Le fabuleux destin du millésime 96 – Marcus Camby : du pivot dominant annoncé au défenseur sacré

Le 08 mai 2017 à 09:37 par David Carroz

Draft 1996 Marcus Camby
Source image : Youtube, montage @TheBigD05

On parle beaucoup de la Draft de 1984 ou de sa petite sœur de 2003 en termes élogieux, comme les meilleures que la NBA ait pu connaître. Pourtant, intercalée entre ces deux générations dorées, une autre cuvée a son mot à dire. Avec 18 titres de champion, 2 MVP des Finales, 4 MVP de saison régulière et 10 All-Stars, la classe 1996 mérite toute notre attention. Ce millésime – qui vient de voir son dernier représentant tirer sa révérence avec un feu d’artifice à 60 points – fête donc cette saison les 20 ans de son arrivée dans la Ligue. Et, force est de constater que ces gars ont non seulement brillé sur les parquets mais aussi grandement contribué à changer le visage de la NBA. Pour le meilleur ou le pire, n’est-ce pas monsieur Stern ?

Second choix de la Draft 1996, Marcus Camby est loin d’être le plus médiatique de sa promotion. Il n’est d’ailleurs même pas passé par la case All-Star. Et pourtant, l’intérieur longiligne a déployé ses longs segments et imposé sa défense pendant de longues années, justifiant le choix des Raptors de miser sur lui. Même si ce n’est pas chez eux qu’il a le plus brillé. Quoique…

Rookie Origins – L’étiquette de pivot dominant

Né à Hartford dans le Connecticut, Marcus Camby fait ses classes dans son état natal, bercé par les exploits de Julius Erving, l’idole de sa mère qui ne rate jamais l’occasion de mener son fils admirer les exploits de Docteur J… en présaison, quand les voisins des Celtics, habitués à préparer les organismes dans le Constitution State, accueillaient les Sixers. On a connu pire comme modèle. Surtout qu’il va en suivre les pas quelques années plus tard, après avoir bouclé sa carrière lycéenne entre Conard High School puis Hartford Public High School où il ira chercher entre autres le titre d’état, celui de meilleur joueur du Connecticut de l’année avec un bilan de 27-0 et des stats plutôt sympathiques de 27 pions, 11 prises, 8 caviars et 8 crêpes par rencontre. Au calme. C’est en allant par la suite pas très loin de chez lui, à l’Université du Massachusetts, que son chemin rejoint celui de son glorieux aîné. Vingt-deux ans après le départ de Julius Irving chez les pros, Marcus Camby devient à son tour un Minuteman. Dans un registre bien différent certes, mais il s’ouvre rapidement un bel avenir. 105 contre pour sa première saison (3,6 par rencontre), meilleur débutant de l’Atlantic 10, les bases sont présentes. Il s’offre même le luxe de dominer Joe Smith avec 32 points et 10 rebonds dans la musette alors que le joueur de Maryland sera numéro un de la Draft quelques mois plus tard, en 1995. Un marché au prospect que le Camby Man ne va pas fréquenter tout de suite, prenant le temps de se former sous les ordres de John Calipari.

L’année suivante sera marquée par une progression individuelle et collective. Les Minutemen atteignent l’Elite Eight et Marcus Camby s’installe comme un des top défenseurs du pays tout en apportant son écot en attaque avec près de 14 pions à 55%. Une évolution confirmée en 1995-96 puisque les moyennes de l’intérieur passent à 20,5 points, 8,2 rebonds et 3,9 contres en 30 minutes et UMass s’invite au Final Four. Une participation qui sera plus tard retirée du palmarès de la franchise car Marcus Camby avouera – alors qu’il évolue en NBA et que les accusations le pointent précisément – avoir touché des avantages d’agents alors que le règlement l’interdit et le rendait donc inéligible pour prendre part à des matchs NCAA. Peu importe, cette histoire n’est pas connue au moment où il décide de s’inscrire à la Draft alors que ses 43 contres en 11 matchs lors du tournoi final ont bien marqué les esprits pour faire grimper sa cote. Tout comme le développement de son jeu offensif puisqu’il dispose désormais d’un panel dos au panier qui lui permet de scorer dans de nombreuses situations. John Calipari en est convaincu, son poulain mérite d’être le premier nom appelé par David Stern.

Rookie Year – Marcus Camby et Damon Stoudamire, duo prometteur

Sauf qu’en 1996, un certain Allen Iverson se pointe lui aussi en NBA et c’est le meneur de Georgetown qui aura cet honneur. Une aubaine pour les Raptors qui sautent sur l’occasion d’associer un intérieur prometteur à leur première star, Damon Stoudamire. Le septième pick de 1995 vient en effet d’être élu Rookie of the Year avec ses 19 points et 9,3 passes par soirée, auxquels il ajoute accessoirement 4 rebonds et 1,3 interception. Le Canada en est sûr, il tient son axe sur lequel construire pour les années à venir. Avec neuf victoires de plus en 1997 – pour atteindre la barre des 30 – alors que leur rookie ne dispute que 63 rencontres, l’idée semble bonne. Malgré ses absences pour blessures qui lui font donc zapper 19 matchs – seulement 6 victoires pour les Raptors – Marcus Camby monte en puissance et s’offre même le titre de rookie du mois en mars, à l’époque où la distinction n’est pas encore scindée par conférence. Il faut dire qu’avec 21,1 points, 9,1 rebonds et 2,5 contres sur cette période, le jeune homme de 22 piges a bien marqué son territoire dans la raquette.

Mais face à Allen Iverson, il ne fait pas le poids au moment de choisir le meilleur débutant de la saison, même si les Sixers remportent moins de matchs que les Canadiens. Du poids il en est également question lorsqu’on sent que le physique ne suit pas forcément chez Marcus Camby, lui qui doit faire face aux baobabs des peintures : Shaquille O’Neal, David Robinson, Hakeem olajuwon, Patrick Ewing ou encore Alonzo Mourning – pour ne citer qu’eux – lui mettent quelques kilos de muscles dans la gueule. Peu importe, avec sa taille et son allonge ainsi que ses capacités à protéger le cercle, les Raptors veulent de lui poste 5, tour de contrôle de leur équipe. Le premier axe de taf pour l’été est donc tout trouvé et pour se donner du cœur à l’ouvrage, le Camby Man peut jeter un œil à ce qu’il a déjà accompli : avec 14,8 pions, 6,3 rebonds et 2,1 contres en 30,1 minutes, il gagne le droit de voir son nom inscrit dans la All-Rookie First team. Avec Allen Iverson, Shareef Abdur-Rahim, Stephon Marbury et Antoine Walker.

Petit rookie deviendra grand – Des blessures qui en font un joueur sous-estimé

Aussi surprenant que cela puisse paraître, plus jamais Marcus Camby n’atteindra la marque des 14 points de moyenne sur une saison. Dès son année sophomore, il enverra 3,7 tirs adverses par soir dans les tribunes, fixant là aussi son record en carrière. Comment ça, le mec a touché le sommet de sa carrière au cours ses deux premiers exercices ? Non, il verra les Finales NBA l’an suivant, après avoir été envoyé aux Knicks contre le vieillissant Charles Oakley, un Twix et un peu de blé. Bref, on pourrait croire qu’il a rapidement fait le tour de la question puisque plus jamais le mec ne connaîtra de telles sensations. Mais ça serait faire injure à sa longue carrière. Enfin longue, en nombre de saisons (17), un peu moins en nombre de matchs, même si ses 973 apparitions sur les parquets représentent une belle marque, qui aurait été atteinte en un peu plus de 12 ans seulement s’il avait pris part à 80 rencontres lors de chaque exercice, un chiffre qu’il n’a en fait jamais connu (son record est de 79 en 2007-08). On touche là du doigt le gros problème de Marcus Camby, possesseur d’une carte de fidélité à l’infirmerie qu’il tamponnait avec régularité.

Du coup, quand on fait le bilan de sa carrière, on est toujours tenté de se demander ce qu’il aurait pu accomplir. Comme être All-Star. Porter une franchise sur ses épaules. Devenir un pivot dominant. Au lieu de ça, il a regardé Jamal Magloire, Mehmet Okur ou encore Theo Ratliff au Match des Etoiles. Il a été tradé à sept reprises, connaissant six équipes au cours dans son périple, ne restant jamais plus de six piges au même endroit. Sans qu’aucun joueur majeur ne soit inclus dans une de ces transactions. Et c’est dans le rôle du protecteur de cercle qui fait le sale boulot pour les stars qu’il s’est épanoui. Loin de nous l’idée de minimiser ce qu’il a tout de même réalisé. Defensive Player of the Year en 2007, quatre fois dans une All-Defensive Team (deux fois la second, deux fois la first), quatre fois meilleur contreur de la Ligue… pas mal non plus. Il a même reçu une voix pour le trophée de MVP de la saison 2004-05. Bon, P.J. Brown aussi cette année-là, les mecs votaient bourrés. Dix fois, il a pris plus de 10 rebonds en moyenne sur une saison, s’offrant même six années en double-double. Ouais, il ne déconnait pas le Marcus et nombreux sont ceux qui se sont cassés les dents sur ses bras tentaculaires en souhaitant accéder au cercle. Surtout qu’il n’était pas un tendre, et s’il fallait glisser une droite pour se faire respecter, il ne s’en est jamais privé, quitte à passer par la case amende et suspension.

Avec 9,5 points, 9,8 rebonds et 2,4 contres par rencontre, il y a peu de chance de voir Marcus Camby squatter avec les plus glorieux de ses anciens camarades de promotion au Hall of Fame. Pourtant il a lui aussi contribué dans son registre à la gloire de cette cuvée 1996. Malheureusement, les blessures l’ont probablement empêché d’atteindre sa plénitude et offrir encore plus. Concurrencer Ben Wallace en défense ou Jermaine O’Neal comme l’intérieur le plus doué de cette génération ? Pas impossible. Mais on ne le saura jamais.

Stats en carrière :

  • 9,5 points à 46,6% au tir, 1,9 passe décisive, 9,8 rebonds, 2,4 contres et 1,0 interception
  • 29,5 minutes de moyenne sur 973 rencontres de saison régulière, dont 786 en tant que titulaire.

Un bout de palmarès :

  • NBA Defensive Player of the Year (2007)
  • NBA All Defensive First Team à 2 reprises (2007, 2008)
  • NBA All Defensive Second Team à 2 reprises (2005, 2006)
  • NBA All-Rookie First Team (1997)
  • Meilleur contreur de la Ligue à 4 reprises (1998, 2006, 2007, 2008)

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