crowder était trop basse. Chez lui, à Chicago, Mark Bartelstein (agent d’Hayward) vit alors le choc entre les corps et détourna immédiatement son regard de l’écran. “J’ai eu cette bizarre intuition, comme si quelque chose de mauvais allait se produire.” Quand il retourna son regard vers l’écran, une vague de nausée le pénétra. Il fût obligé de sortir.
A genoux, Stevens se pencha sur Hayward dans la raquette, le coach étant aussi choqué que le joueur, avec l’image des deux pieds pointant dans des directions opposés. Les Celtics se rassemblèrent autour de leur banc et serrèrent leurs bras autour de leur assistant, Micah Shrewsberry. “On doit se soutenir, les uns les autres,” implora Shrewsberry. “Restez unis.” Semi Ojeleye entama une prière. Boston était dans le flou, avec 18 points de retard, et Hayward était en panique, interrogeant Bartelstein par téléphone dans son vestiaire : “Qu’est- ce que cela veut dire ? Est-ce fini pour moi ?” Et pendant que les docteurs accoururent vers l’ailier, les Celtics se rassemblèrent, réduisant l’écart final à seulement trois points. “On a perdu, mais je crois que ce comeback a installé une sorte de base pour ce groupe,” dit Shrewsberry. “Je crois que cela a lancé quelque chose.”
Boston s’inclina une nouvelle fois, la nuit suivante contre Milwaukee, mais au lieu du jour de pause habituellement offert après un back-to-back, Stevens improvisa un entraînement. Il ne délivra aucun discours passionnant. Il relaya simplement les informations. “Gordon ira bien. L’opération s’est bien passée. Il est bien dans ses pompes, et maintenant on a un travail à accomplir. On a 80 matchs à jouer.”
Et c’est ainsi que se lança la fabuleuse série de victoires de Boston, qui vit les Celtics remporter 16 matchs de suite par la force de leur groupe et l’envie de prouver qu’ils ne pouvaient se laisser abattre aussi tôt, aussi facilement. Chaque soirée était une occasion de plus pour un membre de la franchise de s’exprimer. Que ce soit Aron Baynes et son jeu rugueux, Kyrie Irving et ses folies dans le money-time, Jaylen Brown qui lui perdait son meilleur ami avant de rayonner à Atlanta, Jayson Tatum et sa maturité affolante, Al Horford et son rôle de daron du groupe toujours aussi serein. Accusant un poil le coup récemment, quoi de plus logique après deux mois aussi fatigants moralement, les Celtics ont retrouvé des standards “humains” et réalisent petit à petit l’absence d’un joueur du calibre de Gordon Hayward. Mais ce n’est pas pour autant que Boston va subitement rater sa saison. Bien au contraire, au-delà des rumeurs d’un potentiel retour de GH sur les parquets cette année, c’est surtout dans le ciment posé sur ce groupe que Brad Stevens peut aborder la suite avec le même enthousiasme que celui suivant les cinq premières minutes de jeu à Cleveland. Oui, les Celtics peuvent devenir vraiment bons, et peut-être auraient-ils aimé le vérifier dès cette saison. Mais en réintégrant Hayward par la suite et en jetant les jeunes dans la lave, c’est probablement une immense leçon collective et de soutien qui a été enseignée dans l’équipe, et qui servira par la suite.
Il faudra probablement attendre la fin de saison pour capter pleinement la force montrée par les Celtics, et le contrôle déployé par Stevens à leur tête. Jusque là, en tout cas, c’est fabuleux à regarder.
Source : Sports Illustrated