Jahlil Okafor s’ouvre sur ses premières années difficiles en NBA : le pivot ne pense plus faire partie du Process

Le 12 oct. 2017 à 22:55 par Pierre Morin

Jahlil Okafor
Source image : YouTube

Le début de la carrière de Jahlil Okafor est loin de ressembler à un long fleuve tranquille. Critiqué pour sa défense et ses quelques apparitions dans la rubrique “faits divers”, l’intérieur des Sixers est revenu sur sa traversée du désert dans une interview touchante accordée à Jordan Brenner de de SB Nation.

Difficile de trouver un mot pour caractériser les débuts de Jahlil Okafor en NBA. Chaotique ? Cela pourrait bien être l’adjectif qui pourrait le mieux qualifier la jeune carrière du Sixer. L’intérieur en a connu des vertes et des pas mûres en seulement deux ans dans la Ligue. Tout avait commencé pour le mieux pourtant. Enfin, pour le mieux… Les Sixers prenaient toujours des valises malgré la présence du numéro 3 de la Draft 2015. Mais bon, vu comment Philadelphie touchait le fond, on aurait eu du mal à trouver quelque chose à dire sur la saison de Jahlil, lui qui a terminé son exercice rookie avec 17,8 points par match. On aurait pu, mais un élément hors-basket est venu ternir le tableau de cette première saison. Une vidéo, tournée après une défaite à Boston, montrait Okafor, sortant d’une boîte de nuit, balancer une grosse bastos dans le visage d’un inconnu, après que celui-ci lui ait hurlé un bon gros “The 76ers suck”. La vidéo est immédiatement devenue virale sur les réseaux sociaux et dans les médias américains. C’est alors l’amorce d’une lente descente aux enfers pour Jahlil. L’opinion publique s’enflamme et le pivot passe immédiatement aux yeux de tous de numéro 3 de la Draft à l’image d’un jeune immature, violent, bref, d’une personne peu recommandable. Les critiques fusent déjà, d’autant plus que l’intérieur est mentionné par deux fois dans les rubriques “faits divers” du Philadelphia Inquire. La première pour avoir été flashé à plus de 170 km/h sur le pont Benjamin Franklin, l’autre pour avoir été menacé par un homme armé d’un revolver. Pour Jahlil, les semaines qui ont suivi l’incident de Boston ont été très dures, le rendant carrément mal à l’aise dès qu’il mettait un pied hors de chez lui. Auprès de Jordan Brenner, il a également pu revenir sur cette fameuse nuit dans le Massachusetts.

“J’étais gêné, et encore, le mot est faible. Les gens ont commencé à critiquer la manière dont mon père m’a élevé. Et c’est la chose qui m’a le plus touché, car je savais que quand ma mère est morte, il a tout fait pour me permettre d’être là où je suis.

Je devais aller sur le parquet devant des milliers de gens, et je savais qu’ils avaient tous vu la vidéo et qu’ils me jugeaient à partir de ça. Je me souviens vouloir quitter le terrain, être embarrassé d’être là-bas. C’était la première fois que le basketball n’était pas un échappatoire.

[Sur la nuit à Boston, ndlr] Nous étions sur le point de remporter ce match contre les Celtics et ils ont fini par nous distancer dans le dernier quart-temps. Je me souviens avoir été en colère car je pensais que nous étions sur le point de gagner notre premier match. J’ai juste décidé de sortir cette nuit là. Je ne m’en souviens plus trop, car je n’étais vraiment pas dans mon état normal. Et quand je suis ivre, je ne suis plus moi-même. Je me rappelle avoir été raillé, mais c’était quelque chose de banal, que j’entendais tout le temps en match. J’ai juste réagi différemment.

Je me souviens de ce que notre prof nous disait. Tu peux prendre le bus chaque jour et ne pas te jeter dehors pendant 300 jours, mais si tu le fais un jour, tout le monde se souviendra de toi comme l’enfant qui s’est jeté du bus.”

Hormis cet épisode qui va tout de même le suivre pendant de nombreux mois, la saison se termine sans trop d’accroc pour Okafor, même si les Sixers finissent une nouvelle fois dans les bas-fonds de la NBA. Les Playoffs arrivés, Jahlil adopte volontairement un profil bas pour éviter que de nouvelles critiques pleuvent sur lui. Avec le retour de Joel Embiid, la tâche n’est pas trop ardue tant l’autre numéro 3 de la Draft attire l’attention et les projecteurs. La saison 2016-17 reprend et la “Embiid mania” touche tout le monde, au point de faire limite un peu trop d’ombre à Jahlil, qui voit son temps de jeu diminuer peu à peu. Mais ce répit est de courte durée, puisque Jojo a la santé fragile, ramenant alors Jahlil au centre de l’attention. Et là encore, c’est une vidéo qui lui fait défaut. Face au Heat, on voit le pivot complètement amorphe sous le panier, ne tentant même pas de contester le tir ou de récupérer le rebond. L’image tourne beaucoup sur les réseaux sociaux, l’exposant de nouveau à d’acerbes critiques. Apogée des lacunes défensives du Sixer : le classement des plus-minus défensifs chez les intérieurs, dans lequel il finit 61ème sur 62 joueurs, juste devant Karl-Anthony Towns. On sait pertinemment que sa position de numéro 3 de la Draft n’est pas due à son impact défensif, étant donné que Jahlil est à la mobilité ce que Andre Roberson est aux lancers-francs. Également interrogé par SB Nation, l’un des assistants de Brett Brown, Lloyd Pierce, a tenté tant bien que mal de défendre son jeune pivot, qui a vu la confiance que lui accordait Brett Brown décroître peu à peu.

Pierce [Sur la vidéo contre le Heat] : “Est-ce qu’il aurait pu faire plus sur l’action. Toujours. Mais il était là où on avait besoin de lui sur le parquet. Cela dépend beaucoup de la perception que l’on a. Sur 48 minutes, c’est facile de trouver un errement de n’importe quel joueur de chaque équipe.”

Après que Brown lui ait dit qu’il allait cirer le banc pendant quatre matchs consécutifs, le pivot a commencé à bouillonner intérieurement. Sa fureur était telle que lorsqu’il rentre pour la première fois le match suivant face aux Wizards, c’est un véritable carnage qu’il va faire dans la raquette, faisant passer Marcin Gortat pour un vulgaire cruciforme en plastique. 26 points, 9 rebonds et une intensité offensive rarement vue, Jahlil aura réalisé une véritable mixtape ce soir là. Une prestation que le Sixer a mis sur le coup de l’énervement d’avoir été mis à l’écart. Malgré cette performance, le front office cherche à bazarder l’ancien de Duke, pas assez adapté à la NBA moderne qui demande un minimum de mobilité et de shoot extérieur, choses qui ne caractérisent pas vraiment le jeu old-school de Jahlil. En février, le pivot apprend qu’il est envoyé à Charlotte. Il prend donc l’avion mais doit finalement bifurquer vers Boston pour rejoindre son équipe, le transfert ayant été annulé au dernier moment. De sa télé, Jahlil n’a aucune idée de ce qui se passe et commence déjà à s’imaginer sans équipe. Difficile pour une jeune pousse de savoir prendre le recul nécessaire dans ce genre de situation. Depuis cet incident, c’est régulièrement que des rumeurs de transfert font surface, indiquant que les Sixers cherchent réellement à se débarrasser de Jahlil, mais qu’aucune autre équipe ne souhaite l’intégrer. Le pivot fait donc tant bien que mal partie du Process, dans lequel il ne se sent pas vraiment investi du fait de son histoire particulière, de son début de carrière ressemblant déjà à celle de paria, tandis que les autres jeunes Sixers se voyaient innocentés de toute critique.

“J’ai l’impression d’être le bouc-émissaire des problèmes du Process. J’ai appris que quand tu perds, les gens trouvent une raison à ton échec et je pense que c’est la défense qui a attiré leur attention. […] Mais il y avait tout un tas de choses qui expliquaient pourquoi nous n’avions gagné que 10 matchs cette saison là.

Et puis, l’année suivante est arrivée. C’était la première année de Jojo, donc on ne pouvait le blâmer. C’était la première année de Dario, donc on ne pouvait le critiquer. Nerlens venait d’être opéré et Ben n’avait encore jamais joué, donc je me sentais vraiment comme le bouc-émissaire.

J’ai commencé à me dire que je ne faisais pas partie de ce futur [dit-il en regardant les posts de ses coéquipiers sur les réseaux sociaux]. Je n’étais pas en mode ‘Oh, ils m’ont mis de côté’. C’est moi qui ai décidé de cela. […] Parfois, je me dis que ça serait mieux d’avoir un nouveau départ, d’être dans une nouvelle équipe, d’avoir un nouvel entourage et de nouveaux coéquipiers. Je pense à cela souvent et je crois que cela me serait bénéfique.”

Face à ce témoignage, il est difficile de rester de marbre. Certes, Jahlil Okafor a de nombreuses lacunes défensives et mentales. Pourtant, la façon dont il est devenu presque un paria au sein même de la NBA nous fait vraiment mal au cœur, tant cette interview est empreinte de sincérité et de volonté de faire ses preuves. On espère pour lui qu’il trouvera sa place dans l’univers de la NBA ou même de la balle orange, que ce soit avec ou sans les Sixers.

Source : SB Nation


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